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Bâle III : Le durcissement des contraintes de capital et de liquidité

CHAPITRE 2 : DES SPECIFICITES DE LA BANQUE ET DE SON SYSTEME D’INFORMATIONS 57

2.2. LA REGLEMENTATION BANCAIRE ET SON EVOLUTION

2.2.3 Bâle III : Le durcissement des contraintes de capital et de liquidité

Selon l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR32), la réforme dite de

« Bâle III » constitue la réponse du Comité de Bâle à la crise financière et aux limites de l’accord de Bâle II.

Cette réforme vise principalement quatre (4) objectifs, à savoir :

- Renforcer le niveau et la qualité des fonds propres en introduisant les notions de

« tier one » et de « core tier one ».

- Mettre en place un ratio de levier ou « leverage ratio ».

- Améliorer la gestion du risque de liquidité par la création de deux ratios de

liquidité que sont le ratio de liquidité à un mois « Liquidity coverage ratio » et le ratio de liquidité à un an « Net stable funding ratio ».

- Renforcer les exigences prudentielles concernant le risque de contrepartie.

Les fonds propres réglementaires qui sont classés, selon Bâle III, du plus liquide au moins liquide, sont constitués par la somme des fonds propres de base ou Tier 1 (T1), des fonds propres complémentaires ou Tier 2 (T2) et des autres éléments de fonds propres :

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Les fonds propres de base ou T1 représentent le capital de base servant à assurer la continuité de l’exploitation et à empêcher l’insolvabilité de l’établissement de crédit. Il comprend le « Common Equity Tier 1 » (CET1) ou « Core Tier 1 » et les autres instruments de fonds propres que sont les instruments hybrides. Le CET1 est constitué des fonds propres durs de la meilleure qualité, c’est-à-dire ceux qui constituent le capital disponible en toute circonstance pour éponger les pertes.

Les fonds propres complémentaires ou Tier 2 représentent le capital destiné à

rembourser les créanciers en cas de faillite. Ils comprennent les autres instruments de fonds propres hybrides, les titres subordonnés à durée illimitée et les titres participatifs. Les autres éléments de fonds propres sont principalement constitués des « intérêts minoritaires dans les filiales consolidées et autres fonds propres, détenus par des tiers, émis par les filiales consolidées ».

Le calendrier ci-dessous, Figure 9 : Calendrier de mise en œuvre progressive de Bâle III, tiré de l’annexe 4 du document intitulé « Bâle III : dispositif réglementaire mondial visant à renforcer la résilience des établissements et systèmes bancaires » montre l’importance

32 ACPR : Organe de supervision français de la banque et de l’assurance, c’est une autorité administrative

indépendante qui veille à la préservation de la stabilité du système financier et à la protection des clients, assurés, adhérents et bénéficiaires des personnes soumises à son contrôle. Ses missions et son champ de compétence sont définies par l’article L. 612-1 du Code monétaire et financier. Source :

http://acpr.banque-croissante des fonds propres réglementaires (de 8% en 2013 à 10,5% en 2019) et notamment celle de leur composante CET 1 ou Core Tier 1 qui passera de 4,5% en 2013 à 6% en 2016, sachant que la mise en œuvre de l’intégralité des réformes n’est prévue qu’à l’horizon 2019.

FIGURE 9:CALENDRIER DE MISE EN ŒUVRE PROGRESSIVE DE BALE III33

Le ratio de levier ou « leverage ratio »

La crise financière a entraîné une accumulation excessive d’un effet de levier, aussi bien au niveau du bilan que du hors-bilan. Ainsi, certains établissements bancaires, qui extériorisaient de solides ratios de fonds propres fondés sur le risque (Core Tier 1), parvenaient tout de même à accumuler un fort effet de levier.

Rappelons que l’effet de levier est une mesure comptable de l’impact de l’utilisation d’apports en capitaux de la part de tiers, par rapport aux capitaux propres de l’entreprise. Pour une banque, « l’effet de levier mesure donc le rapport entre ses actifs et ses fonds propres. Si l’effet de levier est élevé, la banque détient beaucoup d’actifs pour un capital donné. Un levier élevé augmente donc la rentabilité potentielle de la banque, mais aussi ses pertes potentielles. Toutes choses égales par ailleurs, un effet de levier plus élevé implique toujours un risque plus grand »34.

Depuis les réformes de Bâle II, les grandes banques ont été autorisées à déterminer elles-mêmes leurs coefficients de pondération des risques à l’aide de modèles de calcul internes. Ceci, dans le but de les encourager à développer eux-mêmes de solides modèles

33 Source : http://www.bis.org/publ/bcbs189_fr.pdf (L’accord de Bâle III, consultable sur le site de la BRI).

de gestion des risques. Cependant, « elles peuvent être tentées d’attribuer des coefficients de pondération des risques plus faibles à leurs actifs afin d’augmenter leur effet de levier, c’est-à-dire la quantité d’actifs qu’elles peuvent posséder pour un montant de fonds propres donné ».

« Afin de remédier à ce problème, Bâle III prévoit l’introduction d’un plafond d’effet de levier, limitant le montant total des actifs qu’une banque peut posséder en fonction de ses fonds propres. Ce plafond ne prend pas en compte les coefficients de pondération des risques et est donc à la fois plus simple à comprendre et plus difficile à manipuler. Techniquement, le ratio d’effet de levier sera calculé en divisant les fonds propres Tier1 (qui sont représentés essentiellement par les actions) par le total des actifs (y compris les actifs dits « hors bilan »35). Il est prévu de plafonner ce ratio à 3%, ce qui signifie que pour chaque euro de capital, une banque peut prêter jusqu’à 33,3 euro »36.

Les ratios de liquidité : « Liquidity Coverage Ratio » (LCR) et « Net Stable

Funding Ratio » (NSFR)

Bien qu’étant un facteur décisif dans la crise financière, la liquidité ne faisait alors l’objet d’aucune réglementation harmonisée au niveau international.

Le régulateur s’est aperçu que les exigences en matière de fonds propres ne sont pas suffisantes pour assurer la stabilité du secteur financier ; un niveau de liquidité adéquat et harmonisé sur le plan international est également important.

Durant la crise financière, de nombreuses banques, quoique dotées d’un niveau adéquat de fonds propres, se sont heurtées à des difficultés de liquidité, obligeant les banques centrales à intervenir pour assurer le bon fonctionnement des marchés monétaires et, parfois, soutenir certains établissements.

Face à cette situation, le Comité de Bâle a publié en 2008 et 2010 divers documents lesquelles il formule des recommandations sur la gestion et la surveillance du risque de liquidité. Il s’agit notamment de « Bâle III : dispositif international de mesure, normalisation et surveillance du risque de liquidité »37 qui traite du volet liquidité des réformes du Comité de Bâle visant à renforcer la réglementation mondiale des fonds propres et de la liquidité, afin de promouvoir une plus grande résilience des banques.

Pour compléter et renforcer ce dispositif, le Comité a élaboré deux normes minimales applicables à la liquidité de financement. Ces normes visent deux objectifs distincts, mais complémentaires, que nous détaillons ci-après.

35 Actifs du Bilan / Actifs hors-bilan : Il existe une distinction comptable entre les actifs qui figurent dans le

bilan de l’entreprise et les actifs dits « hors bilan » qui n’y figurent pas. Ces derniers comprennent essentiellement les garanties et les actifs sous gestion appartenant aux clients. De manière générale, un actif ne figurera dans le bilan d’une société que s’il appartient directement à celle-ci.

36 Source : http://www.finance-watch.org/ifile/Publications/Reports/Bale-3-en-5-question1.pdf

Le LCR ou « Liquidity Coverage Ratio » : Le premier objectif poursuivi par la réforme est de favoriser la résilience à court terme du profil de risque de liquidité d’une banque en veillant à ce qu’elle dispose de suffisamment d’actifs liquides de haute qualité pour surmonter une grave crise qui durerait un mois. Ainsi, le nouveau ratio de liquidité à court terme permettra aux banques d’envergure mondiale d’avoir un volume suffisant d’actifs liquides de haute qualité pour contrebalancer les sorties nettes de liquidité auxquelles elles pourraient avoir à faire face dans un scénario de crise grave de courte durée.

L'idée est que l'encours d’actifs liquides de haute qualité devrait au moins permettre à la banque de survivre jusqu’au 30ème jour du scénario de tensions, pour ainsi permettre aux dirigeants de la banque et aux régulateurs de décider des actions correctives appropriées. Le calcul du « Liquidity Coverage Ratio » se présente comme suit :

(Encours d’actifs liquides de haute qualité/Total des sorties nettes de trésorerie sur les 30 jours calendaires suivants) ≥100%

Le NSFR ou « Net Stable Funding Ratio » : Pour inciter les organisations bancaires à

davantage financer leurs actifs et leurs activités sur les moyen et long termes, le Comité de Bâle a mis au point le ratio structurel de liquidité à long terme (NSFR, Net Stable Funding Ratio) qui institue une exigence de montant minimum acceptable de financement stable en rapport avec le profil de liquidité des actifs et des activités de chaque établissement bancaire sur une période d’une année. Conçue pour servir de mécanisme minimal à mettre en œuvre, elle complète le ratio de liquidité à court terme (LCR, Liquidity Coverage Ratio) et renforce les autres mesures prudentielles. L’objectif ici est de promouvoir la résilience des banques à plus long terme en instaurant des incitations supplémentaires, afin que les banques financent leurs activités au moyen de sources structurellement plus stables.

La norme du « Net Stable Funding Ratio » se présente comme suit :

(Montant de financement stable disponible/Montant de financement stable exigé) ≥100% La réforme a prévu une application progressive de ces nouveaux ratios de liquidité afin d’éviter aux banques de se heurter à un mur de refinancement ou de devoir changer de modèle d’activités.

Limiter le risque systémique

38

Le dernier volet de la réforme de « Bâle III » concerne le risque systémique. En effet, pour le Comité de Bâle et le Conseil de Stabilité Financière (CSF ou FSB pour « Financial Stability Board »), l’interdépendance excessive des établissements bancaires d’importance systémique a permis la transmission des chocs au sein du système financier et de l’économie. Par conséquent, les établissements bancaires d’importance systémique devraient disposer de capacités d’absorption des pertes supérieures aux normes minimales.

38 Bâle III, dispositif réglementaire mondial visant à renforcer la résilience des établissements et systèmes bancaires : http://www.bis.org/publ/bcbs189_fr.pdf

Le Comité de Bâle et le Conseil de stabilité financière (CSF) ont ainsi mis au point une approche intégrée à l’égard de ces établissements, laquelle pourrait allier exigence supplémentaire de fonds propres, fonds propres conditionnels et créances requalifiables (« bail-in debt »). Leurs travaux ont également porté sur diverses autres mesures visant à atténuer les risques ou facteurs externes associés aux établissements d’importance systémique, à savoir des exigences supplémentaires en matière de liquidité, des restrictions plus fortes sur les grands risques et un renforcement du contrôle prudentiel. Avec Bâle III, il faudra beaucoup plus de capital en face de chaque transaction et de chaque prêt bancaire. Cela impose aux banques non seulement d’augmenter leurs marges, mais aussi d’être plus sélectives vis-à-vis des clients et des métiers dont le rendement sur actifs pondérés ne pourrait être suffisamment relevé.

L’introduction du ratio Cooke dans les années 90 (Bâle I) et la pondération par le risque dans les années 2000 (Bâle II) ont entraîné d’importants changements dans les techniques bancaires, transformant la banque en une profession réglementée. Bâle III qui entre progressivement en vigueur, renforce les contraintes de capital et de liquidité des banques.

Ces différentes réformes de la réglementation prudentielle ont contribué à amener les banques à mieux connaitre dans les détails leurs portefeuilles de créances, donc leurs risques, à mieux communiquer sur leurs actifs et la gestion de ceux-ci, à effectuer des reporting, à effectuer des simulations de différents risques majeurs (stress-tests) dans le but de répondre de manière efficiente aux différentes contraintes réglementaires. Précisons cependant que cette obligation de reporting concerne désormais toutes les entreprises, bancaires ou non, et la présentation des informations financières et non financières [Dagorn & Biot-Paquerot & Zanussi, 2013].

Pour remplir ces obligations de reporting et de stress-test, les établissements bancaires ont dû concevoir et mettre en œuvre des systèmes d’informations performants et efficaces. Ce que nous pouvons considérer comme étant déjà les prémisses d’une démarche d’intelligence économique pour ce qui est de la recherche et du traitement de la bonne information utile à une prise de décision optimale.

Et, bien que les réformes proposées par Bâle III ne soient pas complètement mises en œuvre à l’heure actuelle, la réglementation continue d’évoluer et de s’adapter à un contexte en perpétuelle mutation. Certains évoquent déjà Bâle IV.