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Élaboration clinique et écriture du (savoir-faire-) savoir éducatif

C HAPITRE II Q UE FONT LES EDUCATEURS SPECIALISES ?

2.3. Élaboration clinique et écriture du (savoir-faire-) savoir éducatif

Praxis, poièsis, logos, mètis, phronèsis183, l’ensemble de ces concepts issus de la pensée

antique grecque - pensée qui articule l’activité humaine en l’inscrivant dans un cadre philosophico-politique à partir d’une téléologie morale et éthique - est repérable dans les deux principaux signifiants qu’emploient les auteurs de l’éducation spécialisée pour en qualifier l’application empirique et formative dans la pratique professionnelle : la clinique éducative et la pratique réflexive. Dans le prolongement du sous-chapitre précédent, on reprend ici la tension dynamique entre les deux dimensions éthiques - praxis/poièsis - pour l’articuler avec la clinique et la réflexivité toutes deux contingentes dans l’élaboration du savoir-faire

éducatif, dans l’optique d’envisager le genre de savoir qu’il est possible de produire dans

l’après-coup de son effectuation. D’une part et d’un côté se dessinent les contours d’une pensée du compliqué (poièsis) dans laquelle les objets sont déconstruits par la raison en une série de petits problèmes qu’il s’agit ensuite d’expliquer, d’autre part se dessine une pensée complexe (praxis) qui exige de prendre en compte ce qui chez l’homme s’inscrit dans l’ordre de l’énigmatique qui échappe à l’explication. On ne « produit » ainsi pas de l’humain de la même manière que des objets comme le disent et ne cessent de le répéter les écrits de l’éducation spécialisée.

On se trouve dès lors à nouveau convoqué au cœur de l’opposition entre praxis et poièsis, cette dernière relevant d’une tentative de maîtrise, de planification, de programmation et d’instrumentalisation à partir de savoirs et de savoir-faire accumulés. La praxis introduit au contraire la prise en compte du désordre, de l’imprévu, de l’impondérable et de la surprise, exigeant un mode de pensée et d’action où l’inconnu est appréhendé dans son surgissement, ce qu’Aristote nomme phronèsis, intelligence des situations qui ne relève pas d’un savoir

182 SOULET M.-H. Petit précis de grammaire indigène du travail social, op. cit., p. 17. 183 Cf. ROUZEL J., Le transfert dans la relation éducative, op. cit., p. 210.

préétabli, mais d’une connaissance née de la rencontre avec le réel.184 On rencontre dès lors maintenant le troisième terme de phronèsis.

Le premier signifiant employé en éducation spécialisée, la clinique, se rapporte quant à lui et le plus souvent à l’élaboration des actions en situation, à partir du terrain d’où elles sont extraites dans un premier temps avant d’être ensuite traitées dans l’après-coup par un travail de parole et d’écriture. Ce second temps reflète les processus d’élaboration réflexive du savoir en formation professionnelle ou en formation académique, selon des modalités d’élaborations similaires elles aussi qualifiées de cliniques par plusieurs auteurs du domaine universitaire.185 Joseph Rouzel convoque ces concepts, proposant comme développement supplémentaire la nécessité d’une « éthique du bien dire »186, par une mise en œuvre du logos, en y adjoignant comme qualificatif de l’action la notion de mètis évoquée précédemment et la justifiant en affirmant que la technique et le savoir ne suffisent pas dans ces activités professionnelles, « car il faut y épouser de manière très subtile la réalité inédite de la situation pour accomplir des actes efficaces ».187

L’ensemble de ces concepts peut être circonscrit par la notion de clinique et il faut rappeler que sur le plan historique la « clinique éducative spécialisée » puise ses sources et ses références dans la pratique de la psychanalyse et de la médecine d’où est issue la clinique comme le montre Michel Foucault dans son ouvrage Naissance de la clinique qui précise - lorsqu’il s’agit de parler de clinique - qu’il faut envisager une pratique indiciaire dans laquelle l’observation prédomine et exige des conditions praxéologiques particulières où les « discours bavards » doivent se taire selon le bon mot du médecin Corvisart : « Toute théorie se tait ou s’évanouit toujours au lit du malade ».188 Dans ce chapitre, on observe que le savoir spécifique de l’éducation spécialisée ne peut être envisagé qu’à partir de la complexité identitaire paradoxale et aporétique du savoir-faire sur laquelle il se fonde pour son édification. En sus de l’identité paradoxale liée aux origines de la profession ainsi que des visages multiples que présentent les modalités du savoir-faire, la problématique de l’identité trouve encore ici des prolongements et se complexifie logiquement de manière transversale au niveau de la question de la construction du savoir qui peut être élaboré depuis la pratique en situation.

184 Cf. POMMIER G.,Qu’est-ce que le réel, Toulouse, Érès, 2014. 185 Cf. CIFALI M.,GIUST-DESPRAIRIES F., De la clinique, op. cit. 186 Cf. LACAN J.,Le Séminaire, livre XX : Encore, Paris, Seuil, 1975. 187 ROUZEL J., Le transfert dans la relation éducative, op. cit., p. 211.

La question du savoir est ici double, telle la double herméneutique développée par Anthony Giddens en rapport au savoir sociologique.189 En effet, non seulement le savoir-faire implique une première réflexivité consubstantielle à l’élaboration de l’action dans le cours même de sa réalisation, mais elle exige de plus un second mouvement de distanciation réflexive permettant d’envisager la construction d’un savoir formalisé et objectivé dans un second temps d’après-coup, et l’on doit dans ce cas l’envisager comme un savoir qui relève d’un processus poiétique. En fonction de la complexité de la nature de l’action en éducation spécialisée et de son caractère indicible, on comprend ainsi mieux pourquoi la sociologie du travail social190 et notamment la sociologie de l’intervention191 butent sur ces mêmes questions où savoir et savoir-faire sont imbriqués par la nature complexe192 de l’agir qu’il s’agit d’y saisir par les processus de l’élaboration réflexive.

La clinique caractérise effectivement ce point de rencontre nodal, puisqu’elle consiste dans le cas des pratiques professionnelles et des recherches académiques à produire dans l’après- coup de son agir et de ses modalités relationnelles, une élaboration de savoir qui pour cette raison précise l’oblige à une dimension réflexive éthique supplémentaire. Parce que dans les pratiques cliniques la rencontre humaine est au cœur des interactions, une approche trop fortement orientée par la seconde dimension (poiétique) aurait pour conséquence le risque de réifier les sujets de l’action éducative et de les accompagner dans l’action par des gestes qui se rapprochent de modalités à colorations industrielles et techniques. Le 20e siècle en aura tragiquement donné l’illustration dramatique à travers les horreurs indicibles la Shoah et l’utilisation de la bombe atomique.193 Il n’est dès lors pas étonnant que dans le contexte socio- historique de sa naissance, l’éducation spécialisée se soit comme d’autres pratiques fondée sur un personnalisme humaniste et trouve dans la dénomination de pratique clinique une justification logique du rapport au savoir spécifique qui s’y manifeste, ainsi que le souci prioritaire de convoquer la philosophie de l’action à travers notamment les concepts de praxis et poièsis. Il s’agit en effet d’y saisir des phénomènes fondés avant tout sur la rencontre qui se produit dans le cadre de la relation éducative et des interactions humaines entres les individus.

189 Cf. HERREROS G., Sociologie d’intervention : pour une radicalisation de quelques principes, in VRANCKEN

D.,KUTY O. (Éd.), La sociologie et l’intervention, Bruxelles, De Boeck, 2001, p. 276.

190 Cf. DARTIGUENAVE J.-Y.,Pour une sociologie du travail social, Rennes, PUR, 2010.

191 Cf. VRANCKEN D.,KUTY O. (Éd.), La sociologie et l’intervention, Bruxelles, De Boeck, 2001. 192 Cf. MORIN E.,Introduction à la pensée complexe, Paris, Seuil, 2005.

193 Cf. SANKICHI T.,Poèmes de la bombe atomique, Paris, éditions Laurence Tepper, 2008 ; ÔE K.,Notes de

Pour s’inscrire concrètement dans le cadre d’une nouvelle profession, tel que ce fut la cas pour l’éducation spécialisée, le projet humaniste - nourri par son intention éducative « transcendantale » du devenir de la personne - s’est ainsi traduit par l’institution et l’institutionnalisation progressive de dispositifs professionnels et formatifs spécifiques qui ont été rendu opérationnels par des processus d’ingénierie politique, géographique, architecturale et enfin sociologique. Ces processus convoquent par ailleurs des savoirs disciplinaires extérieurs mais nécessaires à la justification sociale de la constitution de la profession. Il est ainsi possible de formuler l’hypothèse que l’éducation spécialisée s’est constituée comme un champ, telle la cellule d’un organisme, selon les mêmes modalités de structuration décrites par Anthony Giddens, à propos de la constitution de la société moderne dans laquelle l’éducation spécialisée est inscrite194, raison pour laquelle celle-ci ne peut être comprise que dans un processus de rupture sociologique et en considérant les orientations théoriques et les politiques de l’action (l’humus de la profession en quelque sorte) sur lesquelles sa croissance à pris pied. Au-delà du processus éducatif subséquent à la clinique et son inclination fondamentale pour la praxis, il faut par contre considérer que la normalisation sociale de la profession et de ses dispositifs institutionnels n’ont pu quant à eux s’ériger logiquement que par des moyens et une activité poiétique rendant possible son projet « politique » d’action personnaliste et humaniste sur le réel des terrains de l’intervention du social. Il faut alors et cette notion est elle aussi au cœur de la pratique éducative spécialisée, envisager l’intentionnalité de cette dernière à travers le concept de projet.195

Le projet moderne et la méthodologie de l’intervention éducative

Envisager la notion du projet, c’est faire un premier détour pour rappeler que l’agir humain s’appuie de tous temps sur deux dimensions qu’on peut ici qualifier de politique pour la première et de technique pour la seconde. Elles correspondent aux deux socles de l’agir humain analysé par A. Leroi-Gourhan dans Le geste et la parole196 : la parole premièrement -

i.e. la faculté de langage - permettant la coopération et le collectif entre humains, la coordination et l’élaboration projective de l’action commune ; la technique ensuite qui quant à elle fournit le soutien matériel indispensable à l’efficacité de l’action - i.e. l’outil construit et crée à cet effet par un prolongement prothétique de l’usage de la main humaine - qui vient

194 Cf. GIDDENS A., La constitution de la société, Paris, PUF, 1987. 195 Cf.BOUTINET J.-P., Anthropologie du projet. Paris, PUF, 1990.

196 Cf. LEROI-GOURHAN A., Le geste et la parole I. Technique et langage, Paris, Albin Michel, 1964 ; Le geste et

compenser la dépendance et l’incomplétude constitutive de l’être humain (néoténie). L’action engendrée par ce « couplage » anthropologique exige effectivement pour sa possibilité et son efficacité - on l’a déjà quelque peu évoqué - l’objet d’un double saisissement réflexif permettant d’une part de produire l’évaluation concourant à la production de son amélioration et d’autre part, en prévision des actions futures, de réaliser une projection anticipatrice et prévisionnelle de l’action qui implique une reprise réflexive que l’effectivité de l’action ne permet pas de réaliser dans le temps de l’action (rétroactivité/après-coup). Pour utiliser une métaphore illustrant simplement cette question, on peut convoquer à cet endroit deux figures de la mythologie grecque qui évoquent la double face de l’action : celles d’Épiméthée (qui réfléchit après-coup) et de Prométhée (qui prévoit).

Quels sont donc le projet et l’intentionnalité (quelle « politique des sujets » ?) de l’éducation spécialisée et en quoi le projet constitue-t-il d’autre part une modalité technique qui en soutient la praxis ? Contrairement à certaines conceptions courantes et d’après nos recherches, l’éducation spécialisée ne s’inscrit pas fondamentalement dans le concept de

relation d’aide, mais plus précisément et différemment, comme nous avons tenté de la cerner,

dans une activité professionnelle issue d’un projet humaniste et personnaliste (i.e. qu’on ne peut qualifier que de politique) qui se fonde prioritairement sur la rencontre d’autrui et qui se dispense socialement dans le cadre d’un accompagnement institutionnalisé que la relation éducative concrétise en fondant les bases de l’action, convoquant la profession et les professionnels à s’interroger sur leurs intentions, c’est-à-dire de ce qu’ils « veulent à l’autre ». La relation d’aide, si elle caractérise sans doute d’anciennes pratiques teintées de charité ou de philanthropie chrétienne, ne correspond pas fondamentalement au projet conceptuel de l’éducation spécialisée dans sa naissance moderne. En effet, en référence aux nombreux travaux cités sur l’identité et ses dangers en éducation spécialisée et comme le rappelle le philosophe Emmanuel Kant : « Il n’est pire tyrannie que de vouloir le bien d’autrui ».197

Tout comme Épiméthée « le distrait » qui se retrouve sans « qualité » à donner aux hommes, après les avoir toutes distribuées aux autres entités vivantes, la « maladie infantile » du travail social trouve son parangon dans la figure d’un éducateur qui se voudrait être un « bienfaiteur », un « sauveur » tant attendu dont l’amour suffirait à résoudre les maux de son prochain en difficulté et en souffrance. L’intention, les bonnes intentions (dont l’enfer est pavé) ne suffisent alors pas à justifier l’existence d’une telle profession. La figure de

Prométhée doit être convoquée car il faut en effet que pour répondre au mandat social qui lui est confié, l’éducateur spécialisé développe une technique clinique et des techniques

d’élaboration réflexive après-coup qui permettent d’une part de répondre de l’action qu’il a

effectuée dans son cadre légal et professionnel et d’autre part d’en constituer un savoir

transmissible susceptible par ailleurs de faire l’objet d’une formation professionnelle

adéquate. Comme Prométhée volant le feu aux Dieu198, l’éducation spécialisée a fait preuve d’innovation en empruntant à divers champs les outils, les savoir-faire, les savoirs et les techniques nécessaires à sa constitution, soignant particulièrement la considération de l’usage technique qui doit y être mesuré et jaugé à l’aulne complexe de la question éthique, afin d’éviter d’instrumentaliser les sujets accompagnés et de perdre ainsi de vue l’intentionnalité humaniste de l’action professionnelle (il y toujours un risque d’incendie). À partir de ces quelques considérations qui rappellent que si la clinique se fonde sur la rencontre, celle-ci ne se réalise pas sans la mise en œuvre de certaines techniques, et il est alors possible de reprendre cette question à partir de la notion et de la figure de projet, telle que la modernité l’a engendrée depuis les Lumières dans sa portée éducative et démocratique.199 C’est une notion centrale de l’action en éducation spécialisée qui se présente dans sa spécificité sous le terme souvent employé de projet socio-éducatif individualisé.

Sans développer ici l’historique exhaustif de la notion de projet, nous la considérons en rapport à la naissance de l’éducation spécialisée afin d’extraire des indices nécessaires à la recherche. À partir du courant philosophique de la phénoménologie née en Allemagne au 19e siècle et de ses principaux représentants - Schelling, Brentano, Husserl -, deux disciples formés dans les années trente par Heidegger prennent le relais en France et développent la notion de projet : Maurice Merleau-Ponty et Jean-Paul Sartre.200 Dans « L’existentialisme est un humanisme », Sartre affirme que la réalité humaine n’existe d’abord que comme manque, ce dernier provoquant précisément une mise en projet permanente : l’homme sera ce qu’il aura projeté d’être, dans un monde qu’il a lui-même projeté.201

On comprend alors mieux que ces réflexions aient nourri en partie les visées d’autonomie et de responsabilisation à l’égard des sujets pris en charge au moment même de la naissance de l’éducation spécialisée comme profession et en rapport à sa mission et son mandat, d’une part en fonction de ses intentions de soin quant à la question de devenir des sujets, et d’autre

198 STIEGLER B.,La technique et le temps 1. La faute d’Épiméthée, Paris, Galilée, 1994, pp. 18-19. 199 Cf. KANT E.,Qu’est-ce que les Lumières ? Paris, Flammarion, 1991.

200 ROUZEL J., Le travail d’éducateur spécialisé, op. cit., p. 52. 201 Ibid., p. 53.

part au moyen du projet, d’un projet de devenir peut-on dire. De plus, examiner la question du projet en éducation spécialisée, c’est de la même manière examiner cette question au prisme de la Modernité dans laquelle on retrouve un certain nombre de préoccupations adoptées par l’éducation spécialisée, car comme le propose Jean-Pierre Boutinet à propos de la notion de projet : « Comprendre pourquoi elle trouve dans le projet un mode d’expression privilégié, c’est chercher à mettre au jour toute une archéologie du projet qui montrera facilement deux dérives constitutives de cette modernité, exprimées dans deux utilisations contrastées du projet : une dérive rationalisante qui a permis la lente affirmation des conduites d’anticipation soucieuses de toujours mieux maîtriser l’avenir, une dérive plus existentielle faite d’interrogation sur le sens d’une évolution individuelle et collective et le type de finalité qu’elle incarne, exprimant par là une recherche inquiète d’un inaccessible idéal. ».202 Dans les modalités de conception de la notion de projet, on retrouve les interrogations bifaces entre

praxis et poièsis, ainsi que celles inscrites au sein des doubles références de l’ancrage

théorique de l’éducation spécialisée : la psychanalyse et la sociologie interactionniste et socio- historique dans lesquelles la profession a abondamment puisé pour sa constitution. Comment penser en effet la question du projet en tenant compte de ses potentielles dérives de réifications, dérives qui accompagnent le développement de la profession depuis sa naissance au regard des anciennes pratiques dont elle est issue et qui nourrissent régulièrement les débats depuis le départ ?

Pour trouver des repères et comprendre le projet de l’éducation spécialisée, il est nécessaire d’interroger la question du projet sous l’angle de la clinique et de repérer les

savoirs à partir desquels les pratiques se sont formalisées, notamment dans le cadre de la

formation professionnelle. S’assimilant à la praxis, la clinique est issue des pratiques médicale, psychopédagogique et psychanalytique et on la retrouve également mentionnée depuis un certain nombre d’années dans certaines sphères de la sociologie contemporaine.203 Le second terme de poièsis se traduit par un ancrage dans les sciences humaines et sociales, depuis l’interactionnisme social et symbolique jusqu’aux théories contemporaines de l’action et techniques de l’analyse de l’activité, en passant par un certain nombre de savoirs disciplinaires multiples et connexes d’où l’éducation spécialisée emprunte des références et des outils hétérogènes : philosophie, droit, sciences politiques, psychopathologie,

202 BOUTINET J.-P., op. cit., p. 8.

203 Cf. VRANCKEN D., KUTY O., op. cit. ; DE GAULEJAC V., La sociologie clinique, enjeux théoriques et

psychologie, pédagogie, etc. L’interactionnisme social et symbolique204 a été une ressource fondamentale pour la formalisation du savoir en éducation spécialisée, notamment dans le cadre des travaux de recherches de fin de formation exigés pour la certification, il est donc logique de considérer que cette méthodologie et ce paradigme se retrouvent convoqués en formation, en raison de l’expérience de champ scientifique dans l’étude des situation d’action sur les terrains professionnels, dans des domaines institutionnels très proches de l’éducation spécialisée205 et en rapport à des phénomènes sociologique connexes de déviances.206

Aujourd’hui, cet héritage se poursuit dans le cadre des méthodologies d’analyse de action et de l’activité, sciences de l’éducation, sociologie du travail et du travail social, sociologie de l’éducation, anthropologie, etc.207 Dans les deux cas, l’analyse se fonde traditionnellement sur des situations extraites depuis la pratique et s’inscrit dans une méthodologie de l’intervention orientée par le projet individualisé, projet communément dénommé de « projet socio- éducatif ». Se dessine ainsi une colonne vertébrale de l’action fondée sur la dimension relationnelle et la rencontre qui se prolonge par un pôle méthodologique de techniques d’observation et d’apprentissages utilisées au bénéfice des sujets pris en charge et qui sont évaluables techniquement, mesurables selon des modalités instrumentales poiétiques sous certains aspects, bien que la finalité du travail éducatif spécialisé reste de l’ordre de la praxis