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Évaluation alimentaire chez la personne âgée

Chapitre 3 – Facteurs nutritionnels et troubles cognitifs

3.2 Consommation alimentaire et troubles cognitifs

3.2.1 Évaluation de la consommation alimentaire

3.2.1.1.3 Évaluation alimentaire chez la personne âgée

Van Staveren et al? signalaient, il y a 20 ans, que l’évaluation alimentaire des sujets âgés requérait une attention particulière et nécessitait des approches spécifiques du fait de la diminution des fonctions, des incapacités ou des problèmes de santé pouvant altérer la capacité de rappel et d’enregistrement des prises alimentaires (360). La consommation alimentaire est influencée par un certain nombre de facteurs. Chez les personnes âgées, la perte d’appétit, l’altération des perceptions

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132 sensorielles, la modification des habitudes alimentaires, les capacités physiques et mentales qui peuvent limiter l’accès aux aliments (aller en course, se préparer à manger…), les difficultés de mastication et de déglutition, l’humeur, l’état de santé, les médicaments, les conditions socio-économiques, le soutien social…, tous ces facteurs peuvent modifier leur consommation alimentaire (355).

Dans les études épidémiologiques, les outils inventoriés plus haut sont utilisés comme ils le sont chez les sujets plus jeunes (355). Il s’avère que, dans le cas où le sujet âgé est indépendant et n’a pas de problème de santé, les méthodes précédentes sont valides. Cependant, elles peuvent être trop longues et stressantes pour la majorité des personnes âgées. Il y a donc un risque non négligeable que les sujets ne participent pas aux enquêtes, engendrant donc un biais de sélection ainsi que des résultats incomplets et non fiables chez les répondants. Chez les sujets présentant des troubles cognitifs, les méthodes habituelles d’évaluation sont difficilement utilisables du fait de l’altération des fonctions mnésiques. Volkert et Schrader recommandent donc de limiter la longueur des questionnaires et des entretiens, voire de les faire passer en plusieurs fois, d’impliquer les proches pour assister les personnes âgées ou répondre aux questions, d’avoir recours à des enquêteurs spécifiquement formés et de considérer un temps de recueil de données plus long exigeant davantage d’efforts (355).

3.2.1.2 Évaluation biologique

Un des inconvénients de l’approche par questionnaire est la variation des concentrations des composants alimentaires à l’intérieur même des aliments (361). Habituellement, la conversion se fait à l’aide de tables de nutriments qui fournissent des concentrations moyennes dans un aliment (361). Un autre inconvénient est que la prise alimentaire ne reflète pas directement la dose réellement utilisée par l’organisme puisque les méthodes par questionnaire ne tiennent pas compte de la biodisponibilité des nutriments pouvant différer d’un sujet à un autre du fait des prédispositions génétiques et de l’influence d’autres composés alimentaires (361). L’avantage des biomarqueurs alimentaires est leur capacité à évaluer les expositions alimentaires de manière objective (362). Habituellement, les composés des aliments (et leurs métabolites) sont utilisés comme biomarqueurs. Les biomarqueurs alimentaires peuvent être divisés en trois classes principales : les biomarqueurs alimentaires de récupération, les biomarqueurs de concentration et les biomarqueurs prédictifs. Les biomarqueurs de récupération sont basés sur l’excrétion totale du marqueur sur une période définie. Ils requièrent que l’excrétion soit une proportion fixe de la consommation chez tout individu avec seulement une variation interindividuelle négligeable. Leur développement est basé sur la connaissance de la balance physiologique entre la consommation et l’excrétion. Pour cette raison, ils

sont les mieux adaptés pour estimer la consommation absolue. À ce jour, seulement quelques marqueurs existent (nitrogène et potassium urinaire). Les biomarqueurs de concentration, quant à eux, sont seulement basés sur la concentration du marqueur ; aucune information sur l’équilibre physiologique entre la consommation et l’excrétion n’est nécessaire et cet équilibre peut différer considérablement selon les individus. Ils ne peuvent donc pas être utilisés pour estimer la consommation absolue et des informations supplémentaires sont nécessaires pour fournir une référence. Cependant, comme ils sont corrélés à la prise alimentaire, ils peuvent être utilisés pour classer la consommation de nutriments spécifiques. Enfin, les biomarqueurs prédictifs sont des biomarqueurs ayant une récupération incomplète mais une corrélation stable et dépendante du temps depuis la prise alimentaire. Les seuls biomarqueurs prédictifs disponibles pour le moment sont le sucrose et le fructose urinaires, marqueurs de la consommation de sucre (362).

Les biomarqueurs présentent plusieurs inconvénients (362). Il est très difficile d’identifier la source des composés en utilisant seulement les biomarqueurs. Malgré de nombreuses recherches pour identifier de bons biomarqueurs alimentaires, seuls certains sont privilégiés (vitamine C et caroténoïdes comme proxy de la consommation de fruits et de légumes). Cette restriction à certains composés introduit un biais considérable dans l’évaluation alimentaire puisque tous les aliments ne contiennent pas la même quantité de ces composés. Il est donc important d’utiliser une combinaison de biomarqueurs ou d’en développer de nouveaux basés sur plusieurs composés. Les différences intra- et interindividuelles dans le métabolisme et l’absorption peuvent également affecter les concentrations de biomarqueurs réelles ou mesurées dans le plasma et l’urine. Enfin, les biomarqueurs ont une demi-vie physiologique courte, en particulier lorsqu’ils sont mesurés dans le plasma ou les urines, offrant ainsi une fenêtre assez courte pour évaluer la prise alimentaire. Les cheveux peuvent être une option pour obtenir des informations sur la consommation à long terme ou des expositions chroniques.

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134 3.2.2 Consommation alimentaire, troubles cognitifs, déclin cognitif, MCI et démence

La recherche s’est intéressée à la relation entre la consommation alimentaire et les troubles cognitifs depuis quelques années seulement. Elle s’est focalisée sur certains nutriments ou aliments riches en nutriments d’intérêt, notamment les acides gras et les vitamines. Une part de la littérature s’est également intéressée à l’alcool. Plus récemment, les chercheurs se tournent vers les types de régime pouvant protéger contre les troubles cognitifs, les nutriments/aliments n’étant pas consommés de façon isolée mais dans le cadre d’un modèle alimentaire. Le modèle alimentaire qui a attiré beaucoup d’attention est le régime méditerranéen.