• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE 2 REVUE DE LITTÉRATURE

2.2 Ressources en ligne pour l’apprentissage des mathématiques

2.2.4 Assistant à la démonstration et preuve automatique

Construire et manipuler des figures géométriques dynamiques qui possèdent certaines pro- priétés à l’intérieur d’un micromonde peut s’avérer être un défi intéressant et amusant. Cepen- dant, toutes les observations que l’on peut faire par rapport aux caractéristiques invariantes d’une figure dynamique ne sont que des conjectures qu’il faut prouver. Pour aider les uti- lisateurs dans ce processus, les concepteurs de logiciels ont produit des systèmes de preuve automatique. Par exemple, il existe des systèmes comme Coq (Coq Development Team, 2015) ou Isabelle (Li et Li, 2012; Wenzel, 2015; University of Cambridge et Technische Universität München, 2015) qui sont des moteurs de déduction génériques qui sont en mesure de traiter de la logique de premier ordre, mais aussi d’ordres supérieurs. Il y a aussi GCLCProver (Ja- ničić et Quaresma, 2006) qui est destiné plus spécifiquement aux preuves en géométrie. Étant donné que leur utilisation nécessite la connaissance d’un langage qui est difficile à maitriser pour un élève de niveau secondaire, des programmeurs les ont intégrés à l’intérieur de logiciels de géométrie dynamique.

Parmi les systèmes intéressants que nous avons recensés, il y a premièrement GeoView (Ber- tot et al., 2004) qui permet d’afficher une figure qui illustre un théorème encodé dans Coq pourvu que l’on utilise le dictionnaire de GeoView pour alimenter le moteur de déduction. À l’inverse, GeoProof (Narboux, 2007, 2006) permet de construire une figure dans une interface

de géométrie dynamique et traduit ses caractéristiques dans le langage de Coq. Par la suite, l’utilisateur peut inscrire une liste d’hypothèses et une conjecture et demander si celle-ci peut être prouvée, de manière automatique par le moteur interne ou de manière interactive avec l’interface Coq. En combinant les deux derniers systèmes, nous obtenons le Java Geometry Expert (JGEX) (Ye et al., 2011), qui est une version évoluée du Geometry Expert (GEX) (Chou et al., 2000). En effet, JGEX permet d’injecter les caractéristiques d’une figure dyna- mique dans le moteur de déduction et d’afficher une nouvelle figure faisant état des résultats obtenus. Il est aussi possible de créer manuellement des animations sur la figure pour produire des preuves sans mots. Le MMP/Geometer (Gao et Lin, 2004) est semblable à JGEX, car il est une version dérivée de ce dernier. Par contre, il permet d’entrer les énoncés selon quatre modes distincts, y compris en langue naturelle, et est en mesure de faire les traductions entre ces quatre représentations. Tous ces systèmes utilisent des méthodes similaires pour produire des preuves qui sont formelles et qui sont souvent difficiles à comprendre. Ils ne sont donc pas compatibles avec le genre de preuve qui est demandé aux élèves.

D’autres systèmes utilisent les moteurs de preuve automatique d’une manière différente. Par exemple, Cinderella (Kortenkamp et Richter-Gebert, 2004; Kortenkamp, 1999, 2013), un micromonde qui offre des fonctionnalités comparables à GeoGebra, contient un moteur de preuve automatique pour gérer les constructions. En effet, il n’est pas accessible à l’usager, mais Cinderella s’en sert, par exemple, pour éviter d’attribuer des noms distincts à un élément unique. Geometry Explorer (Wilson et Fleuriot, 2005; Hvidsten, 2005) permet, comme dans GeoProof, de construire une figure qui est employée pour définir les hypothèses. Par la suite, il utilise un moteur de déduction automatique pour produire une preuve qui peut être facilement comprise par un humain. Il peut aussi générer les figures correspondantes aux différents pas de la preuve. Cependant, cette preuve n’utilise pas les justifications de la géométrie euclidienne. Le logiciel permet tout de même de voir différentes preuves possibles sous forme de graphe, ce qui est une caractéristique intéressante.

Enfin, le logiciel qui se rapproche le plus de notre projet est Chypre (Bernat, 1993), soit un logiciel d’aide au raisonnement. Le but de l’auteur était de proposer un système qui permette aux élèves d’explorer le problème sans s’encombrer de détails inutiles. Il a donc choisi de se concentrer sur les figures pertinentes et les résultats qu’il juge importants à la suite de l’observation du fonctionnement de l’expert. Le logiciel permet de construire une figure et d’entrer des énoncés en tant qu’hypothèse ou en tant que conjecture. Pour chaque énoncé qui est soumis au système, un réseau de déduction local est produit, selon certaines règles qui sont déduites de l’observation de l’expert, et est ajouté au réseau de déduction du problème. S’il est possible de relier la conjecture aux hypothèses, celle-ci est donc prouvée. Chaque fois qu’une conjecture est prouvée, le résultat est propagé dans le réseau pour mettre

à jour le statut de tous les énoncés. L’élève, à mesure qu’il inscrit des énoncés, voit leur statut se modifier. Le système peut aussi fournir une trace des déductions produites par l’élève. Celle-ci peut cependant contenir des déductions inutiles à la production d’une preuve finale et c’est à l’élève de faire le tri. Ce système est intéressant, car il représente les preuves sous forme d’un graphe, qui n’est malheureusement pas visible à l’interface, et il produit des preuves qui ressemblent à ce qui est exigé par les enseignants du secondaire. Toutefois, les détails concernant la mise en oeuvre du logiciel Chypre ne sont pas divulgués. De plus, aucune aide intelligente n’a été implantée. Il est aussi possible d’inscrire des conjectures qui ne correspondent pas à la réalité de la figure et le système les accepte, car les auteurs veulent permettre, entre autres, des raisonnements par l’absurde.

Les systèmes de preuve automatique recensés sont donc généralement incompatibles avec le genre de système que nous voulons concevoir. En effet, ils permettent de vérifier des conjectures ou de déduire de nouveaux faits automatiquement, mais n’offrent aucun support pour l’élaboration d’une preuve. De plus, à l’exception des preuves générées par le logiciel Chypre, les preuves produites ne ressemblent généralement pas à celles que l’on retrouve dans les manuels scolaires. Il est donc difficile d’utiliser ces systèmes sans y apporter des modifications importantes pour y introduire un système d’aide intelligent adapté. En effet, dans notre cas, il nous faut un système qui accepte un ensemble de solutions qui correspondent aux connaissances de l’élève. Cependant, il s’agit d’une avenue que nous pourrions explorer plus en profondeur lors de phases ultérieures du projet, dans le but d’accepter des preuves qui ne seraient pas prises en compte par notre système, mais qui sont tout de même valides. En ce sens, il sera intéressant de suivre l’évolution de GeoGebra dans lequel on travaille actuellement à intégrer un système de preuve automatique (Botana et al., 2015).

Le but de cette section était de faire un survol des ressources disponibles pour l’apprentissage des mathématiques avant de passer aux véritables systèmes tutoriels intelligents en géométrie. Nous avons premièrement recensé des offres de service de tuteurs et des cours offerts en ligne sur différentes plateformes. Toutes ces ressources étaient gérées par des humains et n’offraient pas de système d’aide intelligente. Cependant, certains logiciels permettent de gérer le cheminement à l’intérieur d’un curriculum de façon automatique, donc de générer un itinéraire de problèmes selon les connaissances modélisées de l’élève. Ce genre de système, ainsi que les modèles de l’apprenant associés, n’est pas pertinent pour notre projet, car notre but est d’aider l’élève au cours de la résolution d’un problème choisi par l’enseignant. Nous avons ensuite présenté les micromondes ainsi que les systèmes de preuve automatique. Il s’agit d’outils intéressants pour l’exploration et la découverte. Par contre, ils n’offrent pas d’aide à la résolution ni de moyens pour s’assurer que l’élève réalise l’activité proposée par l’enseignant. En ce qui concerne les démonstrateurs automatiques, à part Chypre, les preuves

produites par ces moteurs ne correspondent pas à ce qui est attendu de la part des élèves. Ils peuvent tout de même permettre de valider des pas de démonstration et pourront être utiles pour une prochaine phase du projet. Nous avons par contre intégré un micromonde à notre système afin de donner accès à l’exploration de la figure dynamique et permettre à l’élève de découvrir des conjectures qu’il pourra prouver par la suite. Dans la section suivante, nous présentons les principaux systèmes tutoriels intelligents en géométrie et nous allons voir comment ils ont adapté certains modèles et systèmes présentés précédemment.