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Abstractivité et critique du nominalisme de la ressemblance

Chapitre II : Abstractivité et critique des nominalismes

2. Abstractivité et critique du nominalisme de la ressemblance

Avant d’en venir à l’exposé de notre solution, nous voudrions nous fonder sur ce concept d’abstractivité pour mettre en difficulté le nominalisme. Voici la situation dans laquelle nous devrions, en tant que réalistes, apparaître aux yeux du nominaliste : jugeant souhaitable de fonder l’applicabilité d’un même prédicat à divers particuliers sur ce que sont ces particuliers, nous évoluons à l’ombre d’une régression vicieuse toujours menaçante, si nous ne savons pas stopper à temps l’analyse ontologique.

Comme on l’a vu, pour bloquer la régression vicieuse fatale au tenant des universaux, le partisan des tropes pouvait reproduire, au niveau des caractères interprétés comme particuliers abstraits, le geste déflationniste que le nominaliste opérait au niveau des particuliers concrets. Mais pour ce faire, il fallait supposer cette abstractivité, dont il reste encore à montrer qu’elle n’est ni fictive ni trop coûteuse. Le nominaliste aurait donc de quoi se rengorger : le réaliste ne s’en sort qu’en empruntant la même voie que lui, après un détour (par l’abstractivité) possiblement couteux ! Pourtant, nous trouvons dans ce concept d’abstractivité non seulement de quoi soutenir notre réalisme des propriétés (quantitatives),

29 A nouveau, cela ne veut pas dire que cette unique nature est un universel : elle est plutôt une nature particulière mais dispersée (scattered), voir pour cela chapitre I section 2.4.

mais aussi et d’abord de quoi mettre en sérieuse difficulté le nominaliste, au point peut-être de lui faire rendre gorge. Ces critiques du nominalisme viseront également à lever les difficultés que l’on peut de bonne foi avoir pour admettre des entités non-individuelles ou non-concrètes.

Dans cette section 2., nous allons nous en prendre à une première forme de nominalisme, qui accepte le problème des propriétés et tente d’y apporter sa solution, appuyée sur le concept de ressemblance. Nous aborderons dans la section 3. la forme de nominalisme qui repousse le problème lui-même. Pour commencer, nous expliquons pourquoi cette première forme de nominalisme doit se présenter comme un nominalisme de la ressemblance (section 2.1.). Ensuite, nous formulerons contre elle deux critiques successives (section 2.2.), avant une conclusion générale concernant la catégorie de la ressemblance, et la place diminuée qu’elle devrait jouer, selon nous, dans la solution au problème des propriétés (section 2.3.).

2.1.Le nominalisme analytique de la ressemblance.

Il faut commencer par s’entendre sur le premier type de nominalisme concerné ici par la critique. Rappelons le cadre posé par le problème des propriétés génériques : sur quoi, dans ce que sont divers particuliers, fonder l’applicabilité multiple d’un prédicat qui se dit véridiquement d’eux ? Cette question appelle une conception ontologique des vérifacteurs de ces attributions. C’est dans ce qu’ils sont qu’il faut, pour le réaliste, chercher la raison de leur commune appartenance à une même classe. Comment situer le nominalisme face à ce problème ?

2.1.1. Le nominalisme analytique et le « nominalisme de l’autruche ».

Le nominalisme se conçoit-il comme une réponse ontologique possible à ce problème, distincte de toute autre position qui admettrait des entités non-individuelles ? Ou bien représente-t-il une option ontologique qui refuse les termes mêmes du problème ? En réalité, ce sont deux attitudes nominalistes qui se distinguent face à cette question.

La première accepte les termes du problème, et entend bien le résoudre. Nous parlerons alors d’un nominalisme analytique, en ce qu’il analyse les conditions ontologiques de satisfaction des deux contraintes vérifactionnelles qui constituent notre problème. Comme le réaliste, ce nominalisme pense que le fondement de l’applicabilité multiple d’un prédicat se trouve dans ce que sont les particuliers, mais contrairement au réaliste, il refuse que cet « être » des particuliers s’analyse par les catégories de propriétés, de tropes ou d’universaux. Il accepte la question, mais rejette avec la réponse réaliste toute tendance à conférer une réalité aux propriétés ou à une « nature commune ». Il n’y a que des particuliers concrets et individuels, et il faut concevoir comment ils « conviennent » entre eux, comme on disait au

Moyen-Âge, pour former une classe naturelle. C’est ce premier nominalisme que nous examinons maintenant.

Le second rejette en bloc ce problème, et considère que, puisqu’il n’existe que des individus, il n’y a aucun fondement réel de la distinction entre classe naturelle et classe artificielle. L’arrangement des individus en classes suit notre construction sémantique et linguistique du monde ; et nous pouvons construire et modifier ces extensions de prédicats, sinon à notre guise – puisque l’on peut admettre des contraintes de cohérence, du moins sans contrainte ontologique venant de la réalité des individus. Ce nominalisme rejette donc les termes mêmes du problème, considérant que si la condition de particularité ne fait pas problème (dans la mesure où c’est ce qu’est un individu qui rend vrais tous les énoncés particuliers le concernant), la condition de généricité exprime une exigence illégitime. Il y a là un refus, pur et net, de penser un quelconque fondement pour une vérité générale, qui justifie qu’on l’appelle, suivant la littérature récente, nominalisme de l’autruche. Il n’en sera pas question maintenant.

Notre argument contre le nominalisme analytique en général s’énonce simplement. S’il accepte de répondre à la question posée, et cherche à fonder l’appartenance de divers particuliers à une même classe, alors ce nominalisme doit supposer à son tour, à un niveau ou à un autre, la même abstractivité des particuliers que nous. Or la seule supposition de cette abstractivité est fatale pour l’ontologie nominaliste, puisqu’elle revient à nier qu’il n’existe que des particuliers concrets, c'est-à-dire des individus. Ainsi, si l’abstractivité est la seule façon de penser comment un particulier est, par lui-même et en vertu seulement de ce qu’il est, cas d’une propriété générique, alors nous devrions pouvoir montrer que le nominalisme analytique, ou bien présuppose une forme d’abstractivité à un niveau ou un autre, et est inconséquent, ou bien n’apporte en réalité aucune réponse au problème des propriétés génériques, et se ramène à une forme de nominalisme de l’autruche ignorante d’elle-même.

2.1.2. Usages projectifs, analytiques et problématiques des catégories.

Mais avant de le développer, nous devons faire un point méthodologique sur les différents usages des catégories ontologiques comme « propriété » ou « ressemblance », pour éviter de fatales ambiguïtés.

Souvenons-nous que le problème des propriétés génériques peut se formuler d’un point de vue sémantique. Un même prédicat s’applique à divers particuliers parce qu’ils appartiennent à son extension. Une sémantique définit ainsi les conditions de vérité de l’attribution de « F » à de multiples particuliers. Mais le problème, ontologique, est alors de concevoir ce qui fonde cette sémantique dans la réalité des particuliers en question. Autrement dit, qu’est-ce qui fait de l’extension de tel prédicat une classe naturelle, tandis que l’extension de tel autre ne correspond à rien qui ne soit linguistiquement construit et artificiel ?

Au début de ce travail, nous avions nettement distingué les conditions de vérité, définies par une sémantique, des vérifacteurs, conçus par l’ontologie. Cette distinction était le fondement de l’orientation économe du réalisme des propriétés rares (sparse), qui refusait d’admettre des propriétés « abondantes », c'est-à-dire autant de propriétés que de prédicats dans un langage. Maintenant, nous devons poser une autre distinction qui découle de cette première. Nous utilisons, depuis le début, des catégories ontologiques : tropes, universaux, particuliers, individus, propriété, classe, etc. Le nominalisme en utilise lui aussi certaines. Mais il faut distinguer entre ce que nous appellerons un usage

projectif et un usage analytique de ces catégories ontologiques.

Par un usage projectif d’une catégorie ontologique, on ne signifie en réalité rien de plus que ce qu’établissent déjà les conditions de vérité fixées par une sémantique. On ne prétend alors à rien d’autre qu’une formulation équivalente de ces conditions de vérité, simplement « projetées » sur la réalité des choses par l’usage d’une catégorie ontologique. Par exemple, posons que E : « a est F » est vrai si et seulement si a appartient à l’extension du prédicat F : voici la condition de vérité de cet énoncé E. Maintenant, si l’on dit O : « a possède la propriété F », mais que l’on ne fait qu’un usage seulement

projectif des catégories de propriété et de possession, alors O ne fait que reformuler les conditions de

vérité de E. On dit tout simplement qu’on tient pour synonymes « appartenir à l’extension du prédicat F » et « posséder la propriété F ». Dans la littérature, il arrive très souvent que les catégories de « classe », d’« appartenance à une classe », de « propriété » et de « possession d’une propriété » fassent l’objet d’un tel usage seulement projectif.

Or un tel usage n’est précisément pas une analyse de ce que c’est que de posséder une propriété ou d’appartenir à une classe, ni de ce que pourraient être les propriétés ou les classes. C’est pourquoi, maintenant, nous appelons usage analytique d’une catégorie le fait d’y recourir non plus pour reformuler les conditions de vérité avec un vernis ontologique, mais pour analyser ce qui, ontologiquement, fonde ces conditions. L’usage analytique des catégories ontologiques les utilise pour concevoir l’être des vérifacteurs. Il ne reformule pas les conditions de vérité en les projetant sur les choses, mais sonde le fondement ontologique de cette vérité. Par exemple, on peut considérer que ce qui fonde la vérité de l’énoncé E : « a est F », et qui réalise la condition « a appartient à l’extension de F », c’est l’existence d’une classe naturelle des choses F. Ici, le vérifacteur de E est un fait ontologique : l’appartenance de a à cette classe naturelle. Ou encore, on peut proposer comme catégories primitives l’universel F et la relation d’instanciation I, telles que ce qui fonde la vérité de E est l’instanciation I de F par a. Dans tous ces cas de figure, les catégories de « classe », d’« appartenance », d’« universel et d’« instanciation » font l’objet d’un usage analytique.

Il faut, pour être tout à fait complet, signaler un troisième type d’usage, aussi important que provisoire. Il s’agit de l’usage problématique, que nous réservons exclusivement à la catégorie de « propriété ». Nous faisons un tel usage du terme de propriété lorsque par lui nous désignons le « quelque chose = X » qui fonde la sémantique d’un prédicat générique, mais qui reste encore à analyser.

En parlant de propriétés problématiquement, nous désignons bien les vérifacteurs qui devraient rendre vraie l’attribution multiple du même prédicat à divers particuliers, et donc nous n’en faisons pas un usage projectif. Pour autant, en parlant problématiquement de propriétés, nous ne faisons que désigner l’existence de ces vérifacteurs, sans dire encore en quoi ils consistent ontologiquement, nous n’en faisons donc pas non plus un usage analytique. Le terme « propriété » est donc surtout, et avant d’en trouver la solution, le nom d’un problème.

Ce problème, le nominalisme de l’autruche le refuse en bloc. De la devise nominaliste générale, « Il n’existe que des individus », il en tire qu’on ne peut faire usage analytique que de la catégorie d’individu. Tout ce qu’elle ne permet pas d’analyser doit être rejeté comme faux problème. En l’occurrence, le problème des propriétés génériques ne peut être résolu par l’usage analytique de la seule catégorie d’individu, il doit donc être rejeté. Avec lui, c’est évidemment aussi l’usage problématique de la catégorie de propriétés qui est abandonné. Et enfin, toute catégorie ontologique (autre que celle d’individu) ne peut faire l’objet que d’un usage projectif. Mais le nominalisme de l’autruche n’a pas forcément raison. Demandons-nous en effet s’il peut y avoir un nominalisme analytique, qui accepte de poser le problème des propriétés – et de faire ainsi un usage problématique du terme « propriété », tout en défendant une solution nominaliste à ce problème, c'est-à-dire une ontologie qui ne fait aucun usage analytique de la catégorie de propriété (ou d’universaux, de tropes, etc.). Expliquons maintenant pourquoi un nominalisme analytique est possible (puisque nous ne voudrions pas critiquer une position impossible), et pourquoi surtout, à notre sens, il est forcément un nominalisme de la ressemblance.

2.1.3. Le nominalisme analytique de la ressemblance (NAR).

Un nominalisme analytique est possible. S’il n’existe que des individus, et aucune entité non-individuelle, ce n’est pas une raison pour ne pas chercher à résoudre le problème des propriétés génériques. En s’engageant dans le problème, le nominaliste accepte alors de faire un usage problématique de la catégorie de propriété : quelque chose dans la réalité des particuliers individuels fait qu’un prédicat s’applique véridiquement à une pluralité de particuliers distincts, et il faut l’analyser ontologiquement. Nous verrons que les analyses récentes de Rodriguez-Pereyra (2002) s’inscrivent explicitement dans ce cadre. Pour formuler une solution à ce problème, enfin, il faut ajouter à la catégorie d’individu une seconde catégorie ontologique, objet d’un usage analytique. Nous pensons qu’en dernière analyse, c’est toujours vers la catégorie de ressemblance que toutes les tentatives convergent.

2.1.3.1.Les différents nominalismes analytiques concevables.

En effet que tout nominalisme analytique est, en dernière instance, un nominalisme analytique de la ressemblance (NAR). Autrement dit, toute catégorie par laquelle le nominaliste entend suppléer

celle d’individu, dans un usage analytique, implique la catégorie de ressemblance, et celle-ci suffit à un nominalisme analytique. Qu’elle y suffise, nous l’examinerons ensuite avec le nominalisme de la ressemblance de Rodriguez-Pereyra. Tout de suite, montrons en revanche que tout nominalisme analytique qui fait usage d’une autre catégorie que celle d’individu implique l’usage analytique de celle de ressemblance.

Suivons la typologie des nominalismes proposée par Armstrong (1978a), qui distingue nominalismes du prédicat, du concept, de la classe et de la ressemblance. Tous ces nominalismes sont présentés comme des réponses à la question : en vertu de quoi l’énoncé E « a est F » est-il vrai ? Les nominalismes du prédicat et du concept répondent que E est vrai en vertu d’une relation de subsomption (« tomber sous ») entre a et le prédicat F ou le concept de F. On peut s’accorder pour dire que les catégories en question n’engagent aucune analyse ontologique, étant donné que les prédicats et concepts sont des entités linguistiques ou mentales. Ces deux premières formes de nominalisme ne sont donc pas des nominalismes analytiques.

Qu’en est-il du nominalisme de classe ? Il dit que l’énoncé E est vrai en vertu de l’appartenance de a à la classe des F, que nous notons : {F}. Mais y a-t-il une différence entre : « l’extension du prédicat F » et {F} ? Si la classe des F est identique à l’extension du prédicat F, alors elle ne désigne rien d’autre que les conditions de vérité des énoncés qui attribuent F, et on ne fait alors de la catégorie de « classe » qu’un usage projectif. Si, en revanche, {F} ne se confond pas avec l’extension du prédicat F et que l’on fait un usage analytique et non simplement projectif de la catégorie de « classe », il faut y voir l’entité qui, dans la nature des choses, fonde cette sémantique. La vérité de l’attribution du prédicat générique F au particulier a doit se fonder sur l’existence de la classe {F} et « l’appartenance » de a à cette entité. Les termes « classe » et « appartenance » dont alors l’objet d’un authentique usage analytique.

2.1.3.2.Insuffisance du nominalisme analytique de classe.

Armstrong a formulé, contre le nominalisme analytique de la classe, une objection qui nous semble cruciale. Dans quel ordre pense-t-on vraiment que les choses se passent ? Est-ce E qui est vrai en vertu du fait que a appartient à {F}, ou bien ne doit-on pas plutôt penser que a appartient à {F} en vertu de la même chose qui rend vrai « a est F », à savoir quelque chose dans la nature de a ? (Armstrong, 1978a, p. 36) Cette alternative est décisive, car elle nous montre qu’une catégorie ontologique, pour être analytique, doit en même temps être primitive. Si, en effet, on pense comme Armstrong que l’appartenance de a à {F} doit encore être analysée, et fondée par exemple sur la possession d’une propriété, alors l’existence de la classe {F} n’est pas un fait ontologique primitif. Mais dans ce cas, la catégorie non-primitive de « classe » (et d’« appartenance à une classe ») ne fait pas l’objet d’un usage analytique, mais seulement problématique : elle désigne un fait ontologique qu’il reste encore à analyser.

Autrement dit, si c’est en vertu de ce qu’est a qu’il appartient à la classe des F, le nominalisme de classe n’est pas analytique.

Donc pour offrir une solution analytique au problème des propriétés, le nominalisme de classe doit présenter la catégorie de « classe » comme primitive. Ce qui fait que « a est F » est vrai, et si l’on parle projectivement, ce qui fait que a possède la « propriété F », c’est en dernière analyse qu’il appartient à la classe des F. L’appartenance à une classe déterminée et l’existence de cette classe apparaitraient alors comme des faits primitifs, ultimes fondements ontologiques de la vérité de l’attribution de F à a, b, c, etc. Dans quelle mesure cette approche est-elle en mesure de répondre au problème des propriétés génériques ?

La condition de particularité est facile à satisfaire. Le vérifacteur de « a est F » est un fait particulier, l’appartenance de a à {F}. Ce fait est à prendre comme ontologique et primitif, sans quoi le nominalisme ne peut pas prétendre être analytique. Qu’il soit particulier relève, à nouveau, de cette « victoire de la particularité » signalée par Armstrong, et que nous admettons ici : nous avons divers faits particuliers : l’appartenance de a à {F}, l’appartenance de b à {F}, l’appartenance de c à {F}, etc. Dès lors, comment satisfaire la condition de généricité ? Il faut penser ce qu’il y a de commun entre ces divers faits particuliers. On voit jaillir exactement la même régression dont était victime la théorie des états de choses d’Armstrong : ces différents faits d’appartenance ne peuvent être instances d’une même propriété qu’en appartenant à une même et nouvelle classe {IF}, la « classe des faits particuliers d’appartenance à {F} ». Il est facile alors de montrer que la régression s’enclenche, et qu’elle est vicieuse. Il n’y a donc, en principe, aucune raison pour qu’une ontologie qui admet l’existence de classes et prend pour primitive l’appartenance des particuliers à ces classes n’aient pas les mêmes vices que la théorie des universaux et de l’instanciation (Armstrong, 1978a, p. 41).

2.1.3.3.Le nominalisme de la ressemblance est le seul analytique.

A moins qu’on ne parle de classes de ressemblance. C’est ici l’immense avantage du nominalisme de la ressemblance de tirer dans une catégorie ontologique inédite, la « ressemblance », de quoi couper court à toute régression. Cela ne doit pas nous surprendre, nous qui avions déjà vu ce fait se produire avec la théorie des tropes et l’idée d’une classe de particuliers abstraits exactement ressemblants. Il semble en effet – et c’est ce qui est couramment admis à son endroit, que la relation de ressemblance bénéficie d’une forme de gratuité ontologique, qui nous permettrait, en la prenant comme catégorie primitive, sans coût ontologique aucun, de fonder :

(1) L’appartenance de a à la classe {F} : c’est que a ressemble aux particuliers qui sont F, membres de cette classe (Condition de particularité).

(2) L’appartenance de divers particuliers à une même classe : c’est qu’ils se ressemblent entre eux (Condition de généricité).

Le geste fondamental du nominalisme analytique de la ressemblance (NAR) est de classer la catégorie de ressemblance non pas comme projective (comme le ferait un nominaliste du prédicat, par exemple, qui dirait que n’importe quels particuliers se ressemblent pourvu qu’on puisse leur appliquer le même prédicat), ni comme problématique (comme le pense Armstrong, pour qui un fait de ressemblance est objectif mais reste à analyser ontologiquement), mais comme analytique. Les faits de ressemblance sont pris pour ontologiquement primitifs et fondateurs. C’est ce que propose la thèse fondamentale NAR :

(NAR) a et b sont instances de la même propriété F (avec C la classe de particuliers