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2.2 L’offre

2.2.5 Les barrières structurelles

La dernière barrière abordée dans les écrits théoriques concerne les dimensions structurelles. Cette catégorie concerne les caractéristiques, essentiellement immuables, qui relèvent de la structure géographique de la région métropolitaine et qui rendent difficile la bonne localisation d’un projet TOD. La localisation des infrastructures de transport, la dis- ponibilité des terrains à proximité des stations de TC et la qualité de ces terrains sont les principaux exemples de barrières structurelles. À la différence des barrières financières et réglementaires, qui sont modifiables avec l’introduction des nouvelles pratiques et poli- tiques, la structure physique de la ville est très difficilement modifiable par les efforts hu- mains. Effectivement, on peut seulement éviter le développement de ces circonstances.

Les manifestations d’une barrière structurelle s’expriment à plusieurs échelles. À l’échelle métropolitaine, le contexte du paysage urbain structuré autour de l’automobile réduit beaucoup la viabilité d’un projet radicalement différent, tel qu’un TOD. Pour obtenir un succès dans ce contexte, un projet de TOD devrait inverser les tendances de croissance urbaine des six dernières décennies (Transportation Cooperative Research Program 2004).

Le choix de localisation des stations de transport en commun est un processus qui peut aller à l’encontre de celui de TOD. La station est le cœur physique et symbolique d’un projet de TOD. La décision de localisation des stations n’est habituellement pas influencée par des préoccupations urbanistiques, mais plutôt par des considérations techniques et fi- nancières (Cervero, Bernick et coll. 1994; Transportation Cooperative Research Program 2004). Selon Loukaitou-Sideris (2000), dans le cas du Blue Line à Los Angeles, la localisa- tion de cette nouvelle ligne de train ne s’est pas faite en fonction des concentrations de po- pulation, des facteurs socio-économiques ou de la forme urbaine désirée. Le peu de déve- loppement qui s’est produit autour des gares est un résultat naturel de cette mauvaise locali- sation. Ce problème se manifeste également dans la région de Montréal. En guise d’exemple, la gare de train de Mont-Saint-Hilaire, où se construit le projet de TOD de

Mont-Saint-Hilaire, est trop éloignée du centre villageois pour pouvoir profiter des dyna- miques commerciales déjà présentes.

À une échelle plus petite, le promoteur d’un projet de TOD a le défi d’acquérir suf- fisamment de terrain contigu pour pouvoir construire un TOD (Dumbaugh 2004). Pourtant, les terrains qui entourent une gare sont souvent possédés par plusieurs personnes. Le pro- moteur doit ainsi assembler les terrains de gré à gré, mais sans les pouvoirs que possède une municipalité à cet égard (Cervero, Bernick et coll. 1994). Généralement, cet assem- blage est bien plus facile dans un projet d’extension urbaine qu’à l’intérieur de la ville où le foncier est divisé entre plusieurs petits propriétaires (Neal 2003). Dans le cas où un proprié- taire ne vend pas ses terrains, le promoteur peut se retrouver avec un site fragmenté, ce qui rend difficile l’élaboration d’un projet cohérent. L’hésitation à vendre des terrains à un promoteur ne se limite pas qu’aux propriétaires privés. Les agences de transport sont aussi souvent inflexibles quant à la conversion de leurs terrains de stationnement ou autre en ter- rains construits (Cervero, Bernick et coll. 1994). Cela étant dit, il n’est pas toujours difficile pour un promoteur d’assembler les terrains, surtout si son entreprise est importante, si les propriétaires des terrains sont plus facilement prêts à vendre et si la municipalité veut assis- ter le promoteur.

Même quand les terrains nécessaires sont disponibles, la mauvaise qualité de ceux- ci peut nuire au projet. Souvent, les stations de transport en commun, particulièrement les gares de train, sont situés dans des endroits peu attrayants, comme des friches industrielles ou les abords d’une autoroute. Aussi, le fait qu’un terrain ne soit pas déjà bâti dans une mu- nicipalité urbanisée témoigne souvent de la qualité médiocre des terrains (Cervero, Bernick et coll. 1994). Une friche industrielle est particulièrement problématique parce que généra- lement il faut décontaminer les terrains avant de construire. Un terrain bâti nécessite la dé- molition des édifices ou l’élaboration d’un plan de rénovation. Le manque de terrains de bonne qualité qui sont facilement acquis et assemblés constitue un défi majeur pour la pro- position de projet de TOD. Cette barrière est particulièrement frustrante parce que, une fois présente, elle est pratiquement inaltérable.

Notre discussion des barrières à l’offre proposées dans les écrits théoriques nous permet d’identifier certaines caractéristiques qui différencient ces barrières. Premièrement, certaines barrières sont clairement créées par les acteurs présents au moment de la concep- tion du projet, tandis que d’autres sont le résultat des décisions prises dans le passé. Les

barrières politiques, par exemple, sont créées par la population locale et les politiciens. Par contre, les barrières structurelles sont généralement les vestiges des décisions d’un passé lointain. Deuxièmement, on observe beaucoup de variation dans la volonté des acteurs de créer ces barrières. Quelques barrières, comme les exigences de stationnement, ne sont vou- lues comme telles. Par contre, la motivation derrière le zonage fiscal est irréfutablement d’exclure certains usages. Constatons aussi qu’un nombre de barrières peuvent s’appliquer à toute forme de développement immobilier. D’autres barrières s’appliquent seulement aux projets alternatifs et d’autres seulement aux projets de densification. Très peu des barrières identifiées dans la théorie s’adresse exclusivement au TOD. Néanmoins, la théorie présume qu’une barrière généralisable à toute forme de développement posera un plus grand défi aux projets TOD. Cette différenciation des barrières soulève d’importants enjeux pour l’analyse de notre étude empirique.