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3.6 Application à la propagation en milieu extérieur 3D

3.6.2 Approximation rationnelle de modèles de sol

Les outils présentés dans ce chapitre sont maintenant mis en œuvre pour illustrer la prise en compte des effets de sol par le modèle ITM. D’un point de vue numérique, la première étape consiste à déterminer, avec la méthode VFIT (voir section 3.4.1), le modèle pôle-résidu R? ayant la même réponse en fréquence qu’un coefficient de réflexion cible R. Ce dernier peut se déduire directement des modèles d’impédance de la section 3.1 avec les relations du tableau 3.1.

Modèles de sol considérés

On considère ici deux modèles de sol :

• le modèle à porosité variable, défini par l’équation (3.7), avec une résistance σg = 25 kPa s m−2 et un taux de décroissance de la porosité αg = 50 m−1; ces paramètres ont été obtenus à partir de mesures d’impédance in situ pour rendre compte du sol herbeux de l’expérience ADVISE (voir section 4.2.1),

• une couche d’épaisseur e = 0.1 m du modèle de Miki modifié [équations (3.2) et (3.4)] avec une résistance σg = 10 kPa s m−2 et un fond rigide ; ces paramètres sont par exemple utilisés par Dragna et al. [65] pour modéliser un sol recouvert d’une couche de neige, et serviront ici à illustrer et valider le comportement de l’onde de sol à longue distance, bien que l’hypothèse de réaction locale puisse, pour ce modèle, être sujette à caution.

La figure 3.13 montre la partie réelle et imaginaire de l’impédance de surface théorique (« cible ») des deux modèles, ainsi que le module du coefficient de réflexion associé. On peut constater que les deux modèles sont passifs, et ont tendance à être très réfléchissants en dessous de 100 Hz car |R| ' 1. L’absorption augmente avec la fréquence : le module du coefficient de réflexion à 1000 Hz devient |R| ' 0.7 pour le modèle d’herbe et de l’ordre de 0.2 pour la couche de neige ; une onde se réfléchissant spéculairement en incidence normale sur un sol neigeux verra donc son contenu hautes fréquences fortement atténué. On peut également noter la présence de résonances liées aux conditions de montage du modèle de neige d’épaisseur e, qui ne se sont pas présentes

pour le modèle d’herbe, implicitement semi-infini. Enfin, le modèle de neige vérifie la condition (3.56) d’existence de l’onde de sol jusqu’à 350 Hz, et, pour le modèle d’herbe, sur l’ensemble de

la plage fréquentielle affichée.

Choix de l’ordre du modèle pôle-résidu

Le coefficient de réflexion des deux modèles est maintenant approximé en modèle pôle-résidu avec la méthode VFIT.

La principale difficulté réside dans le choix du nombre de pôles réels et complexes N. En effet, si N est trop faible, l’approximation R? de R sera de piètre qualité. À l’inverse, un grand nombre de pôles permet dans la plupart des cas une très bonne approximation ; cependant, ceci conduit généralement à des pôles très éloignés de l’origine du plan complexe, qui, d’après l’analyse de stabilité de la section 3.4.3, vont contraindre le choix du pas de temps ∆t des simulations FDTD. L’utilisation du coefficient de réflexion permet d’obtenir la valeur optimale du nombre de pôles

Nopt, qui correspond au meilleur compromis entre l’erreur de l’approximation et les contraintes sur ∆t. En effet, pour un jeu de pôles donné, il est possible de trouver le pas de temps maximal ∆tmax à la limite de stabilité du schéma FDTD d’intégration temporel (par exemple, avec la méthode de la sécante). Connaissant l’ordre de grandeur du pas de temps ∆testdes simulations à réaliser, une stratégie pour trouver Nopt peut alors consister à déterminer les modèles pôle-résidu en faisant varier N, et de comparer ∆tmax avec la qualité de l’approximation : le nombre de pôles optimal Nopt est celui qui correspond à la meilleure approximation stable pour le pas de temps prescrit, telle que ∆test< ∆tmax.

La figure 3.12 montre l’erreur RMS entre R(ω)

2 et

R?(ω)

2 ainsi que le pas de temps maximum ∆tmax pour le modèle d’herbe et de neige, avec N variant entre 2 et 20. Les ajus-tements de courbe par VFIT sont réalisés en 25 itérations avec des pôles de départ espacés logarithmiquement le long de l’axe réels entre 1 et 2225 Hz ; cette plage de fréquence correspond à la bande passante des simulations FDTD présentées dans la section suivante. Sauf exceptions, on constate que l’erreur diminue avec le nombre de pôle pour les deux modèles, au prix d’une plus grande contrainte sur le pas de temps puisque ∆tmax diminue lui aussi. Le pas de temps utilisé par la suite est de l’ordre de ∆test ' 5 × 10−5s et est représenté par la ligne horizontale de la figure 3.12(b). Les simulations avec le modèle d’herbe pour N > 7 seraient donc instables, étant donné que ∆test> ∆tmax. Le nombre de pôles optimal est ici Nopt = 5, qui est associé, en gardant une petite marge de manoeuvre, à la plus faible erreur de toutes les valeurs admissibles de N. Le modèle de neige pose moins de difficultés puisque la condition de stabilité est vérifiée dans tous les cas ; on trouve, d’après la procédure présentée précédemment, Nopt = 19. On se limitera néanmoins à 10 pôles pour limiter le coût de calcul du traitement des conditions limites, étant donné que cette valeur correspond déjà à une erreur plus faible que pour le modèle d’herbe.

Les coefficients obtenus pour les deux modèles sont donnés en annexe E.2.

Commentaires sur les approximations obtenues

Les réponses en fréquence associées aux modèles pôle-résidu de l’herbe (N = 5) et de la neige (N = 10) sont affichées sur la figure 3.13. Dans les deux cas, le module du coefficient de réflexion théorique est indissociable de son approximation au sein de la bande de fréquences considérée ; les résultats restent physiquement admissibles en dehors de cette dernière, bien que

Fig. 3.12 : (a) erreur RMS entre le module du coefficient de réflexion théorique et son ap-proximation par VFIT pour le modèle d’herbe et de neige, en fonction de l’ordre N du modèle pôle-résidu. (b) pas de temps maximal ∆tmax, obtenu avec la méthode de la sécante à partir de la position des pôles, garantissant des simulations stables avec le schéma d’intégration RK46L ; la zone hachurée indique les valeurs de ∆tmax qui correspondent à des simulations instables pour le pas de temps ∆test.

les fréquences au delà de 2225 Hz ne soient pas prises en compte par VFIT. On notera toutefois, pour l’herbe, des erreurs plus importantes en valeur absolue sur l’impédance dans les basses fréquences.

La figure 3.14 montre la répartition des pôles dans le plan complexe. Le modèle d’herbe ne comporte que des pôles réels, caractéristique d’un matériau plutôt absorbant, et deux paires complexes conjuguées sont présentes pour la neige ; celles-ci permettent de rendre compte des résonances liées au support rigide. La région de stabilité du schéma temporel est également affichée. Pour le premier modèle, le pôle limitant le pas temporel est ainsi le pôle (réel) le plus éloigné de l’axe imaginaire, alors que la paire complexe la plus éloignée de l’axe réel est le facteur limitant pour le second modèle. Cette différence permet d’expliquer l’évolution différente de ∆tmax avec le nombre de pôles de la figure 3.12(b). En effet, pour la neige, le pas de temps maximum reste plus ou moins constant, autour de ∆tmax ' 2 × 10−4; ceci est cohérent avec la fréquence de résonance associée à la paire de pôles limitants, qui reste à peu près constante pour différentes valeurs de N et qui reste donc tout aussi limitante. Réciproquement, le pôle réel limitant du modèle d’herbe permet une meilleure approximation dans les basses fréquences. Ce pôle, associé au plus grand résidu (voir annexe E.2), se déplace de plus en plus loin le long de l’axe réel quand N augmente et contraint progressivement ∆tmax.

Ces considérations peuvent avoir un intérêt pratique dès lors que l’on souhaite diminuer la contrainte sur le pas de temps. En effet, une stratégie efficace pour le modèle de neige consiste à réduire la fréquence maximale prise en compte par VFIT pour éviter de modéliser la résonance haute fréquence, qui est limitante. À l’inverse, cette approche a peu d’effet pour le modèle d’herbe puisque celui-ci est davantage contraint par la fréquence minimale.

Fig. 3.13 : Module théorique (« cible ») du coefficient de réflexion (ligne du haut), partie réelle (ligne du milieu) et imaginaire (ligne du bas) de l’impédance, et approximation par VFIT à partir du coefficient de réflexion entre 1 et 2225 Hz (ligne verticale) pour (a) le modèle d’herbe avec N = 5 et (b) le modèle de neige avec N = 10.

3.6.3 Comparaison des résultats numériques avec la solution