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L'architecture génétique, c’est-à-dire les contributions relatives des différentes variations génétiques aux TSA est très hétérogène mais commence à être mieux connue depuis quelques années. La figure 3 montre les gènes de risque qui ont été identifiés, les patterns d'héritage génétique (Figure 3A), des exemples de types de mutations associés au TSA (Figure 3B) et la contribution de ces gènes aux TSA (Figure 3C). Les premières idées clé sur la base génétique des TSA proviennent de la reconnaissance que des dizaines de syndromes génétiques rares, avec différents mécanismes d'héritage, ont une forte pénétrance pour des TSA (Betancur, 2011; Miles, 2011; Zafeiriou et al., 2013). La pénétrance signifie la proportion de porteurs de mutation qui sont également diagnostiqués avec TSA. Ces mutations sont rares et aucune ne se retrouve chez plus de 1 % des

patients avec TSA. Cependant, pris ensemble, ils affecteraient environ 5 % de la population totale d'individus avec TSA.

Les études ayant porté sur les familles et les jumeaux ont montré que les TSA sont fortement héréditaires (Folstein and Rutter, 1977; Lichtenstein et

al., 2010; Sandin et al., 2014), ce

qui a incité à effectuer des

Figure 3. Architecture génétique des troubles du spectre autistique (de la Torre-Ubieta et al. 2016). (A) Différents pattern d’héritage des gènes identifiés comme étant associés aux TSA. (B) Exemples de variation génétique associés au TSA ainsi que des exemples de gènes associés aux TSA. (C) Le pourcentage de personnes avec TSA chez qui des mutations connues ont été identifiés

47 analyses génomiques de variantes génétiques, de séquençage de l'exome (whole-exome

sequencing, WES ; une technique qui permet de lire la séquence codante pour des protéines)

et plus récemment, de séquençage du génome entier (whole-genome sequencing, WGS, une technique qui permet de lire l'intégralité du code génétique). Ces méthodes ont permis l’identification de variantes génétiques rares qui perturbent le fonctionnement de certaines protéines chez l'enfant avec TSA, qui ne sont pas présentes chez les parents sains, c’est-à-dire des mutations de novo (de la Torre-Ubieta et al., 2016). Ces variantes sont des délétions ou des duplications d'un segment chromosomique qui conduit à des changements du nombre de copies d’un gène (Figure 3B), (CNVs) de novo (Autism Genome Project Consortium et al., 2007; Sebat et al., 2007; Glessner et al., 2009; Pinto et al., 2010; Levy et al., 2011) ou des mutations rares (<1 %) d'un seul nucléotide (SNVs) qui sont apparues dans la lignée germinale (Neale et

al., 2012; De Rubeis et al., 2014; Iossifov et al., 2014; Geschwind and State, 2015). Ces études

ont également montré l’augmentation générale de mutations "susceptibles de perturber un gène" (likely gene-disrupting mutations ; LGD) chez les personnes avec TSA par rapport à leurs proches sains ou à d'autres personnes non affectées. D’autres mutations individuelles rares

de novo montrant une forte implication dans les TSA ont été identifiées, y compris des

mutations de gènes de modification de la chromatine (par exemple CHD8, CHD2, ARID1B), de gènes exprimés dans l’embryon (par exemple TBR1, DYRK1A, PTEN), de gènes codant pour des protéines de densité postsynaptique (par exemple GRIN2B, GABRB3, SHANK3) et une délétion ou duplication du chromosome 16 (16p11.2) qui englobe une région contenant des dizaines de gènes. Les données suggèrent qu’environ 30 % des patients ont une mutation de novo qui contribue à leur diagnostic (Iossifov et al., 2014) et que les événements de novo dans certains

48 gènes peuvent augmenter considérablement le risque de TSA (Odds ratio: ≥20) (De Rubeis et

al., 2014).

En plus des mutations de novo rares, la WES a permis d’identifier des mutations récessives rares qui sont héritées dans des familles consanguines (Strauss et al., 2006; Morrow et al., 2008; Lim et al., 2013; Yu et al., 2013). Ces études ont montré que les mutations récessives rares associées à des TSA ont autant ou plus d'hétérogénéité dans les mécanismes moléculaires que celles des mutations de novo. Ces mutations comprennent : CNTNAP2 (Strauss et al., 2006), SLC9A9 / NHE9 (Morrow et al., 2008), BCKDK (Novarino et al., 2012) et CC2D1A (Manzini et al., 2014).

Plusieurs modèles ont été suggérés afin d’expliquer les patterns d'agrégation familiale observés dans les TSA et les résultats génétiques récents. En effet, chez certains patients, une seule mutation peut être suffisante pour provoquer des TSA tandis que chez d’autres, l’accumulation de nombreuses variantes à faible risque (> 1 000) pourrait être l'origine de ce trouble (Betancur, 2011; Huguet et al., 2013).

Le modèle de risque polygénique, appelé aussi de « variantes fréquentes » suppose qu'il existe de nombreuses variantes héritées qui contribuent aux TSA, chacune avec un petit effet qui, quand il est combiné avec des facteurs environnementaux et épi génétiques, entraîne le développement de TSA (Gaugler et al., 2014). En revanche, le modèle de gène principal suppose que, soit une mutation rare avec une forte pénétrance, soit un nombre limité de mutations avec une pénétrance modérée sont suffisantes pour produire des TSA (O’Roak et

49 Le modèle polygénique est soutenu par de multiples résultats. Tout d'abord, la récurrence des TSA chez les familles implique une forte composante génétique héréditaire (Hallmayer et al., 2011; Sandin et al., 2014). Deuxièmement, les proches des enfants avec TSA montrent des phénotypes apparentés, tels que des difficultés sociales et comportementales, plus fréquentes que dans la population générale (Virkud et al., 2009; Lyall et al., 2014; Lowe et al., 2015). Enfin, les estimations d'héritabilité utilisant des données de polymorphisme d'un seul nucléotide (single-nucleotide polymorphism ; SNP) démontrent que les variantes génétiques fréquentes expliquent une grande proportion de la variance en matière de susceptibilité à des TSA (Klei et al., 2012; Cross-Disorder Group of the Psychiatric Genomics Consortium et al., 2013) .

Le modèle de gène principal (Zhao et al., 2007; Ronemus et al., 2014) est soutenu par l'augmentation significative des mutations de novo perturbatrices chez les sujets avec TSA par rapport à leurs frères et sœurs non affectés (Iossifov et al., 2014). Un soutien supplémentaire pour ce modèle est observé dans le phénomène d’augmentation de SNV hérités qui perturbent la fonction protéique dans les gènes des individus avec TSA par rapport à leurs frères et sœurs non affectés (Krumm et al., 2015).

Les modèles de variantes fréquentes et de gène rare ne s'excluent pas mutuellement et les deux sont soutenus dans la littérature ; mais l'ampleur de leur contribution aux TSA fait encore l'objet de débats (Bourgeron, 2015; de la Torre-Ubieta et al., 2016).

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