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Approches th´eoriques susceptibles de d´ecrire le diagramme de phases :

Deux classes de sc´enarii sont susceptibles de d´ecrire l’´evolution des propri´et´es physiques des supracondcuteurs `a haute temp´erature critique en fonction du dopage : isolant de Mott dop´e et ordre en comp´etition.

Figure 2.24 – Diagramme de phases dans un sc´enario isolant de Mott : T∗marque l’apparition d’une phase pr´ecurseur.

Dans la classe isolant de Mott dop´e (fig. 2.24), le pseudogap est un ´etat pr´ecurseur de la supraconductivit´e et T∗ se confond avec Tc `a partir du dopage maximal. Les mesures

d’ARPES montrent l’ouverture d’un gap de sym´etrie d aux antinoeuds de la surface de Fermi quand on croise T∗. Ce gap ´evolue continˆument avec la temp´erature et le passage `a

l’´etat supraconducteur `a Tc ne s’accompagne d’aucun changement important [50]. La den- sit´e superfluide est tr`es faible par rapport `a des supraconducteurs conventionnels et semble ˆetre proportionnel `a Tc [93]. D’apr`es Emery et Kivelson, la rigidit´e de la phase des paires

de Cooper est li´ee `a la densit´e superfluide et la phase fluctue de fa¸con importante. Ils ont d´evelopp´e un mod`ele ph´enom´enologique o`u T∗ marque l’apparition de paires de Cooper

sans coh´erence de phase [94]. La longueur de coh´erence des cuprates est bien plus courte que dans les supraconducteurs conventionnels. A Tc, la coh´erence de phase est restaur´ee et des supercourants peuvent alors circuler dans l’´echantillon.

Un autre mod`ele appartenant `a une classe similaire a ´et´e imagin´e par Anderson [95]. Le com- pos´e parent est un isolant de Mott o`u les ´electrons sont coupl´es antiferromagn´etiquement. En rajoutant des trous dans le syst`eme, on d´etruit l’ordre antiferromagn´etique et l’´etat fon- damental du syst`eme est une superposition d’´etats singulets (et triplet suivant le dopage). Dans ce mod`ele, T∗ marque l’apparition d’un gap de spin dˆu `a l’appariement des ´electrons

en singulet de spin. Cette ´etat est appel´e un liquide de spin. Dans cette phase pseudogap, il y a une s´eparation des degr´es de libert´e de spin et de charge et le syst`eme pr´esente deux types d’excitations :

– Les spinons qui sont des excitations de type fermion sans charge et de spin 1 2.

A Tc, les excitations de charge deviennent coh´erentes et le compos´e devient supracon-

ducteur. Les mesures de chaleur sp´ecifique [43] et de susceptibilit´e [38] ne mettent pas en ´evidence de s´eparation spin charge dans les cuprates.

Figure 2.25 – Diagramme de phases dans un sc´enario ordre en comp´etition : T∗ marque l’apparition d’une phase en comp´etition avec la supraconductivit´e.

La seconde classe de sc´enario stipule que la phase pseudogap est une phase ordonn´ee en comp´etition avec la supraconductivit´e dont le param`etre d’ordre reste encore `a d´eterminer (fig.2.25). En dopant l’isolant de Mott, l’ordre antiferromagn´etique est d´etruit `a faible do- page. A beaucoup plus fort dopage le compos´e se comporte comme un liquide de Fermi. Entre les deux, une phase caract´eris´ee par une perte de densit´e de porteur apparait `a T∗.

La ligne marquant T∗ se prolonge alors jusqu’`a un point quantique critique qui marque

une transition entre une phase ordonn´ee (`a gauche) et un liquide de Fermi. Le pseudogap marquerait alors l’apparition d’une phase ordonn´ee et T∗ un changement de phase ther-

modynamique avec une brisure de sym´etrie. Dans ce sc´enario, la phase supraconductrice s’appuierait sur les fortes fluctuations quantiques autour de ce point quantique critique. Nous allons bri`evement passer en revue les diff´erents ordres propos´es.

T∗ peut marquer l’apparition d’une onde de densit´e de sym´etrie d (d-DW)(fig.2.26) comme

l’ont sugg´er´e Laughlin et Chakravarty [96]. Cet ordre est induit par un courant de plaquette. Dans ce cas, le param`etre d’ordre brise les sym´etries de rotation et de translation et reste invariant par combinaison des deux. La sym´etrie par renversement du temps n’est bris´ee que dans le cas o`u le moment magn´etique est diff´erent suivant les directions up et down. Ces deux types d’ordre induisent une reconstruction de la surface de fermi au vecteur d’onde Q = (π, π). Le vecteur d’onde caract´erisant ces ordres peut ˆetre d´ecal´e de δ. Dans ce cas ont parle de vecteur d’onde incommensur´e Q = (π + δ, π). Des mesures de neutrons ont mis en ´evidence un pic ´elastique d’excitation magn´etique incommensur´e dans YBa2Cu3O6.45 [78] mais pas dans YBa2Cu3O6.5 [77] ni dans YBa2Cu3O6.6 [97].

Varma a propos´e un mod`ele bas´e sur des courants orbitaux [47] entre les sites oxyg`enes et les cuivres (fig.2.26). Chaque cellule unit´e est alors divis´ee en quatres plaquettes o`u circule des courants orbitaux dans des directions alternativements oppos´ees. Ce type d’ordre brise la sym´etrie par renversement du temps et par rotation mais pas celle par translation. Des

mesures de neutrons [45] et d’effet Kerr [48] dans YBa2Cu3O6+δ ont ´et´e interpr´et´ees comme l’apparition d’un tel ordre `a champ nul. Cependant, ce type d’ordre n’entraˆıne pas de re- construction de la surface de Fermi et ne peut donc pas expliquer les mesures d’oscillations quantiques et d’effet Hall [98].

Figure 2.26 – Repr´esentation des moments induits dans les plans CuO2 pour diff´erents

ordres.

Il existe une classe de compos´es o`u un ordre appel´e stripes a clairement ´et´e mis en ´evidence. Il s’agit de compos´es du type La2−xBaxCuO4+δ et La2−xSrxCuO4 dop´e au N d et `a l’Eu. Des mesures de diffraction de neutrons ont mis en ´evidence une onde de densit´e de spin 1D et de charge 1D incommensurables dans La2−xBaxCuO4+δ [99, 100]. La super- position d’une onde de densit´e de charge et de spin statique incommensurable a aussi ´et´e observ´ee dans La2−xSrxCuO4 dop´e N d et Eu pour x = 1/8 [58]. A basse temp´erature cette phase est caract´eris´ee par l’apparition de rivi`eres de charge s´epar´ees par des r´egions anti- ferromagn´etiques isolantes (fig. 2.27). Sur la figure 2.27, les stripes sont statiques mais elles peuvent ´egalement ˆetre dynamique et seront alors plus dures `a d´etecter [100]. Les excitations magn´etiques mesur´ees par diffusion de neutrons [101] dans YBa2Cu3O6+δ `a un dopage de δ = 6.6 et δ = 6.85 sont 2D ce qui exclue la pr´esence de stripes statiques.

Techniques de mesure

3.1

Introduction :

Ce chapitre pr´esente l’environnement exp´erimental utilis´e au cours de ma th`ese. La premi`ere partie est consacr´ee au g´en´erateur, bobine et cryostat qui ont permis d’atteindre de tr`es fort champ magn´etique `a des temp´eratures de l’ordre de la centaine de millikel- vin. La deuxi`eme partie pr´esente les mesures de couple magn´etique en champ puls´e. Le d´eveloppement et l’optimisation de cette technique de mesure en champ puls´e dans un r´efrig´erateur `a dilution a repr´esent´e une partie importante de mon travail et sera abord´e dans la troisi`eme partie. La quatri`eme partie pr´esente les r´esultats des tests de validation de ce syst`eme r´ealis´es dans un ´echantillon de Sr2RuO4 .

3.2

Dispositif exp´erimental :

Il existe peu d’installations capables de fournir de tr`es forts champs magn´etiques dans le monde. Ces installations sont r´eparties en deux cat´egories. Celles permettant d’obtenir un champ magn´etique continu comme le Laboratoire National des Champs Magn´etiques Intenses (LNCMI) `a Grenoble, le High Magnetic Field Laboratory (HFML) au Pays Bas, le National High Magnetic Field Laboratory (NHMFL) aux ´Etats Unis et le High Magne- tic Field Laboratory (HMFL) au Japon. Ces installations permettent d’atteindre de tr`es forts champs magn´etiques statiques (le record est de 45 T pour le NHMFL). Cependant, ces installations demandent d’´enormes ressources ´electriques et des syst`emes de refroidis- sement de bobine tr`es lourds. L’autre cat´egorie produit un champ magn´etique puls´e qui a ´et´e invent´e par Kapitza en 1924. Les principales installations capables de d´elivrer de forts champs magn´etiques puls´ees sont le Laboratoire National des Champs Magn´etiques Intenses (LNCMI) `a Toulouse, le Hochfeld-Magnetlabor Dresden (HLD) en Allemagne , le National High Magnetic Field Laboratory (NHMFL) aux ´Etats Unis. Les temps caract´eristiques sont beaucoup plus courts (pulse de l’ordre de quelques millisecondes `a la centaine de milli- secondes) mais permettent de monter `a de plus forts champs (le record est de 90 T au NHMFL). Ces installations n´ecessitent moins d’´energie et sont moins encombrantes. Cepen- dant, la courte dur´ee du pulse magn´etique complique les mesures.

3.2.1 G´en´erateur :

Le LNCMI `a Toulouse utilise un g´en´erateur capable de d´elivrer une ´energie de 14M J durant un pulse de quelques centaines de millisecondes permettant d’atteindre un champ de 60 T.

Le g´en´erateur (fig. 3.1) est constitu´e de 10 cellules de 60 condensateurs que l’on charge jusqu’`a 24 kV. On note la capacit´e ´electrique du banc de condensateurs C. Une fois la charge atteinte, les thyristors optiques de puissance se ferment et les condensateurs sont alors connect´es `a la bobine d’inductance L et de r´esistance r. Le syst`eme se comporte alors comme un circuit LC, r ´etant n´egligeable, et le courant oscille `a une fr´equence propre de F = 1/√LC. Il atteindra sa valeur maximale `a T =√LC/4. La tension aux bornes de la bobine change alors de signe. La phase de la tension est d´ecal´ee de π/2 par rapport `a celle de courant. Les diodes de puissance crowbar mont´ees en parall`ele deviennent alors conductrices et court- circuitent la bobine. Le courant d´ecroˆıt exponentiellement avec un temps caract´eristique τ = L/rT. A la fin du pulse, une impulsion optique d´eclenche l’ouverture des thyristors optiques de puissance. Cette m´ethode de d´ecroissance est appel´ee m´ethode crowbar.

3.2.2 Bobine :

Nous utilisons des bobines Cuivre Zylon `a densit´e de renforts optimis´es d’un diam`etre int´erieur de 28 mm. Le temps de mont´ee est 50 ms et la dur´ee totale du pulse est de 400 ms. Un champ de 55 T correspond `a une ´energie de 3.3 MJ.

La figure3.2repr´esente un profil de champ en fonction du temps. Nous utilisons g´en´eralement le signal lors de la descente pour analyser les donn´ees. La bobine est plong´ee directement dans un bain d’azote liquide. La limite ´elastique du cuivre est alors multipli´ee par deux et sa r´esistance ´electrique diminue d’un facteur sept. Durant le pulse, la temp´erature de la bobine va passer de 77 K `a une temp´erature proche de 300 K. Apr`es un pulse, il faut attendre que la bobine refroidisse. Afin de diminuer le temps d’attente n´ecessaire entre deux tirs, on peut pomper sur le bain d’azote. Un syst`eme d´evelopp´e au laboratoire permet ´egalement d’acc´el´erer le refroidissement. Des fentes situ´ees dans la bobine permettent `a l’azote de circuler. Ces bobines sont dites `a refroidissement rapide. Le temps d’attente entre deux tirs passe de 4 h `a 1 h 15 si on utilise la combinaison de ces deux syst`emes.

Pour calculer le champ magn´etique, on utilise la mesure de la tension induite aux bornes d’une bobine pickup situ´ee pr`es de l’´echantillon. La relation entre le champ et la tension cr´e´ee aux bornes de la pickup est :

e = dt = S dB dt + B dS dt (3.1)

o`u e est la tension en volt et S est la section de la pickup en m2. La section de la pickup ´etant constante, cette ´equation se r´esume `a :

e = SdB

dt (3.2)

Il suffit alors de connaˆıtre la section de la bobine et de mesurer la tension aux bornes de celle-ci au cours du pulse pour remonter au champ magn´etique par int´egration (fig.3.2) .

0.0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 -1000 0 1000 2000 3000 0 30 60 d B / d t t(s) B ( T )

Figure 3.2 – La ligne noire repr´esente le signal aux bornes de la bobine pickup. La ligne rouge repr´esente le profil de champ magn´etique.

3.2.3 Cryog´enie :

L’effet que nous cherchons `a mesurer n´ecessite l’utilisation de tr`es basses temp´eratures. Nous avons utilis´e deux syst`emes diff´erents : un cryostat4He et un r´efrig´erateur `a dilution. La bobine est immerg´ee dans un cryostat azote (fig. 3.3) qui est en acier inoxydable non magn´etique. L’acier inoxydable a comme avantage une bonne tenue m´ecanique et une conductivit´e faible. Un vide secondaire est maintenu entre les deux parois. Des couches de super isolant sont plac´ees entre celles-ci afin de d´ecoupler le plus possible l’azote du milieu ambiant. Un cˆable coaxial de puissance relie la bobine au g´en´erateur.

Pour les mesures en 4He, le cryostat helium (fig. 3.3) permet d’effectuer des mesures jusqu’`a une temp´erature de 1.5 K en pompant sur le bain d’h´elium. Il est construit en acier inoxydable. Le cryostat est constitu´e de deux bains reli´es entre eux par un capillaire. La queue du cryostat est dans le prolongement du bain du bas. Elle est gliss´ee au centre de la bobine. L’´echantillon est plac´e au centre de la bobine dans la queue du cryostat grˆace `a une canne en fibre de verre. Le cryostat que nous avons utilis´e poss`ede un diam`etre int´erieur utile de 19 mm.

Figure 3.3 – a) Sch´ema du cryostat azote dans lequel est fix´ee la bobine b) Sch´ema du cryostat h´elium

L’h´elium liquide est transf´er´e directement dans le bain du haut. Une vanne pointeau permet de contrˆoler le d´ebit du compartiment du haut vers celui du bas. Un chauffage r´ealis´e `a l’aide d’un fil de manganin situ´e dans le vide d’isolation permet de r´eguler la temp´erature entre 1.5 K et 300 K. Les capteurs de temp´erature sont des r´esistances de type CERNOX. La temp´erature est mesur´ee et r´egul´ee avec un contrˆoleur de temp´erature LAKESHORE 370.

3.2.3.1 R´efrig´erateur `a dilution :

Le principe du r´efrig´erateur `a dilution a ´et´e ´enonc´e pour la premi`ere fois en 1951 [102]. Cette technique permet d’atteindre des temp´eratures de l’ordre du millikelvin. La gamme de temp´erature ainsi explor´ee est plus basse que celle atteinte par syst`eme `a circulation d’3He (Tmin ∼ 300 mK) ou d’4He pomp´e (Tmin ∼ 1 K). Le principe de refroidissement est bas´e

sur une propri´et´e particuli`ere du m´elange3He −4He. La figure3.4repr´esente le diagramme de phases du m´elange.

Figure 3.4 – a) Diagramme de phases du m´elange3He −4He [103]. b)Sch´ema d’un cryostat

`a dilution [104]. Point : phase dilu´ee, croix phase concentr´ee.

En dessous de T = 0.7 K et pour une certaine concentration d’3He, le m´elange se s´epare en deux phases : une phase dilu´ee (D) et une phase concentr´ee (C) en 3He. A une temp´erature inf´erieure `a 100 mK, la phase dilu´ee contient environ 7% d’3He et la phase concentr´e 100%. A pression constante, l’enthalpie de ces atomes d’3He est plus grande dans la phase dilu´ee que dans la phase concentr´ee.

3H

D 3HC = 82 T2J/mol (3.3)

Le principe de la dilution est de faire circuler des atomes d’3He de la phase riche vers la phase dilu´ee. A chaque fois qu’un atome traverse l’interface, il absorbe une partie de la chaleur de la phase dilu´ee.

La figure 3.4 repr´esente le principe de circulation du r´efrig´erateur `a dilution. Venant de la pompe, l’3He gazeux se condense sur le pot maintenu `a basse temp´erature en pompant sur un bain d’4He. Il se refroidit ensuite sur l’´evaporateur (bouilleur) et passe par une s´erie d’´echangeurs thermiques et rentre dans la chambre de m´elange o`u a lieu la dilution. Par diff´erence de pression osmotique, l’3He peut remonter jusqu’au bouilleur o`u il sera pomp´e avant d’ˆetre `a nouveau r´einject´e.

Figure 3.5 – Sch´ema et photographie du r´efrig´erateur `a dilution (d’apr`es Marc Nardone).

Le r´efrig´erateur que nous utilisons est unique (fig. 3.5). Il a ´et´e con¸cu et assembl´e par Marc Nardone (LNCMI). Les contraintes li´ees au fonctionnement d’une dilution en champ puls´e sont :

– le peu de place au centre du champ. Le diam`etre int´erieur du cryostat h´elium est de l’ordre de 19 mm et il doit contenir la chambre de m´elange 3He et4He.

– l’impossibilit´e d’utiliser du m´etal dans la zone proche du champ.

0 30 60 90 0 300 600 900 T ( m K ) Puissance (µW)

Figure 3.6 – Courbe de puissance frigorifique du r´efrig´erateur `a dilution.

La figure 3.6repr´esente la courbe puissance obtenue pour ce r´efrig´erateur `a dilution en fonction de la temp´erature du bain. Lors de nos exp´eriences, la puissance dissip´ee par les cantilevers est de l’ordre de la dizaine de microwatts. Cette puissance a donc un impact sur la temp´erature limite de l’´echantillon (voir 3.4).

3.3

Mesure du couple magn´etique avec un cantilever sous