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A – L’histoire personnelle du malade mental

Dans le document La criminalité des malades mentaux (Page 109-112)

L’histoire personnelle du malade mental se compose majoritairement de ses antécédents (traumatiques notamment) (1) dont l’impact sera d’autant plus important qu’ils se seront manifestés durant la petite enfance ou l’enfance (2). Par ailleurs, les traits de personnalité qui peuvent inhiber ou au contraire favoriser le passage à l’acte (3).

1/ Les antécédents

Ils représentent le facteur le plus important. Les personnes impulsives et violentes ont presque toutes une histoire personnelle traumatique, ce que nos cas ont illustré.

Des études tentent d’expliquer pourquoi un comportement violent au cours de la vie est le meilleur prédicteur d’une nouvelle violence. Renaud de Beaurepaire a étudié les interactions entre la génétique, l’environnement et le cerveau. Il en déduit que ces interactions détermineraient les comportements du sujet à l’âge adulte, notamment ses réactions impulsives et violentes dans certaines situations.

Des maltraitances de tout ordre (physiques, psychologiques, sexuelles) ainsi que des expériences de victimisation, de séparation, d’abandon ou de perte, vont avoir un impact majeur sur le développement du cerveau et sur l’organisation psychique lorsqu’elles

surviennent dans l’enfance, et surtout dans la petite enfance. Pourtant certains sujets dotés d’une bonne résilience évolueront mieux que les autres, sans que l’on connaisse à l’heure actuelle les mécanismes psychologiques ou biologiques de la résilience. Quant aux autres, ils éprouveront de la difficulté à contrôler leur impulsivité et leur agressivité dans certaines conditions.

2/ La petite enfance et l’enfance

Un psychiatre anglais, John Bowlby, a mis en évidence la notion fondamentale du lien qui se soutient de la théorie de l’attachement de l’enfant à sa mère depuis la naissance. Ce lien a une fonction structurante sur le fonctionnement psychique de l’enfant. Bowlby a établi une relation entre l’abandon dans l’enfance et des comportements antisociaux à l’adolescence. Un lien de bonne qualité favorise le développement chez l’enfant d’un « sentiment de sécurité interne ». L’enfant se forge des modèles internes à travers sa représentation du monde, l’attachement à des personnes ou à des objets et il construit des systèmes de valeurs. En l’absence de lien, l’enfant va grandir avec un « sentiment d’insécurité » et avec une faible estime de lui-même. Qu’ils soient bons ou mauvais, ces modèles sont des principes organisateurs à l’âge adulte. En l’absence de lien sécurisant, l’individu va développer un trouble grave de la personnalité. Il peut s’agir d’une personnalité psychopathique, instable et impulsive, où le passage à l’acte vient en lieu et place de la parole, de la capacité à mentaliser une situation, et où il y a négation des liens. Il peut s’agir aussi d’une personnalité état-limite qui se manifeste par une insécurité permanente des liens, devenant une véritable pathologie de la relation. Une personnalité dépressive sera dans la répétition permanente des expériences de perte. Une personnalité paranoïaque interprètera les liens à l’autre de façon délirante, essentiellement persécutrice.

Par ailleurs, une étude retentissante, réalisée par Raine et al (1997), cités par Combalbert109, montre qu’il semble exister une relation entre les complications survenant lors de l’accouchement et une prévalence augmentées des épisodes violents à l’adolescence ou à l’âge adulte. Cette étude porte sur 4269 garçons, de leur naissance à l’âge de 18 ans. Ceux qui ont connu des complications à la naissance (forceps notamment) et qui ont été rejetés très tôt par leur mère (mise en institution dans la première année et/ou tentative d’avortement par la

109

COMBALBERT N., BRET-DIBAT J.L., FAVARD A.M., « Intérêts et limites de l’approche biologique pour l’étude des comportements agressifs », Annales Medico Psychologiques, 160, 2002, p. 640-648.

mère) ont trois fois plus de risques de devenir des criminels violents. Raine a été un des premiers à préconiser une approche bio-sociale pour essayer de réduire l’agressivité.

3/ Les traits de personnalité

Les personnalités à haut potentiel d’agressivité ont été évoquées du fait essentiellement d’une impulsivité comme les personnalités antisociales ou les états limites, ou à cause d’une fausseté de jugement comme les personnalités paranoïaques. Certains facteurs peuvent jouer un rôle relativement protecteur.

-- La peur de la punition, consécutive à une agression, a un effet inhibiteur de l’agressivité. Les sujets fortement concernés par le jugement s’avèrent moins agressifs que les sujets peu soucieux du regard de l’autre. Mais parfois, c’est l’effet contraire qui se produit lorsque l’agresseur puni interprète la punition comme d’autrui une attaque contre lui. Il peut alors nourrir un sentiment de vengeance et accroître son agressivité.

-- Les sujets qui anticipent des sentiments de culpabilité comme conséquence d’une agression sont susceptibles d’être moins agressifs que ceux qui ne ressentent que peu de culpabilité. L’absence de culpabilité et d’anxiété caractériserait les criminels violents, comme chez les psychopathes.

-- Un sentiment de désarroi peut se manifester chez des sujets qui craignent de ne pouvoir contrôler la situation. Ils auront tendance à ne pas répondre à des provocations fortes et répétées d’autrui.

-- Dans les années 70, Rosenman et Friedman ont isolé des sujets en perpétuelle compétition, dit sujets de type A. Ils sont constamment en mouvement, pressés en permanence par le temps, se battant contre de nombreuses échéances de la vie courante. Ils sont aussi particulièrement exposés à des risques cadio-vasculaires. Ce comportement les rend davantage agressifs.

-- En 1976, une étude de Toch, cité par Moser, réalisée sur des prisonniers, a montré que ceux-ci s’engagent dans des comportements violents afin d’atteindre certains buts individuels. Parmi les comportements violents les plus fréquents, il a remarqué la violence par sentiment d’insécurité et d’auto-estimation basse, les sujets avides d’affirmer leur importance et leur valeur par ce moyen, les sujets amenés à être agressifs pour jouer un rôle dominant dans les groupes.

L’histoire personnelle à elle seule ne suffit pas à expliquer le passage à l’acte ou son absence. Viennent se greffer des informations dites collatérales.

Dans le document La criminalité des malades mentaux (Page 109-112)