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Les barrières structurelles : l’absence de bons sites à proximité du transport

5.5 Les barrières qui concernent les TOD

5.5.2 Les barrières structurelles : l’absence de bons sites à proximité du transport

Dans la section 5.4.5, nous avons expliqué que la rareté croissante de terrains n’est pas indépendamment un obstacle au développement de TOD. Il nous semble que, dans certaines circonstances, la pression générée par cette situation pourrait pousser la densification du territoire. Nous sommes néanmoins de l’avis qu’il s’agit d’un obstacle au TOD parce qu’un manque général de terrains devra se traduire par un manque encore plus pénible de terrains à proximité d’une station de transport en commun. Ce problème de l’absence de terrains disponibles pour le développement de TOD est aggravé par le fait qu’un TOD nécessite non seulement un terrain qui est disponible, mais un terrain d’une bonne qualité.

Dans la banlieue montréalaise, peu de sites à proximité de TC sont d’une bonne qualité et disponibles pour un développement ou réaménagement. Selon G5, il est diffi- cile de trouver le type de terrain nécessaire pour faire un TOD dans la région de Mon- tréal parce qu’il ne reste pas beaucoup de terrains en zone blanche en général. Toutefois, il faut noter que dans d’autres villes les TOD sont parfois construits sur des « brown- fields », ou des friches industrielles. La possibilité de redévelopper les friches indus- trielles à côté des stations de TC est cependant limitée dans la région de Montréal parce que, comme G5 l’a constaté, les sites à proximité des gares sont souvent occupés par des stationnements incitatifs. Par conséquent, un promoteur qui veut bâtir un TOD est souvent obligé de densifier autour des terrains de stationnement incitatif. Les stations de TC dans la banlieue montréalaise ne sont pas planifiés dans une perspective de TOD; ils sont basés sur un modèle de « car-oriented transit » ou COT (St-Amour 2008). Ce cons- tat appuie la théorie de Belzer et Autler (2002) selon laquelle l’aménagement du sta- tionnement incitatif aux pourtours d’une station de TC est en conflit direct avec la créa- tion des TOD. Au lieu d’être un obstacle au développement, l’occupation des pourtours d’une gare par des friches industrielles et stationnements incitatifs pourrait être considé- ré comme une opportunité pour la revitalisation d’un secteur.

Un autre facteur qui influence la qualité des terrains à proximité du TC est l’emplacement de la gare. Dans le cadre conceptuel nous avons discuté du fait qu’un emplacement à proximité d’une gare par rapport au centre de la municipalité peut rédui- re le potentiel d’un TOD à bénéficier des dynamiques communautaires et commerciales déjà en place. Les entrevues ont révélé qu’un emplacement central pose aussi des contraintes importantes au développement d’un TOD. Le constructeur P1 a constaté, par

exemple, que les nouvelles gares sur certaines lignes de train sont souvent situées dans les vieux noyaux urbains. Les infrastructures routières dans ces vieux centres n’ont pas été conçues pour accueillir des densités résidentielles élevées. L’emplacement adjacent au centre du village du TOD de Sainte-Thérèse est un bon exemple de ce genre de pro- blème.

Deux autres difficultés sont associées aux terrains à proximité des stations de TC : la contamination des sols et les coûts des terrains. Les terrains à proximité des sta- tions de TC, surtout ceux qui sont situés dans les vieux noyaux urbains, sont souvent d’anciens sites industriels. Par conséquent, ces sites nécessitent des opérations de dé- contamination très complexes et coûteuses. Le prix du foncier est aussi souvent plus élevé pour un terrain à proximité d’une station de TC, surtout un terrain situé au cœur d’une municipalité. Pour toutes ces raisons les résultats démontrent que la localisation des gares de train dans des environnements complexes restreint le potentiel de dévelop- pement des TOD.

Même si quelques répondants sont de l’opinion qu’il n’y a pas de bons sites dis- ponibles pour le développement de TOD, nous devons remettre en question leur capaci- té d’évaluer l’existence de tels sites. Les promoteurs et constructeurs qui ne font pas de projets alternatifs ne pouvaient pas vraiment commenter la disponibilité des terrains autour des stations de TC. En guise d’exemple, le promoteur G5 a admis qu’il se peut que sa compagnie ne soit simplement pas consciente des sites existants. De notre avis, ce niveau d’ignorance est cependant normal étant donné que la majorité des promoteurs immobiliers sont préoccupés par l’équilibre entre le prix d’un terrain et de sa qualité, de laquelle la proximité au TC n’est qu’une seule composante. En guise d’exemple, la compagnie de G1 a décidé de ne pas poursuivre un projet à proximité d’une nouvelle station de métro parce que les prix étaient trop élevés. Cette conclusion renforce notre proposition que le promoteur type est essentiellement réactif, c’est-à-dire qu’il répond aux opportunités qui sont présentées à lui.

Ce genre de promoteur contraste avec le promoteur plus visionnaire qui va iden- tifier tous les sites qui répondent à la philosophie de son entreprise, comme les sites à proximité d’une station de TC. Par exemple, au cours de l’entrevue, le promoteur G3, qui travaille actuellement sur un projet de style de vie, a identifié deux sites dans la cou- ronne sud qui peuvent accueillir un TOD. Vraisemblablement, ce promoteur est cons- cient de ces opportunités parce qu’il préfère entreprendre des projets plus novateurs. Nous avons vu que le promoteur G8, qui a déjà fait un TOD, sera conscient des oppor-

tunités de faire d’autres projets semblables. Cependant, même s’il croit qu’il existe de bons sites pour développer des TOD, il ne pouvait pas nommer des sites précis. Un au- tre promoteur de projets novateurs, le promoteur G4, a expliqué qu’il est difficile de trouver un bon site à proximité du TC :

« Faire du développement par définition, ce n’est pas facile. Trouver de bons terrains, trouver les bonnes localisations des terrains près des métros, près des transports en commun… il n’y a pas. De moins en moins. »

Nos résultats indiquent que certains sites présentent des opportunités de créer des TOD dans la région de Montréal, dont seulement les promoteurs plus visionnaires sont conscients. Pourtant, il nous parait clairement que le nombre de ces sites est toute- fois limité, ce qui réduit la possibilité de créer le « transit metropolis » vanté par Cerve- ro (Cervero 1998). Nous devons ainsi conclure que le manque de terrains propices au développement à côté des stations de transport en commun est un obstacle majeur au développement de TOD dans la région de Montréal.