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Dix-sept années de crise (1880-1897)

2.Un paysage associatif complexe et troublé 2.1 La difficile transition des années 1870

2.2 Dix-sept années de crise (1880-1897)

La rivalité entre la Société Universelle et la Société d’Appui Fraternel semble se dévoiler au grand jour, après la mort de Ferdinand Berthier. Les racines de cette rivalité semblent se trouver dans la mésentente entre Ferdinand Berthier et Jules Imbert (1815-1885), mésentente qui se trouverait dans une divergence de la conduite des affaires de la communauté et de l’attitude à tenir :

« Imbert n’admettait pas, en principe, que les quatre indispensables qui, comme nous le disions plus haut, étaient chargés, à l’Institut Royal de la rue St Jacques, de donner des leçons de morale aux enfants sourds-muets, se mêlassent aux affaires des adultes et dirigeassent leurs pas dans la vie sociale. » 162

Ainsi apparaît en filigrane un conflit idéologique, entre le groupe de professeurs qui veille à la dignité morale de la communauté sourde, et les jeunes qui veulent faire évoluer la communauté vers une nouvelle voie. Sur ce conflit idéologique entre conservateurs et républicains se greffe un autre conflit, assez important dans cette période, et qui ne se trouve pas exclusivement au sein de la communauté sourde, mais également dans la société française : la question de la place de l’Eglise dans la société. Ainsi apparaît un conflit entre les traditionalistes et les anticléricaux. On voit là un impact de l'évolution et des débats sociaux français sur la petite communauté sourde. Le conflit entre la Société Universelle et la Société d’Appui se pose essentiellement à propos de l’implication des professeurs dans la vie au quotidien , et par conséquent, des limites de cette implication.

Lucien LIMOSIN, « Les enfants sourds réduits à essuyer les haleines puantes des Chevaliers de l’Articulation », La

161

Défense des Sourds-Muets, juillet 1886, n°19, p 67

Joseph COCHEFER, « Histoire des sociétés de sourds-muets jusqu’à nos jours », Echo de la Société d’Appui

162

Comment déterminer alors les bornes de l’implication du professorat Sourd dans la vie privée du Sourd ? Par extension, on assiste également à une interrogation sur la place de la femme Sourde. Faut-il reconsidérer sa place selon les évolutions sociales des années 1880, ou maintenir la tradition qui consiste à les exclure des banquets ?

Cochefer a tenté de convaincre Berthier, entre 1875 et 1884, de laisser entrer des femmes. Mais, le vieil homme a refusé, craignant que les banquets, lieux traditionnels de débats et de discussions, ne soient transformés en bals, et donc, en lieux frivoles à ses yeux. Ce refus ferme entraîne, de la part de Cochefer une décision de rupture : l’organisation d’un banquet parallèle en 1885 par la Société

d’Appui Fraternel, où l’on assiste pour la première fois, à une présence féminine. En effet,

Cochefer, le président-fondateur de la Société d’Appui, est un républicain déclaré, anticlérical, en coopération avec Lucien Limosin. Leurs attaques directes contre Ferdinand Berthier, conservateur et croyant, sont en fait des critiques contre l’Association amicale qui est considérée comme un foyer de conservateurs empêchant l’émancipation de la femme sourde. Cette opposition idéologique sur la question de la femme sourde est l’une des causes de la crise dans laquelle est plongé le mouvement associatif sourd français, entraînant son retard par rapport à ses voisins européens. Cette affaire semble avoir également entraîné la reprise des banquets de Juillet par la Société d’Appui fraternel en juillet 1882, après une éclipse de 18 ans, depuis le dernier banquet Imbert en 1866 , 163

Par conséquent, la Société d’Appui fraternel , dans ce contexte, essayant de se trouver une place au sein de la communauté sourde, tente de bousculer l’Association amicale sur le déclin après la disparition de Berthier en 1886 et de Lenoir en 1887. Cette tentative de bousculade repose sur un positionnement idéologique vis-à-vis de la religion. Avec ces éléments, on comprend mieux le principal motif de l’organisation de deux banquets parallèles dès 1884, l’un qui dispose de convives féminins, et l’autre qui n'en dispose pas, au nom des convenances sociales. Mais, d’autre part, l’absence d’implication du professorat sourd parisien sur la question éducative et donc, la préservation de la langue des signes semble avoir été la goutte supplémentaire qui a fait déborder le vase déjà plein de récriminations des « non-enseignants » sourds envers leurs professeurs.

s.n. « Chronique des sociétés », Revue des Sourds-Muets, mai 1907, 2eme année, n°1, p 11

Ainsi, l’indignation de certains Sourds de province conduit, en 1884, à la création de la Défense du

Sourd-Muet, et à attaquer cette «acclimatation» en présentant des faits, des témoignages, et même

en publiant des tribunes assez violentes contre les promoteurs de la méthode orale pure que sont Oscar Claveau et Adolphe Frank. Cette révolte est survenue dans un contexte particulièrement difficile pour le mouvement sourd moribond de cette époque. En effet, les disparitions de Ferdinand Berthier, en 1886, et d’Auguste Lenoir, en 1887 marquent la fin d’une génération connue pour avoir été brillante Elle est surtout, la première qui ait agi en faveur de la communauté, en organisant des banquets annuels, et en fédérant les énergies dans une lutte, d’abord contre les préjugés, mais également pour la préservation de la langue des signes. Mais qui l’âge avançant, elle semble avoir freiner les initiatives des nouveaux venus, ce qui explique les reproches de la génération née dans les années 1855-1865.

La mort de Berthier, déclencheur d’une crise ouverte


Néanmoins, des efforts de conciliation ont été entrepris du vivant de Berthier. Ainsi, cinq mois avant sa mort, Ferdinand Berthier a écrit, par l'intermédiaire du secrétaire adjoint de la Société

Universelle, Ernest Endrès, au rédacteur de La Défense du Sourd-Muet:

« M.Ferdinand Berthier, doyen honoraire des professeurs sourds-muets, tient beaucoup à voir régner l’union fraternelle parmi tous les sourds-muets

Il espère qu’un pareil voeu sera apprécié par vous.

Recevez, Monsieur le Rédacteur, mes civilités empressées» 164

Mais la crise semble avoir empiré après la mort de Ferdinand Berthier. En effet, un témoignage de Lucien Limosin, l’un des membres les plus virulents de la Société apporte un éclairage troublant sur la situation. Il explique, dans un article, les efforts conjoints entre Ferdinand Berthier et Joseph Cochefer pour tenter de calmer la crise naissante entre La Société d’Appui, et La Société

Universelle, et pour mettre fin aux divisions et aux oppositions existantes au sein de la communauté

sourde, depuis une cinquantaine d’années :

«Et je ne reconnaîtrai à personne le droit de me contraindre à mettre sous le boisseau, les plus noires turpitudes commises par les ennemis déclarés de la florissante Société

d’Appui fraternel. C’est à eux, qu’incombe toute entière la responsabilité d’avoir

déjoué, par la démolition de la Société universelle et par la création de l’Association

amicale, notre projet de grouper en un seul faisceau tous les Sourds-Muets, sous la Ernest ENDRES, « Correspondance », Defense des Sourds-Muets, n°16, avril 1886 p 37

dénomination de la Société Universelle d’Appui fraternel. Ce projet approuvé par Cochefer, et appuyé par Berthier devait mettre fin un terme aux discordes qui divisent le peuple sourd-muet depuis 1830.» 165

Ainsi, Lucien Limosin accuse la nouvelle équipe de l’ancienne Société Universelle d’avoir fait échouer les efforts de conciliation en faisant changer le nom de l’association. La principale question qui se pose est de savoir si l’accusation de Limosin est fondée, puisqu’elle vise justement Victor-Gomer Chambellan, et Ernest Dusuzeau. Chambellan étant devenu président de l’Association en 1887, son rôle dans cette crise semble être central bien que peu compris. D’autre part, Joseph Cochefer apporte une explication partielle, et partiale, quant aux raisons de cette inertie. Pour lui, c’est la responsabilité de quatre personnes, les «quatre indispensables» qui auraient tout 166

verrouillé, et empêché des initiatives personnelles de développement et de fondation de nouvelles sociétés sourdes. Voici ce qu’il en dit :

«Les partisans de Berthier eux-mêmes n’en contestent pas l’authenticité, et ne cachent pas leur regret qu’on ait laissé trop longtemps les rênes de la société entre ses mains...»

Cochefer, pour appuyer son argumentation, cite un extrait du discours de Théobald, professeur sourd à Chambéry et à Paris, qui a fait cette déclaration, le 27 mai 1888 :

«... Mais, on eut le tort de s’en remettre à un seul homme, de voir en lui l’homme

indispensable, la clef de voûte de l’édifice, et lorsque l’âge eût terrassé cette grande

intelligence, la Société fût sur le point de disparaître avec lui.» 167

Ces extraits issus du journal, Echo de la Société d’Appui Fraternel, semblent montrer le caractère incontournable de Ferdinand Berthier dont la disparition semble avoir plongé la Société Universelle dans des difficultés de succession. Cependant, les écrits de l’Écho sont également l’occasion de critiquer ses rivaux directs, et donc de pointer leurs insuffisances, comme s’ils s'étaient avérés incapables de s’organiser en l’absence de Berthier. Joachim Ligot, de son côté, défend le bilan de Berthier en déplorant ces critiques :

Lucien LIMOSIN «Nos ex-souteneurs de la Méthode allemande», Echo de la société d’appui fraternel, 1er février

165

1891, troisième année, n°14, p. 8.

Joseph COCHEFER, «Histoire des sociétés de S.M jusqu’à nos jours», Echo de la société d’appui fraternel, avril

166

1890, n°8, p 8.

Joseph THEOBALD, in Joseph COCHEFER, « Histoire des sociétés de Sourds-Muets jusqu’à nos jours », Echo de

167

« …, il a beaucoup fait pour ses frères d’infortune, il a bien mérité du peuple sourd-muet. Par conséquent, c’est pour nous un devoir rigoureux d’honorer sa mémoire. D’aucuns prétendent avoir en à se plaindre de lui comme président de la Société Universelle des Sourds-Muets; j’ignore ce qu’il y a de fondé en cela et veux l’ignorer, mais tout homme qui réussit à s’élever, par son intelligence, au-dessus des autres, a inévitablement des envieux, roquets hargneux qui, aboyant à ses trousses, cherchent à détruire sa gloire dans l’espérance qu’une partie en remaillait sur eux. Leur espoir sera déçu. » 168

Cependant, il est clair que la mort de Ferdinand Berthier semble avoir brisé nombre de tabous, tel celui de la présence féminine lors des banquets annuels. Mais elle permet à la crise de devenir nettement plus visible au travers de la presse sourde, où les critiques, voire les accusations, se font désormais au grand jour, dans La Défense du Sourd-Muet tout d'abord puis dans L’écho de la

Société d’Appui fraternel.

Les relations difficiles entre les deux sociétés rivales se complexifient, puisque l’on retrouve une opposition entre les enseignants parisiens déchus, quasiment tous membres de l’Association

Amicale, et certains de leurs anciens élèves, membres de la Société d’Appui. On trouve là une

opposition de générations, à l’exemple d’Henri Gaillard, qui est au départ membre de l’Association, jusqu’à ce qu’un conflit l’opposant à Victor-Gomer Chambellan le contraigne à quitter cette association pour la Société d’Appui et à contribuer à la fondation de L’Echo. Or, à mesure que 169

L’Echo devient de plus en plus dur dans ses critiques, Gaillard décide de la quitter pour revenir

dans l’Association, et contribue à sa transformation interne, comme son ouverture aux femmes sourdes L’on note la présence de femmes, pour la première fois, en 1893, au banquet annuel de l’Association, et la présence de Gaillard lui-même dans ce même banquet auquel il n’etait plus revenu depuis 1889 . 170

Or, un troisième groupe fait irruption dans cette affaire, il s’agit d'un groupe d’indépendants. Lassés de voir la crise durer, ils se sont constitués en une Ligue pour l’Union amicale des Sourds-Muets, fondée en 1886, afin de permettre à ceux qui sont restés à l’extérieur de la polémique de ne plus

Joachim LIGOT, Abbé de l’Epée, 1ere année, n°4, 15 Juin 1888, p. 52.

168

Henri GAILLARD, Echo de la société d’appui fraternel, n°3, 1er Juin 1889, p 5.

169

Manuscrit, Registre des procès-verbaux des réunions annuels des sourds-muets, 1867-1907.

faire de choix entre les sociétés rivales. Son président est Eugène Graff (1866-1935), natif de Besançon. Victor Colas, artiste de renom précise à nouveau l’objectif principale de la Ligue :

« La Ligue n’a d’autre but que de réunir une fois par an tous les membres de la famille sourde-muette, sans distinction d’opinion et sans s’occuper à quelle fraction ils appartiennent pour qu’ils célèbrent ensemble cette grande date du 24 novembre. » 171

Ainsi l’arrivée de la Ligue, en 1886, redistribue en partie les cartes de la primauté de l’organisation des banquets. En effet, à partir de 1890, une entente s’est formé entre l’Appui et la Ligue afin que cette dernière soit en charge du banquet annuel. On assiste, entre 1890 et 1893 à une situation bloquée entre ceux qui rejettent totalement la religion, et d’autres qui, selon les positions, la respectent ou la vénèrent. Ainsi, il semble que durant cette période précise, la question de l’éducation des enfants sourds soit en partie oubliée par ces querelles internes. En effet, les articles des journaux de la communauté laissent montrer un oubli progressif depuis le congrès de Paris, en 1889, de cette question et les débats sont nettement dominés par la rivalité entre les deux associations.

Le rôle central de Henri Gaillard

Durant la Crise des Banquets, on note le rôle central d’Henri Gaillard qui a opéré des choix cruciaux. Tout d’abord, en poussant l’élection d’Henri Genis (1835-1928), personnalité plus conciliante, à la présidence de l’Association Amicale, en remplacement de Victor-Gomer Chambellan, plus contesté, et ensuite, en promouvant le développement d’une presse sourde plus neutre, avec la fondation du Journal des Sourds-Muets, en 1893. Ainsi, Gaillard semble avoir pris la mesure de la profondeur de la crise, et du retard accumulé par la communauté sourde française en ce qui concerne l’accessibilité sociale. Et il va s’en rendre compte, lors du congrès de Chicago, où il déplore ce retard, en découvrant les progrès accomplis par la communauté sourde américaine sur les plans associatifs, sociaux et éducatifs, en dépit d’un contexte difficile, avec l’influence croissante d’Alexander Graham Bell (1847-1922) qui milite pour l’éducation orale exclusive.

La volonté de Henri Gaillard est de mettre fin aux discordes internes qui reposent principalement sur des rancunes anciennes et des divergences politiques. Son objectif est de permettre une convergence des différentes tendances idéologiques de la communauté sourde autour d’un intérêt

« Anniversaire de la naissance de l’abbé de l’Epée », Echo de la Société d’Appui, p 2, 1er février 1891.

commun : la préservation du Noétomalalien et sa transmission auprès des nouvelles générations. La situation est d’autant plus urgente que le congrès de Chicago a éclairé les militants sourds français sur le retard accumulé par la France sourde par rapport à ses voisins, et surtout l’avance prise par les sourds américains.

Ce retard les embarrasse d’autant plus qu’il est principalement dû, non pas à un refus des gouvernements de prendre en compte les revendications des Sourds, mais bel et bien à la division interne, et à l’absence d’actions auprès des politiques afin de faire évoluer la situation en leur faveur. Par conséquent, Gaillard s’est rapproché d’une personnalité de premier rang, Paul Deschanel (1855-1922), certainement par l’intermédiaire de relations du monde littéraire comme Francisque Sarcey qui a assisté à une représentation théâtrale organisée par Henri Gaillard, avec le Comité des

Sourds-Muets mimes, constituée en 1891.

Or, un fait d’ordre privé entraîne d’importantes difficultés au sein de la communauté. Au retour du congrès de Chicago, la décision de faire jeu commun, entre la Société d’Appui et l’Association

Amicale, sur l’influence de Henri Gaillard, provoque une réaction imprévue de la part d’un groupe

d’indépendants qui se regroupent en Union Française des Sourds-Muets.

Par conséquent, bien que la paix semble s’établir entre les principales associations en 1894 et ouvre la voie à la naissance de la Fédération des Sociétés de Sourds-Muets, la querelle Gaillard-Chazal atteint son paroxysme durant la même période avec l’embrassement survenu lors de la visite de Edward Hopkins Gallaudet en France, en 1897, à qui Joseph Chazal, secrétaire de l’Union

Française des Sourds-Muets, écrit directement pour se plaindre de l’organisation de l’Alliance Silencieuse, et surtout de Henri Gaillard que l’auteur qualifie de « triste personnage » ayant 172

mendié « le concours de notre société pour vous recevoir dignement ». Les conditions de la remise de cette lettre en plein milieu d’un banquet ont été détaillées dans le Journal des Sourds-Muets , 173

où l’auteur de l’article conclut par :

« Tout de même, que pensez-vous, chers frères de ces inconscients qui étalent nos querelles devant l’étranger? »

Joseph CHAZAL, lettre du 19 juillet 1897, archives Edward Millet Gallaudet, Dossier 13, boîte 12.

172

« Le Banquet Gallaudet », Journal des sourds-muets, p 126, n°58 du 15 aout 1897.

C’est ce qui dérange fortement les militants sourds français d’autant que ces discordes reposent, non pas sur des divergences idéologiques profondes mais sur des rancœurs entre personnes. C’est ce qu’a remarqué un sourd autrichien, joseph Obhlidal, dans le Taubstummen-Courier, qui déplore les divisions françaises basées sur la rivalité Gaillard-Chazal :

« Ce n’est pas la question de méthode qui est cause de cette dissension, attendu que les deux rivaux sont d’ardents défenseurs de la méthode mixte. D’après toutes les apparences, il s’agit d’une lutte pour l’hégémonie sur les autres Sourds-Muets : ce qui donne un intérêt particulier à cette concurrence, c’est que les deux adversaires sont d’anciens condisciples. » 174

C’est ce qu’a également noté Yves Delaporte quand il fait remarquer l’immixtion importante de la sphère privée dans la vie publique au sein de la communauté sourde:

« Le privé vient constamment interférer avec le public. D’autant plus que la séparation entre les sphères du public et du privé ne coïncide pas avec ce qu’elle est dans la culture française majoritaire : beaucoup de choses qui relève du privé chez les entendants sont publiquement affichées chez les sourds. Il s’ensuit qu’aucune querelle ne saurait engager seulement deux personnes : par un mécanisme de réaction en chaîne, un grand nombre d’individus et de groupes s’y trouvent rapidement impliqués, chacun apportant ses motifs particuliers de l’alimenter. » 175

Ainsi, le conflit Gaillard-Chazal interfère grandement dans la marche du mouvement associatif sourd, à un moment crucial. Cependant, deux années après l’incident du banquet Gallaudet, des efforts sont entrepris par Henri Gaillard qui a dissous le journal Le Pilori, créé expressément pour contrer les critiques du journal de Chazal, Le Sourd-Muet Illustré. La fête de l’Union Française des

Sourds-Muets, du 17 juin 1899 présente un aspect de paix. En effet, un article rédigé par un certain Passe-Partout démontre une volonté de faire la paix entre les différentes sociétés de sourds. Les

personnalités font étalage de leur réconciliation, y compris entre Gaillard et Joseph Chazal qui a été son adversaire le plus acharné176. Celui-ci est finalement employé au sein du Journal des

Sourds-Muets, la même année, trois ans après le fameux discours de Saint-Fargeau, de Deschanel.

Joseph OBHLIDAL, in Le Messager de l’abbé de l’Epée, « Charité-Paix « , 15 mars 1899, n°7, p 89

174

Yves DELAPORTE, Querelles de sourds, dans Sylvie Mougin (dir.), La querelle : histoire, ethnologie, linguistique,

175

littérature. Actes du colloque international organisé par le Centre d’étude du patrimoine linguistique et ethnologique de

Champagne-Ardenne (2-3 juin 1999). Reims, Presses universitaires, 2001 : 25-54 s.n., «La fête de l’union », Journal des sourds-muets, 15 juillet 1899, n°81, p 343

L’intervention de Deschanel

Lors d’un banquet en hommage des lois du 21 et 28 juin 1791 consacrant l’éducation des enfants sourds, au lac de Saint-Fargeau, le 26 mai 1896, Henri Gaillard déplore que l’on tienne pas compte