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Partie IV.  Référentiel expérimental

2.  Observations de terrain

2.3.  Les foyers à bois

2.3.3.  Bilan sur les foyers à bois

2.3.3.1. Les foyers à utilisation unique

Cette série de 6 foyers expérimentaux permet de questionner principalement trois aspects : െ L’effet de l’état du bois sur le fonctionnement du foyer;

െ L’impact de l’allongement de la durée d’utilisation en lien avec l’augmentation de la quantité de combustible;

െ L’altération du sédiment en fonction de ces différents paramètres.

Pour questionner ces différents points et comparer nos différentes expérimentations, outre nos observations le plus souvent qualitatives effectuées sur le terrain, nous avons eu recours à différents critères quantitatifs :

െ La masse de combustible utilisée (kg) mesurée avant l’expérimentation; െ La durée de fonctionnement (min) mesurée durant l’expérimentation; െ La vitesse de combustion (kg/min) déduite des valeurs précédentes;

െ L’énergie émise (Mj) calculée à partir de la masse et du type de combustible selon des valeurs de référence (Théry-Parisot, 2001);

െ L’épaisseur de sédiment rubéfié (mm) mesurée sur le terrain; െ L’épaisseur de sédiment noirci (mm) mesuré sur le terrain.

Sur le premier point, nous avons vu que les résultats obtenus en utilisant un bois sec (2012J) ou humide (2013G) sont proches (respectivement 137 et 147 min), bien que l’humidité cause un allongement de la durée d’utilisation en lien avec une vitesse de combustion plus lente (Tableau IV.4). Si l’allumage du foyer a été plus laborieux, une fois lancé la chaleur émise par celui-ci a suffi à sécher le combustible puis à le consumer presque totalement. Dans le cas du foyer ayant fonctionné avec le même type de bois, mais encore vert (2013F), le résultat est plus mitigé, puisque la combustion n’a pu être maintenue que durant 77min après un allumage laborieux, une grande partie du combustible restant non brûlé.

Expé Bois (kg) Durée (min) Vitesse de

combustion (kg/h) Energie emise (Mj)** Épaisseur de sed. Rubéfié (mm) Épaisseur de sed. noirci (mm)

2012J 5 137 2,19 96,6 15 2 2013F * 77 * * 15 5 2013G 5 147 2,04 62,8 22 2 2012E 10 202 2,97 193,3 33 2 2012F 20 291 4,12 386,6 37 2 2012G 50 560 5,35 966,4 55 2

* Dans la mesure où tout le combustible n’a pas été consommé, ces valeurs nous paraissent hasardeuses. Nous estimons qu’environ 1/3 du combustible a effectivement brûlé soit 1,6 kg, ce qui donnerait, à titre indicatif, une vitesse de combustion d’environ 1,3 kg/h et une énergie émise de 10 Mj.

** Pour cette estimation le pouvoir calorifique du bois sec est fixé à 19.32 MJ/Kg, celui du bois humide à 12,55 MJ/kg et celui du bois vert à 6,28 MJ/kg (Théry-Parisot, 2001)

Tableau IV.4: Caractéristiques des foyers à bois à utilisation unique.

En conclusion, si l’utilisation de bois sec est optimale, notamment grâce à sa facilité d’inflammation, celle de bois humide est, elle aussi, envisageable tandis que celle de bois vert paraît peu efficace. Même si la présence de résine peut en théorie faciliter l’inflammation du bois vert (Théry-Parisot, 2001), il semble que sa forte teneur en eau (100 à 200% sur sec, idem) limite grandement son utilisation directe comme combustible. Pour le bois mort, mais humide, l’humidité aura tendance à tendre vers l’équilibre avec le milieu ambiant par l’évaporation de l’eau libre contenue par la porosité du bois. À titre indicatif, en fonction des conditions météorologiques et d’exposition, de l’espèce et de l’état du bois, entre autres, cela peut correspondre à 20 à 80% sur sec (idem).

Concernant le deuxième point, en comparant les foyers ayant fonctionné à une seule reprise avec 5, 10, 20 et 50 kg de bois sec, on observe logiquement que la durée de fonctionnement est étroitement corrélée à la quantité de combustible (Figure IV.27). Avec toute la prudence requise, il paraît possible de proposer un moyen d’estimer une quantité y de combustible nécessaire à l’entretien d’un foyer utilisé continuellement durant une durée x avec l’équation suivante : y=0.1082x-10,931 (y en kg et x en min).

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Partie IV: Référentiel expérimental

Figure IV.27: Projection des quantités de combustible et de la durée d’utilisation des foyers à bois à utilisation unique (le foyer 2013F a été écarté en raison de son arrêt prématuré).

Cependant les durées mesurées pour les foyers 2012E, F et G peuvent paraître relativement courtes vis-à-vis de celles de 2012J et 2013G. En effet, les vitesses de combustion calculées nous montrent que l’apport en combustible a été géré de façons différentes entre les foyers. Dans le cas des foyers 2012J et 2013G, cette vitesse est proche 2 kg/h tandis que pour 2012E, F et G elle augmente nettement (Tableau IV.4). Un approvisionnement plus lent en combustible aurait donc sans doute permis de diminuer cette vitesse tout en allongeant la durée de fonctionnement. Par ailleurs, la formation d’un lit de braises conséquent dans le cas des foyers 2012E, F et G semble avoir favorisé une combustion plus intense, là aussi au détriment de la durée de fonctionnement. Le facteur humain en ce qui concerne l’alimentation en combustible garde donc sans nul doute un poids déterminant, ce qui pondère donc l’aspect linéaire de la relation quantité de combustible/ durée de fonctionnement.

Tous ces foyers ont causé une rubéfaction de l’encaissant. Là aussi une relation étroite semble apparaître entre d’une part la quantité de combustible, la durée de fonctionnement et donc la vitesse de combustion et d’autre part l’épaisseur de sédiment rubéfié (Tabl 1 et Fig20).Les foyers ayant fonctionné plus longtemps et plus intensément ont rubéfié le sol plus profondément (Figure IV.28).

Figure IV.28: Projections de l’épaisseur de sédiment rubéfié en fonction de la durée de fonctionnement ou de la vitesse de combustion des foyers à bois à utilisation unique.

L’énergie émise lors de la combustion est moins bien corrélée à l’épaisseur de sédiment rubéfié. Par exemple le foyer 2013G présente une sole plus épaisse que le foyer 2012J, alors qu’il a émis moins d’énergie que ce dernier. Si l’on considère que seulement une partie de cette énergie va être diffusée dans le sédiment, selon de nombreuses variables (état du sol, vent, disposition du combustible, etc.), il n’est pas surprenant que ce paramètre descriptif soit moins pertinent pour expliquer le degré d’altération du sédiment.

Toujours du point de vue des observations macroscopiques, la mise en place d’un liseré noirâtre, peu épais dans la plupart des cas (exception 2013F) au sommet du sédiment rubéfié est à noter (Tableau IV.4). En plan, l’expression de ce noircissement est également visible, mais demeure difficile à expliquer. Le plus souvent ce noircissement semble se concentrer au milieu des foyers, là où le combustible va perdurer le plus longtemps. Les zones libres de combustible (périphérie) paraissent plus volontiers uniquement rougies. Cependant, cette tendance est loin d’être systématique et de nombreux contre-exemples sont observés au sein de chaque foyer.

Plus largement, même si quelques tendances se dessinent, certains points restent problématiques. Par exemple dans le cas du foyer 2013F, une épaisseur de sédiment rubéfié de 15mm est obtenue après une combustion courte et peu intense. Cette épaisseur est égale à celle obtenue pour le foyer 2012J avec un fonctionnement plus long et plus intense. Certains paramètres explicatifs des variations observées restent donc à définir.

Enfin, fait intéressant dans le cas de deux foyers (2012J et 2012F), nous avons remarqué que l’épaisseur maximale de rubéfaction était atteinte en périphérie du foyer et non pas en son centre comme observé dans les autres foyers.

2.3.3.2. Les foyers à utilisations multiples

Cette série de foyers expérimentaux vient compléter la précédente en abordant la question de la réutilisation de ce type de structure. Elle permet d’aborder les questions suivantes :

െ L’effet du nombre d’utilisations en termes de gestion du combustible et de durée de fonctionnement.

െ L’altération du sédiment en fonction de ces différents paramètres

Du point de vue des durées de fonctionnement, les différentes réutilisations des foyers 2012 B, C et D se ressemblent avec une durée moyenne de 148 ± 19 min (Tableau IV.5). La vitesse de combustion durant ces différentes utilisations est également relativement constante, avec une vitesse moyenne de 2,06 ± 0,3kg/h. Il est malgré tout intéressant de constater qu’à partir de la même quantité de combustible, en fonction de la vitesse de combustion, c’est-à-dire de la façon dont le combustible est géré, il est possible d’obtenir des durées de fonctionnement allant de 115 à 189 min, soit une différence de 74 min.

Les épaisseurs de sédiment rubéfié mesurées sont relativement proches elles aussi, autour de 20 mm (Tableau IV.5). On note que malgré des durées de fonctionnement cumulées longues, les épaisseurs de sédiment rubéfié sont relativement peu importantes et n’augmentent pas significativement avec le nombre de réutilisations (Figure IV.29). La corrélation entre les durées de fonctionnement cumulé et l’épaisseur de sédiment rubéfié paraît peu probante (Figure IV.29). De même, la quantité d’énergie émise cumulée ne paraît pas déterminante.

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Partie IV: Référentiel expérimental

Enfin, la formation d’un liseré noirâtre au sommet de la sole est notée pour ces trois foyers (Tableau IV.5). Celui-ci est particulièrement développé dans le cas de 2012D (7 mm d’épaisseur).

Figure IV.29: Projections de l’épaisseur de sédiment rubéfié en fonction de la durée de fonctionnement ou de la vitesse de combustion des foyers à bois à utilisations multiples.

Expé Bois (kg) Durée

(min) combustion (kg/h)Vitesse de Énergie émise (Mj)** Épaisseur de sed. rubéfié (mm) sed. noirci (mm)Épaisseur de

2012B1 5 147 2,04 96,6 2012B2 5 167 1,8 96,6 Total 2012B 10 314 1,92* 193,2 22 2 2012C1 5 125 2,4 96,6 2012C2 5 145 2,07 96,6 2012C3 5 161 1,86 96,6 2012C4 5 162 1,85 96,6 Total 2012C 20 593 2,04* 386,4 19 2 2012D1 5 159 1,89 96,6 2012D2 5 154 1,95 96,6 2012D3 5 139 2,16 96,6 2012D4 5 115 2,61 96,6 2012D5 5 121 2,48 96,6 2012D6 5 137 2,19 96,6 2012D7 5 143 2,1 96,6 2012D8 5 189 1,59 96,6 2012D9 5 145 2,07 96,6 2012D10 5 153 1,96 96,6 Total 2012D 50 1455 2,09* 966 26 7

* Moyenne de la vitesse des différentes utilisations

** Pour cette estimation le pouvoir calorifique du pin sec est fixé à 19.32 MJ/Kg (Théry-Parisot ; 2001)

2.3.3.3. Discussion

La première remarque concerne la durée totale de fonctionnement. À quantité de combustible égale, les foyers à utilisations multiples ont duré plus longtemps que leurs homologues à utilisation unique. La vitesse de combustion des premiers est relativement constante, proche de 2 kg/h comme c’était le cas pour les foyers 2012J et 2013G, confirmant que la gestion de l’alimentation en combustible est logiquement l’un des facteurs déterminants pour la question de la durée. Les foyers 2012 E, F et G ont bénéficié d’une vitesse de combustion plus importante, mais cela s’est fait au détriment de la durée de fonctionnement. Notons que c’est toutefois dans ces foyers que l’altération du sédiment sous forme de rubéfaction est la plus importante. D’un point de vue statistique, le paramètre expérimental qui est le mieux corrélé à l’épaisseur de sédiment rubéfié est la vitesse de combustion (0.95 ; Tableau IV.6). C’est donc avant tout l’intensité du fonctionnement qui prime pour expliquer l’altération plus ou moins prononcée du sédiment.

Rubéfaction Durée Vitesse Energie

Rubéfaction 1,00

Durée 0,19 1,00

Vitesse 0,95 0,06 1,00

Energie 0,67 0,83 0,58 1,00

Tableau IV.6: Matrice de corrélation des paramètres des foyers à bois.

L’épaisseur de sédiment rubéfié augmente peu dans les foyers à fonctionnements multiples (Figure IV.29). Elle est de 22mm en moyenne ce qui correspond à l’épaisseur obtenue en seule fois avec le foyer à utilisation unique 2013G (Figure IV.28). L’hypothèse que nous pouvons émettre est que le délai entre chaque réutilisation permet à la sole de refroidir suffisamment pour que l’effet des montées en température de chaque fonctionnement ne soit pas cumulatif.

À l’inverse, l’épaisseur du liséré noirâtre au sommet de la sole est plus importante pour le foyer 2012D (7 mm) que dans le cas des autres foyers à bois où il se limite à 1 ou 2 mm d’épaisseur. La surface de la sole de ce foyer est elle aussi particulièrement noircie. On peut avancer l’hypothèse que les dix utilisations successives de ce foyer ont contribué à ce noircissement prononcé. Ce liseré noirâtre est également bien marqué pour le foyer 2013F (5 mm) dont le combustible encore vert a empêché le fonctionnement efficient. Il est donc probable que ces liserés noirâtres soient causés par un dépôt de résidus de combustion de type suie, qui aura tendance à augmenter en fonction du nombre d’utilisations et/ou si la combustion est peu efficace. Sur ce dernier point, il est également envisageable que les résidus de combustion accumulés lors des multiples fonctionnements du foyer 2012D aient créé un milieu peu ventilé à la base de la structure, milieu dans lequel les gaz produits par la combustion auraient pu se condenser en suie de façon plus importante. La prise en compte de nombreux paramètres (température, pression, concentration en HAP, etc.) serait toutefois nécessaire pour vérifier ces hypothèses concernant le sujet complexe de la formation des suies (voir par exemple Richter et Howard, 2000 pour une revue).

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Partie IV: Référentiel expérimental