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La première étude utilisant un marquage du spin des protons de l’eau dans le sang artériel, en les inversant dans la région du cou et en observant les effets d'inversion sur l'intensité de l'IRM, a été réalisée dans des cerveaux de rats (Williams et al., 1992). Ce marquage, reflétant le DSC régional au repos a été nommé « Arterial Spin Labeling (ASL) ». Ce n’est que très récemment que des études utilisant l’IRM-ASL ont commencé à être réalisées sur l’homme (Wolf and Detre, 2007; A. R. Deibler et al., 2008; Chappell et al., 2010, 2012).

83 Le marquage en IRM-ASL est fait en deux temps : tout d'abord, le sang artériel est marqué par inversion magnétique des spins au niveau du cou, en appliquant une impulsion d'inversion de radiofréquence à 180 degrés. Puis, le sang marqué s'écoule dans les tissus d’intérêt et tend vers l'équilibre avec la constante de temps de relaxation longitudinale du sang. Dans un second temps, après un délai TI (temps d'inversion) permettant l'entrée du sang marqué dans le tissu, une image est acquise dans la coupe d'intérêt. Cette image est appelée « image marquée » ou « taguée ». Afin d'éliminer la contribution du tissu statique à l'image marquée, une image de contrôle de la même coupe est acquise, dans laquelle le sang entrant n'est pas marqué (Figure 19A). La différence entre l’image de contrôle et l’image marquée produit une image qui est proportionnelle au débit sanguin cérébral. A partir de ces images de perfusion, des cartes quantitatives de DSC (typiquement exprimées en unité de ml par temps, par exemple 100 ml-1 min-1) peuvent être dérivées, à condition que les temps de relaxation du sang et des tissus soient connus et que la durée du marquage et le délai post-labelling soient contrôlés (Figure 19B) (Buxton, 2005; Detre et al., 2009).

L’ASL est ainsi une technique véritablement TEP-like, car elle mesure le DSC au repos de manière directe. Par ailleurs, elle présente des avantages importants par rapport à la méthode

Figure 19. Principe de l’acquisition en IRM- l’arterial spin labeling (IRM-ASL). (A) Acquisition d’une image marquée et d’une image de contrôle (B) La différence entre l’image de contrôle et l’image marquée produit une image qui est proportionnelle au débit sanguin cérébral.

84 TEP, à savoir sa réalisation en IRM sans radioactivité. Grâce à son caractère non invasif et à la quantification reproductible et validée du DSC par rapport aux autres techniques de perfusion cérébrale (Petersen et al., 2010; Wang et al., 2011), l’ASL est aujourd’hui de plus en plus employée dans des études en neurosciences, sur des individus sains et des individus présentant différentes pathologies (Petersen et al., 2006; Wolf and Detre, 2007; Detre et al., 2012; Ferré et al., 2013). L’ASL a également contribué à la mise en évidence de modifications régionales de DSC dans des pathologies neurologiques telles que l’épilepsie, les pathologies neurovasculaires, les pathologies tumorales, les maladies neurovégétatives et la sclérose latérale amyotrophique (Ferré et al., 2013). Quelques rares études se sont intéressées à la pathologie psychiatrique, en particulier à la dépression (Lui et al., 2009; Duhameau et al., 2010; Ota, Noda, et al., 2014), la schizophrénie (Ota, Ishikawa, et al., 2014), la privation de sommeil (Clark et al., 2006) ou les addictions (Franklin et al., 2007).

L'ASL est assez unique dans les différentes séquences utilisées en IRM, dans la mesure où sa base biologique, la perfusion, est connue. La possibilité de fournir la quantification absolue d'un paramètre biologique clé tel que le DSC au repos fait de cette technique un potentiel bio- marqueur polyvalent de la fonction cérébrale normale et pathologique. Ainsi, l’utilisation de l'ASL dans l’étude d’anomalies du fonctionnement cérébral dans des pathologies neurologiques et psychiatriques peut fournir des connaissances précieuses sur la base neurale d’un large éventail de comportements et de troubles. Par ailleurs, les mesures du DSC au repos par l’ASL peuvent également être utilisées en tant que biomarqueurs de l’efficacité de traitements afin de développer et de valider de nouvelles thérapies.

85 Par ailleurs, l’ASL présente des avantages particulièrement intéressants pour l’étude des populations pédiatriques. En effet, au-delà du fait de permettre de se passer d’injection radioactive, l'ASL permet un meilleur rapport signal/bruit chez les enfants que chez les adultes. Cette amélioration est principalement due à l’augmentation du taux moyen de DSC et de la vitesse de circulation sanguine dans les carotides des enfants par rapport à celles des adultes (Biagi et al., 2007; A.R. Deibler et al., 2008). Par conséquent, le marquage des spins est plus stable et les erreurs d’estimation quantitative de DSC réduites (Proisy et al., 2016). De plus, les cerveaux des enfants ont une teneur plus importante en eau, ce qui entraîne une augmentation de la concentration du traceur et résulte en un signal de perfusion beaucoup plus fort avec une délimitation des structures corticales et sous-corticales plus importante par rapport aux images de perfusion réalisées chez des adultes (Wang and Licht, 2006).

Malgré ces avantages, peu de travaux ont été réalisés en ASL dans la population pédiatrique (Ferré et al., 2013). En France, le service de radiologie pédiatrique de l’hôpital Necker enfants malades est l’un des seuls services pédiatriques à

disposer de cette technique en routine clinique. De ce fait, une grande partie des études en ASL chez l’enfant ont été réalisées dans ce service. Ces études suggèrent que l’ASL peut être utilisé dans le diagnostic radiologique de pathologies de plus en plus nombreuses : la Maladie de moyamoya (Blauwblomme

et al., 2016) (Figure 20), la dysplasie corticale

(Blauwblomme et al., 2014), les malformations vasculaires (Blauwblomme et al., 2015), les gliomes

Figure 20. Exemple de l’ASL dans la maladie de Moyamoya. (A) Image ASL préopératoire (B) Image ASL post-opératoire à 12 mois (Blauwblomme et al., 2016)

86 (Calmon et al., 2017), les tumeurs (Dangouloff-Ros et al., 2016), les tumeurs liés à la sclérose tubéreuse de Bourneville (Hully et al., 2016) et les tumeurs du plexus choroïde (Dangouloff- Ros et al., 2015).