Applications linéaires
Table des matières
1 Généralités sur les applications linéaires 2
1.1 Définitions . . . 2
1.2 Espace image, applications linéaires surjectives . . . 3
1.3 Noyau, applications linéaires injectives . . . 5
1.4 Isomorphismes . . . 7
1.5 L’ensemble des applications linéaires . . . 9
1.5.1 L’ensemble L(E, F) . . . 9
1.5.2 L’ensemble L(E) . . . 9
2 Applications linéaires en dimension finie 12 2.1 Matrice associée à une application linéaire . . . 12
2.1.1 Matrice d’un vecteur dans une base . . . 12
2.1.2 Matrice d’une famille de vecteurs dans une base . . . 12
2.1.3 Matrice d’une application linéaire dans des bases . . . 13
2.1.4 Calcul des coordonnées de l’image d’un vecteur . . . 14
2.2 Espaces vectoriels de matrices et d’applications linéaires . . . 15
2.2.1 Produit de matrices et composée d’applications linéaires . . . 16
2.2.2 Matrices carrées et endomorphismes . . . 17
2.3 Rang d’une application linéaire, théorème du rang . . . 17
2.3.1 Définition, premières propriétés . . . 17
2.3.2 Théorème du rang . . . 18
2.3.3 Application à la caractérisation des isomorphismes . . . 19
3 Changement de base 20 3.1 Matrices de passage . . . 20
3.2 Les nouvelles et anciennes coordonnées d’un même vecteur . . . 21
3.3 Formule de changement de base pour un endomorphisme . . . 21
3.4 Matrices semblables . . . 22
1 Généralités sur les applications linéaires
1.1 Définitions
Définition 1.1 : Application linéaire
SoientE etF deux R-espaces vectoriels. On considère une application ude E versF
E → F
x 7→ u(x) Cette application est dite linéaire si
∀x, y∈E,∀λ, µ∈R, u(λx+µy) =λ u(x) +µ u(y).
L’ensemble des applications linéaires deE vers F est noté L(E, F).
Une application linéaire est une application linéaire entre deux espaces vectoriels qui respecte leur structure d’espace vectoriel.
Propriété 1.2 : Application linéaire
SoientE etF deux R-espaces vectoriels, pour toute application linéaire u de E vers F, on a
• ∀x, y∈E, u(x+y) =u(x) +u(y),
• ∀x∈E,∀λ∈R, u(λ·x) =λ·u(x),
• ∀x∈E, u(−x) =−u(x).
Définition 1.3 : Endomorphisme
Une application linéaire deE vers E lui-même est appelée endomorphisme.
L’ensemble des endomorphismes deE est noté plus simplement L(E).
Définition 1.4 : Application nulle
L’application linéaire suivante est appelée application nulle
E → F
x 7→ 0F
Définition 1.5 : Application identité
L’application linéaire suivante est appelée application identité
E → E
x 7→ x
Exemple 1. Montrer que l’application suivante est linéaire u: R3 →R2
x1 x2
x3
7→ x1−x2 x2+x3
!
Remarque 1.6 : Dérivation L’application suivante est linéaire
Rn[X] → Rn[X]
P 7→ P0 2
Remarque 1.6 : Dérivation L’application suivante est linéaire
Rn[X] → Rn[X]
P 7→ P0 La dérivation est un endomorphisme deRn[X].
Exemple 2. Montrer que l’application suivante est linéaire u:Rn[X] → Rn[X]
P 7→ P +P0 Proposition 1.7 : Image de l’élément nul
SoientE etF deux R-espaces vectoriels, pour toute application linéaire u de E vers F, on a u(0E) = 0F.
Démonstration. Puisque ∀x∈E,∀λ∈R, u(λ·x) =λ·u(x),pourλ= 0, on a : u(0E) =u(0·x) = 0·u(x) = 0F
Proposition 1.8 : Image d’une combinaison linéaire
Soitu∈ L(E, F), pour tous vecteurs e1, e2, . . . , en de E et tous réelsλ1, λ2, . . . , λn, on a u
n
X
i=1
λiei
!
=
n
X
i=1
λiu(ei)
Démonstration. La démonstration se fait sans difficulté par récurrence sur n.
1.2 Espace image, applications linéaires surjectives
Définition 1.9 : Espace image
Soitu∈ L(E, F). On appelle image de u l’ensemble suivant
Im(u) ={y∈F|∃x∈E, u(x) =y}. C’est l’ensemble des éléments deF qui ont un antécédent paru dans E.
Proposition 1.10 : Structure de l’espace image
Soitu∈ L(E, F), l’ensemble Im(u) est un sous-espace vectoriel deF.
• Par définition de l’espace image, Im(u)⊂F.
• Commeu(0E) = 0F, 0F ∈Im(u).
• Soient y1 et y2 dans Im(u), ils existent x1 et x2 dans E tels que y1 = u(x1) et y2 = u(x2). Soient λ, µ∈R, alors
λy1+µy2 =λu(x1) +µu(x2) =u(λx1+µx2)∈Im(u), par linéarité de u.
On en conclut que Im(u) est un sous-espace vectoriel deF. Proposition 1.11 : Famille génératrice de Im(u)
SoientE unR-espace vectoriel de dimension finie n, (e1, e2, . . . , en) une base deE etu∈ L(E, F).
Vect(u(e1), u(e2), . . . , u(en)) = Im(u).
Démonstration. Montrons la double inclusion de Im(u) = Vect(u(e1), u(e2), . . . , u(en)).
• Montrons que Vect(u(e1), u(e2), . . . , u(en))⊂Im(u).
On note que (u(e1), u(e2), . . . , u(en)) est une famille de vecteurs du sous-espace vectoriel Im(u) deF, donc Vect(u(e1), u(e2), . . . , u(en))⊂Im(u).
• Montrons que Im(u)⊂Vect(u(e1), u(e2), . . . , u(en)).
Soity ∈Im(u), alors ∃x∈E tel queu(x) =y.
Commex∈E et (e1, e2, . . . , en) est une base de E,∃(λ1, λ2, . . . , λn)∈Rn tel quex=Pni=1λiei. y =u(x) =u
n
X
i=1
λiei
!
=
n
X
i=1
λiu(ei)
Doncy∈Vect(u(e1), u(e2), . . . , u(en)), on en conclut que Im(u)⊂Vect(u(e1), u(e2), . . . , u(en)).
La double inclusion nous permet de conclure que Im(u) = Vect(u(e1), u(e2), . . . , u(en)).
Méthode 1.12 : Comment déterminer une base de Im(u)?
Afin de déterminer une famille génératrice (voire une base) de Im(u), on cherche à déterminer l’image de la base de l’espace de départ.
Exemple 3. Déterminer une base de l’image de u définie par u:R2 → R3
x y
! 7→
3x+ 7y 2y x−y
.
Exemple 4. Déterminer une base de l’image de u définie par u:R2[X] → R2[X]
P 7→ P+P0 Remarque 1.13 : Rappel : surjectivité
uest surjective si chaque vecteur deF a au moins un antécédent paru.
Proposition 1.14 : Surjectivité de u Soitu∈ L(E, F),
u est surjective ⇔ Im(u) =F
Démonstration. Dire que u est surjective revient à dire que chaque élément deF s’écrit comme image par u d’un élément deE.
Proposition 1.15 : Surjectivité de u
SoientE unR-espace vectoriel de dimension finie n, (e1, e2, . . . , en) une base deE etu∈ L(E, F).
u est surjective ⇔ Vect(u(e1), u(e2), . . . , u(en)) =F Démonstration. Démonstration évidente avec les deux propositions précédentes.
Exemple 5. Montrer que l’application linéaire u suivante est surjective u:R3 → R2
x y z
7→ x+y z
! .
1.3 Noyau, applications linéaires injectives
Définition 1.16 : Noyau
Soitu∈ L(E, F). On appelle noyau deu l’ensemble suivant
Ker(u) ={x∈E|u(x) = 0F}.
C’est l’ensemble des éléments deE qui sont un antécédent du vecteur nul.
Proposition 1.17 : Structure du noyau
Soitu∈ L(E, F), l’ensemble Ker(u) est un sous-espace vectoriel deE.
Démonstration. Montrons que Ker(u) est un sous-espace vectoriel deE.
• Par définition du noyau, Ker(u)⊂E.
• Commeu(0E) = 0F, 0E ∈Ker(u).
• Soientx1 etx2 dans Ker(u),u(x1) =u(x2) = 0F. Soient λ, µ∈R, alors
u(λx1+µx2) =λu(x1) +µu(x2) = 0F, par linéarité de u.
Ainsi λx1+µx2∈Ker(u), on en conclut que Ker(u) est un sous-espace vectoriel deE.
Méthode 1.18 : Comment déterminer une base de Ker(u)?
Afin de déterminer une base de Ker(u), on cherche à résoudre l’équationu(x) = 0F.
Exemple 6. Déterminer une base de Ker(u) avec u définie par u: R3 → R2
x1 x2
x3
7→ x1+x2−2x3 3x1−x3
!
Exemple 7. Soit A= 0 1 1 0
!
. Déterminer une base de Ker(u) avec u définie par u: M2(R) → M2(R)
M 7→ AM −M A
Remarque 1.19 : Rappel : injectivité
uest injective si chaque vecteur de F a au plus un antécédent par u, autrement dit x, x0 ∈E, u(x) =u(x0) ⇒ x=x0
Proposition 1.20 : Injectivité de u Soitu∈ L(E, F),
u est injective ⇔Ker(u) ={0E} Démonstration. Montrons l’équivalence : uest injective ⇔Ker(u) ={0E}
• Supposons queu soit injective.
Ker(u) est un sous-espace vectoriel de E, donc 0E ∈Ker(u). Soit x∈Ker(u), alorsu(x) = 0F, soit encore u(x) = u(0E), l’injectivité de u nous permet de conclure que x = 0E. On en déduit que Ker(u) ={0E}.
• Supposons que Ker(u) ={0E}.
Soientx, x0 ∈E tels queu(x) =u(x0), ainsi
u(x) =u(x0)⇔u(x)−u(x0) = 0F ⇔u(x−x0) = 0Fpar linéarité de u
⇔x−x0 ∈Ker(u)⇔x−x0 = 0E ⇔x=x0 u est donc injective.
Exemple 8. Soit u l’application définie sur R2[X]par
u(P) =P(X+ 1) Montrer que u est un endomorphisme injectif de R2[X].
Proposition 1.21 : Injectivité de u
SoientE unR-espace vectoriel de dimension finie n, (e1, e2, . . . , en) une base deE etu∈ L(E, F).
u est injective ⇔(u(e1), u(e2), . . . , u(en)) est une famille libre de F.
Démonstration. Avec la proposition précédente, montrons l’équivalence suivante
(u(e1), u(e2), . . . , u(en)) est une famille libre de F ⇔Ker(u) ={0E}.
• Supposons que Ker(u) ={0E}.
Soientλ1, . . . λn∈Rtels que Pni=1λiu(ei) = 0F, alors 0F =
n
X
i=1
λiu(ei) =u
n
X
i=1
λiei
!
par linéarité de u.
Comme Ker(u) ={0E}, alors on a Pni=1λiei = 0E.
La famille (e1, e2, . . . , en) étant libre, λ1, λ2, . . . , λn sont donc tous nuls.
La famille (u(e1), u(e2), . . . , u(en)) est une famille libre de F.
• Supposons que la famille (u(e1), u(e2), . . . , u(en)) soit une famille libre deF.
Soit x ∈ Ker(u) ⊂ E, comme (e1, e2, . . . , en) est une base de E, il existe (λ1, . . . λn) ∈ Rn tel que x=Pni=1λiei. On a alors
0F =u(x) =u
n
X
i=1
λiei
!
=
n
X
i=1
λiu(ei) par linéarité deu.
Or la famille (u(e1), u(e2), . . . , u(en)) est libre, λ1, λ2, . . . , λn sont donc tous nuls.
On a x= 0 et donc Ker(u) ={0E}.
1.4 Isomorphismes
Remarque 1.22 : Rappel : bijection
u est bijective si chaque vecteur de F a exactement un antécédent par u. Une application u est donc bijective si, et seulement siu est à la fois injective et surjective.
Définition 1.23 : Isomorphisme
Une application linéaire deE vers F bijective est appelé un isomorphisme deE versF.
u−1 est trivialement bijective comme réciproque d’une application bijective. Ce qui est intéressant dans la proposition suivante, c’est que c’est une application linéaire.
Proposition 1.24 : Réciproque d’un isomorphisme
Soitu un isomorphisme de E vers F, sa réciproqueu−1 est un isomorphisme deF dansE.
Démonstration. Si uest une bijection de E vers F, alors u−1 est une bijection de F vers E. Montrons que u−1 ∈ L(F, E). Soient y1, y2 ∈F etλ, µ∈R, posons x1 =u−1(y1) et x2 =u−1(y2).
λy1+µy2 =λu(x1) +µu(x2) =u(λx1+µx2) par linéarité de u en composant par u−1 des deux côtés on obtient
u−1(λy1+µy2) =u−1(u(λx1+µx2)) =λx1+µx2 =λu−1(y1) +µu−1(y2) ce qui démontre queu−1∈ L(F, E).
Définition 1.25 : Espaces vectoriels isomorphes
SoientE etF deux R-espaces vectoriels, on dit queE etF sont isomorphes s’il existe un isomorphisme deE vers F.
Théorème 1.26 : Egalité des dimensions de deux espaces vectoriels isomorphes SoientE etF deux R-espaces vectoriels de dimension finie,
E etF sont isomorphes⇔dim(E) = dim(F) Démonstration. La démonstration de ce théorème est hors programme.
Exemple 9. Montrer que R3 etR2[X]sont isomorphes. Déterminer un isomorphisme de R3 vers R2[X].
Proposition 1.27 : Isomorphisme et bases
SoientE etF deux R-espaces vectoriels de dimension finie et u∈ L(E, F).
u est un isomorphisme ⇔ l’image d’une base deE est une base de F Démonstration. Soit B une base deE. D’après les propositions 1.15 et 1.21, on a
uest injective ⇔u(B) est une famille libre de F.
u est surjective ⇔u(B) est génératrice de F.
Exemple 10. Soit A= 0 1 1 0
!
. On considère l’application linéaire u définie par u: M2(R) → M2(R)
M 7→ AM
Montrer que u est un isomorphisme de M2(R) versM2(R).
Définition 1.28 : Automorphisme
Une application linéaire de E dans E bijective (endomorphisme et isomorphisme) est appelé un automorphisme deE.
Pour résumer, pour une application linéaire de E vers F,
Application linéaire −−−−−→bijective Isomorphisme
E=F
y E=F
y Endomorphisme −−−−−→bijective Automorphisme
1.5 L’ensemble des applications linéaires
1.5.1 L’ensemble L(E, F)
Proposition 1.29 : Opérations sur les applications linéaires Siu, v∈ L(E, F) et siλ∈R, on définit
u+v: E → F
x 7→ u(x) +v(x)
λ·u: E → F x 7→ λ u(x) u+v etλ·u sont encore des applications linéaires.
Propriété 1.30 : Structure de L(E, F)
SoientE etF deux R-espaces vectoriels, (L(E, F),+,·) est unR-espace vectoriel.
Démonstration. Montrons que L(E, F) est un sous-espace vectoriel de l’espace vectoriel A(E, F), l’ensemble des applications deE dans F.
• Par définition,L(E, F)⊂ A(E, F).
• Comme l’application nulle deE dansF est linéaire, elle appartient àL(E, F).
• D’après la proposition précédente, siu, v∈ L(E, F) et λ∈R, alors u+v etλ·u sont dans L(E, F).
On en conclut que L(E, F) est un sous-espace vectoriel deA(E, F), donc un espace vectoriel.
Propriété 1.31 : Composition d’applications linéaires
SoientE, F, G troisR-espaces vectoriels, u∈ L(E, F) et v∈ L(F, G) alorsv◦u∈ L(E, G).
Démonstration. Soient x, y∈E etλ, µ∈R
(v◦u)(λx+µy) = v(u(λx+µy))
= v(λ u(x) +µ u(y)) par linéarité de u
= λ v(u(x)) +µ v(u(y)) par linéarité de v
= λ(v◦u)(x) +µ(v◦u)(y)
Remarque 1.32
On retiendra que la composé de deux applications linéaires est une application linéaire.
1.5.2 L’ensemble L(E)
Dans l’ensembleL(E) des endomorphismes deE, nous pouvons composer les endomorphismes entre eux sans restriction.
Définition 1.33 : Puissance d’un endomorphisme
Soitu∈ L(E) non nul, on définit un dansL(E) pour tout n∈Npar la récurrence (u0 =IdE,
∀n∈N, un+1=u◦un. On a un=u◦u◦ · · · ◦u
| {z } n fois
pour n∈N∗.
Exemple 11. Soit k∈R, on définit l’application linéaire u par u:R2 → R2
x y
!
7→ kx ky
!
Soit n∈N, reconnaître un.
Exemple 12. On considère l’endomorphisme dde R[X] défini par : d: R[X] → R[X]
P 7→ P0 Soit n∈N, reconnaître dn.
Définition 1.34 : Polynôme d’endomorphisme, d’une matrice carrée SoitP(X) =
r
X
i=0
aiXi un polynôme deR[X], alors
• pouru∈ L(E), l’écriture P(u) représentera l’endomorphisme P(u) =
r
X
i=0
aiui ∈ L(E).
• pourA∈ Mn(R), l’écritureP(A) représentera la matriceP(A) =
r
X
i=0
aiAi ∈ Mn(R).
Définition 1.35 : Polynôme annulateur
On dit que le polynômeP ∈R[X] est annulateur deu (respectivement A) si P(u) = 0 (respectivementP(A) = 0).
Exemple 13. Soit une application linéaire u définie par u:R2 → R2
x y
!
7→ 2x+y 3y
!
Montrer que X2−5X+ 6est un polynôme annulateur de l’endomorphisme u.
Exemple 14. Soit la matrice A =
2 −2 1
2 −3 2
−1 2 0
. Vérifier que le polynôme P(X) = X2 + 2X−3 est annulateur de A.
Proposition 1.36 : Existence d’un polynôme annulateur en dimension finie
Tout endomorphisme d’un espace de dimension finie admet un polynôme annulateur non nul.
Démonstration. Soit u∈ L(E) un endomorphisme deE, espace de dimension n, la famille (IdE, u, . . . , un2) est une famille de vecteurs deL(E) qui compte n2+ 1 éléments.
Comme dim(L(E)) =n2, cette famille est liée, c’est-à-dire qu’il existea0, a1, . . . , an2 non tous nuls, tels que
n2
X
k=0
akuk= 0.
Si l’on pose P(X) =
n2
X
k=0
akXk, on a doncP(u) = 0, avec P 6= 0 puisque lesak sont non tous nuls.
Remarque 1.37 : Existence d’un polynôme annulateur pour une matrice De même, toute matrice deMn(R) admet un polynôme annulateur.
Méthode 1.38 : Calcul de l’inverse d’une matrice à l’aide d’un polynôme annulateur On peut calculer à l’aide d’un polynôme annulateur l’inverse d’une matrice : si P(X) =
r
X
i=0
aiXi avec a0 6= 0 est un polynôme annulateur d’une matrice A∈ Mn(R), alors on peut écrire
a0In+· · ·+arAr = 0n⇔Aa1In+· · ·+arAr−1=−a0In⇔A
−1 a0
a1In+· · ·+arAr−1
=In. Ainsi
A−1=−1 a0
a1In+· · ·+arAr−1.
Exemple 15. Soit la matrice A =
2 −2 1
2 −3 2
−1 2 0
. On a vu que le polynôme P(X) =X2+ 2X−3 était annulateur de A. En déduire que A est inversible et calculer A−1.
Méthode 1.39 : Calcul de la puissance n-ème d’une matrice à l’aide d’un polynôme annulateur
Dans certains cas, on peut également calculer la puissancen-ème d’une matrice à l’aide d’un polynôme annulateur. On procède par récurrence en utilisant le polynôme annulateur durant l’étape d’hérédité.
Exemple 16. Soit la matrice A =
2 −1 −1
−1 2 1
1 −1 0
. Vérifier que le polynôme P(X) = X2−3X+ 2 est annulateur de A. Montrer que pour tout n∈N, An= (2n−1)A−(2n−2)I3.
2 Applications linéaires en dimension finie
Dans toute cette section, nous travaillons uniquement avec des espaces vectoriels de dimension finie.
2.1 Matrice associée à une application linéaire 2.1.1 Matrice d’un vecteur dans une base
Définition 2.1 : Matrice d’un vecteur dans une base
SoientB= (e1, e2, . . . , en) une base de E et x un vecteur deE. On appelle matrice de xdans la baseB le vecteur colonne des coefficients de xdans B, notée MatB(x).
Proposition 2.2 : Unicité de l’écriture
SoitB= (e1, e2, . . . , en) une base fixée de E, l’application MatB :E→ Mn,1(R) est un isomorphisme.
Démonstration. Comme les coordonnées sur une base sont uniques, chaque vecteur a une unique matrice dans une base et à chaque matrice correspond un unique vecteur dans une base.
Pour conclure, on montre que MatB ∈ L(E,Mn,1(R)).
Pour λ, µ∈R, pour tous vecteursx=
n
X
j=1
xjej ety=
n
X
j=1
yjej de E, nous avons
λx+µy=
n
X
j=1
(λxj+µyj)ej et donc
MatB(λx+µy) =λMatB(x) +µMatB(y).
L’application MatB est donc un isomorphisme de E vers Mn,1(R).
Exemple 17. Calculer la matrice d’un vecteur de R3 dans la base B=
1 1
−1
,
−1 1 1
,
1
−1 1
.
Exemple 18. Calculer la matrice d’un vecteur de R2 dans la base C= 1
1
! , −1
1
!!
. Exemple 19. Calculer la matrice de P(X) = 1 + 2X+X2.
1. dans la base canoniqueB= (1, X, X2) de R2[X]
2. dans la base B0 = (1,1 +X,1 +X2) deR2[X]
2.1.2 Matrice d’une famille de vecteurs dans une base Définition 2.3 : Matrice d’une famille de vecteurs dans une base
SoientB= (e1, e2, . . . , en) une base deE et (f1, f2, . . . , fp) une famille de vecteurs deE.
On appelle matrice de (f1, f2, . . . , fp) dans la base B la matrice de Mn,p(R) dont la jème colonne (j∈[[1, p]]) est la matrice de fj dans la base B.
On note cette matrice MatB(f1, f2, . . . , fp).
Proposition 2.4 : Unicité de l’écriture
La baseB étant fixée, la matrice MatB(f1, f2, . . . , fp) est unique.
Exemple 20. Calculer la matrice de la famille (P, Q, R) dans la base B0 = (1,1 +X,1 +X2) avec : P(X) = 1 + 2X+X2, Q(X) =X+ 2X2, R(X) =−3−X2.
2.1.3 Matrice d’une application linéaire dans des bases Définition 2.5 : Matrice d’une application linéaire dans des bases
SoientBE = (e1, e2, . . . , ep) une base deE, BF une base deF etu∈ L(E, F). On appelle matrice de u dans les bases BE et BF la matrice de la famille u(BE) dans la base BF
MatBE,BF(u) = MatBF(u(BE)) = MatBF(u(e1), u(e2), . . . , u(ep))∈ Mn,p(R).
MatBE,BF(u) a nlignes (comme le nombre de vecteurs de la base d’arrivée) et pcolonnes (comme le nombre de vecteurs deu(BE)).
Proposition 2.6 : Unicité de l’écriture
Les basesBE etBF étant fixées, la matrice MatBE,BF(u) d’une application linéaireu est unique.
Exemple 21. Soit l’application linéaire
u: R3 →R2
x1
x2
x3
7→ x1−x2
x2+x3
!
Calculer la matrice de l’application linéaire u 1. dans les bases canoniques deR3 et R2. 2. dans les basesB=
1 1
−1
,
−1 1 1
,
1
−1 1
etC= 1
1
! , −1
1
!!
.
Définition 2.7 : Matrice d’un endomorphisme dans une base SoitBE une base deE etu∈ L(E).
On appelle matrice deu dans la base BE et l’on note MatBE(u) la matrice MatBE,BE(u).
Exemple 22. Soient A= 2 1 0 1
!
et v l’application linéaire v: M2(R) → M2(R)
M 7→AM −M A
Calculer la matrice de l’application linéaire v dans la base canoniqueB deM ( ).
2.1.4 Calcul des coordonnées de l’image d’un vecteur Exemple 23. Soit l’application linéaire
u: R3 →R2
x1 x2 x3
7→ x1−x2 x2+x3
!
Pour x∈R3,
1. montrer queMatB
R2(u(x)) = MatB
R3,B
R2(u) MatB
R3(x).
2. pour B =
1 1
−1
,
−1 1 1
,
1
−1 1
base de R3 et C = 1
1
! , −1
1
!!
base de R2, montrer que MatC(u(x)) = MatB,C(u) MatB(x).
En pratique, la proposition suivante montre que la composition par une application linéaire u correspond au produit par la matrice deu.
Proposition 2.8 : Calcul des coordonnées de l’image d’un vecteur
SoientBE une base deE,BF une base deF etu∈ L(E, F). Pour toutx∈E, on a MatBF(u(x)) = MatBE,BF (u) MatBE(x).
Démonstration. Déterminons le vecteur colonne MatBF(u(x)). SoientBE = (e1, e2, . . . , ep),BF = (f1, f2, . . . , fn) et
MatBE,BF(u) =
u(e1) u(e2) . . . u(ep)
a1,1 a1,2 . . . a1,p f1 a2,1 a2,2 . . . a2,p f2
a3,1 a3,2 . . . a3,p f3 ... ... ... ...
an,1 an,2 . . . an,p fn
alors pour tout j∈[[1, p]], on a u(ej) =
n
X
i=1
ai,jfi. Pour toutx=
p
X
j=1
xjej deE, on a
u(x) = u
p
X
j=1
xjej
=
p
X
j=1
xju(ej) car uest linéaire
=
p
X
j=1
xj
n
X
i=1
ai,jfi =
n
X
i=1
p
X
j=1
ai,jxj
fi.
On obtient les coordonnées deu(x) dans la base BF, donc
MatBF (u(x)) =
p
X
j=1
a1,jxj p
X
j=1
a2,jxj
...
p
X
j=1
an,jxj
D’autre part,
MatBE,BF(u) MatBE(x) =
a1,1 a1,2 . . . a1,p
a2,1 a2,2 . . . a2,p a3,1 a1,1 . . . a3,p ... ... ... an,1 an,2 . . . an,p
x1
x2 x3 ... xp
=
p
X
j=1
a1,jxj p
X
j=1
a2,jxj ...
p
X
j=1
an,jxj
= MatBF (u(x)).
Exemple 24. Soit u∈ L(R2[X]) dont la matrice dans la base canonique de R2[X]est
A=
1 0 0
2 −3 0
0 0 1
On poseP(X) = 1 +X+X2, calculeru(P).
Exemple 25. Soit u∈ L(R3[X]) tel que
u:R3[X] → R3[X]
P(X) 7→ P0(X) 1. Déterminer la matrice M = MatB
R3[X](u).
2. Soit Q(X) =X3−2X+ 1, déterminer u(Q).
Exemple 26. Soient A= 2 1 0 1
!
et v l’application linéaire v: M2(R) → M2(R)
M 7→AM −M A
On a vu que MatB(v) =
0 0 1 0
−1 1 0 1
0 0 −1 0
0 0 −1 0
, déterminerv −2 3 2 −1
! .
2.2 Espaces vectoriels de matrices et d’applications linéaires
Proposition 2.9 : Base et dimension de L(E, F)
SoientBE = (e1, e2, . . . , ep) une base deE etBF = (f1, f2, . . . , fn) une base deF. On définit la famille (ui,j)1≤i≤n
1≤j≤p
:
(ui,j(ek) = 0, sik6=j ui,j(ej) =fi.
La famille (ui,j)1≤i≤n 1≤j≤p
est une base deL(E, F). La dimension de L(E, F) est donc dim(E)×dim(F).
Proposition 2.10 : Isomorphisme entre L(E, F) et Mn,p(R)
SoientBE = (e1, e2, . . . , ep) une base deE etBF = (f1, f2, . . . , fn) une base deF. L’application MatBE,BF :L(E, F)→ Mn,p(R) est un isomorphisme.
Démonstration. Montrons que MatBE,BF est une application linéaire.
Soientu, v∈ L(E, F), soient (ai,j)1≤i≤n 1≤j≤p
= MatBE,BF(u) et (bi,j)1≤i≤n 1≤j≤p
= MatBE,BF(v) etλ, µ∈R
pour toutj ∈[[1, p]], (λu+µv)(ej) = λu(ej) +µv(ej)
= λ
n
X
i=1
ai,jfi
! +µ
n
X
i=1
bi,jfi
!
=
n
X
i=1
(λ ai,j +µ bi,j)fi De ce fait, MatBE,BF est une application linéaire :
MatBE,BF(λu+µv) = (λ ai,j+µ bi,j)1≤i≤n
1≤j≤p
=λMatBE,BF(u) +µMatBE,BF(v) De plus, pour touti∈[[1, n]] et j∈[[1, p]],
MatBE,BF(ui,j) =Ei,j
L’application MatBE,BF envoie la base de L(E, F) sur la base canonique deMn,p(R), c’est donc un isomor- phisme.
Remarque 2.11
On avait déjà vu que lorsque les basesBE et BF sont fixées, la matrice MatBE,BF(u) d’une application linéaireu est unique. On sait désormais qu’à une matrice de Mn,p(R) correspond une unique application linéaire deL(E, F) pour des bases données.
2.2.1 Produit de matrices et composée d’applications linéaires Proposition 2.12 : Matrices et composition
SoientE,F et Gmunis respectivement des bases BE,BF etBG. Pour u∈ L(E, F) et v∈ L(F, G) MatBE,BG(v◦u) = MatBF,BG(v) MatBE,BF(u)
Démonstration. Soit x∈E,
MatBE,BG(v◦u) MatBE(x) = MatBG((v◦u)(x)) = MatBF,BG(v) MatBF(u(x))
= MatBF,BG(v) (MatBE,BF(u) MatBE(x))
= (MatBF,BG(v) MatBE,BF(u)) MatBE(x)
Puisqu’à l’applicationv◦une correspond qu’une seule matrice dans les basesBE et BG, il s’agit de la matrice MatBF,BG(v) MatBE,BF(u).
Remarque 2.13
On retiendra que la multiplication des matrices correspond à la composition des applications linéaires.
2.2.2 Matrices carrées et endomorphismes
Proposition 2.14 : Matrice de la puissance d’un endomorphisme SoientBE une base deE,u∈ L(E) non nul et n∈N∗, alors
MatBE(un) = (MatBE(u))n avec un=u◦u◦ · · · ◦u
| {z } n fois
.
Démonstration. Avec la proposition précédente, la démonstration se fait sans difficulté par récurrence sur n.
Proposition 2.15 : Inversibilité de la matrice d’un automorphisme SoitBE une base deE,
u est un automorphisme de E ⇔ MatBE(u) est inversible Dans ce cas, on a
MatBE(u−1) = (MatBE(u))−1.
Démonstration. Démontrons uniquement le sens direct. Supposons queusoit un automorphisme deE, espace vectoriel de dimension p. Commeu◦u−1 =IdE et u−1◦u=IdE, alors
MatBE(u) MatBE(u−1) =Ip et MatBE(u−1) MatBE(u) =Ip. Donc MatBE(u−1) = (MatBE(u))−1.
Exemple 27. Soit u∈ L(R3[X]) tel que
u:R3[X] → R3[X]
P(X) 7→ P(X+ 2) Déterminer la matrice M = MatB
R3[X](u). La matriceM est-elle inversible ? Si oui, calculer son inverse.
2.3 Rang d’une application linéaire, théorème du rang
2.3.1 Définition, premières propriétés
Définition 2.16 : Rang d’une application linéaire
Soitu∈ L(E, F), on appelle rang de ula dimension de l’image de u que l’on note rg(u) = dim(Im(u))
Remarque 2.17 : Lien avec le rang d’une famille de vecteurs SoitBE = (e1, e2, . . . , ep) une base deE etu∈ L(E, F), alors
rg(u) = dim(Vect(u(e1), u(e2), . . . , u(ep)))
Proposition 2.18 : Rang invariant par changement de base SoientBE une base deE,BF une base deF etu∈ L(E, F), alors
rg(u) = rg (MatBE,BF(u))
Le rang d’une application linéaire est égal au rang de sa matrice dans n’importe quelle base.
Démonstration. NotonsBE = (e1, e2, . . . , ep) et BF = (f1, f2, . . . , fn).
On sait que rg(u) = rg(u(e1), u(e2), . . . , u(ep)). MatBF :F → Mn,1(R) est un isomorphisme, ainsi dim(Vect(u(e1), u(e2), . . . , u(ep)) = dim(Vect(MatBF(u(e1)),MatBF(u(e2)), . . . ,MatBF(u(ep)))
= rg(MatBF(u(e1)),MatBF(u(e2)), . . . ,MatBF(u(ep))) (définition du rang d’une matrice) = rg(MatBF(u(e1), u(e2), . . . , u(ep)))
(matrice d’une application linéaire) = rg(MatBE,BF(u))
2.3.2 Théorème du rang
Théorème 2.19 : Théorème du rang Soitu∈ L(E, F), alors
dim(Ker(u)) + rg(u) = dim(E).
Démonstration. La démonstration de ce théorème est hors programme.
Remarque 2.20
Dans la pratique, il suffit donc de déterminer la dimension du noyau ou celle de l’image d’une application linéaire pour avoir les deux dimensions.
Exemple 28. Soit u une application linéaire définie par u:R2 → R3
x y
! 7→
3x+ 7y 2y x−y
.
On a déjà déterminé Im(u) = Vect
3 0 1
,
7 2
−1
. Déterminer le noyau de u.
Exemple 29. On considère l’endomorphisme dde R[X] défini par : d: R3[X] → R3[X]
P 7→ P0 Déterminer le rang de d.
2.3.3 Application à la caractérisation des isomorphismes Proposition 2.21 : Caractérisation de l’injectivité
Soitu∈ L(E, F), alors
u est injective ⇔rg(u) = dim(E) Démonstration.
uest injective ⇔Ker(u) ={0E} ⇔0 = dim(Ker(u)) = dim(E)−rg(u)⇔rg(u) = dim(E)
Proposition 2.22 : Caractérisation de la surjectivité Soitu∈ L(E, F), alors
u est surjective ⇔rg(u) = dim(F) Démonstration.
u est surjective ⇔Im(u) =F ⇔dim(Im(u)) = dim(F)⇔rg(u) = dim(F)
Proposition 2.23 : Caractérisation des isomorphismes Soitu∈ L(E, F). Supposons que dim(E) = dim(F), alors
u est injective ⇔u est surjective ⇔u est un isomorphisme Démonstration. C’est une conséquence immédiate des deux propositions précédentes.
Remarque 2.24
Un endomorphisme injectif (ou surjectif) est nécessairement un automorphisme.
Proposition 2.25 : Rang d’une matrice carrée inversible SoitA∈ Mn(R), alors
rg(A) =n ⇔ A est inversible
Démonstration. Soit uAl’endomorphisme deRn dont la matrice dans la base canonique deRn est A, on a alors
Aest inversible ⇔ uA est un automorphisme, (d’après la proposition 2.15)
⇔ rg(uA) = dim (Rn) =n, (d’après les propositions 2.22 et 2.23)
⇔ rg(A) =n, (d’après la proposition 2.18)