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2.3 La gestion de la classe

2.3.1 Évolution du concept de gestion de la classe

Tout d’abord, bien que le concept de la gestion de la classe puisse remonter jusqu’au XVIIe siècle avec les préoccupations des pédagogues européens (Martineau, Gauthier et Desbiens, 1999), la naissance de ce concept se situe en Amérique du Nord vers le début des années 1970 (Jones, 1989). On peut donc dire que celui-ci est relativement nouveau (Desbiens, 2006). Depuis, tout comme la profession d’enseignant et l’acte d’enseigner, le concept de gestion de la classe s’est transformé; influencé principalement par trois courants théoriques : le béhaviorisme, l’humanisme et le cognitivisme (Doyle, 1986; Nault et Fijalkow, 1999). L’influence de ceux-ci sur le concept de gestion de la classe ne forme pas un continuum, où chacun des courants influencerait le concept de la gestion de la classe à tour de rôle, leur influence se chevauche (Archambault et Chouinard, 2009); bien que certains courants à certaines époques dominent.

À ses débuts, le concept de gestion de la classe faisait référence exclusivement à l’ordre et à la discipline (Nault et Fijalkow, 1999). La gestion de la classe était alors entendue comme étant le type de solution utilisée par l’enseignant pour éviter ou pour contrôler les mauvais comportements : réaction aux problèmes de discipline (Jones, 1989). La gestion de la classe est alors définie comme étant les lignes directrices que l’enseignant donne à sa classe, afin de modifier le comportement des élèves. Le

rapport entre l’élève et l’enseignant est alors confiné dans une perspective hiérarchique (Artaud, 1989) où l’élève est le subordonné de l’enseignant. Cette perspective n’est pas sans rappeler le climat autoritaire défini par Artaud (1989) où l’objet d’apprentissage domine le sujet qui apprend. Ce type de climat induit des pédagogies normatives où la connaissance est transmise. L’influence du courant théorique béhavioriste est notable. En effet, pour modifier le comportement des élèves, l’enseignant applique les principes d’apprentissage du béhaviorisme : renforcement positif et négatif et punition positive et négative (Archambault et Chouinard, 2009).

Le concept a ensuite évolué vers une perspective systémique englobant les activités du groupe dans leur environnement (Doyle, 1986; Jones, 1996). Celui-ci visant la prévention et la réduction des comportements inadaptés (Nault et Fijalkow, 1999). L’influence du courant humaniste prévaut en amenant l’aspect du développement de l’identité de l’élève et l’établissement des rapports harmonieux en classe, modifiant ainsi la définition de la gestion de la classe. Celle-ci poursuit son évolution, influencée par le courant sociocognitif, plus spécifiquement les travaux portant sur les stratégies d’apprentissage, la métacognition et l’apprentissage et la motivation scolaire, permettant de voir l’aspect complémentaire entre le développement des compétences disciplinaires et sociales (Archambault et Chouinard, 2009). Un lien entre la gestion de la classe et la didactique peut alors être perçu dans le développement des compétences des élèves puisque le fait de proposer aux élèves « des activités d’apprentissage porteuses de sens facilite la gestion de la classe en les rendant plus responsables et plus autonomes » (idem, p.13).

À la suite de l’évolution sous les diverses influences, le concept de la gestion de la classe s’ancre de plus en plus dans une perspective éducative dans laquelle les enseignants et les élèves sont des partenaires collaborant au processus de gestion de la classe (Archambault et Chouinard, 2009; Caron, 1994; Evertson, Emmer, Clements et

Worsham, 1994; Jones et Jones, 1995). Archambault et Chouinard (2009) définissent d’ailleurs la gestion de la classe, à ce moment, comme étant « l’ensemble des pratiques éducatives utilisées par l’enseignant afin d’encourager chez ses élèves le développement de l’apprentissage autonome et de l’autocontrôle » (p. xvi). Au début des années 2000, ceux-ci peaufinent cette définition accentuant la perspective éducative. La gestion de la classe est maintenant vue comme : « l’ensemble des pratiques éducatives auxquelles l’enseignant a recours afin d’établir, de maintenir et, au besoin de restaurer dans la classe des conditions propices au développement des compétences des élèves » (Archambault et Chouinard, 2009, p.14). Toutefois, on trouve toujours des auteurs pour dire qu’« une bonne gestion de la classe passe par l’ordre qui règne dans la classe » (Lessard et Schmidt, 2011, p.3). C’est donc dire qu’il existe plusieurs façons de définir la gestion de la classe.

Pour cette recherche doctorale, c’est la définition d’Archambault et Chouinard (2009) ci-haut présentée qui sera retenue. Celle-ci, tout comme le faisait déjà celle de 1996, permet de dépasser le simple maintien de l’ordre par la discipline, en incluant les visées d’autonomie et de responsabilisation de l’élève, en plus de favoriser le développement des compétences dans le milieu particulier qu’est la classe (Everston et Randolph, 1995). De plus, elle est cohérente avec les compétences attendues des enseignants par le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport, entre autres, la compétence 6 : « Planifier, organiser et superviser le mode de fonctionnement du groupe-classe en vue de favoriser l’apprentissage et la socialisation des élèves » (MÉQ, 2001a, p.59).

Pour résumer la compréhension des deux dimensions de l’enseignement, selon moi la didactique se situe au niveau des conditions de la diffusion et d’appropriation des connaissances, des savoirs et la gestion de la classe se place plus précisément dans l’acquisition des compétences afin d’assurer cette diffusion et cette acquisition. En appui, Nault et Lacourse (2008) décrivent la compétence de la gestion de la classe

comme « un processus complexe qui préside à la planification, à l’organisation et au contrôle d’un ensemble d’éléments contextuels, matériels et temporels (p.24) » en précisant que tout ceci est « sans pour autant porter sur les contenus spécifiques aux disciplines ni sur des habiletés didactiques (idem). » Maintenant le terme gestion de la classe explicité, il serait opportun de voir comment, au quotidien, les enseignants peuvent choisir la gestion de leur classe.