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Chapitre 3 – Facteurs nutritionnels et troubles cognitifs

3.1 Dénutrition et troubles cognitifs

3.1.2 Évaluation de la dénutrition

Facteurs psychosociaux et nutritionnels des troubles cognitifs en Afrique Centrale !

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études menées par le 10/66 Dementia Research Group dans plusieurs pays à faible et moyen revenu

(Chine, Inde, Amérique Latine et Nigéria), la dénutrition définie par un périmètre brachial < 23,5 cm touchait de 0,5% en Chine à 53,9% en zone rurale d’Inde de la population de 65 ans et plus (305). En Afrique, les quelques études menées chez les personnes âgées rapportent des prévalences de

dénutrition, définie par un IMC<18,5 kg/m2, de 20,8% au Botswana (306), de 25,8% au Gabon (307),

de 26,4% en Afrique de l’Est (308), de 33,3% en zone rurale d’Ouganda (309), et de 36,1% chez les femmes pour 27,0% chez les hommes de zones rurales de Malawi (310). Une récente étude menée par notre équipe de recherche dans deux pays d’Afrique Centrale a montré une prévalence de dénutrition en population générale de 29,5% pour Bangui, capitale de la République Centrafricaine et de 9,5% à Brazzaville, capitale de la République du Congo (156).

3.1.2 Évaluation de la dénutrition

3.1.2.1 Évaluation anthropométrique

Variation du poids corporel

L’outil le plus simple pour détecter une dénutrition est l’évaluation de la variation du poids corporel sur une période de un à six mois. En général, une diminution de 5% du poids en un mois ou 10% en six mois est signe d’une dénutrition (311). Cependant, plusieurs études faisant le lien entre la perte de poids et les troubles cognitifs ont pris comme seuil une perte de poids involontaire de 4% sur une

année (312–314). Wallace et al. ont en effet montré qu’une perte de poids involontaire de 4% sur une

année chez les personnes âgées était cliniquement importante puisqu’au delà le risque de mortalité était augmenté (315). Cette mesure demande un suivi du sujet, faisable en clinique, mais difficile dans le cas d’études épidémiologiques en population. En effet, le sujet doit se remémorer son poids antérieur, ce qui peut être rendu difficile par la présence éventuelle de troubles cognitifs.

Indice de masse corporelle

L’indice de masse corporelle (IMC) est de loin l’indicateur le plus utilisé pour évaluer l’état nutritionnel des individus quel que soit leur âge. L’IMC se calcule en divisant le poids (kg) par la taille (m) au carré. Chez le sujet âgé, la mesure de la taille peut être rendue difficile si le sujet n’est pas capable de se tenir debout. Dans ces cas-là, il est possible d’estimer la taille soit par la hauteur talon-genou, soit par la mesure de l’écartement des bras (316), des formules permettant d’estimer la taille.

L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) définit la dénutrition par un IMC <18,5 kg/m2 et

• 17,0-18,4 kg/m2 : Dénutrition de stade I • 16,0-16,9 kg/m2: Dénutrition de stade II • < 16,0 kg/m2: Dénutrition de stade III

L’IMC est recommandé par l’OMS mais son interprétation chez le sujet âgé peut porter à discussion car, avec l’âge, la taille diminue et la composition corporelle se modifie. Par ailleurs, l’IMC ne permet pas de distinguer les différents compartiments corporels. De plus, le seuil de 18,5 kg/m2 semble ne pas être adapté pour les personnes âgées. Certains utilisent un seuil de 20 kg/m2 pour définir les personnes à risque de dénutrition (317) mais chez la personne âgée de 75 ans et plus un seuil inférieur à 23,5 kg/m2 serait davantage à risque de mortalité (318). En France, la Haute Autorité de Santé recommande un seuil de 21 kg/m2 en dessous duquel un sujet âgé est identifié comme dénutri (319).

Périmètre brachial

La dénutrition peut être évaluée par la mesure du périmètre brachial à mi-distance entre l’acromion et l’olécrane. L’OMS recommande une valeur inférieure à 24 cm pour définir une dénutrition chez le sujet adulte mais ne recommande pas de seuil spécifique pour les personnes âgées. Certaines études utilisent le seuil de 21 cm (320), comme suggéré par le Mini-Nutritional Assessment (MNA) (321) ; d’autres utilisent un seuil de 23,5 cm (305).

Plis cutanés

Rarement utilisée seule, l’épaisseur des plis cutanés est un indicateur de la masse grasse. Elle représente l’épaisseur du tissu adipeux sous-cutané qui reflèterait le tissu adipeux corporel total. La mesure peut se faire en quatre endroits différents : le triceps (pli tricipital), le biceps (pli bicipital), sous l’omoplate (pli sous-scapulaire) et au dessus de la hanche (pli supra-iliaque).

Circonférence musculaire brachiale

La circonférence musculaire brachiale (CMB) est un indicateur de la masse maigre. Elle est obtenue par la formule suivante :

CMB (cm) = Périmètre brachial (cm) – ! *Épaisseur du pli tricipital (cm) (322).

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120 3.1.2.2 Évaluation par impédancemétrie

L’impédancemétrie bioélectrique est une technique non invasive permettant d’évaluer la composition corporelle de façon indirecte, simple et indolore. Le principe repose sur la différence de résistances des différents tissus corporels soumis à un courant électrique alternatif. La masse maigre, composée essentiellement de liquides et d’électrolytes, offre peu de résistance au courant contrairement à la peau, les os et la graisse. L’impédancemétrie permet d’évaluer la quantité de masse maigre, de masse grasse mais aussi de déterminer le volume d’eau corporelle totale ainsi que de l’eau intra- et extracellulaire (323).

3.1.2.3 Évaluation par absorptiométrie biphotonique

L’absorptiométrie biphotonique compare l’absorption par le corps des rayons X à double énergie à celle de compartiments témoins de composition connue. Elle permet de mesurer la masse maigre, la masse grasse ainsi que la masse minérale mais elle ne permet pas de mesurer l’hydratation.

3.1.2.4 Évaluation biologique

L’albuminémie reflète le métabolisme protéique. C’est le marqueur biologique le plus utilisé pour évaluer l’état nutritionnel d’un sujet. Cependant, ce n’est pas un bon marqueur nutritionnel puisque l’albumine plasmatique diminue dans les situations inflammatoires (infection, intervention chirurgicale et cancer) (311). De plus, la demi-vie de l’albumine est longue pouvant atteindre 20 jours, ce qui en fait un mauvais indicateur de suivi de l’état nutritionnel à court terme.

3.1.2.5 Évaluation par questionnaire

Plusieurs instruments de dépistage ou d’évaluation nutritionnelle ont été développés. Dans leur revue, Green et Watson ont identifié 71 outils dont 21 étaient spécialement conçus pour une utilisation chez les personnes âgées (324). Ce sont des questionnaires dans lesquels chaque question examine un facteur de risque de dénutrition connu (324). Un score est ensuite calculé et un ou des seuils est/sont établi/s pour identifier les sujets à risque de dénutrition. Le but de ces questionnaires est d’évaluer les sujets à risque de dénutrition de façon rapide, non invasive et simple. La plupart ont été conçus pour une utilisation hospitalière mais certains d’entre eux sont également utilisés dans les études épidémiologiques. Le plus connu d’entre eux est le M1ni2N34ritional Assessment (MNA). Il s’agit d’un outil de dépistage nutritionnel pour les sujets âgés hospitalisés, institutionnalisés ou vivant à domicile (321). Le MNA contient 18 items spécifiques à la population gériatrique interrogeant sur les habitudes alimentaires, l’état de santé objectif et subjectif, la qualité de vie, la dépendance, la mobilité et la cognition (figure 12). Le MNA est complété en 10 à 15 minutes mais dans certaines

circonstances, une évaluation plus rapide est nécessaire. Une version courte du MNA a donc été développée et compte six questions. Cette version courte permet de détecter les sujets à risque de dénutrition et dans ce cas la version complète du MNA est passée.

D’autres questionnaires existent. Le Malnutrition Universal Screening Tool (MUST) a été développé par l’Association britannique de nutrition parentérale et entérale (British Association for Parenteral

and Enteral Nutrition, BAPEN) pour identifier les adultes en insuffisance pondérale et à risque de

dénutrition ainsi que les adultes obèses (www.bapen.org.uk). Cet outil peut être utilisé à l’hôpital, dans des consultations externes, des cabinets de médecine générale, en communauté ou dans des maisons de santé. La procédure de dépistage compte cinq étapes :

- Étapes 1 et 2 : Obtenir les mesures de l’état nutritionnel (taille, poids, IMC, perte de poids non intentionnelle récente)

- Étape 3 : Envisager l’effet d’une maladie aigüe

- Étape 4 : Déterminer le score de risque global ou la catégorie en termes de dénutrition.

- Étape 5 : Prise en charge de la dénutrition

Le descriptif complet de l’outil est disponible en suivant ce lien : http://www.bapen.org.uk/images/pdfs/must/french/must-exp-bk.pdf.

Le Nutrition Screening Initiative Checklist est un outil contenant 14 items, développé par le Nutrition

Screening Initiative en 1993 pour dépister les sujets âgés à risque nutritionnel (325). Le Subjective

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