• Aucun résultat trouvé

Atelier 5 – Collage de quatre moments charnière du quadrilatère

CHAPITRE 4 RÉSULTATS

4.5 P RÉSENTATION , ANALYSE ET INTERPRÉTATION DES RÉSULTATS PAR ATELIER

4.5.5 Atelier 5 – Collage de quatre moments charnière du quadrilatère

Afin de symboliser le retour sur le passé du quadrilatère étudié et de tous les bâtiments qui se sont succédés jusqu’à aujourd’hui, nous fabriquons un collage. À partir des dessins réalisés lors du deuxième atelier, c’est-à-dire ceux faits à l’aide de nœuds, on colle diverses images par couche successive sur ces dessins puis on les déchire partiellement afin que chacune laisse sa trace. Les images superposées dans le collage évoquent quatre moments charnières du secteur à l’étude: l’époque de la corderie, l’incendie de 1866, les bâtiments construits après l'incendie et le centre d’hébergement Notre-Dame-de- Lourdes.

Le passé laisse toujours des traces, parfois sous formes d’images, d’empreintes dans le paysage ou dans la physionomie des gens, parfois c’est sur le plan psychologique ou encore, les traces sont des histoires qu’on se raconte. Cette exercice permet aussi une fusion des horizons, une fusion entre le présent et le passé car on ne distingue plus les quatre périodes charnières. Les traces de nœuds et les images superposées forment un tout cohérant. Voici deux exemples de collage, deux exemples de fusion des horizons.

Chapitre 4 – Résultats

Figure 4.6 – Exemples de collages réalisés

4.5.5.1 Le vocabulaire

Le mot du jour qui s’ajoute à l’univers maritime est « phare ».

4.5.5.2 Les échos de l’activité de la semaine passée

À mon arrivée au Centre de jour, un intervenant est heureux de mentionner que Monsieur B est allé le voir afin qu’il lui montre à nouveau comment plier des avions en papier.

4.5.5.3 Les souvenirs et la nature des liens

Cet exercice de collage, bien que fait à base d’un dessin et de photocopies d’images, peut se rapprocher de l’abstraction étant donné que ce qui était concret et visible se perd avec les morceaux qui ont été déchirés. Monsieur C en a toujours après l’art abstrait. « Faut pas dire que c'est mon travail parce que j'ai horreur de ça » fait-il comme réplique après qu’un intervenant lui ait dit que l'image qui restait, c'était son travail. Un peu plus tard, il passe aussi le commentaire suivant : « Ben vous vous trompez parce que plus c'est laite plus c'est beau! » (Monsieur C).

Tandis que pour d’autres personnes, ce qu’elles voient dans le collage stimule leur imagination. Pour madame D, elle voit une cabane à sucre de loin ou encore un phare. « Sais-tu à quoi ça me fait penser? À un phare!...l'eau qui continue, icitte on voit comme une espèce d'horloge, je sais pas si c'est une horloge. Je vois la chose, c'est comme si eee…le phare... » (Madame D). Pour Madame G « Ah oui, on dirait deux bateaux hein? ».

Chapitre 4 – Résultats

Madame M est à la recherche de son pignon, de son clocher d’église. En déchirant l’image, elle a par le fait même déchiré le bout du clocher. « J'aurais aimé à garder mon pignon. Je veux retrouver mon clocher. Yé icitte là... à quèque part » (Madame M). Autrefois, les capitaines fixaient généralement des éléments élevés et permanents pour orienter la course de leur navire. Les églises étaient des éléments de choix.

Madame G s'excuse de ne pas pouvoir en faire plus, elle est fatiguée et elle a mal aux mains. Elle parle de la peinture qu’elle a faite étant plus jeune. « Moi je peinturais des maisons, des logements, comme tout mon logement au complet, c'est moi qui l'a peint, j'ai vernis le plancher, on avait un magasin de peinture, j'en ai vendue ». Elle n’a jamais peint sur des toiles mais elle a déjà dessiné. « J'ai fouillé dans mon tiroir pis j'ai trouvé deux dessins que j'avais faits. […] J'allais à l'école…J'avais faite le, le chum de ma sœur, j'avais assez ben réussi! J'avais passé proche de le brûler, après ça, je l'ai regretté. Le plus difficile à faire c'est les yeux. Mon père était un décorateur, même aux États-Unis, ils l'ont demandé. Y m'a dit que je peinturais mieux que certains peintres » (Madame G).

Déchirer du papier fait rire Monsieur B. Peut-être parce que c’est la première fois qu’il fait ce geste? Étant donné la barrière de langue, la raison demeurera un mystère.

Le processus technique éveil un souvenir commun entre Madame M et Madame I, toutes deux ayant déjà faites partie du Cercle de Fermières. Elles se souviennent des livres qu’elles fabriquaient.

- Madame M : Ça ça me fait penser quand on était aux Fermières. - Madame I : Quand qu'on a fait des livres.

- Madame M : Ouen!

- Madame I : Des livres ouverts là, pour les 25e anniversaires, pour les 30 ans…50 ans, oui, oui, moi j'en ai faite pour toutes mes enfants à 25 ans.

Étant donné la nature de cette recherche, la réflexion de Madame G est très intéressante pour le double sens qu’elle offre. « Moi c't’un arbre que j'avais fait pi ils l'ont transformé en bateau ». Elle fait référence à l’arbre qu’elle avait dessiné à l’aide de nœuds estampés lors du deuxième atelier. Son dessin a été transformé en bateau la semaine suivante lors du

Chapitre 4 – Résultats

troisième atelier alors qu’elle était absente. Il s’avère que dans la construction navale au XIXe siècle, on transformait les arbres en navires.

4.5.5.4 Les retombées durant l’atelier

L’exercice du jour est plus difficile à cause des nombreuses étapes qu’il comporte: le choix de quatre images, les coller une à la suite de l’autre tout en les déchirant. Tout ceci fait en sorte qu’ils sont un peu mêlés pendant un moment. À la troisième image, ils sont plus confiants. Malgré l’incompréhension passagère du début, ils demeurent très travaillants et persévérants. À la fin, plusieurs sont contents du résultat final, une participante explique même son travail à une intervenante qui vient tout juste d’arriver : « Notre-Dame-de- Lourdes en haut…C'est un orphelinat, là c'est le chèque de l'incendie, ça c'est la corderie, ça c’est des cordes… » (Madame J).

Les gens remarquent beaucoup les détails sur les images distribuées. « Y'a un escalier qui monte le cap icitte, ça c'est notre bâtisse, la bâtisse icitte » (Monsieur C). Des grosses cordes (Madame K). Des gros rouleaux (Madame J). « Y'a des beaux bateaux, avoir su, j'aurais apporté mon beau bracelet avec des bateaux! » (Madame D). « Y'avait 96 canons après ça…96 canons » (Monsieur O).

Madame M fait des liens entre les activités, les éléments, les thèmes et le quartier. Elle explique son choix de vouloir garder un bout d’une image de corde pour son collage: « C'est parce que moé j'connais pas ça pantoute pantoute c'te coin citte, mais je voulais ben garder la corde parce qu'on a travaillé de ça, pas de la corde de la même qualité mais de la corde » (Madame M).

L’entraide et l’art de s’auto-complimenter sont toujours présents. En guise d’exemples, deux dames s’aident pour appliquer le vernis sur le collage. Madame G mentionne « m'a regarder mon chef d'œuvre ». Monsieur O fait aussi partie des gens qui apprécie le travail qu’il fait alors qu’au début de cet atelier, il ne comprenait plus trop où nous allions: « Je l'aimais pas, pis là je l'aime » (Monsieur O). Il l’apprécia encore plus la semaine suivante, au moment où j’ai ramené son collage transféré sur une petite toile pour éventuellement l’ajouter au triptyque final. Il en était très fier.

Chapitre 4 – Résultats

À la fin de la rencontre, Monsieur C mentionne qu’il est un peu critique. En lui appliquant deux des définitions de Grondin à Monsieur C, il a la forme réflexive très développée, c’est-à-dire la capacité de réfléchir, de juger et d’exprimer son opinion. Il est aussi doué pour l’art de vivre puisqu'il possède le sens du tact. En fonction de ce qu’il dit et en fonction des nouvelles facettes que les intervenants découvrent de lui, les ateliers réveillent plusieurs choses chez cet homme. De nature plutôt calme, parlant avec tous, le voici animé d’une énergie nouvelle. Curieux, il pose des questions, il veut savoir et comprendre, il exprime aussi son opinion. Une intervenante, dès le début des rencontres, mentionne qu’elle n’avait jamais vu Monsieur C comme ça.

Les mots de la fin vont à Monsieur O « On a de la patience (ce qui fait rire plusieurs personnes) et Madame J « Faut en avoir pour faire ça! »