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Un bref regard sur la nature du régime actuel…

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 160-170)

Ce projet nous explique le passage à l’idéologie actuelle (1992-2008)

A. Un bref regard sur la nature du régime actuel…

Comme on l’a vu plus haut4, le régime chinois actuel n’est plus un totalitarisme pur et dur. Pour autant, aucun fait ne donne à penser qu’une possible démocratisation

1 Comme le rappelait Lucien Bianco dans une conférence récente : Lucien Bianco « 60 ans de communisme, un essai de bilan », intervention lors de la journée de conférences pour la 100ème édition de la revue Perspectives Chinoises, le 5 mars 2008.

2 Le Yangwu ou mouvement des activités à l’occidentale qui se déroule dans les années 1860-1890. Il s’agit de se renforcer techniquement pour pouvoir défendre sa civilisation. Cette Ligne de pensée sera formalisée au lendemain du traité de Shimonoseki (1895) par Zhang Zhidong un lettré conservateur dans l’expression tiyong ou Zhongxue wei ti Xixue wei yong (prendre la culture chinoise pour essence et utiliser le savoir occidental dans la pratique). Pour plus de détails, voir le développements que j’y consacre dans la note de synthèse n°1 [la notion de frontière].

3 Jean-Philippe Béja, « Vers l’émergence d’un national-confucianisme » in référence à préciser.

4 Chapitre 1, section1 : I. Nature et origine du système chinois aujourd’hui.

est à prévoir dans les années à venir1. La Chine n’est donc pas une démocratie. Mais elle ne peut être classée comme un totalitarisme pur non plus. Reprenant le travail de Juan Linz2, nous estimons donc que la Chine semble être un post-totalitarisme.

Pourquoi conserver cette classification totalitariste ? Il nous semble que le projet idéologique du régime, s’il a été modifié dans la forme (abandon progressif de la rhétorique communiste à partir de 1992), demeure dans le fond. Comme nous l’avons déjà mentionné dans un paragraphe précédent, l’ambition totalitaire du régime demeure intacte. La théorie des Trois représentations en est un exemple marquant.

D’abord perçu comme la « roue de secours » d’un Parti communiste chinois en panne idéologique, le nationalisme va progressivement s’imposer pour devenir le cœur de la pensée politique du régime aujourd’hui. S’agit-il ici d’un simple opportunisme de la part du pouvoir pour combler le vide laissé par l’abandon de la pensée marxiste et pour utiliser les tendances xénophobes au sein de la population ? Il nous semble que la question du nationalisme est plus profonde. C’est pour cela que cette idéologie a pris la place qu’on lui connaît aujourd’hui dans le régime.

B. …permet de définir le nationalisme (et comment il s’est imposé comme idéologie majeure)…

Depuis 1989, le discrédit jeté sur le communisme en Chine est total : de la répression sanglante des manifestations étudiantes place Tian’anmen à l’effondrement du bloc de l’Est, le communisme ne trouve plus guère de défenseurs que ce soit chez les dirigeants, y compris la vieille garde qui représente l’aile gauche du parti, ou à plus forte raison chez les intellectuels. A cette époque on va voir émerger une nouvelle catégorie qui entre en jeu, il s’agit des entrepreneurs. Ces entrepreneurs sont presque toujours liés au pouvoir soit comme étant d’anciens cadres de l’administration, ou des membres de la famille de fonctionnaires importants ou ayant réussis dans les affaires ils ont intégré les cercles dirigeants connus. Toujours est-il que la réussite de ces entrepreneurs ne peut se faire en dehors du parti communiste.

1 Cependant, si les tensions sociales sont trop fortes, elles peuvent toucher le régime dans ses fondements. Mais l’émergence de tels mouvements est par définition difficile à anticiper. Il nous semble que dans cette hypothèse les changements pourraient être aussi radicaux que soudains.

2 LINZ Juan, op.cit.

Au début des années 1990, les dirigeants essaient de sauver ce qu’il reste de légitimité au parti communiste par un nationalisme classique. Ainsi dès la première moitié des années 1990, le pouvoir parle de « sa confiance dans la supériorité de la nation chinoise » (Zhonghua minzu). Mais, force est de constater que ce nationalisme ne suscita pas l’adhésion y compris au sein de la presse officielle. Pourquoi ? Disons que le nationalisme tel qu’il fut initialement proposé comme « idéologie de rechange » était surtout un recyclage de thèmes anciens issus des premières heures du régime (dans certains cas, les formules utilisées datent d’avant la prise du pouvoir de 1949) : anticolonialisme, résistance à l’impérialisme occidental. Or d’impérialisme occidental en 1992 (dans une Chine qui vivait presque recluse depuis la loi martiale de 1989) il n’y en avait point. Ainsi, le Jiefang ribao1 en novembre 1995 publie un article de Sima Xin fustigeant les attaques néo-colonialistes. Sima Xin écrit : « on peut parler de culture coloniale lorsqu’une puissance coloniale qui a supprimé la souveraineté d’un pays lui fait respecter la culture de la métropole. Comme assimiler l’ouverture volontaire de la Chine souveraine à de la ‘culture féodale’ »2. Le nationalisme qui va s’imposer, et qui est celui que l’on connaît aujourd’hui en Chine, est assez différent de cette première tentative. Il résulte de la convergence de plusieurs mouvements qui tous vont faire du nationalisme le courant de pensée dominant qu’il est aujourd’hui.

Ce nationalisme se trouve donc être le résultat de différents courants de pensée qui ont traversé la société chinoise à partir des années 1990 : réflexions sur le conservatisme, les valeurs asiatiques, le confucianisme, les attaques américaines (China bashing), la critique du modèle occidental (qui est en fait plus une critique des effets pervers induits par une réforme économique menée au pas de charge). Si bien que la rhétorique nationaliste passéiste du début des années 1990 va évoluer vers un national-communisme pendant les premières années du mandat de Jiang Zemin et aujourd’hui on est en droit de se demander si la doctrine officielle n’est pas, pour reprendre l’expression de Jean-Philippe Béja, un national-confucianisme tant les références au confucianisme (certes revisité par le régime) sont nombreuses. Dans cet ordre d’idée, on peut citer le culte fait à l’empereur Jaune. Cet ancêtre supposé de la

1 Le jiefang ribao, littéralement « libération » est un quotidien de Shanghai qui dépend du gouvernement municipal de Shanghai. Le Courrier international écrit de lui qu’il ne « brille ni par son originalité, ni par son audace ». Ce journal défend les positions de ce qu’on appelle le « groupe de Shanghai ». Il est donc plutôt favorable aux réformes économiques. Dans cette optique, il avait publié les déclarations de Deng Xiaoping lors de son voyage dans le Sud, déclarations qui marquaient la reprise et l’accélération des références et de l’ouverture économiques.

2 Cité par Béja dans Perspectives chinoises mars 1996.

race han qui aurait vécu il y a plus de 5000 ans fait l’objet d’un culte récent et très nationaliste. Or de nombreux officiels de premier plan ont pris part à ces manifestations. Cette évolution n’a pu se faire que grâce à deux éléments. D’abord, le nationalisme ne serait jamais devenu aussi important si les intellectuels ne s’étaient pas emparés du sujet. Celui-ci passe alors d’une simple propagande à une réflexion plus profonde qui va structurer le débat politique entre les intellectuels du milieu des années 1990 à nos jours (en témoigne le vif débat intellectuel suscité par la loi anti-sécession au printemps 2005, et d’une manière plus large la question attenante à Taiwan). Le deuxième élément clé sera le fait que les élites, les entrepreneurs vont devenir d’ardents défenseurs du nationalisme.

1. Les fondements du nationalisme chinois : tentative de définition conceptuelle

Le nationalisme est en Chine un concept pluriel qui n’a été véritablement adopté qu’à la fin du XIX° siècle par les anti-traditionalistes et les anti-impérialistes du mouvement du 4 mai et par les modernistes de la fin du XX° siècle.

Historiquement, on peut dire des Chinois qu’ils ont une grande fierté dans leur culture et leur histoire nationale (qui confine parfois à l’autosatisfaction) mais aussi que la culture chinoise est profondément cosmopolite en cela qu’elle est ouverte à toutes les cultures. Le sinocentrisme1 s’est nourri de ces courants de fond. Fondamentalement, la civilisation n’est pas disposée au nationalisme. Cependant, deux évènements majeurs vont bouleverser la conception qu’avaient les Chinois de l’univers. Le premier fut l’établissement de la dynastie mandchoue à la fin du XVII° siècle. Les Mandchous étaient un groupe ethnique relativement petit (en nombre comme en influence) dont la population habitait le nord-ouest de la Chine. Ils achevèrent leur conquête de la Chine en 1644 et dirigèrent l’empire pour les deux siècles et demi qui suivirent. Alors que les précédents changements de dynasties avaient certes été critiqués, notamment par les lettrés restés fidèles à l’empereur, avec la conquête mandchoue on assiste à un véritable mouvement intellectuel de refus du nouvel occupant ; les Mandchous étant qualifiés de « meute de loups » (Wang Fuzhi). Ce

1 Sur ce point, voir chapitre 2. section 1.

mouvement trouve son fondateur et sa figure de proue en la personne de Wang Fuzhi.

Le second évènement sera la première guerre de l’opium (1839-1842).

Le nationalisme qui émerge en Chine à la fin du XIX°, et qui est structurant de la pensée politique moderne, est une conséquence de ces deux mouvements. Ce nationalisme avait de forts sentiments anti-mandchous et anti-étrangers (principalement anti-occidentaux puis dans un second temps s’y ajoutera un sentiment anti-japonais tout aussi fort). Liang Qichao fut le premier lettré1(intellectuel) a introduire en Chine la notion occidentale de nation ( 民族_ Minzu) à partir de la traduction du concept japonais de « minzoku ». Le docteur Sun Yat-sen adopta le concept de nationalisme (民族 主义 [minzu zhuyi]) comme le premier de ses Trois principes fondamentaux du Peuple (ou triple démisme). Le nationalisme de Sun avait une orientation culturelle et ethnique très claire, qui défendait un retour à un régime dirigé par la majorité han et la préservation d’une culture dominée par les hans. La Société pour la restauration de la prospérité chinoise (Xingzhong hui) fondée par Sun Yat-sen à Honolulu en 1894 clamait chercher à « chasser les barbares tatars [les Mandchous], restaurer la Chine et établir une république ». La dimension ethnique de ce premier nationalisme de restauration ou de libération, c’est selon, fut largement accomplie avec la chute du dernier empereur mandchou de la dynastie Qing en 1911.

Cependant, ces aspects de régénération culturelle ainsi que de restauration de la

« vraie Chine » restèrent des éléments cruciaux du nationalisme chinois jusqu’aujourd’hui. Les avocats du nationalisme, comme Sun Yat-sen ou après lui Chiang Kai-shek, partageaient de nombreuses similitudes avec le « père du nationalisme culturel », le penseur allemand Johann Gottfried von Herder. En effet, les premiers théoriciens du nationalisme partageaient avec Herder l’idée que l’individu doit être intégré, doit être considéré comme une partie de la nation. Herder est considéré par beaucoup aujourd’hui comme le « père philosophique » du nationalisme. Pour certains, Herder est l’avocat d’un relativisme culturel tolérant, quand d’autres voient en lui le penseur avec lequel le patriotisme civique va se muer pour la première fois en xénophobie. Il ne nous appartient pas ici d’étudier dans le détail la pensée de Herder, disons simplement que l’on peut comprendre facilement

1 Selon certains sinologues et historiens des idées, on peut parler d’intellectuel en Chine avec Kang Youwei, pour d’autres, ce terme n’a vraiment de sens qu’avec des penseurs plus tardifs. Liang Qichao, qui fut le disciple de Kang, semble cependant plus proche de l’intellectuel chinois qui s’interroge sur la modernité que du lettré traditionnel même s’il fut formé dans la très traditionnelle Académie de l’océan d’érudition de Canton.

ces différences d’interprétation tant la présentation qu’il fit de ses idées fut changeante.1 Ceci étant, notons que l’idée même de nations comme « entités culturelles » est, pour beaucoup, discutable en elle-même. Alors que Rousseau avait émis l’hypothèse que les nations trouvaient leur origine dans le consentement mutuel (le contrat social), le genevois plaçait les fins politiques bien au dessus de la « pureté culturelle ». A l’inverse, Herder fait de la « préservation culturelle » le but premier et discute moins souvent de politique. Tout comme Herder, les premiers nationalistes chinois insistent sur la nécessité d’intégrer les individus dans leur nation et cherchent différentes voies pour redonner à la Chine sa grandeur et sa gloire passées. Sun appelait les Chinois à restaurer leur « esprit national » et la moralité traditionnelle.

Chiang lança dans les années 1930 le mouvement de la « Nouvelle vie » qui essaya de restaurer le confucianisme et le système traditionnel de responsabilité de groupe et d’assistance mutuelle.

2. Le nationalisme de Sun Yat-sen : fondement du nationalisme et transfiguration contemporaine.

Sun Yat-sen est connu pour avoir été l’un des plus célèbre défenseur du nationalisme chinois. La pensée politique de Sun est résumée dans son ouvrage le plus célèbre Les trois principes du peuple (ou Triple démisme selon les traducteurs) (三民 主義 [San Min Chu I]. Le premier principe de Sun, et le plus important, était le nationalisme. En fait, il semble plus exact de dire que le nationalisme sert de fondement aux autres principes de Sun 2 . Pour le docteur Sun Yat-sen le cosmopolitisme de la Chine des Qing a rendu la population incapable de distinguer ce qui était chinois de ce qui ne l’était pas ce qui a causé la domination sous « le joug des Manchous » tout comme, note-t-il les Coréens ont succombé devant le colonialisme nippon. Si la Chine veut survivre, estime-t-il, elle doit adopter et cultiver le nationalisme. Le terme de Minzu ou nationalisme (qui peut être aussi traduit par le mot race) a clairement chez Sun une connotation ethnique ou raciale. Pour lui, il s’agit

1 Pour une étude complète sur l’œuvre de Herder, BERLIN Isaiah, Vico and Herder : two studies in history of ideas, 1976.

2 Comme le rappelle Marie-Claire Bergère, la pensée de Sun Yat-sen n’est pas structurée. Elle est le résultat d’une série d’approximations en fonction de l’évolution personnelle de Sun mais aussi de l’évolution de la situation politique. Le nationalisme aura, cependant, la ligne directrice de sa pensée et de son action politique.

d’instiller chez les Chinois la conscience d’appartenir à une race. Face à l’humiliation que subit la Chine du début du XX° siècle, il faut développer une conscience de race ou le nationalisme (ce qui revient au même pour Sun). Sinon, la Chine ne pourra pas survivre et sera condamnée à être divisée en différentes colonies occidentales.

Cependant, le nationalisme de Sun n’est pas une théorie raciale mais plutôt le projet de construire une nation, qu’elle prenne conscience de sa propre existence. Sun pensait que la survie de la Chine et la rendre à nouveau forte mais aussi démocratique dépendait de la capacité à nourrir cet esprit nationaliste. Les second et troisième principes de Sun (la démocratie et l’égalitarisme_ vu parfois comme le socialisme) dépendent du succès de la réalisation de cet esprit national et de la capacité à bâtir la Chine comme une nation.

« La mort de Mao Zedong et l’avènement de Deng Xiaoping en 1978 ont entraîné de multiples ruptures au sein du système communiste chinois, mais n’ont pas bouleversé les fondements de la pratique historique. La vogue dont joui actuellement Sun Yat-sen en Chine n’a guère d’autre explication que l’utilité du mythe suniste, rénové pour répondre aux besoins de la politique des Quatre Modernisations. »1 Cette politique constitue une véritable rupture avec la politique de l’ère maoïste. Elle met en avant la modernisation du pays et les objectifs proprement socialistes (justice sociale, égalisation des conditions) sont ajournés jusqu’à la réalisation de cette modernisation.

Alors que la période précédente mettait en avant un secteur public protégé dans un cadre autarcique (comme le rappelle le slogan : « compter sur ses propres forces »), la période contemporaine est celle de l’entreprise privée couverte et qui coopère avec l’étranger. Devant un tel renversement, le Parti communiste a besoin d’asseoir sa légitimité. Le nationalisme le lui permettra et la figure de Sun Yat-sen lui donnera un gage de continuité historique. « La célébration par le pouvoir du patriote modèle et du modernisateur cosmopolite que fut Sun a donc pour objet de fournir une caution historique à Deng Xiaoping et ses collaborateurs. Le prestige de ce glorieux précurseur doit les protéger contre toutes les accusations de complaisance à l’égard des étrangers et légitimer leur politique d’ouverture, d’appel aux capitaux privés, de développement prioritaire des zones côtières. A plus long terme, l’exaltation de Sun Yat-sen doit créer un terrain d’entente avec les autorités de Taiwan et éventuellement

1 BERGERE Marie-Claire, Sun Yat-sen, Fayard, 1994

préparer le retour de l’île dans le giron de la mère patrie. La réunification de la Chine ne représenterait-elle pas l’accomplissement patriotique par excellence, propre à fermer la bouche à tous les nationalistes ombrageux ? […]Les réformistes s’abritent [donc] derrière le patriotisme optimiste d’un Sun Yat-sen persuadé que son pays gagnerait beaucoup de temps en sollicitant l’aide des puissances étrangères et que celles-ci auraient tout intérêt, de leur côté, à favoriser une modernisation bénéfique non seulement à la Chine mais à la paix mondiale. »1

3. Le nationalisme après Mao.

Après la mort de Mao, le nationalisme comme impérialisme et anti-capitalisme a subsisté. Depuis 1979, la modernisation est redevenue la priorité de la nation. Le nationalisme est réapparu fort de la force économique toute récente et de l’implication croissante de la Chine dans les affaires mondiales. En un siècle, la Chine a restauré la domination han à l’intérieur de ses frontières, regagné sa souveraineté, abrogé les traités inégaux et restauré son intégrité territoriale. Le retour de Hong Kong en 1997 et de Macao en 1999 au sein de la République populaire indiquait que la page coloniale était définitivement tournée.

Si on ne peut que constater la résurgence du nationalisme à partir de la fin des années quatre-vingt dix, comment pour autant l’expliquer ? Le nationalisme va trouver un nouveau souffle car il va être porté par une partie des intellectuels conservateurs2. Précisons ici à la suite de Zhang Lun que le conservatisme revêt dans la Chine contemporaine deux aspects qui, s’ils partagent certains points, n’en demeurent pas moins très différents. Il faut distinguer le « conservatisme autoritaire » (l’expression est de Zhang Lun) qui veut « instaurer au plan politique l’autoritarisme, au plan économique, le modèle asiatique, et au plan culturel la tradition ». Ce courant, que l’on qualifie souvent de « néo-conservatisme » par opposition aux « vieux conservateurs » maoïstes, ignore la liberté individuelle au nom de l’intérêt collectif. A l’inverse, l’autre branche du conservatisme, si elle partage avec celle évoquée ci-dessus le même profond respect pour la tradition et le rejet du radicalisme, revendique le respect de la liberté individuelle et le refus de l’autoritarisme.

1 Ibid.

2 ZHANG Lun, La vie intellectuelle en Chine depuis la mort de Mao, Paris, Fayard, 2003.

Une grande partie des débats intellectuels dans les années 1990 se cristallisent sur cette question du conservatisme, les libéraux ayant quasiment disparu du paysage intellectuel après 1989. « Après Tiananmen, les intellectuels libéraux disparaissent de la scène politique publique et les autorités tentent de regagner une légitimité en encourageant un retour à la tradition (ainsi en octobre 1989, Jiang Zemin fait-il l’éloge de la pensée confucéenne à l’occasion de la commémoration du 2540° anniversaire du philosophe). […] Cette ferveur pour les sciences et les arts chinois traditionnels n’est pas dissociable du nationalisme culturel naissant [au début de la décennie quatre-vingt dix], exaltant la grandeur de la civilisation nationale, seul rempart contre la folie du monde post-moderne. Et les autorités constatent avec satisfaction que la référence à la tradition contribue à atténuer l’influence des libéraux auprès de la population… » En fait, la période qui s’ouvre en 1992 (et dont nous ne sommes pas sortis) voit dans le nationalisme un rôle fondamental car double. Le nationalisme est un outil de

Une grande partie des débats intellectuels dans les années 1990 se cristallisent sur cette question du conservatisme, les libéraux ayant quasiment disparu du paysage intellectuel après 1989. « Après Tiananmen, les intellectuels libéraux disparaissent de la scène politique publique et les autorités tentent de regagner une légitimité en encourageant un retour à la tradition (ainsi en octobre 1989, Jiang Zemin fait-il l’éloge de la pensée confucéenne à l’occasion de la commémoration du 2540° anniversaire du philosophe). […] Cette ferveur pour les sciences et les arts chinois traditionnels n’est pas dissociable du nationalisme culturel naissant [au début de la décennie quatre-vingt dix], exaltant la grandeur de la civilisation nationale, seul rempart contre la folie du monde post-moderne. Et les autorités constatent avec satisfaction que la référence à la tradition contribue à atténuer l’influence des libéraux auprès de la population… » En fait, la période qui s’ouvre en 1992 (et dont nous ne sommes pas sortis) voit dans le nationalisme un rôle fondamental car double. Le nationalisme est un outil de

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