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Suite à la découverte du parcours et du projet professionnel de chaque enquêté au cours de l’entretien même, la retranscription des échanges a largement contribué à l’appropriation du matériau. Prendre le temps de revenir sur chaque entretien a permis de s’imprégner des modes de pensées de l’enquêté, comprendre intimement les choix effectués, les situations rencontrées. Dans les tous premiers temps, nous avons accepté que notre subjectivité guide les points qui retenaient notre attention : qu’est-ce qui nous surprend ? Qu’est-ce qui ne nous étonne pas ? Pourquoi tel ou tel entretien (ou morceau) fait surgir telle émotion ou sentiment ? Cette première confrontation au matériau a permis de mettre à jour nos propres représentations et de mieux situer notre vécu de doctorante comme un positionnement situé, parmi d’autres. Après avoir accepté le nécessaire détour par l’objectivation de notre rapport à notre terrain et notre objet d’études, nous pouvions ainsi nous replonger dans le matériau en dissociant ce qui

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relevait de notre subjectivité personnelle et de notre subjectivité de jeune chercheuse. L’approche adoptée pour aborder le matériau était donc dégagée des premiers a priori et pouvait donc se revendiquer inductive. La posture était plus ouverte, prête à découvrir de nouveaux phénomènes et nous laissait la possibilité d’être déstabilisée par les données qui viendraient éventuellement contredire nos représentations ou notre vécu de doctorante.

Considérant que l’enquêté cherchait à défendre une position, une vision du déroulement de son parcours jusqu’au moment de l’entretien, nous avons essayé de répondre aux questions suivantes : « Que veut-il nous montrer via son discours ? » « Quelle est la question générale à laquelle l’entretien répond ? » « Quel message l’enquêté veut-il nous faire passer au sujet du déroulement de sa thèse et de ses premiers mois d’après-thèse ? » « Qu’est-ce que l’enquêté nous apprend de plus comparativement aux autres entretiens ? ». Cette première étape d’appropriation du matériau est celle qui demande le plus de faire preuve d’empathie pour permettre une véritable approche compréhensive, souple et ouverte à la pluralité des modes de pensées et des situations. A l’issue de chaque retranscription et relecture d’entretien, nous identifiions, selon le point de vue de l’enquêté, les points saillants, spécifiques et caractéristiques de son projet et de son parcours tels qu’il nous les avait racontés. Nous prenions acte de manière relativement synthétique de ce qu’il s’était passé concrètement. A ce stade, il n’y avait pas encore d’analyse mais une description du parcours et du vécu, tel qu’il se donne à voir sur le terrain, sans jugement mais avec disponibilité et respect des discours. L’attention a commencé également à se porter sur l’évolution du projet professionnel ; à ce stade, il s’agit d’en repérer les mouvements et la trajectoire, sans nécessairement chercher les conditions, ressources ou contraintes qui donnent lieu à ces mouvements : le projet est-il stable, fait de va-et-vient, connaît des changements, se construit ? Cette première appropriation du matériau a fait l’objet de ce que nous avons appelé une « description-résumé » : face à la longueur des entretiens (la retranscription de beaucoup d’entre-deux approche les 50 pages), il a fallu réduire et résumer le matériau, le condenser pour pouvoir se remémorer leur déroulement lors des phases ultérieures d’analyse, plus rapidement qu’avec les retranscriptions originales toutefois largement mobilisées également.

Catégorisation

La deuxième phase de l’analyse du matériau a consisté en un codage fin des entretiens sur le logiciel N’Vivo29, permettant de surcroît un approfondissement de l’appropriation du matériau et une imprégnation totale de chacun des entretiens réalisés. Ce codage a consisté à nommer les portions d’entretiens dans lesquels apparaissaient des phénomènes, processus, actions, évènements, contextes, configurations, personnages etc. ayant joué un rôle dans le déroulement du parcours et l’évolution du projet professionnel. Ce premier codage a donné très rapidement un nombre d’items extrêmement important et où chaque code n’avait qu’une ou deux occurrences. Il a donc fallu mettre à plat toutes ces premiers codes ainsi créés et faire du lien entre eux pour les réduire. Nous avons donc cherché les recoupements, les regroupements possibles en essayant de repérer les récurrences dans la structure des différents récits. L’identification de ces dernières a donné lieu aux ingrédients des parcours ; le classement

29 N’Vivo est un logiciel d’analyse de données qualitatives. Il permet de coder différentes sources de données et propose une visualisation des données en fonction des codages réalisés, croisée avec les sources.

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des extraits d’entretiens parmi eux a permis ensuite d’en établir les différentes déclinaisons grâce à la catégorisation à visée conceptualisante du matériau. La dénomination des ingrédients cherchait en effet un arc plus général dans lesquels classer les codes, ouvrant la voie à une désignation plus générique qui englobe les différentes déclinaisons de ces phénomènes, processus, actions, évènements, contextes, configurations, personnages etc émergeants. Les ingrédients identifiés se sont révélées être pertinents (toutefois à des degrés différents) de l’évolution des projets et des parcours professionnels. La dénomination de ces ingrédients se devait être suffisamment générale pour que la catégorisation à visée conceptualisante du matériau puisse faire état des déclinaisons possibles en dépassant la trop grande spécificité des codages initiaux, trop collés au verbatim des enquêtés. Les catégorisations devaient être plus riches conceptuellement que les codes et caractériser les ingrédients repérés. La tenue d’un journal de catégorisation a permis de lister les questions survenant au fur et à mesure de la catégorisation et de la caractérisation des ingrédients. Ces questions concernaient à la fois les questionnements persistants sur la méthodologie mais également les prémisses d’hypothèses émergentes qui se dégageaient au fur et à mesure du codage et de la catégorisation des entretiens. La reprise des notes du journal de catégorisation à intervalles réguliers a permis d’affiner progressivement la méthodologie et d’orienter les éléments à rechercher dans les entretiens ultérieurement soumis à l’analyse afin de confirmer ou d’invalider les hypothèses naissantes.

La plongée au cœur de chaque entretien afin d’en réaliser un codage et une catégorisation minutieuse a parallèlement donné lieu à la mise en forme de leur trame temporelle (Demazière, 2007). Concrètement, il s’agit de reporter et temporaliser - sur un fichier excel en l’occurrence - les différents éléments composants le récit et de les croiser avec les ingrédients structurant les récits afin de donner lieu à une schématisation spécifique pour chaque enquêté30. A ce stade, l’attention commençait à être portée au contexte de l’évolution du projet professionnel ; ce dernier apparaissait d’autant plus clairement que la schématisation spécifique offrait une vision temporalisée du déroulement du récit grâce au placement spatio-temporel de la déclinaison spécifique des ingrédients repérés, datés, catégorisés et décrits. A l’issue de ce travail, nous étions alors en mesure de formuler des hypothèses sur le moteur ou la logique sociale de l’entretien.

Tous les quatre ou cinq entretiens environ (tout dépendait des découvertes et des apports de chaque entretien), nous revenions sur cet ensemble pour faire le point et commencer à mettre en lien les entretiens : qu’est-ce que nous avons compris à ce stade de l’évolution des projets professionnels ? Dans quels contextes a été amené à évoluer le projet ? Quels sont les points de convergence et divergence entre les récits ? Quelles questions se posent encore ? Quels phénomènes collectifs émergent et qu’il faudrait essayer de cerner de manière systématique dans les entretiens à suivre ? Est-il possible de poser des premières pistes d’interprétation ? Ces réflexions étaient notées dans le journal de catégorisation également (il a été complété au fur et à mesure de l’avancement de la catégorisation de chaque entretien mais également lors de ces points d’étapes) afin de redéfinir le cap général. Il permet de garder une trace des observations et pistes d’analyses qui se dégagent au fur et à mesure des entretiens. La reprise de ces

30 Un exemple du résultat de ces « schématisations spécifiques » est proposé en annexes et son mode de construction est développé plus en détail dans la suite de ce chapitre.

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pistes et la vérification de leur validité dans les précédents entretiens permet de consolider la théorie, la méthode d’analyse et la construction de l’objet.

Interprétation

Les approximations analytiques et théoriques émergeantes se sont progressivement affinées et fiabilisées avec l’avancée du recueil de données et le traitement systématique de chaque entretien. Les allers-retours entre les phases de catégorisation et d’interprétation ont été les plus nombreuses, mais leurs délimitations respectives souvent floues. Ces deux phases ont constitué dans tous les cas le cœur de la démarche d’analyse et sont celles qui ont demandé le plus de temps. Assez rapidement, le postulat de départ selon lequel les projets professionnels sont évolutifs s’est confirmé. La nouvelle question de recherche a donc cherché à repérer le ou les types d’évolution des projets professionnels. Dans quel ordre les états du projet professionnel changent-ils ? Quels sont les carrefours ou les transitions ? Quelles étaient les alternatives à la voie choisie ? Quels étaient les avantages et les coûts subjectifs de chacune des voies (Bertaux, 1997) ? La recherche des différents types d’évolution du projet professionnel s’est accompagnée de questions sociologiques subsidiaires puisque cette évolution ne pouvait se faire seule. Le projet étant une projection qui ne connaît pas encore de matérialité, il n’a pas la même densité qu’un fait ou qu’une action qui se sont déjà déroulés et que l’enquêté raconte rétrospectivement. Pour autant, le projet est une pratique sociale dont il est possible d’identifier les causes, les conséquences, les variations et le contexte dans lequel il émerge. En tant que futur anticipé, il s’inscrit dans plusieurs registres de réalité qu’il convient de bien identifier au cours de l’analyse : il se décline en effet selon des réalités possibles, probables, souhaitables. Par ailleurs, l’évolution du projet professionnel de chaque enquêté résultait très probablement d’une configuration sociale spécifique qu’il fallait repérer. L’identification des ingrédients structurant les récits constituait les indices de cette configuration sociale à explorer ; leur déclinaison spécifique dans chacun des cas ainsi que leur temporalisation nous a aidé à identifier, tout au long du processus, ceux qui étaient les plus pertinents lors de telle ou telle séquence.

Nous avons ensuite cherché à confronter le déroulement du parcours avec l’évolution du projet professionnel : l’objectif de l’interprétation des données était de mettre en lien les séquences du parcours avec les séquences d’évolution du projet professionnel. Existait-il des configurations spécifiques qui permettaient de comprendre les inflexions prises par le projet professionnel ? Pouvait-on trouver des configurations de parcours similaires d’un cas à un autre au cours desquelles le projet professionnel évoluait de façon semblable ? Ces questionnements avaient pour vocation à mettre en lien l’analyse verticale de chaque cas avec une analyse transversale entre tous les cas. Pour déceler les liens potentiels entre les catégories, il fallait générer des questionnements de nature relationnelle afin d’en déterminer le type : s’agit-il d’un lien de continuité, causalité, concomitance, coexistence, imbrication, opposition, exclusivité, dévoilement, exposition, révélation, suscitation, interpellation, sollicitation, déclenchement, entraînement, provocation, activation, ranimation, ravivement, alimentation, amplification, accentuation, accélération, précipitation, renforcement, intensification, aggravation, exacerbation, ressemblance, dépendance, fonctionnel, hiérarchique etc… ?

La phase interprétative s’est progressivement détachée du discours tenu par les acteurs pour adopter un angle plus analytique. Le recours à une approche inductive ne devait pas pour autant nous interdire de

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convoquer certains modèles théoriques existants s’ils pouvaient venir éclairer certains phénomènes observés (Paillé & Mucchielli, 2013). Mais il fallait trouver un juste équilibre entre le recours à ces cadres théoriques établis et l’ouverture nécessaire à la compréhension et au dévoilement de nouveaux phénomènes. Ici, notre subjectivité de jeune chercheuse était pleinement mobilisée. La progression dans l’analyse nous donnait suffisamment de matériau et de pistes d’analyse pour laisser nos impressions personnelles être remplacées par la convocation de notre bagage sociologique. Les points d’étonnement tout comme ceux qui nous paraissaient évidents devaient alors être explicités et objectivés : à quelle théorie - que nous connaissions déjà plus ou moins - ce (non-)étonnement fait-il référence ? Aller chercher le bagage théorique et conceptuel « caché » derrière les phénomènes observés nous a permis de comprendre et d’expliquer ce que nous renvoyait cette subjectivité de jeune chercheuse.

L’aspect longitudinal du matériau offrait un temps « d’observation »31 relativement long durant lequel plusieurs phénomènes apparaissaient, faisant appel à plusieurs cadres théoriques déjà existants. L’aspect kaléidoscopique pris par l’analyse à ce stade demandait de questionner ce qui prenait forme sous nos yeux : que se dégageait-il de ces divers éléments ? Que racontait la succession des différentes séquences ? Au-delà de la description des diverses évolutions des projets professionnels, comment pouvait-on la totaliser, lui donner un sens et une explication sociologique qui fasse état et donne une cohérence à cet ensemble ? A l’interprétation successive de chaque entretien a donc suivi l’interprétation et la comparaison des différents entretiens entre eux : qu’il y a-t-il de commun ou de différent (configuration, logique d’action, mécanisme, effets, positionnement…) ? C’est en effet de la confrontation des cas qu’émerge le modèle théorique. Grâce aux schématisations spécifiques établies parallèlement, nous avons cherché à identifier le « schème commun » (Demazière & Dubar, 1997a) à l’ensemble des entretiens.

Théorisation

La dernière phase d’analyse consistait à théoriser les observations, c’est-à-dire « dégager le sens d’un évènement, […] lier dans un schéma explicatif divers éléments d’une situation, […] renouveler la compréhension d’un phénomène en le mettant différemment en lumière » (Paillé, 1994, p. 149). « Théoriser, ce n’est pas, à strictement parler, faire cela, c’est d’abord aller vers cela » - c’est donc plus un processus qu’un état. Les références théoriques déjà existantes et mobilisées dans l’analyse ont servi de guide, de leviers ; elles n’ont pas constitué l’apport théorique en lui-même (ou marginalement seulement) car elles sont un outil au service de l’élaboration de la nouvelle théorie.

La théorisation visait donc à identifier les ingrédients centraux, les plus influents dans l’évolution des projets professionnels, mais également la manière dont leur agencement participe à donner sens aux parcours et évolutions des projets professionnels observés. La typologie d’évolution des projets professionnels a facilité la mise à jour de quelques agencements spécifiques : le repérage des similarités, récurrences et convergences de chacun des parcours professionnels a permis d’en établir les différents types. A ce stade de l’analyse, la méthode inductive n’est plus aussi importante qu’au début et s’hybride

31 L’« observation » ne fait ici pas référence à la méthode de recueil de données mais à la période de vie balayée par les entretiens.

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avec une forme d’approche déductive : les éléments récurrents prennent valeur d’hypothèses émergentes à vérifier dans les autres cas.

Initialement centrées sur la compréhension de l’influence des conditions de réalisation des thèses sur les parcours professionnels ultérieurs à la soutenance, les analyses menées ont permis de décomposer les différents types d’évolution des projets professionnels. La plupart des ingrédients ayant contribué à ces évolutions convergeaient et résultaient d’une influence institutionnelle plus ou moins directe, à chaque fois sous des formes différentes. L’analyse a effectivement conclut que cette influence institutionnelle se décline différemment dans le temps, mais persiste sous une forme ou une autre. La séquentialisation des différentes formes d’influence institutionnelle au cours du temps a ainsi conduit à la piste du processus (s)électif de fabrique institutionnelle des projets et parcours professionnels.

La théorisation a donc progressivement pris forme alors que nous explicitions le processus (s)électif de fabrique institutionnelle des projets professionnels. Nous avons pour cela décrit le déroulement habituel du processus, identifié les moments forts de son existence, ses conséquences, ses antécédents, ses propriétés et les autres phénomènes qui lui sont associés (Paillé, 1994), comme l’évolution des projets professionnels déjà repérée par exemple. Nous avons alors pu nous détacher de la singularité des récits pour rechercher les éléments de contextualisation et de compréhension invisibles pour les enquêtés eux-mêmes puisqu’émergeant par la comparaison des cas entre eux.

Les modèles théoriques de phénomènes sociaux sont bien souvent pluridimensionnels mais leur exposé est nécessairement linéaire (Bertaux, 1997). Comment alors trouver l’ordonnancement écrit des arguments qui n’écrase pas trop cette multidimensionnalité ? Nous avons ainsi opté pour présenter d’abord la typologie d’évolution des projets professionnels. Si l’établissement d’une typologie demande la mise en œuvre d’une démarche analytique, le résultat d’une typologie est plutôt descriptif : ici, elle donne ainsi à voir ce qui change ou perdure au cours du temps. La description typologique initiale nous permettait ensuite d’aborder la démarche de recherche qualitative en termes de logiques et de processus sociaux (Paillé & Mucchielli, 2013). Nous avons donc cherché à éclairer, dans les chapitres ultérieurs à la typologie, les conditions sociales dans lesquelles ces différentes évolutions ont pu avoir lieu et comment la succession de ces changements s’inscrit dans un processus sélectif dont l’influence est principalement de nature institutionnelle. Nous avons choisi de privilégier la logique biographique et temporelle pour l’exposé, afin de donner à voir la dimension processuelle de l’évolution des projets professionnels. De surcroît, la logique temporelle et biographique est particulièrement adaptée pour rendre compte des parcours et permet, nous l’espérons, de donner une consistance à l’analyse en s’appuyant sur les vies des enquêtés.

1.3.2. - L’émergence de 24 ingrédients structurant les entretiens

En croisant la littérature sociologique relative à la sociologie des parcours de vie avec les résultats de recherches sur l’insertion professionnelle notamment et le premier codage des données d’entretiens, nous avons repéré les ingrédients structurants et récurrents des récits qui nous étaient rapportés. L’ensemble des ingrédients émergents faisaient référence à plusieurs niveaux d’analyse du social, du plus micro au plus macro, suggérant que les parcours et projets professionnels sont la résultante d’influences multifactorielles et multiscalaires (Bidart, 2006) dont il fallait rendre compte. Les enquêtés replaçaient en

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effet leur parcours et l’évolution de leur parcours et de leur projet professionnel dans des contextes macro-sociaux de type culturels, historiques ou institutionnels. Les références à l’influence du niveau méso-social étaient également largement présentes, notamment lorsqu’étaient mentionnés le rôle du contexte et de leur entourage personnel, familial ou amoureux. Enfin, des éléments d’ordre plus micro-social intervenaient également dans leur récit lorsqu’ils faisaient état du vécu de leurs expériences, de leurs préférences ou de leurs caractéristiques personnelles. Ces facteurs et échelles dressaient ainsi à grands traits les ingrédients à considérer.

La première liste de codage a donc été mise à plat pour mieux opérer des fusions ou des regroupements permis par la montée en généralisation. Par allers-retours successifs entre ces codages évolutifs et le nouveau matériau, les différents ingrédients se sont alors stabilisés puisqu’il devenait possible de codifier et catégoriser chaque phrase ou extrait d’entretien, offrant une grille d’analyse commune à tous les entretiens pour faciliter leur comparaison.

Le première double ingrédient structurant les entretiens concerne les éléments de culture partagée, le sens de la vie et les valeurs et fait état des cadres sociohistoriques ainsi que des parcours sociaux institués. Le deuxième double ingrédient fait référence aux contraintes et opportunités des marchés du travail et de l’emploi et de la conjoncture économique. Vient ensuite la reconnaissance et la valorisation des diplômes, c’est-à-dire la valeur accordée au doctorat dans sa dimension professionnelle à la fois par les employeurs potentiels et par les docteurs eux-mêmes mais également dans sa dimension statutaire. Les cadres socioprofessionnels constituent le quatrième ingrédient structurant les récits : il s’agit des conditions et de l’environnement de formation et de travail dans lesquels ont évolué les enquêtés. Ils ont été dissociés des conditions matérielles d’existence individuelle qui relèvent plus de la sphère personnelle et auxquelles