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1.3 50 ans de gestion de la zone côtière en France

1.3.1. Avant la GIZC

(2009). Elle préconise de « passer de la gestion intégrée de la zone côtière (GIZC) à la gestion intégrée de la mer et du littoral (GIML) », car l’ambition est de redonner au domaine maritime sa place dans les débats, dans la réflexion et dans la planification stratégique, relatifs aux littoraux.

1.3.1.1. Les SAUM et SMVM

En 1973, le rapport Piquart préconisait la création de Schémas d’Aptitude et d’Utilisation de la Mer (SAUM), documents de planification spatiale pour l’usage et le développement du littoral. Quatre SAUM expérimentaux furent initiés (rade de Brest, golfe du Morbihan, pertuis Charentais, rade de Hyères), mais le concept ne fut pas généralisé, et les SAUM furent remplacés en 1983 par les SMVM.

Le but des SAUM était de planifier les activités en mer et sur le littoral et d’organiser la concertation, pour élaborer un guide de gestion d’une unité maritime sensible (Guineberteau, 1994). En fonction des SAUM, la partie terrestre de la zone côtière était plus ou moins prise en compte (la part dédiée à la partie terrestre est faible pour le SAUM du bassin d’Arcachon et forte pour le SAUM de la rade de Brest). Il n’était toutefois pas spécifiquement fait référence à la présence des hommes sur le littoral, et aucune mesure spécifique n’a été proposée pour limiter les impacts d’une croissance démographique sur ces espaces.

Les SMVM62 concernent une partie du littoral présentant une unité géographique et maritime cohérente. Ils ont pour but d’en préciser la vocation et d’assurer la cohérence entre ses différents usages et notamment entre la protection de l’environnement et le développement économique. Une importance spécifique est donnée à la mer. La prise en compte de la pression humaine sur le littoral varie selon les projets. Dans le cas du SMVM du Golfe du Morbihan approuvé en 200663

60. Le CELRL dit « Conservatoire du Littoral » est un établissement public de l’Etat créé en 1975. Il mène une politique foncière visant à la protection définitive des espaces naturels et des paysages sur les rivages maritimes et lacustres français. Pour mener à bien sa mission de protection, il acquiert des terrains fragiles ou menacés, remet ces espaces en état et en confie la gestion à des communes, des collectivités locales ou des associations. Pour plus de détails : http://www.conservatoire-du- littoral.fr.

, une des orientations thématiques s’intitule : « Contenir l’urbanisation et préserver les paysages ». Le SMVM du Bassin d’Arcachon, approuvé en

61. Cf point 1.3.3 du présent chapitre.

62. Depuis le décret 2007-1586 du 8/11/2007, les SMVM sont directement intégrés dans les Schéma de Cohérence Territoriale (SCOT) sous la forme d’un chapitre spécifique intitulé « Volet Mer » et ayant valeur de SMVM.

63. Le rapport du SMVM du Golfe du Morbihan est disponible ici :

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2004, contient lui aussi un volet consacré à l’augmentation de la présence humaine sur la partie terrestre du bassin et à ses conséquences, notamment sur la qualité des eaux64

1.3.1.2. Un outil législatif à terre : la « loi Littoral »

.

La loi n°86-2 du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral, dite « loi Littoral » est à juste titre considérée comme la mesure réglementaire phare en France en matière de protection du littoral. L’article premier de cette loi en expose clairement et succinctement les objectifs (encadré 1).

Article L321-1 du Code de l’Environnement, dispositions générales relatives à la protection et à l’aménagement du littoral

I – Le littoral est une entité géographique qui appelle une politique spécifique d’aménagement, de protection et de mise en valeur.

II – La réalisation de cette politique d’intérêt général implique une coordination des actions de l’Etat et des collectivités locales, ou de leur groupement, ayant pour objet :

1° La mise en valeur d’un effort de recherche et d’innovation portant sur les particularités et les ressources du littoral ; 2° La protection des équilibres biologiques et écologiques, la lutte contre l’érosion, la préservation des sites et paysages et du patrimoine ;

3° La préservation et le développement des activités économiques liées à la proximité de l’eau, telles que la pêche, les cultures marines, les activités portuaires, la construction et la réparation navale et les transports maritimes ;

4° Le maintien ou le développement, dans la zone littorale, des activités agricoles ou sylvicoles, de l’industrie, de l’artisanat et du tourisme.

Encadré 1 : Principes généraux de la loi Littoral.

Cette loi a abouti à l’insertion, dans le Code de l’Urbanisme, d’un chapitre spécifique intitulé « dispositions particulières au littoral ». Il était en effet devenu nécessaire de mettre en place des règles d’urbanisme opposables aux collectivités, puisqu’elles étaient devenues responsables de l’élaboration et de l’application de documents d’urbanisme suite à la loi de décentralisation de 1982. La loi Littoral est la première manifestation d’une volonté de « développement équilibré » entre protection de la nature et développement économique sur la partie terrestre du littoral. L’articulation de cette loi avec tous les autres documents d’urbanisme (Plan Locaux d’Urbanisme (PLU) communaux, SCOT des intercommunalités) en fait aujourd’hui un outil réglementaire puissant et efficace. Cette loi a fait l’objet de plusieurs rapports et bilans (DATAR, 2004 ; DIACT, 2007 ; Le Guen, 2004 ; Martinez, 2006 ; Gélard, 2004), dont certains émanent de parlementaires. Ainsi Gélard (2004) et Le Guen (2004) constatent que la loi est devenue un instrument d’urbanisme confié à la libre appréciation des juges, la faisant ressentir comme excessivement contraignante par les élus locaux. Ces rapports mettent en avant la diversité des situations rencontrées sur le littoral français, et dénoncent les effets pervers du champ d’application de la loi aux communes littorales d’emprise spatiale variable.

A l’inverse, le rapport de la DIACT (2007) souligne que la loi Littoral n’a en aucun cas empêché le développement économique des littoraux, qu’elle n’a pas non plus contrecarré

64. Le rapport du SMVM du Bassin d’Arcachon est disponible ici :

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les profondes évolutions structurelles qui les ont affectés (et dont témoigne l’augmentation toujours plus forte de la population littorale). Par contre elle a permis d’amortir les effets liés à la pression toujours plus forte exercée sur les littoraux en limitant le recul des espaces naturels par l’action du Conservatoire du Littoral. Au regard de ce bilan, la DIACT estime qu’une politique spécifique aux littoraux est toujours nécessaire, politique au sein de laquelle la loi Littoral doit continuer à tenir sa place. Le rapport de l’UICN sur la question (Martinez, 2006) va encore plus loin en dénonçant une érosion et un assouplissement progressifs de la loi contribuant à la vider de son sens, et préconise une application plus stricte des dispositifs prescrits.

Si la loi Littoral n’a pas empêché la poursuite de l’artificialisation sur le littoral et le développement économique des littoraux, on peut toutefois penser qu’elle a permis de contenir la consommation des terres littorales dans des limites « raisonnables ». On peut s’interroger sur ce que seraient les littoraux métropolitains aujourd’hui sans cette loi, indépendamment des questions inhérentes à son application parfois difficile que dénoncent certains parlementaires. De fait, il apparaît que la prise en compte de la multitude de cas particuliers serait potentiellement une porte ouverte à l’affaiblissement de la portée réglementaire de la loi, et pourrait avoir comme conséquence l’artificialisation des littoraux jusqu’alors préservés.

1.3.2. La GIZC

Ni les SAUM ni les SMVM, élaborés dans les années 1980 et 1990, n’ont abouti de façon concluante à des actions concrètes du fait de l’absence de réelle volonté politique (Euzenes et Le Foll, 2004). La GIZC65

En 2005, la DIACT et le Secrétariat Général à la mer lancèrent conjointement un appel à projet à destination des acteurs du littoral intitulé « Pour un développement équilibré des territoires littoraux par une gestion intégrée des zones côtières »

s’est ensuite progressivement imposée, permettant de sortir d’une vision purement législative de la gestion des espaces littoraux (Bersani et al., 2006).

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Le « Grenelle de la Mer »

. Ce programme avait pour but d’encourager des expérimentations de terrain autour de projets concrets, et de faire émerger des pratiques et des méthodes adaptées aux besoins des territoires littoraux et aux volontés locales. Les projets devaient s'inscrire dans le cadre général d’une gestion intégrée des zones côtières.

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65. La Recommandation du Parlement et du Conseil européen du 30 mai 2002 a fixé le cadre de la GIZC en Europe. Le rapport de la Commission Environnement Littoral évoque le concept de GIZC pour la première fois en France en 2002 en choisissant de mener la réflexion qui lui était demandée pour l’aménagement et la protection du littoral sous l’angle de la gestion intégrée des littoraux (Commission Environnement Littoral, 2002). La mise en œuvre de la GIZC en France est officialisée par le Comité Interministériel de la Mer le 29 avril 2003.

est une consultation organisée par le gouvernement français en juillet 2009 sous forme de réunions publiques de réflexion et de négociation entre l’Etat, les acteurs économiques concernés par la mer, et la société civile. Pour ce qui concerne l’aménagement de la partie terrestre de la zone côtière, les préconisations majeures qui en découle sont de s’appuyer sur les outils de planification spatiale existants pour organiser l’aménagement et la gestion intégrée de la zone côtière, et entre autres propositions de

66. http://www.territoires-littoraux.com/

67 Les tables rondes relatives au Grenelle de la Mer ont retenu une centaine de propositions recensées dans le « Livre Bleu des engagements du Grenelle de la mer » (Ministère de l'Ecologie, de l'Energie, du Développement durable et de la Mer, 2009).

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relancer la désignation des espaces littoraux remarquables, et de travailler autour de la notion de capacité d’accueil du littoral.

2. Les dynamiques démographiques et spatiales du littoral breton