• Aucun résultat trouvé

Approches psychopédagogiques de la carte:

APPRENDRE LA CARTE, APPRENDRE AVEC LES CARTES.

3.1. Des didactiques de la carte à l’école primaire.

3.1.1. Approches psychopédagogiques de la carte:

En replaçant les apprentissages cartographiques dans le cadre d'une progression "de 6 à 19 ans", Jacques Mauduy fourni des informations qui illustrent sa de volonté de promouvoir la pratique du croquis cartographique : « Une des finalités de l'enseignement est, sans doute

de préparer l’élève à la synthèse : le croquis est un outil essentiel. » 194

3.1.1.1. Des étapes psychologiques dans l'apprentissage du croquis

Sa programmation de l'apprentissage du croquis en géographie du cours préparatoire à la Terminale est fort traditionnelle en ce qui concerne le C.P. et le C.E.

"Au C.P. : Se repérer en un milieu proche, vues obliques et de dessus, passage au plan; dessin après une visite, prise de repères, réduction du réel vers la (lointaine) notion d’échelle; trajets autour de l’école, dans le quartier et, parfois trajet pour "aller en vacances...".

Au C.E. : Découverte progressive du globe, de la mappemonde, du planisphère et des cartes à différentes échelles; vers une véritable représentation en plan; introduction de l’échelle au plan concret (un objet de référence comme échelle); rapports visualisés entre les symboles des croquis géographiques et la réalité..."

Jacques Mauduy On notera que le globe et le planisphère ne sont introduits qu'au cours élémentaire. La carte de France n'est qu'occasionnelle au cours préparatoire.

"Au C.M. : Acquisition de la représentation en plan; apprentissage du croquis descriptif et de la légende et ses principes: réduction, pertinence, classement; apprentissage de la reproduction de cartes données: les couleurs et leur signification visuelle (symbolique du type rouge = habitat pavillonnaire = diapositives ou sortie pour découvrir cette réalité) savoir utiliser du papier calque pour reproduire un modèle, savoir présenter les dessins, croquis, croquis descriptifs, reproductions de cartes données: cadre, titre, légende rapide, écriture normalisée...). Établir des liens de causalité sommaires."

Jacques Mauduy L'accent est mis sur la copie bien faite plus que sur le croquis outil d'analyse. Situation inverse de celles que nous rencontrerons avec les "modèles" de Maryse Clary et Robert Ferras. La logique de la classification des expressions cartographiques ou "péri- cartographiques" proposée par Jacques Mauduy montre bien que vers 10-11 ans c'est la rigueur de la représentation qui est son objectif dominant.

- Type 1 (de Jacques Mauduy) : Le dessin représentation, perspective naïve puis géométrique, les illustrations fournies proviennent de travaux d'enfants de 5 à 7 ans.

- Type 2 : Le croquis d'interprétation (d'un paysage, d'une diapositive).

194

- Type 3: le plan, la représentation en plan, puis le plan rigoureux. Des croquis de collégiens précoces (10 ans en 6ème et 11 ans en 5ème) illustrent ce niveau de performance.

Jusqu'au type 7 "le spatiogramme", qui porte sur le programme de Terminale. Il n'y a pas explicitement d’étapisme, mais une telle logique pourrait s'en dégager.

On pourrait pousser la logique qui tend à isoler le "faire" des cartes, des croquis du "lire" des cartes, (ce que ne dit pas l'auteur) jusqu’à ne présenter des cartes et des plans qu'aux élèves les plus âgés, capables de plans "rigoureux". Le chapitre suivant195 montrera des activités de lecture de cartes avec des enfants de 5 ans qui ne semblent pas incompatibles avec les types de croquis montrés par Jacques Mauduy, mais qui vont bien au-delà de leurs capacités à faire des croquis.

Isoler ma lecture de la carte et la confection de croquis est une technique d’observation, mais elle empêche de rechercher des types de compétence cartographiques.

Ce qui n'empêche pas de rechercher des types de compétences cartographiques.

On peut alors s'interroger : dans quelle mesure ces types correspondent-ils à des étapes du développement de l'enfant et sont-ils relativement fixes et incontournables ? Il s’agirait alors de stades différenciés qui devraient être éclairés par la dimension psychogénétique. Ceci semble implicite dans les croquis communiqués par l'auteur.

Figure 61. Croquis publié par Jacques Mauduy, op cit.

Visite d’une exploitation agricole (pépinière urbaine) vue par un enfant de 5 ans Type 1 (Jacques Mauduy). Enfant de 5 ans.

- La voiture, la maison sont vues de face sur le dessin.

195

- L’allée, les champs, utilisés pour leur surface horizontale et vus du dessus sont représentés en plan

- Une fleur souligne la poésie et la subjectivité de la démarche. -

Figure 62. Croquis publié par Jacques Mauduy, op cit.

Même visite d’une exploitation vue par un enfant de 6 ans (les notes sont relevées par le maître sur les indications de l’élève)

Type 1 (Jacques Mauduy). Enfant de 6 ans.

- À cet âge aussi, les objets en plan ou de face sont mêlés. Une voiture est représentée à a fois vue de dessus et de côté

- De mignonnes petites fleurs, plus grandes que les portes des maisons apportent leur touche de poésie enfantine.

- Mais au total, le nombre d’objets relevés et dessinés est bien plus important que dans le dessin précédent.

Figure 63. Croquis publié par Jacques Mauduy, op cit.

Même visite d’une exploitation vue par un enfant de 7 ans maîtrisant l’écriture, la représentation en plan n’est pas complète

Type 1 (Jacques Mauduy). Enfant de 7 ans.

- L'ampleur relative de l'espace de la pépinière est mieux perçue, la place occupée par les bâtiments se restreint donc.

- Le codage est plus important: soit par recours à l’écrit, soit par utilisation d'un seul trait pour représenter une route.

- Les maisons s'alignent le long des voies et en épousent les formes; mais restent plantées comme des décors de théâtre.

3.1.1.2. "Enfance des cartes, cartes d'enfants" (Jacques Wallet)196

Ces cartes d'enfants nous rappellent par de nombreux aspects les cartes anciennes. Les maisons représentées par leur façade couvrent le plan de "Bâle", premier plan connu de Paris. Des personnages exotiques, à l'instar des petites fleurs, peuplent les anciens portulans. S'agit-il, pour ces cartes anciennes d'une incapacité intellectuelle à penser le monde en plan, on ne peut guère le croire, vues les compétences des architectes de ces époques.

Figure 64. Plan « de Bâle » : Paris en 1550

196 Wallet J., « Enfance des cartes, cartes d'enfants », Journal des Instituteurs, n°5, Nathan, janvier, 1988,

Il faut alors penser à un souci psychologique, celui de présenter l'aspect familier ou poétique du monde avec les façades des maisons et des objets et personnages remarquables chargés de symbolique.

On peut ainsi dresser un parallèle entre l'histoire de la carte et la genèse des compétences cartographiques chez l'enfant. Cela ne réduit pas nos ancêtres au niveau de développement intellectuel d'enfants du cycle 2; mais pour permettre de comprendre l'importance majeure de la fonction poétique, sentimentale dans les croquis et l’efficacité sémiotique des signes de la carte qui conservent l’image de l’objet, telle qu’elle se présente à l’observateur du paysage.

La dimension affective se retrouvera si on étudie la question de la décentration psychologique. Dans les cartes anciennes nombrilistes on voit le disque terrestre s'organiser autour de Jérusalem. Dans les cartes d'enfants les éléments sont représentés en fonction de leur importance aux yeux de celui qui se pense encore un peu comme le centre de son monde.

Le parallèle entre l'histoire des cartes et le développement des apprentissages cartographiques peut ainsi être prolongé, mais il ne faut pas oublier que nos ancêtres (et leurs enfants) ne connaissaient que leur mode d'expression cartographique, alors que nos élèves d'aujourd'hui confrontent leurs réalisations aux cartes d'adultes du vingtième siècle.