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3.2 Présentation du schéma de calcul

3.2.3 Ajustement de la température et de l’axial offset

La modélisation d’un opérateur fictif est primordiale dans la mesure où elle conditionne le comportement du réacteur au cours du transitoire, à l’image d’un opérateur contrôlant l’évolution du cœur sur site. Dans les REP1300 en gestion GEMMES, le bore soluble et le GRT font partie des composantes dont le pilotage est laissé à la charge d’un opérateur en situation normale (bien qu’automatisés en grande partie). Ainsi, tout comme un opérateur, nous avons fait des choix, que nous détaillons ci-après.

Premièrement, le GRT intervient avant le bore. En effet, étant donné que le GRT a pour but d’ajuster automatiquement la température du fluide primaire, il est naturel qu’il intervienne avant toute action de l’opérateur sur le bore soluble. De plus, il est commun pour un opérateur de vouloir réduire l’utilisation du bore soluble (réduction des effluents). Ce choix permet de ne pas utiliser de bore si les mouvements du GRT sont suffisants pour réguler le cœur. Le schéma 3.5 représente de façon très synthétique le déroulement des opérations.

Le GRT se déplace en premier lieu pour réguler la température du fluide primaire, puis la concentration en bore soluble est ajustée soit pour finir de réguler la température (cas où le GRT serait en limite de bande de manœuvre), soit pour l’ajuster plus finement, soit encore pour contrôler l’axial offset. La régulation de l’axial offset consiste à maintenir le dés- équilibre axial de puissance (∆I, voir Section 1.4.2.2) dans une bande comprise usuellement entre ±5% autour de la valeur de référence (qui correspond à un axial offset constant). Il y a donc une boucle «GRT-bore», englobant une «boucle GRT» suivie d’une «boucle bore». Cette possibilité de revenir ajuster le GRT après une variation du bore est nécessaire, car le bore joue plusieurs rôles. Toute la difficulté réside dans le fait que ces rôles sont parfois contradictoires : il sert premièrement à réguler la température, mais si l’axial offset est trop important, l’opérateur peut utiliser le bore soluble dans le but d’écarter la température pri- maire de la température de référence, pour qu’automatiquement le GRT se déplace afin de

Mouvement du GRT. Satisfaisant ?

Sortie

Modification de la concentration en bore soluble. Satisfaisant ?

Modification de température et d'axial offset : T dans la bande morte ?

oui non oui non non oui non Boucle GRT Boucle Bore Boucle GRT-Bore (A+S) (S) (GRT) (A+C) non

Figure 3.5 – Schéma représentant le principe du pilotage de la température moyenne modé- rateur et de l’axial offset par l’opérateur.

réguler à la fois la température et l’axial offset. Les différentes possibilités à la sortie de la boucle de bore sont donc :

— soit la configuration est satisfaisante et on sort (S)

— soit la configuration n’est pas satisfaisante, mais il n’est pas possible de faire mieux, auquel cas on sort également (A+S)

— soit la configuration n’est pas satisfaisante et requiert un nouvel ajustement de la concentration en bore (ajustement plus fin de la température) auquel cas on reste dans la boucle bore (A+C)

— soit la configuration n’est pas satisfaisante et requiert un nouveau déplacement du GRT (ajustement grossier de l’axial offset), auquel cas on retourne dans la boucle GRT (GRT)

Les abréviations utilisées sont les suivantes : «A» signifie annulation de la variation de la concentration tout juste effectuée, «S» signifie sortie de la boucle (donc fin du pas de temps), «C» signifie que la recherche continue et «GRT» signifie que l’on sort de la boucle bore pour réajuster le GRT.

Nous détaillons à présent chacune des boucles GRT et bore, ainsi que les différentes issues possibles aux tests de vérification de la pertinence des actions engagées ainsi que les cas particuliers.

3.2.3.1 Boucle GRT

Le principe de cette boucle est de comparer la température moyenne du fluide primaire à la température de référence : si l’écart est trop important (supérieur à la bande morte de température du GRT de ±0.8℃), le GRT se déplace automatiquement avec une vitesse qui

CHAPITRE 3. CONCEPTION DU SCHÉMA DE CALCUL DU RÉACTEUR

dépend de l’écart en température (Fig. 1.7). Ce déplacement est toujours suivi d’un calcul neutronique du cœur intégrant les contre-réactions et le couplage avec le générateur de vapeur, afin de calculer la température du fluide primaire et l’axial offset qui en résultent.

3.2.3.2 Boucle bore

La loi (1.1) caractérise l’évolution de la concentration en bore soluble, en fonction de la concentration en bore en sortie du réservoir d’acide borique, du volume de fluide primaire, du débit des pompes (débit RCV), de la concentration initiale dans le circuit et du temps. La grandeur importante et limitante dans cette équation est le débit des pompes d’injection. En effet, les principales limitations technologiques s’appliquent sur les pompes et il convient donc de les prendre en compte pour éviter d’atteindre des vitesses de borication/dilution excessives. Ainsi, une première estimation de la variation en bore attendu est réalisée puis convertie en vitesse de borication/dilution. Cette vitesse est comparée aux limites et réduite si besoin, puis convertie à nouveau en variation de concentration.

Le principe de l’estimation de la variation en bore se base sur la température moyenne du fluide primaire visée et de l’efficacité différentielle. Cette estimation se calcule par :

dBore= Texp− Tm EDB

avec Texp (resp. Tm) la température moyenne visée (resp. température moyenne calculée)

et EDBl’efficacité différentielle du bore soluble (exprimé en ℃ par pcm et actualisée à chaque

pas de temps grâce aux résultats du calcul neutronique). Si aucune opération n’est requise (∆I et température du fluide primaire ajustés), la variation en bore soluble est la même que celle du pas de temps précédent. Dans le cas contraire, un ajustement est nécessaire. La température moyenne visée dépend alors de la température moyenne courante, du ∆I et de la position du GRT. Elle est établie suivant les critères suivants :

i la température est en dehors de la bande morte :

i.a si le ∆I est en dehors de sa bande morte et que le GRT est en limite de sa bande

de manœuvre (∆I très positif et GRT en bas de sa bande ou ∆I très négatif et GRT en haut de sa bande), alors la température visée est juste à la limite (haute ou basse respectivement) de la bande morte par valeurs inférieures, de façon à ramener le plus possible le ∆I (on sait que le GRT ne peut pas le faire)

i.b sinon, la température visée est au milieu de la partie inférieure ou de la partie

supérieure de la bande morte, de telle sorte que le signe de l’écart en température (entre la température courante et la référence) soit conservé, ce afin éviter les oscillations autour de la température de référence.

ii la température est dans la bande morte, la priorité devient la régulation du ∆I. On

vérifie alors la position du GRT :

ii.a s’il est en bout de course (bas de la bande si le ∆I est positif ou haut de la bande

si le ∆I est négatif), on se ramène au point i.a et on vise le bord de la bande morte.

ii.b sinon, on autorise le dépassement de la bande morte (par le haut si le ∆I est

positif, par le bas sinon) et le GRT se déplace en conséquence.

iii la température et le ∆I sont dans leurs bandes mortes respectives, il est alors possible

d’ajuster finement la température : on la maintient dans une gamme plus étroite autour de la température de référence (un quart de la bande morte du GRT, on parle de

bande morte du bore pour la température), tout en conservant le signe de l’écart en température tel qu’il était lors du dernier dépassement de la bande morte (permet d’éviter là encore les oscillations autour de la température de référence, de même que les trop nombreuses actions sur le bore).

Après l’estimation de la variation de concentration en bore et avant que la modification ne soit calculée, quelques tests sont effectués. Ils permettent d’éviter de réaliser le calcul dans quelques cas :

— Si le signe de la variation en bore change d’un pas de temps à l’autre, on met fin au pas de temps (sauf si le ∆I est en dehors de sa bande morte et que le GRT n’est pas en bout de course, auquel cas on le déplace). Cela permet d’éviter les borications/dilutions successives, et augmente ainsi la robustesse du modèle.

— Si la variation en bore prévue est la même qu’au pas de temps précédent, on ne fait pas le calcul et on sort (sauf si le ∆I n’est pas dans sa bande morte, auquel cas on déplace le GRT de nouveau).

Une fois la variation en bore effective, un calcul de couplage avec le générateur de vapeur est effectué afin de connaître la température et l’axial offset qui en résultent. S’en suit une étude de cas, afin de choisir l’action à effectuer à la suite de cette modification. L’enjeu ici est de trouver une bonne configuration GRT-bore (satisfaisant un maximum de critères), sans être trop gourmand en temps de calcul, c’est-à-dire sans nécessairement chercher la meilleure configuration.

3.2.3.3 Étude de cas

Après une variation de la concentration en bore, plusieurs scénarios sont envisageables. Nous les discriminons par rapport à plusieurs critères :

— oui ou non la température moyenne était-elle dans la bande morte avant la variation de la concentration en bore ?

— oui ou non la température moyenne est-elle dans la bande morte après la variation de la concentration en bore ?

— oui ou non le ∆I était-il satisfaisant (compris entre ±5%) avant la variation de la concentration en bore ?

— oui ou non le ∆I est-il satisfaisant après la variation de la concentration en bore ? Que l’on peut résumer par les assertions «devient bon», «devient pas bon», «reste bon», «reste pas bon», à la fois pour la température du fluide primaire (Tm) et pour le ∆I. Cela

représente donc 16 configurations possibles (sans compter les cas ou l’on essaye d’ajuster plus finement la température). Le tableau suivant représente ces différents cas ainsi que les actions associées.

Tm devient pas bon Tm reste pas bon Tm devient bon Tm reste bon

∆I devient pas bon A + S A + C S A + S

∆I reste pas bon GRT (ou A + S)1 A + C S GRT (ou S ou A+C)3

∆I devient bon GRT (ou A + S)1 A + C S S

∆I reste bon A + S A + C S S (ou A+C)2

Table 3.1 – Choix des actions à effectuer suivant les différents cas Les abréviations utilisées sont définies lors de l’analyse de la Fig. 3.5.

CHAPITRE 3. CONCEPTION DU SCHÉMA DE CALCUL DU RÉACTEUR

concentration en bore soluble doit être mis en regard d’autres paramètres pour conclure sur la suite du pas de temps :

1 la température devient pas bonne et le ∆I était pas bon avant la variation : le GRT doit

se déplacer de nouveau, mais si le nombre maximal d’itérations GRT-bore est atteint, ou si le groupe de régulation est en butée, on annule la dernière modification et on sort.

2 la température et le ∆I restent bons : on sort si la température est dans la bande morte

du bore, ou on annule et on continue sinon.

3 la température reste bonne et le ∆I reste pas bon :

Si le débit RCV n’est pas à son maximum, on annule et on continue.

Si le débit RCV est à son maximum, cela signifie que le bore n’est pas suffisant pour faire sortir la température de sa bande morte et il s’agit d’une impasse. On force donc le GRT à se déplacer (s’il n’est pas en butée) pour ajuster le ∆I. Si le débit RCV est à son maximum et que le GRT est en butée, il n’est pas possible de faire mieux et on sort.

Les actions mentionnées ici sont définies de façon à remplir au mieux les attentes de l’opérateur fictif, tout en conservant un temps de calcul raisonnable.

Afin de pouvoir annuler une modification de la concentration en bore (sachant que chacune des ces modifications est suivie d’un calcul neutronique couplé avec le générateur de vapeur), un mécanisme de sauvegarde/reprise est mis en place, ce qui permet de récupérer l’état du cœur avant la variation du bore soluble.