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Revue de littérature

2.9 Interfaces entre les couches de la chaussée

2.9.3 Analyse des déformations au niveau des interfaces

L’analyse de la distribution des déformations suivant la profondeur permet d’obtenir une caractérisation des signaux de part et d’autre de l’interface. Afin de comparer ces résultats de modélisation avec des mesures in situ, et de mieux comprendre le comportement mécanique des couches d’interface, Vulcano Greullet et coll. (2010) ont installé des capteurs de déformation de part et d’autre d’une interface. La structure de chaussée étudiée est constituée de trois couches d’enrobé bitumineux. Les capteurs ont été placés à la base de la couche 1 et au sommet de la couche 2. L’instrumentation est effectuée par carottage de la première couche de chaussée jusqu’à l’interface. Des jauges d’extensométrie ont été collées au sommet de la couche 2 dans la direction transversale et longitudinale. Une autre série de jauge a été collée à la base de la carotte de la couche 1. La structure instrumentée a été testée au manège de fatigue de l’IFSTTAR, sous une charge tridem, pour une première température de 10 °C et une seconde de 42 °C. Les signaux montrent nettement deux comportements bien distincts de l’interface en fonction de la température d’essai. Les mesures prouvent que l’efficacité mécanique de liant d’accrochage est fortement dépendante de la température des couches bitumineuses. Une discontinuité très marquée (extension à la base de la couche 1 et contraction au sommet de la couche 2) apparait lorsque la température est élevée, en particulier dans la direction transversale au mouvement de la charge. Vulcano Greullet et coll.

(2010) préconisent de poursuivre les recherches en laboratoire et sur des structures réelles afin de comprendre le fonctionnement des interfaces entre les couches bitumineuses.

2.9.4 Synthèse

Lors de la construction d’une structure routière, un liant d’accrochage est appliqué entre les couches bitumineuses pour garantir un collage entre ces couches. En fonction des propriétés du liant, de la température et de la charge, l’efficacité mécanique de ce liant d’accrochage peut varier. La distribution des déformations et des contraintes dans la structure de chaussée est dépendante de cette efficacité. Lorsque les interfaces sont modélisées collées, les critères de dimensionnement correspondent aux critères classiques utilisés dans les méthodes de dimensionnement. Lorsqu’une ou plusieurs interfaces sont modélisées glissantes, les modèles montrent une perte de la durée de vie de la chaussée et une redistribution des déformations et des contraintes dans les couches de la structure. Les conditions d’interface peuvent expliquer

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plusieurs phénomènes de rupture identifiés sur des structures réelles et dont l’approche classique de dimensionnement ne permet pas d’expliquer. La pose de capteurs de déformation de part et d’autre de l’interface permet d’analyser le comportement de celle-ci pour plusieurs conditions environnementales.

2.10 Conclusion

Les méthodes mécanistiques-empiriques de conception reposent sur le principe d’effectuer un calcul d’endommagement ou de durée de vie pour une structure donnée en ayant préalablement calculé les sollicitations internes pour des conditions de charge imposées en tenant compte des propriétés physiques et mécaniques des matériaux. L’analyse du comportement des chaussées peut être effectuée par des calculs théoriques ou par la mise en place d’instrumentation de mesure dans la chaussée. Ces deux approches sont complémentaires et montrent l’influence des paramètres de charge sur le comportement à long terme des structures de chaussées. Les risques de fissuration et d’orniérage de la chaussée sont fonction du nombre d’essieux, de la configuration des pneus, du matériau des couches et des conditions à l’interface entre le pneu et la chaussée. Les essais en vraie grandeur, combinés à des essais de laboratoire, permettent d’obtenir une caractérisation très précise du comportement mécanique de la structure. L’instrumentation des chaussées est nécessaire à une bonne analyse du comportement en petites déformations des structures de chaussées et en particulier des enrobés bitumineux. Cette instrumentation de chaussée doit cependant répondre à un nombre important de conditions afin de correctement évaluer les déformations ou les contraintes à plusieurs niveaux de la structure. Les techniques d’instrumentation du bas des couches bitumineuses sont nombreuses et sont à considérer avec un intervalle de confiance à définir pour chaque capteur. Les déformations situées proche de la surface restent très peu étudiées expérimentalement de par une difficulté marquée à pouvoir y installer des capteurs fiables et durables. Les sollicitations mécaniques combinées aux sollicitations climatiques sont très importantes et requièrent des capteurs robustes sans pour autant négliger la véracité des mesures. Les analyses théoriques de la répartition des déformations et des contraintes dans les premiers centimètres sous le pneu permettent d’expliquer plusieurs phénomènes de rupture s’exerçant proche de la surface. Les paramètres de charge et en particulier le type de pneu influencent significativement les sollicitations proche de la surface. L’analyse des interfaces

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entre les couches de la chaussée a montré que les conditions d’interface modifient la répartition des déformations sur l’ensemble de la structure. La caractérisation des déformations, de part et d’autre d’une interface entre deux couches bitumineuses, reste peu étudiée puisque les méthodes de dimensionnement considèrent un collage parfait entre les couches. Il apparait cependant que cette considération n’est pas toujours vérifiée en fonction des conditions climatiques. Une analyse de la distribution des déformations permettrait d’intégrer les conditions d’interface aux méthodes de dimensionnement. L’analyse de la réponse mécanique et l’identification des paramètres responsables de l’endommagement des chaussées doivent donc considérer la structure dans son ensemble.

Dans la littérature, il semble exister une lacune en ce qui concerne l’instrumentation des chaussées et en particulier sur l’instrumentation dans les parties hautes des couches bitumineuses et sur l’instrumentation des interfaces bitumineuses. L’accessibilité expérimentale aux déformations à plusieurs profondeurs dans les couches bitumineuses permettrait de valider les analyses théoriques d’ores et déjà effectuées à ces profondeurs critiques de la structure. Les mesures expérimentales doivent tenir compte du caractère viscoélastique des matériaux bitumineux et la littérature recommande d’effectuer des matrices expérimentales où les paramètres suivants doivent être évalués : la température de la structure, la vitesse de la charge, le tonnage appliqué à l’essieu, le type de pneu, la pression de gonflage et le nombre d’essieux. Il semble également nécessaire de pouvoir caractériser les déformations à plusieurs niveaux dans les structures de chaussée en utilisant un même type d’instrumentation. Un nouveau type d’instrumentation doit passer par des étapes de validation comprenant une analyse comparative avec les technologies existantes ainsi qu’avec des calculs théoriques effectués avec des logiciels de modélisation adaptés tels que ViscoRoute© 2.0. Considérer la performance globale d’une structure de chaussée nécessite d’analyser spécifiquement chaque mode d’endommagement et d’identifier les sollicitations susceptibles de les engendrer et cela pour un grand nombre de conditions expérimentales.

L’approche de recherche proposée vise à améliorer les connaissances sur la répartition des sollicitations proche de la surface, aux interfaces entre les couches et à la base des couches, à l’aide de mesures expérimentales et de modélisation et ainsi évaluer spécifiquement, l’effet des charges et des types de pneus.

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Chapitre 3