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Chapitre 1 – Définir le e-learning par des notions adjacentes

2.3 Les différentes postures, face à la technologie

2.3.4 Accepter la technologie

Le CREDOC diffuse périodiquement un état des lieux de diffusion des technologies de

l’information et de la communication dans la société française. Ce baromètre du numérique 2016

(RESP, 2013) nous renseigne sur la rapide progression de l’équipement des français en services

de télécommunications et produits technologiques, même si elle progresse moins vite que par le

passé. Parmi les faits marquants :

 L’équipement en téléphonie mobile fait désormais figure d’équipement de référence et

dépasse aujourd’hui de 5 points celui en téléphonie fixe (93% vs. 88%).

 Le multi-équipement en téléphonie est la norme en France avec plus de huit personnes

sur dix équipées d’un fixe et d’un mobile (81%).

 L’équipement en ordinateur est relativement stable depuis 2012 (82%) tandis que la

proportion de connexion à internet à domicile affiche une progression continue (85%, +2

points).

 Les équipements nomades, tablettes tactiles et smartphones, qui se démocratisent à un

rythme soutenu, respectivement +5 points et +7 points. Quatre Français sur dix sont

désormais équipés en tablette et 65% ont un smartphone (cf. Figure 28). Pour la première

fois, la situation la plus répandue est le triple équipement en

ordinateur-tablette-smartphone (30%, +5 points), devant le double équipement ordinateur-ordinateur-tablette-smartphone (29%,

+2 points). Seuls 11% des individus ne disposent d’aucun de ces trois équipements (-3

points) - avant 2003

33

(en pointillés).

Figure 28 - Taux d’équipement en téléphonie, ordinateur et internet à domicile, CREDOC 2016

 La forte diffusion des smartphones (en 2015, 84 % des téléphones vendus sont des

smartphones contre 77 % un an plus tôt), dont disposent aujourd’hui deux Français sur

trois, s’accompagne d’un essor des pratiques digitales depuis un téléphone mobile.

L’équipement numérique fait converger différents services vers des canaux de diffusion

unique et de plus en plus mobile.

 Sans exception les usages d’internet étudiés sont également en hausse par rapport à 2015.

Ainsi parmi les personnes interrogées :

o 60 % ont effectué des achats en ligne (+5 points en un an). À mesure que les achats

en ligne se démocratisent, les freins à l’achat évoluent. La sécurité des paiements

reste le premier frein aux dépenses en ligne (36 %) mais il est beaucoup moins

souvent évoqué que par le passé (-13 points par rapport à 2004) tandis que le besoin

de bien voir ou toucher les produits (27 %) se fait de plus en plus ressentir (+8 points

par rapport à l’an dernier). La livraison à domicile est le mode de réception le plus

répandu des achats en ligne : 63 % des e-acheteurs déclarent le préférer ;

o 56% sont membres de réseaux sociaux, une pratique désormais majoritaire et en

constante progression (+4 points). Parmi les personnes de moins de 40 ans, 84 %

utilisent les réseaux sociaux ;

o 55 % utilisent internet pour écouter ou télécharger de la musique (+4 points) ;

o 35 % téléphonent grâce à un logiciel de type Skype, ou Google Hangouts depuis la

connexion internet fixe (+2 points) ;

o Enfin, 14 % ont utilisé internet pour se former (dans le cadre d’un programme

de formation). L’opinion est plus mitigée : un peu moins d’une personne sur

deux pense qu’internet est un bon outil pour cela (+7 points par rapport à 2001).

Figure 29 - Les usages d’internet

Indubitablement, l’année 2016 est marquée par une très nette intensification des usages

numériques. Une proportion croissante de la population (65 % des Français, +11 points par

rapport à 2009) pense d’ailleurs qu’avoir accès à internet est important pour se sentir intégré dans

notre société.

Néanmoins, la même enquête précise qu’environ 15 % des adultes se sentent incapables

d’entreprendre des démarches administratives en ligne. Le fait de disposer, à domicile, d’une

connexion à internet s’avère un préalable : plus de la moitié des personnes non équipées se sentent

incapables de réaliser une démarche administrative en ligne. Ces adhésions varient fortement en

fonction des différents descripteurs sociodémographiques. En particulier :

 Les moins de 40 ans sont les plus enthousiastes. Le sentiment d’être à l’aise avec ces

pratiques et que cela simplifie les démarches diminue fortement et régulièrement à partir

de 40 ans (-15 points entre 40 et 60 ans). La question de savoir s’il est plus facile de

contacter les administrations est moins corrélée à l’âge – la baisse ne s’opère qu’à 60 ans

(et non à 40 ans) et elle est beaucoup moins sensible.

 Plus l’enquêté est diplômé et plus il a un avis positif sur l’administration en ligne (plus

de 50 points d’écarts entre non diplômés et diplômés du supérieur sur le sentiment d’être

à l’aise avec ce genre de démarches, par exemple).

 Le lien avec le niveau de vie est un peu moins fort, mais ce critère est tout de même

significatif puisque de 20 à 25 points d’opinions favorables séparent les personnes

disposant de bas revenus de celles ayant des hauts revenus.

Les français ne sont pas tous équipés de la même manière et présentent une aptitude différente à

l’usage des technologies. Ce n’est pas la même chose de souhaiter utiliser un smartphone pour

jouer, que d’imaginer utiliser une tablette pour se former. Il convient donc de veiller à faire

accepter la technologie auprès de tous les publics concernés.

Davis, Bagozzi et Warshaw (1989) ont développé un modèle d’acceptation de la technologie – à

partir du modèle de l’action raisonnée

34

- dans le cadre de la prédiction de l’acceptabilité d’un

système d’information. Ce modèle s’appuie sur deux facteurs :

 La perception de l’utilité : L’apprenant croit-il que l’utilisation du e-learning améliore

ses performances d’apprenant ? Le formateur voit-il dans le e-learning un moyen

d’accroître ses compétences ou ses moyens de performer ?

 La perception de la facilité d’utilisation : L’apprenant est-il convaincu que ses efforts

sont minimisés ? Le formateur est-il confiant dans sa capacité à maîtriser aisément les

fonctionnalités du dispositif ?

Tricot et al. (2003) propose un schéma, adapté des travaux de Nielsen (1993) pour rendre compte

de l’acceptabilité pratique, par l’emboitement des concepts d’utilité et d’utilisabilité, ainsi que

des dimensions qui leur sont associées :

34 La théorie de l’action raisonnée (Theory of Reasoned Action) est un modèle qui provient de la psychologie sociale. Ce modèle développé par Fishbein et Ajzen (1975) définit les liens entre les croyances, les attitudes, les normes, les intentions et les comportements des individus. Selon ce modèle, le comportement d’une personne serait déterminé par son intention comportementale à l’adopter. Cette intention serait quant à elle déterminée par l’attitude de la personne et par ses normes subjectives relatives au comportement en question.

Figure 30 - L’acceptation passe par la conviction de l’utilité et de l’utilisabilité (Tricot et al., 2003)

Bandura (1986, 1997) a défini la théorie selon laquelle plus un système est facile à utiliser, plus

l’utilisateur développe le sentiment d’auto-efficacité. Réciproquement, Davis, Bagozzi et

Warshaw montrent que la perception de facilité d’usage influence significativement l’envie

d’utilisation. Surtout, ils concluent que l’élément le plus influent reste le sentiment d’utilité de

l’outil.

Figure 31 - L’acceptation de la technologie, d’après le modèle de Davis, Bagozzi et Warshaw (1989)

Aussi, les efforts de légitimation des dispositifs technologiques semblent déterminants pour

permettre leur usage. Dans le cas du e-learning, les avantages et opportunités exploitables

doivent être présentés invariablement.

D

EUX NOUVELLES CRAINTES

:

L

’«

UBERISATION

»

ET LA

«

KODAKISATION

»

En 2014, le publicitaire Maurice Levy introduit le néologisme « ubérisation

35

» pour

qualifier le phénomène de mise en relation directe et instantanée des clients avec des

professionnels, notamment grâce aux nouvelles technologies. Pour beaucoup, ce

bouleversement est source de déclassement du métier ou de l’entreprise, en déplaçant la

chaîne de valeur. On peut supposer qu’en matière de formation continue pour adulte, à

l’instar des compagnies de taxi, le e-learning puisse participer – pour certains acteurs – à ce

sentiment de dégradation, de déclassement. Même si le raccourci est contestable, la mise en

relation directe de l’apprenant à l’offreur de formation et de services en ligne peut faire

craindre une perte de marché pour les organismes de formation traditionnels. Pour les plus

35 Inspiré de l’entreprise Uber® qui développe et exploite des applications mobiles de mise en contact d'utilisateurs avec des conducteurs réalisant des services de transport.

réfractaires (à l’usage des technologies), les disrupteurs (cf. définition en annexe 16), une

autre menace hante les plus pessimistes : celle de la « kodakisation », nouveau néologisme

inspiré de la mésaventure qu’a connue l’entreprise KODAK®, voyant son marché (et ses

revenus) de la photographie papier, en situation de quasi-monopole, presqu’entièrement

balayé par la photographie numérique (l’entreprise déposant alors son bilan en 2012).

L’incapacité à se transformer, à bouger un modèle, à changer pourrait menacer jusqu’à la

vie du métier, de l’entreprise.