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soutenu par Kazutaka TSURUDOME CIP Promotion Louis Pasteur (2017-2018)

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Université Paris 1

École nationale d’administration

Juin 2018

Masters Études européens et relations internationales Spécialité Relations internationales et Actions à l’Étranger Parcours « Administration publique et Affaires internationales »

soutenu par

Kazutaka TSURUDOME

CIP Promotion Louis Pasteur (2017-2018)

Sous la direction de Dr Alexis VAHLAS

Maître de conférences en droit L’Université de Strasbourg

Les perspectives de la collaboration nippo-française dans le champ de la sécurité et de la défense au

profit de pays tiers, en Afrique et en Asie

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1

Table des matières

Résumé ... 2

Introduction ... 3

I. UN NOUVEAU CHAMP DE PARTENARIAT NIPPO-FRANÇAISE ... 8

A. Des progrès récents et rapides ... 8

A.1 La feuille de route pour la coopération nippo-française 2013-2018 ... 9

A.2 Le plan nippo-français pour l’Afrique (2015) au niveau des Premiers ministres ... 10

A.3 La 4e session des consultations politico-militaires ministérielles « 2+2 » en janvier 2018 ... 11

B. Des avantages spécifiques pour chacun des partenaires ... 12

B.1 Pour le Japon ... 12

B.2 Pour la France ... 17

B.3 Pour les pays tiers ... 23

II. LES CHAMPS D’OPPORTUNITÉS ET LES PERSPECTIVES ... 23

A. La sécurité maritime ... 23

A.1 Dans le golfe d’Aden ... 24

A.2 Dans le golfe de Guinée ... 26

A.3 En Indo-Pacifique ... 27

B. La protection civile ... 30

B.1 Énergie nucléaire ... 30

B.2 Catastrophes naturelles ... 32

C. Les opérations de Maintien de la Paix (OMP) ... 34

C.1 Centres de maintien de la paix ... 34

C.2 Français langue étrangère (FLE) ... 35

Conclusion ... 39

Bibliographie ... 42

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2

Résumé

Afin de faire face aux nouvelles menaces dans le monde, il est essentiel que le Japon et la France, qui partagent des valeurs fondamentales, endossent des responsabilités et jouent conjointement un rôle plus important que par le passé.

Le moment est opportun pour approfondir la collaboration nippo-française cette année, en 2018, au cours de laquelle le Japon et la France célèbrent le 160e anniversaire de l’établissement de leurs relations diplomatiques.

Compte tenu du récent progrès rapide de cette coopération notamment après que le président François Hollande a visité le Japon en 2013, et des avantages particuliers pour le Japon, la France ainsi que les pays tiers, le potentiel de collaboration nippo-française apparait évident dans les domaines de la sécurité maritime, de la protection civile et des opérations de maintien de la paix, surtout au profit de pays tiers en Afrique et en Asie.

La sécurité maritime est le champ idéal pour la collaboration entre les deux puissances maritimes que sont le Japon et la France. Cette coopération a un fort potentiel, notamment dans le golfe d’Aden, le golfe de Guinée et en Indo-Pacifique.

La protection civile est un autre domaine où le Japon et la France peuvent coopérer avec chacun ses points forts, surtout dans le champ de l’énergie nucléaire et de la gestion des catastrophes naturelles.

Afin de bien préparer les contingents à servir au sein des opérations de maintien de la paix, il y aurait deux moyens efficaces : le soutien aux centres de maintien de la paix et l’apprentissage du français par les Forces d’autodéfense japonaises.

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Introduction

Fondé sur les valeurs fondamentales que sont la liberté, la démocratie, les droits de l’Homme et l’État de droit, l’ordre mondial, qui a soutenu la stabilité et la prospérité mondiale depuis l’après-guerre, est désormais fortement ébranlé par de nouvelles menaces comme le terrorisme, le développement nucléaire de la Corée du Nord et les tensions en mers de Chine orientale et méridionale.

Concernant le terrorisme, selon Europol, il y a eu, au total en 2016, 142 attaques terroristes ratées, déjouées et achevées dans l’Union européenne1. 142 victimes ont succombé à des attaques terroristes et 379 personnes ont été blessées2. La plupart des victimes sont le résultat d'attaques terroristes djihadistes3 . Le nombre de suspects arrttés pour terrorisme d'inspiration religieuse ou djihadiste augmente constamment ces dernières années (voir Figure 1)4 . La France est le seul État membre dans lequel le nombre total d'arrestations continue d'augmenter ces trois dernières années : 238 en 2014, 424 en 2015 et 456 en 20165.

Figure 1 : Nombre de suspects arrêtés pour terrorisme d'inspiration religieuse ou djihadiste dans l'UE (Source : Europol)

1 Europol, Europol’s annual EU Terrorism Situation and Trend Report (TE-SAT), 2017, p.10. Disponible sur : https://www.europol.europa.eu/tesat/2017/

2 Ibid

3 Ibid

4 Ibid, p.23.

5 Ibid, p.10.

0 100 200 300 400 500 600 700 800

2012 2013 2014 2015 2016

Nombre de suspects arrêtés pour terrorisme d'inspiration religieuse / djihadiste

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À propos du développement nucléaire de la Corée du Nord, les activités militaires de ce pays constituent une menace sérieuse et immédiate non seulement pour la région, mais aussi pour la communauté internationale. Le développement d'armes nucléaires et de missiles balistiques ainsi que l'amélioration de leur capacité opérationnelle représentent un nouveau degré de menace. En 2017, la Corée du Nord a procédé à son sixième essai nucléaire et a lancé plus de 15 missiles balistiques, dont deux ont survolé le Japon6. Si la Corée du Nord parvenait à allonger la portée de ses missiles balistiques ainsi qu'à miniaturiser les ogives nucléaires et à en équiper ses missiles, il est possible qu’un jour un missile équipé d’ogives nucléaires atteigne mtme l’Europe ou les États-Unis (voir Figure 2).

Figure 2 : Portée des missiles balistiques nord-coréens (Source : Ministère japonais de la Défense7)

6 Ministère japonais des Affaires étrangères, « Livre bleu de la diplomatie, version 2018 [traduction libre] », 2018, p.4. Disponible sur : https://www.mofa.go.jp/mofaj/files/000363740.pdf

7 Ministère japonais de la Défense, « Livre blanc de la défense, version 2017 [traduction libre] », 2017, p.5-6. Disponible sur : www.mod.go.jp/e/publ/w_paper/pdf/2017/DOJ2017_Digest_FR.pdf

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En ce qui concerne les tensions en mer de Chine orientale et méridionale, tandis que le développement pacifique de la Chine est le bienvenu, ses tendances à renforcer largement et rapidement sa puissance militaire (voir Figure 3) et à changer le statu quo par des manifestations de force (voir Figure 4), conjuguées au manque de transparence dans ses affaires militaires et de sécurité, génèrent des craintes quant à leur impact sur l'environnement de sécurité dans la région et au sein de la communauté internationale. En mer de Chine orientale, outre la violation des eaux territoriales par des navires chinois, la Chine poursuit le développement de ressources dans des espaces où les zones économiques exclusives et les limites du plateau continental n'ont pas encore été délimitées. En mer de Chine méridionale, « les travaux de poldérisation à grande échelle et la militarisation des archipels contestés ont modifié le statu quo et augmenté les tensions »8. Les bases militaires dans les zones controversées en cours dans la mer de Chine méridionale progressent régulièrement, et la superficie totale des installations permanentes achevées ou mises en service en 2017 est d'environ 290 000 mètres carrés9. En outre, « certains dispositifs fondamentaux de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer ne sont pas respectés dans les mers de Chine »10. Par exemple, concernant le conflit entre les Philippines et la Chine en mer de Chine méridionale, en juillet 2016, le tribunal arbitral a jugé l'illégalité des activités de remblai de la Chine. Malgré cela, cette dernière a nié le pouvoir juridiquement contraignant de cette décision finale.

8 Ministère français des Armées, « La France et la sécurité en Indo‑Pacifique », juin 2018, p.4. Disponible sur :

https://www.defense.gouv.fr/content/download/532751/9176232/file/La%20France%20et%20la%20s%C3

%A9curit%C3%A9%20en%20Indo-Pacifique%20-%202018.pdf

9 Ministère japonais des Affaires étrangères, « Livre bleu de la diplomatie, version 2018 [traduction libre] », 2018, p.5. Disponible sur : https://www.mofa.go.jp/mofaj/files/000363740.pdf

10 Ministère français des Armées, « La France et la sécurité en Indo‑Pacifique », juin 2018, p.4. Disponible sur :

https://www.defense.gouv.fr/content/download/532751/9176232/file/La%20France%20et%20la%20s%C3

%A9curit%C3%A9%20en%20Indo-Pacifique%20-%202018.pdf

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Figure 3 : Évolution du budget de la défense nationale publié par la Chine (Source : Ministère japonais de la Défense11)

Figure 4 : Des activités récentes de la Chine dans les zones maritimes (Source : Ministère japonais de la Défense12)

11 Ministère japonais des Affaires étrangères, « Livre bleu de la diplomatie, version 2018 [traduction libre] », 2018, p.5. Disponible sur : https://www.mofa.go.jp/mofaj/files/000363740.pdf

12 Ibid

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Afin de faire face à ces menaces, qui sont également soulignées dans la « Revue stratégique de défense et de sécurité nationale » présentée au Parlement français en octobre 201713 et dans la nouvelle version du document de référence sur la politique de défense française en Indo-Pacifique « La France et la sécurité en Indo-Pacifique » présentée en juin 201814 , il est essentiel que le Japon et la France, deux puissances militaires majeures (respectivement 8e rang dans le monde pour le Japon et 6e rang pour la France en 201715) qui partagent des valeurs fondamentales, endossent des responsabilités et jouent conjointement un rôle plus important que par le passé. Le moment est opportun pour approfondir la collaboration nippo-française alors que le Japon et la France célèbrent, en 2018, le 160e anniversaire de l’établissement de leurs relations diplomatiques.

160 ans après la signature d’un traité d’amitié et de commerce qui permit l’établissement de relations diplomatiques entre le Japon et la France, comment les deux pays coopèrent-ils ensemble plus étroitement et réagissent-ils aux risques internationaux pour faire face aux menaces imminentes dans le monde ? Ce mémoire examine les opportunités et les perspectives de la collaboration nippo-française dans le champ de la sécurité et de la défense, au regard des bénéfices spéciaux de cette coopération. Nous traiterons d’abord le récent progrès rapide et les avantages particuliers de la collaboration nippo-française (I), avant d’analyser les opportunités et les perspectives de cette collaboration dans le domaine de la sécurité maritime, de la protection civile et des opérations de maintien de la paix (II).

Avant d’aborder ces différents points, il est important de préciser que ce mémoire est rédigé par l’auteur dans le cadre d’une recherche scientifique et n’exprime aucune position liée

13 Ministère français des Armées, « Revue stratégique de défense et de sécurité nationale », octobre 2017, Paragraph 26, 107, 112. Disponible sur :

https://www.defense.gouv.fr/content/download/514684/8664656/file/2017-RS-def1018.pdf

14 Ministère français des Armées, « La France et la sécurité en Indo Pacifique », juin 2018, p.4. Disponible sur :

https://www.defense.gouv.fr/content/download/532751/9176232/file/La%20France%20et%20la%20s%C 3%A9curit%C3%A9%20en%20Indo-Pacifique%20-%202018.pdf

15 Stockholm International Peace Research Institute (SIPRI), Trends in world military expenditure 2017, 2018, p.2. Disponible sur : https://sipri.org/sites/default/files/2018-04/sipri_fs_1805_milex_2017.pdf

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à sa fonction actuelle. En outre, dans la mesure où l’auteur a effectué son stage à la Direction de coopération de sécurité et de défense (DCSD) au Quai d’Orsay dans le cadre du stage d’étude au sein d’une administration française, certains éléments de ce mémoire sont éclairés par cette expérience. Néanmoins, ce mémoire n’exprime en rien les positions officielles des gouvernements japonais et français.

I. UN NOUVEAU CHAMP DE PARTENARIAT NIPPO-FRANÇAISE

Au cours de ces dernières années, le Japon et la France ont grandement progressé dans leur coopération bilatérale en matière de sécurité et de défense notamment après que le président François Hollande a visité le Japon en 2013 et que la « Feuille de route pour la coopération nippo-française » a été adoptée (A). Les avantages de cette collaboration naissante sont nombreux, non seulement pour les deux pays, mais aussi pour les pays tiers (B).

A. Des progrès récents et rapides

En octobre 1858, le Japon et la France ont signé un traité d’amitié et de commerce qui permit l’établissement de relations diplomatiques entre les deux pays16. Cette relation nippo- française est dynamique et encadrée par un partenariat stratégique signé en 1995. Les relations de défense bilatérales sont régies par un échange de lettres de 2002 et une déclaration conjointe de 2005 pour un « nouveau partenariat pour la paix, la stabilité et la prospérité de la communauté internationale ». Cette relation est encore renforcée par la « Feuille de route pour la coopération nippo-française »17 publiée en 2013 (A1), le « Plan nippo-français pour le

16 Polak Christian, Soie et lumières : l’âge d’or des échanges franco-japonais (des origines aux années 1950), Tokyo, Hachette Fujingaho, 2002, p. 29

17 Ambassade du Japon en France, « Feuille de route pour la coopération franco-japonaise 2013-2018 », 2013. Disponible sur : www.fr.emb-japan.go.jp/actualite/pdf/Feuille_de_route_France_Japon.pdf, consulté le 10 mai 2018.

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développement durable, la santé et la sécurité en Afrique »18 officialisé en 2015 (A2) et, plus récemment, par la 4e session des consultations politico-militaires ministérielles « 2+2 »19 en janvier 2018 (A3).

A.1 La feuille de route pour la coopération nippo-française 2013-2018

En juin 2013, à l’occasion de la visite du président François Hollande au Japon, la « Feuille de route pour la coopération franco-japonaise 2013-2018 » a été adoptée pour concrétiser le contenu de la coopération pour les cinq ans à venir. Il s’agit de renforcer le « partenariat d’exception » dans tous les domaines notamment par le dialogue politique et de sécurité, mais aussi par la coopération économique, scientifique, technologique et culturelle.

Le dialogue annuel politique et de sécurité, le seul que la France ait engagé à ce niveau avec un pays d’Asie, permet d’échanger sur les enjeux stratégiques internationaux et de donner une forte impulsion à la coopération bilatérale sur les questions internationales, de défense et de sécurité. Grâce à cette feuille de route, au cours des cinq dernières années, les progrès de la relation bilatérale sur les questions stratégiques et de défense ont été assez impressionnants. Par exemple, quatre sessions des consultations politico-militaires ministérielles « 2+2 » ainsi que trois dialogues sur la cybersécurité ont eu lieu. D’ailleurs, l’accord intergouvernemental portant sur le transfert d’équipements et de technologies de défense, qui prévoit la mise en œuvre d’activités communes de recherche, de développement et de production, est entré en vigueur en décembre 2016. De plus, plusieurs exercices conjoints se sont tenus comme ARC 17 conduit par le Japon, la France, les États-Unis et le Royaume-Uni, à proximité du Japon et des îles de Guam et de Tinian lors de la visite de bâtiments français au Japon dans le cadre de la mission «

18 Ministère japonais des Affaires étrangères, « Plan franco-japonais pour le développement durable, la santé et la sécurité en Afrique ». Disponible sur : www.mofa.go.jp/files/000103135.pdf, consulté le 10 mai 2018.

19 Ambassade du Japon en France, « Communiqué conjoint des ministres des Affaires étrangères et de la Défense de la République française et du Japon ». Disponible sur : http://www.fr.emb-

japan.go.jp/actualite/pdf/18-Communique-(2+2).pdf, consulté le 10 mai 2018.

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Jeanne d’Arc 2017 ». En outre, à l’invitation de la France, l’avion japonais de lutte contre les anti-sous-marins Kawasaki P-1 a été présenté en juin 2017 au Salon du Bourget, la plus prestigieuse des manifestations aéronautiques internationales.

A.2 Le plan nippo-français pour l’Afrique (2015) au niveau des Premiers ministres En octobre 2015, lors de la visite du Premier ministre Manuel Valls au Japon, a été adopté le « Plan franco-japonais pour le développement durable, la santé et la sécurité en Afrique (Plan franco-japonais pour l’Afrique) ». Il s’appuie sur la coopération sécuritaire déjà existante, comme le cofinancement du Forum international de Dakar sur la paix et la sécurité en Afrique, l’évacuation des ressortissants japonais en cas d’urgence (en Côte d’Ivoire en 2011 par exemple) ou le cofinancement de certaines écoles de maintien de la paix du Ghana, du Mali, du Cameroun ou d’Éthiopie. La 2e édition du Forum international de Dakar, ainsi que le premier séminaire nippo-français destiné aux attachés de défense japonais en poste sur le continent africain ont été organisés respectivement un mois (novembre 2015) et trois mois (janvier 2016) après l’adoption de ce plan. De plus, afin d’améliorer la sécurité au Sahel, ce plan prévoit la recherche de voies de coopération nippo-française pour appuyer le renforcement des capacités dans le domaine de la police et de la justice dans les pays du Sahel et pour soutenir les projets destinés à améliorer la gestion intégrée des espaces frontaliers au Sahel. En outre, à l’occasion de la 6e Conférence internationale de Tokyo sur le Développement de l’Afrique (TICAD VI) de Nairobi au Kenya, le Japon et la France ont organisé en août 2016 un événement conjoint consacré à l’action nippo-française sur le continent africain20. Cette réunion a permis de faire le point sur l’état d’avancement de la mise en œuvre du Plan franco-japonais pour l’Afrique.

Par ailleurs, un mémorandum de coopération entre le gouvernement ivoirien, l’Agence

20 Ambassade du Japon en France, « Événement conjoint sur le Partenariat franco-japonais pour l’Afrique organisé dans le cadre de la TICAD VI ». Disponible sur :

https://jp.ambafrance.org/IMG/pdf/000183525.pdf?21186/c02464e9e0912466c1662a680b87b65726c59abc , consulté le 14 mai 2018.

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japonaise de coopération internationale (JICA) et l’Agence française de Développement (AFD) a été signé. Par ce mémorandum, Abidjan a été désignée comme ville-pilote de la coopération en matière de développement durable et le Japon ainsi que la France travaillent ensemble à la réhabilitation des infrastructures de la ville, sur la base d’un plan directeur élaboré par le Japon.

A.3 La 4e session des consultations politico-militaires ministérielles « 2+2 » en janvier 2018 En janvier 2018, les ministres des Affaires étrangères et de la Défense du Japon et de la France se sont réunis à Tokyo, pour la 4e session des consultations politico-militaires ministérielles « 2+2 », suivie de la 7e session du dialogue stratégique qui se tient à intervalles réguliers alternativement au Japon et en France au niveau des ministres des Affaires étrangères.

Lors de ces entretiens, ils ont réaffirmé leur solidarité face au développement du programme nucléaire et balistique nord-coréen, ainsi que la nécessité de préserver le régime de non-prolifération. Ils ont travaillé sur l’ensemble des grands enjeux internationaux : renforcement du multilatéralisme, lutte contre le terrorisme, règlement des crises régionales, protection d’un ordre maritime international fondé sur le droit, lutte contre le changement climatique, coopération en matière de développement international, lutte contre toute forme de protectionnisme. Ils ont par ailleurs évoqué les relations économiques entre les deux pays, notamment dans le domaine du nucléaire civil, et l’accord de partenariat économique Union européenne-Japon qui ouvre de nouvelles perspectives d’échanges. Enfin, les deux pays ont salué l’accord global obtenu dans le cadre des négociations pour un Accord d’acquisition et de soutien logistique (ACSA), lancées lors de la précédente réunion en format « 2+2 » de janvier 2017. Cet accord a pour effet de renforcer l’interopérabilité entre les armées françaises et les Forces d’autodéfense japonaises et de faciliter leur coopération lors de leur participation à des exercices, à des opérations de maintien de la paix ou à des actions en matière d’assistance humanitaire et de secours en cas de catastrophe. Les deux parties ont convenu de signer et de conclure l’ACSA dans les plus brefs délais.

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B. Des avantages spécifiques pour chacun des partenaires

S’ajoutant à la volonté politique très forte pour la coopération nippo-française comme nous venons de le voir, il est essentiel de réfléchir aux avantages et intértts communs et de trouver des applications pratiques sur le terrain afin que les agents des deux pays travaillent ensemble plus efficacement. Par leurs positions géopolitiques et géographiques, le Japon est impliqué dans de nombreux projets en Asie, alors que la France est plus présente en Afrique.

Grâce aux synergies nées de la collaboration nippo-française, il sera possible de contribuer à résoudre deux enjeux majeurs complémentaires : la réalisation d’une croissance durable à l’échelle du continent africain d’une part, et la construction d’un environnement de sécurité, de paix et de stabilité en Asie, d’autre part. La collaboration de nos deux pays n’est en effet pas seulement profitable pour le Japon (B1) et la France (B2), mais également pour les pays tiers (B3).

B.1 Pour le Japon

Tout d’abord, le Japon a besoin des connaissances de la France et de son expérience en Afrique pour y ttre plus actif et y assurer la sécurité de ses compatriotes. Cette nécessité se traduit par sa présence de plus en plus importante sur ce continent, illustrée les 12,37 milliards de dollars d’investissements effectués en 201521 et la croissance du nombre d’entreprises japonaises en Afrique (voir Figure 5). L’Archipel importe également nombre de matières premières, particulièrement les métaux rares, du continent africain (voir Figure 6).

Malheureusement, quinze ressortissants japonais ont été les victimes d’attaques sur ce continent depuis 2012. L’on dénombre notamment dix victimes du terrorisme islamiste en Algérie en janvier 2013, ce qui a convaincu le Japon d’approfondir ses connaissances de l’environnement africain et moyen-oriental à l’aide de la France.

21 Jetro, « Aperçu de la région Moyen-Orient / Afrique du Nord [traduction libre] », p.3. Disponible sur : https://www.jetro.go.jp/ext_images/world/gtir/2016/pdf/49.pdf, consulté le 19 mai 2018.

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Figure 5 : Tendances du nombre d'entreprises japonaises en Afrique (Source : Département des Affaires consulaires du Ministère japonais des Affaires étrangères « Statistiques sur le nombre de résidents d'outre-mer » de 2011 à 201822)

Figure 6 : Taux d'importation de métaux rares de l'Afrique subsaharienne du Japon en 2015 (Source : Organigramme des ressources minérales du secteur du gaz naturel et du

pétrole (JOGMEC), ressources minérales (2016))

22 Ministère japonais des Affaires étrangères, « Statistiques sur le nombre de résidents d'outre-mer », Disponible sur : https://www.mofa.go.jp/mofaj/toko/page22_000043.html, consulté le 6 juin 2018.

520

562 560 584

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400 600 800 1000

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76.4%

69.2%

56.3%

42.8%

32.0%

31.3%

0 10 20 30 40 50 60 70 80 90

プラチナ マンガン ロジウム パラジウム バナジウム チタン クロム

% Afrique du Sud

Afrique du Sud Afrique du Sud, Gabon

Afrique du Sud, Mozambique Afrique du Sud

Afrique du Sud Afrique du Sud Platine

Manganèse Rhodium Palladium Vanadium Titane Chrome

(Année) (Nombre d'entreprises)

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La France, ancienne puissance coloniale en Afrique, a gardé des liens très forts avec de nombreux pays de ce continent et de ce fait en possède une connaissance intime. Les renseignements français ont souvent des sources différentes des États-Unis, ce qui permet au Japon de diversifier ses sources. La coopération avec la France est donc précieuse pour le Japon pour ouvrir différentes perspectives et diversifier ses partenariats stratégiques. De plus, les Forces d’autodéfense japonaises ont établi une base à Djibouti, un ancien territoire français, où la présence de la France est encore importante. Ainsi, le service de santé de l’armée française leur apporte un soutien médical remarqué23.

Du point de vue du rapport avec les États-Unis, qui sont les seuls alliés du Japon, l’opposition de la France contre les États-Unis pendant la guerre en Irak aurait pu marquer le Japon. Cependant, la participation active de la France au Moyen-Orient et en Afrique au cours des dernières années paraît avoir renforcé les relations entre la France et les États-Unis. Depuis le début de 2013, la France est intervenue au Mali et en Afrique centrale, et lorsque l'utilisation des armes chimiques par le régime syrien d'Assad a été découverte en 2013, la France n'a pas changé sa position en faveur des frappes aériennes malgré la réticence du Royaume-Uni et des États-Unis. En réponse aux attaques terroristes simultanées à Paris en novembre 2015, c'est aussi la France qui a pris l’initiative de renforcer les frappes aériennes contre Daesh en Irak et en Syrie. En conséquence, l'argument, selon lequel l'allié le plus fort des États-Unis en Europe serait la France, est plus fréquemment discuté24.

En outre, dans la zone Asie-Pacifique, face aux tensions en mer de Chine méridionale et aux menaces du développement nucléaire de la Corée du Nord, il est de plus en plus important pour le Japon de contribuer à maintenir la sécurité en Asie en coopérant avec des pays qui possèdent des valeurs et des intértts communs. Dans ce contexte, la France qui est également

23 Ministère japonais de la Défense, « Visite du ministre de la défense Nakatani à Djibouti, au Soudan du Sud et au Royaume-Uni [traduction libre] », le 29 janvier 2015. Disponible sur :

http://www.mod.go.jp/j/approach/exchange/nikoku/docs/2015/01/29_gaiyou.html, consulté le 29 mai 2018.

24 Dyer Geoff, « Bienvenue and G’day to America’s New Best Friends: France and Australia Are Taking Over as Key US Allies », Financial Times, 21 January 2016.

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une puissance asiatique et pacifique où elle dispose de territoires, d’intértts et de moyens navals, est un bon partenaire pour le Japon. La France entretient une présence militaire permanente de huit mille personnes, qui veillent à la protection et à la sécurité de ses territoires ainsi qu’au contrôle de ses zones économiques exclusives25 . Ces forces participent aux opérations de secours aux populations, à la lutte contre les trafics, aux missions de l’action de l’État en mer, mais aussi aux activités de coopération de défense dans tous les domaines avec ses partenaires.

Le positionnement clair de Paris sur la liberté de navigation sur mer et son intention de s’impliquer davantage dans la sécurité asiatique exprimée par le ministre de la Défense lors du dialogue Shangri-La en 201626 ont été réaffirmés en 201727 et en 201828. De plus, les deux pays s’accordent sur leur défense du respect du droit et des accords internationaux, dont la Convention des Nations unies sur le droit de la mer (CNUDM).

En revanche, l'exportation d’armes de la France vers la Chine serait une préoccupation pour le Japon en matière de sécurité. Ainsi, en 2013, le Japon a exprimé son inquiétude quant à l'exportation vers la Chine d'une plate-forme d'atterrissage d'hélicoptère pour les navires de la compagnie DCNS, et les discussions sur la coopération en matière de matériels de défense étaient mal engagées29. Cependant, lors du premier 2 + 2 en janvier 2014, les deux pays ont décidé de créer « le comité sur les mécanismes de contrôle des exportations » et de partager «

25 Ministère français de la défense, « Discours à l’occasion du Shangri-LaDialogue », le 5 juin 2016.

Disponible sur :

http://www.defense.gouv.fr/content/download/476642/7635868/file/20160605_MINDEF_Discours%20de

%20JY%20Le%20Drian%20%C3%A0%20l%5C%27occasion%20du%20Shangri-La%20Dialogue.pdf, consulté le 19 mai 2018.

26 Ministère français de la défense, « Discours à l’occasion du Shangri-LaDialogue », le 5 juin 2016.

Disponible sur :

http://www.defense.gouv.fr/content/download/476642/7635868/file/20160605_MINDEF_Discours%20de

%20JY%20Le%20Drian%20%C3%A0%20l%5C%27occasion%20du%20Shangri-La%20Dialogue.pdf, consulté le 19 mai 2018.

27 Ministère français des Armées, « Stabilité en Asie-Pacifique : le Shangri-La Dialogue », le 9 juin 2018.

Disponible sur : https://www.defense.gouv.fr/actualites/articles/stabilite-en-asie-pacifique-le-shangri-la- dialogue, consulté le 8 juin 2018.

28 Ministère français des Armées, « Discours de Madame Florence Parly, ministre des Armées, à l'occasion du Shangri-La Dialogue », le 3 juin 2018. Disponible sur :

https://www.defense.gouv.fr/content/download/534003/9192755/file/20180603%20-%20Shangri- La%20Dialogue%20-%20Discours%20Florence%20Parly%20.pdf, consulté le 8 juin 2018.

29 Japan Times, « Hollande Heads to Tokyo for ‘Abenomics’ Lesson », le 5 June 2013.

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leur analyse de l’environnement de sécurité de chaque pays, et y seront attentifs »30 . Cette phrase qui semble neutre a particulièrement retenu l'attention du Japon parce qu’elle signifie que la France accepte de considérer l'environnement de sécurité (le Japon est attentif à la situation de la Chine) en matière de contrôle des exportations. Bien que le dialogue avec la France sur le contrôle des exportations ait été une mesure en réponse à l’inquiétude exprimée par le Japon, il est possible que le futur dialogue entre le Japon et la France puisse ttre utilisé au-delà du contexte bilatéral, parce que la France a présidé la sous-commission sur le contrôle des exportations composé du groupe volontaire d’exportateurs européens d'armes qui s’appelle LoI (Letter of Intent)31.

Concernant la protection civile, les expériences de coopération conduites par la France avec des pays en voie de développement sont utiles pour le Japon parce qu’elles montrent que ce type de missions contribue à son rayonnement et son influence sur d’autres continents. Les compétences de la France en matière nucléaire sont aussi intéressantes pour le Japon et une collaboration plus poussée en ce domaine est souhaitable.

S’agissant des opérations de maintien de la paix, compte tenu du fait que presque un tiers des OMP en cours dans le monde sont dans des pays francophones, il est opportun que le Japon coopère avec la France qui y déploie de nombreux moyens. Il est également souhaitable que le Japon mette davantage à profit le potentiel de coopération avec la France pour améliorer la connaissance en langue française de ses personnels d’autodéfense contribuant aux opérations dans les pays francophones.

30 Ministère japonais des Affaires étrangères, « Communiqué conjoint des ministres des Affaires étrangères et de la Défense de la République française et du Japon », le 9 janvier 2014. Disponible sur :

https://www.mofa.go.jp/mofaj/files/000023741.pdf, consulté le 29 mai 2018.

31 Gouvenement de la Grande-Bretagne, « Letter of Intent: Restructuring the European Defense Industry ».

Disponible sur : https://www.gov.uk/guidance/letter-of-intent-restructuring-the-european-defence-industry, consulté le 29 mai 2018.

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B.2 Pour la France

Parallèlement, l’engagement historique du Japon en Asie au profit du développement dans cette zone serait utile à la France qui y trouve un intértt de plus en plus important. La France est certes une puissance européenne, mais dont certains territoires se situent au sud de l’océan Indien : Mayotte, La Réunion, les îles Éparses et les Terres australes et antarctiques françaises ; ainsi que dans le Pacifique : Nouvelle-Calédonie, Wallis-et-Futuna, Polynésie française et Clipperton. 85% de la zone économique exclusive (ZÉE) de onze millions de km2 de la France, soit la deuxième au monde, sont situés dans les océans Indien et Pacifique32. En outre, plus d’un million six cent mille ressortissants français résident dans cette zone33.

De plus, en tant que membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies et de la Commission d’armistice militaire du Commandement en Corée (UNCMAC), la France est concernée par les tensions géopolitiques dans le Pacifique, identifié comme zone stratégique majeure par le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2013, qui rappelle que « ses entreprises et ses ressortissants sont en nombre croisant dans la région et sa prospérité est désormais inséparable de celle de l’Asie-Pacifique »34 . C’est pourquoi la France s’investit toujours davantage dans cette zone et fait partie des nombreuses organisations régionales qui la composent, où elle jouit du statut de pays riverain reconnu. Par exemple, en 1992, la France a signé l’accord FRANZ avec l’Australie et la Nouvelle-Zélande pour coordonner l’aide civile et militaire apportée aux États insulaires des pacifiques victimes de catastrophes naturelles. En 2007, la France est devenue l’un des tout premiers États hors de la région à signer le Traité

32 Ministère français de la défense, « Discours à l’occasion du Shangri-LaDialogue », le 5 juin 2016.

Disponible sur :

http://www.defense.gouv.fr/content/download/476642/7635868/file/20160605_MINDEF_Discours%20de

%20JY%20Le%20Drian%20%C3%A0%20l%5C%27occasion%20du%20Shangri-La%20Dialogue.pdf, consulté le 19 mai 2018.

33 Ministère français de la défense, « La France et la sécurité en Asie-Pacifique », 2016. Disponible sur : http://www.defense.gouv.fr/content/download/475361/7615476/file/201606-

PlaquetteAsiePacifiqueFR.compdf

34 Ministère français de la défense, Le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, 2013, p.36.

Disponible sur : https://www.defense.gouv.fr/content/download/206186/2286591/Livre-blanc-sur-la- Defense-et-la-Securite-nationale%202013.pdf

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d’amitié et de coopération en Asie du Sud-Est, qui promeut, entre autres choses, le respect de l’intégrité territoriale, le règlement pacifique des différends et la renonciation à l’usage et à la menace d’usage de la force. La France est aussi membre de l’Indien Ocean Naval Symposium, qui vise à accroître la coopération entre nations de l’Océan indien. De plus, elle participe à plusieurs réunions stratégiques du Pacifique, particulièrement à la réunion des ministres de la Défense du Pacifique Sud (SPDMM), au Shangri-La Dialogue qui réunit chaque année plusieurs responsables de la défense afin de coopérer sur la sécurité en Asie-Pacifique, au séminaire des chefs d’état-major des armées du Pacifique (CHOD) ou bien encore à la réunion des chefs du renseignement militaire d’Asie-Pacifique (APICC), qui se réunit annuellement.

De la mtme manière, la France est reconnue pleinement comme nation du Pacifique à travers sa participation au Western Pacific Naval Symposium, ou encore via sa participation au Quadrilateral Defence Coordination Group (QUAD) qui réunit la France, l’Australie, la Nouvelle-Zélande et les États-Unis autour des questions des ZÉE et de défense. De plus, les forces de la marine nationale française ont pris part à plusieurs opérations d’assistance civile et militaire aux Philippines, aux Fidji et au Vanuatu suite au passage d’un typhon en 2013 et à celui de deux cyclones en 2015 puis en 2016. Plus récemment, en mai 2018, la Nouvelle- Calédonie et la Polynésie française ont participé pour la première fois au 8e sommet du « Pacific Islands Leaders Meeting (PALM 8) » sur l’invitation du Japon. D’ailleurs, la présence française dans cette région est reconnue dans d'autres pays de la région, mtme à Singapour, ancien territoire britannique où le centre des relations de sécurité et de défense avec l'Europe a été transféré du Royaume-Uni à la France. De mtme les officiers militaires de la défense de Singapour en Europe préalablement installés à Londres ont été transférés à Paris35.

En outre, la France souhaite devenir observatrice de la conférence élargie des ministres de la Défense de l’ASEAN, l’ASEAN Defense Ministres Meeting Plus (ADMM+), qui est sans

35 EU Centre in Singapore, The Brexit Dilemma: What would Britain’s exit from the EU mean for Singapore Businesses, Panel Discussion Report, 2015, Disponible sur : http://www.eucentre.sg/wp- content/uploads/2015/04/PanelDiscussion-Print-Brexit.pdf

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conteste l’enceinte régionale de coopération en matière de défense et de sécurité la plus aboutie.

L’ADMM+ contribue de la manière la plus concrète au développement des capacités et, ainsi, à la sécurité régionale.Si la France devient observatrice de l’ADMM+, elle « apporterait son expérience de membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, son savoir-faire opérationnel et une contribution essentielle à la constitution d’un espace de paix et de sécurité, fondé sur le respect du droit international, dans l’ensemble de l’Indo-Pacifique »36 . Pour la France, le resserrement des liens avec le Japon sert sa volonté d’asseoir sa position en tant que puissance maritime et riveraine du Pacifique. Cette politique serait, comme le traduit une analyse du Sénat, l’expression du grand « pivot vers l’Asie » de la France : « Selon le Ministère de la Défense, cette coopération franco-japonaise de défense s’inscrit dans un schéma global qui vise à mieux valoriser la présence militaire française dans l’Indopacifique et, au-delà, à développer l’interopérabilité avec les principaux partenaires de la région que sont les États- Unis, l’Australie, Singapour et le Japon »37. La coopération avec ces pays alliés peut s’appuyer sur le dispositif des forces positionnées en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie, ainsi que sur le déploiement d’un commandement maritime permanent dans la zone de responsabilité Asie-Pacifique (ALPACI).

De plus, selon la « Revue stratégique de défense et de sécurité nationale », la Chine est effectivement appelée à devenir une puissance stratégique capable de modifier les équilibres globaux et régionaux, que ce soit en mer de Chine, dans le Pacifique ou encore en Afrique avec notamment l’installation d’une base à Djibouti et par sa présence en Méditerranée38. En outre,

36 Ministère français des Armées, « La France et la sécurité en Indo‑Pacifique », juin 2018, p.4. Disponible sur :

https://www.defense.gouv.fr/content/download/532751/9176232/file/La%20France%20et%20la%20s%C3

%A9curit%C3%A9%20en%20Indo-Pacifique%20-%202018.pdf

37 Reiner Daniel, Rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Japon relatif au transfert d’équipements et de technologies de défense, le 8 juin 2016.

38 Ministère français des armées, « Revue stratégique de défense et de sécurité nationale », octobre 2017, Paragraphe 118-121. Disponible sur :

https://www.defense.gouv.fr/content/download/514684/8664656/file/2017-RS-def1018.pdf

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selon le document de référence sur la politique de défense française en Asie-Pacifique « La France et la sécurité en Asie-Pacifique » présenté en juin 2016, « face aux tensions en mer de Chine méridionale, la France, puissance maritime civile et militaire de premier rang, continuera d’affirmer le principe de la liberté de navigation, de contribuer à la sécurité des espaces maritimes, de promouvoir une application uniforme de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer »39 . Ce sont exactement les mtmes valeurs que le Japon promeut en Asie- Pacifique. Ce sont des raisons pour lesquelles la France est le seul pays européen qui déploie des forces de façon permanente et envoie des navires au Japon chaque année.

En matière de protection civile, le Japon peut partager ses expériences de gestion des catastrophes naturelles et d’accidents nucléaires, qui seraient utiles pour la France. En effet la France possède de nombreuses centrales nucléaires (environ 75 % de l’électricité provient des 58 réacteurs nucléaires et près de 220 000 personnes travaillent pour cette filière)40 et déploie de nombreuses coopérations dans le domaine de la protection civile.

Concernant les opérations de maintien de la paix (OMP) dans lesquelles la France est engagée depuis longtemps, le Japon serait un bon partenaire d’un point de vue non seulement financier, mais aussi opérationnel. Depuis 2008, le Japon a financé pour plus de 42 millions de dollars les 13 centres de maintien de la paix en Afrique41. Il conduit aussi la restauration et la construction d’installations, la fourniture d’équipements, la formation, etc. Du côté des ressources humaines, au total 43 instructeurs / consultants japonais ont été envoyés aux 8

39 Ministère français de la défense, « La France et la sécurité en Asie-Pacifique », juin 2016, p.1.

Disponible sur : http://www.defense.gouv.fr/content/download/475361/7615476/file/201606- PlaquetteAsiePacifiqueFR.compdf

40 Costes Fanny, « 10 chiffres à connaître sur la France et le nucléaire », La tribune, le 9 septembre 2015.

Disponible sur : https://www.latribune.fr/entreprises-finance/la-tribune-de-l-energie/10-chiffres-a- connaitre-sur-la-france-et-le-nucleaire-479263.html, consulté le 19 mai 2018.

41 Ministère japonais des Affaires étrangères, « Envoi d’un consultant international d’autodéfense aux centres de maintien de la paix à l’Éthiopie [traduction libre] », le 30 mai 2016. Disponible sur : http://www.mofa.go.jp/mofaj/press/release/press4_003338.html, consulté le 19 mai 2018.

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centres de maintien de la paix africains42 . Face à un environnement incertain, le Japon a augmenté ses dépenses liées à la défense (voir Figure7) et a révisé sa posture de défense, adoptant une nouvelle législation sur la sécurité nationale. La « législation sur la paix et la sécurité » de septembre 2015, entrée en vigueur au printemps 2016, lui permet de s’affirmer comme nation « contribuant de manière proactive à la paix », y compris aux OMP et mtme de faire valoir son droit à la légitime défense collective pour la protection de ses intértts et celle de ses alliés43(voir Figure8). Grâce à ces prérogatives accrues, le Japon peut participer plus efficacement aux opérations de maintien de la paix qui demeurent soumises à cinq principes : la nécessité d’un cessez-le-feu, ce qui interdit au Japon de participer à des opérations de rétablissement de l’ordre ; le consentement des autorités locales et des parties en conflit à l’opération et à la présence japonaise ; la neutralité de l’opération ; la faculté pour le Japon de se retirer si ces conditions étaient compromises ; un droit à l’usage par les Forces d’autodéfense de leurs armes limitées à l’autodéfense individuelle ou depuis 2015, collective. Cette nouvelle posture devrait permettre une coopération bilatérale renforcée et enrichie avec les pays proches du Japon, au premier rang desquels figure la France.

42 Ibid.

43 Secrétariat du Cabinet japonais, « Concernant l’amélioration de la législation de paix et de sécurité [traduction libre] ». Disponible sur : www.cas.go.jp/jp/gaiyou/jimu/housei_seibi.html, consulté le 19 mai 2018.

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Figure 7 : Évolution des dépenses liées à la défense sur les 15 dernières années (Source : Ministère japonais de la Défense44)

Figure 8 : Points principaux de la « Législation sur la paix et la sécurité » (Source : Ministère japonais de la Défense45)

44 Ministère japonais de la Défense, « Livre blanc de la défense, version 2017 [traduction libre] », 2017, p.12. Disponible sur : www.mod.go.jp/e/publ/w_paper/pdf/2017/DOJ2017_Digest_FR.pdf

45 Ibid, p.14

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B.3 Pour les pays tiers

La collaboration nippo-française est également profitable pour les pays tiers qui peuvent bénéficier de l’aide des deux pays. Le Japon et la France sont deux puissances actives dans le domaine de l’aide au développement avec chacun ses points forts. Cela doit inciter aussi les pays bénéficiaires à améliorer leur capacité à élaborer un plan stratégique et à avoir une vue d’ensemble de ce qu’ils peuvent attendre de chacun, sans duplication, voire avec des effets de complémentarité ou de levier. Cette collaboration nippo-française devrait aussi ttre une incitation réciproque pour les deux pays à ajuster au mieux ce qu’il semble opportun de proposer au partenaire et pour celui-ci, d’évaluer les avantages et inconvénients de chacun.

II. LES CHAMPS D’OPPORTUNITÉS ET LES PERSPECTIVES

En considération des avantages particuliers que nous venons de voir, le potentiel de collaboration nippo-française apparait évident dans les domaines de la sécurité maritime (A), de la protection civile (B) et des opérations de maintien de la paix (C). En outre, compte tenu des engagements forts et historiques du Japon en Asie et de ceux de la France en Afrique, il est également primordial de jouerconjointement un rôle plus important au profit de pays tiers dans ces régions. Cela permet d’engager plus de pays pour faire face plus efficacement aux nouvelles menaces que nous avons traitées dans l’introduction.

A. La sécurité maritime

Le Japon importe de nombreux types de ressources énergétiques, de ressources minérales, de produits de la ptche, de produits agricoles et d'autres ressources qui sont à la base des activités économiques et de la vie sociale de la population. 99,6% de ces importations

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dépendent du transport maritime46. Quant à la France, près de 70% de ses exportations transitent par un port maritime français47. Il est donc extrtmement important pour les deux pays d'assurer la sécurité de la navigation maritime.

Alors qu’il est évident que la France donne historiquement de l’importance à la sécurité maritime en Afrique surtout dans le golfe d’Aden (A1) et le golfe de Guinée (A2), le Japon met également l’accent sur la sécurité maritime dans ces régions comme le montrent la Déclaration de Nairobi48 de 2016 et le Plan de mise en œuvre de Nairobi49 lancés lors de la réunion TICAD VI. Il y a aussi un potentiel important de coopération nippo-française dans ce domaine en Asie pacifique (A3).

A.1 Dans le golfe d’Aden

Selon le rapport annuel du Bureau maritime international (IMB) de la Chambre de commerce international (ICC), il y a eu 180 cas de piraterie mondiale et de vols à main armée en 201750. Ce chiffre est en forte diminution par rapport au passé : 445 cas en 2010, 439 cas en

46 Ministères japonais liés à la réunion de liaison antipiratage au large de la Somalie et dans le golfe d’Aden, « Rapport de contre-mesures de piratage de 2017 [traduction libre] », 2018, p. 1. Disponible sur : https://www.cas.go.jp/jp/gaiyou/jimu/pdf/siryou2/report2017.pdf

47 Ministère français de la Transition écologique et solidaire, « Observation et statistiques (le transport maritime) », avril 2010. Disponible sur : www.statistiques.developement-

durable.gouv.fr/lessentiel/ar/361/1228/transport-maritime.html, consulté le 16 mai 2018.

48Ministère japonais des Affaires étrangères, « Déclaration de Nairobi », août 2016. Disponible sur : www.mofa.go.jp/files/000183757.pdf, consulté le 14 mai 2018.

Citation : 3.3.4 Sécurité maritime « Nous insistons sur l’importance de promouvoir des efforts régionaux et internationaux relatifs à la sécurité maritime, y compris la piraterie, la ptche illégale et d’autres crimes maritimes, ainsi que de maintenir un ordre maritime fondé sur des règles, conformément aux principes du Droit international tels qu’ils ressortent de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer

(CNUDM). Nous soulignons également l’importance du renforcement de la sécurité et de la sûreté

maritime à travers la coopération internationale et régionale, comme le reflète la Stratégie africaine intégrée pour les mers et les océans – Horizon 2050 (2050 AIM Strategy), conformément au droit international de la mer. »

49 Ministère japonais des Affaires étrangères, « Plan de mise en œuvre de Nairobi », août 2016. Disponible sur : www.mofa.go.jp/files/000183758.pdf, consulté le 14 mai 2018.

Citation : 3.8 Sécurité maritime « Appuyer les efforts régionaux, continentaux et internationaux visant à accroître la sécurité et la sûreté maritime en luttant contre la piraterie et les vols à main armée en mer et renforcer l’État de droit en mer par le développement des capacités des autorités appliquant les lois maritimes. »

50 IMB, le rapport annuel du Bureau maritime international (IMB) de la Chambre de commerce international (ICC), report for the period 1 january – 31 december 2017, janvier 2018.

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2011 et 297 cas en 2012. Cela résulte notamment de la réduction du nombre de cas d'actes de piraterie en Somalie (voir Figure 9). Ces dernières années, grâce aux divers efforts de la communauté internationale comme la poursuite des activités antipiratage par la marine de divers pays dont le Japon et la France dans le golfe d'Aden ainsi que l'embarquement des gardes armés sur les navires marchands, le nombre de cas de piraterie somalienne a été faible. Les activités antipiraterie de chaque marine sont dissuasives. De plus, le fait que, après vingt-et-un ans, le premier gouvernement unifié a été créé en 2012 en Somalie est également un facteur d’atténuation du phénomène.

Figure 9 : Des incidents de piraterie ont eu lieu au large de la Somalie et du golfe d'Aden (Source : Rapport annuel du IMB)

S’agissant du Japon, les Forces d’autodéfense s’engagent dans la lutte contre la piraterie autour de la Corne de l’Afrique depuis 2009 en envoyant des navires escorteurs et des avions-patrouilleurs P-3C stationnés sur la base permanente à Djibouti. Elles s’engagent également dans la CTF-151 et mettent en œuvre la défense de zone dans le cadre multilatéral.

0 50 100 150 200 250 300 350 400 450 500

2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 Dans le monde Au large de la Somalie et du golfe d'Aden

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Le Japon est responsable d’environ 60% des activités de patrouille par avion dans la région51. De plus, en octobre 2017, le Japon a organisé au Centre Régional de Formation Maritime (CRFM), dont il a financé la construction, un séminaire relatif au « Code de Conduite de Djibouti pour l’action contre les contre-mesures de piraterie au large de la Somalie et du golfe d’Aden » en collaboration avec la France et le Djibouti. Ce séminaire était une nouvelle tentative pour renforcer la coopération nippo-française. Il est nécessaire d’approfondir ce type d’expérience, en profitant au maximum du CRFM.

A.2 Dans le golfe de Guinée

Selon le rapport annuel du IMB, en 2017, il y a eu 36 incidents signalés dans le golfe de Guinée52. Bien que le nombre d'attaques soit en baisse cette année par rapport à l'année dernière, le golfe de Guinée et la mer autour du Nigeria sont encore menacés par la piraterie.

Les autorités nigérianes sont intervenues dans un certain nombre d'incidents aidant à prévenir leur escalade.

Le Japon n’est pas encore très actif d’un point de vue opérationnel dans le golfe de Guinée par rapport au golfe d’Aden. Cependant, le Japon a apporté certaines contributions structurelles. Par exemple, il soutient l’Académie régionale des sciences et techniques de la mer (ARSTM) par l’aide financière non remboursable (subvention). Il appuie également l’Institut de sécurité maritime interrégional (ISMI) d’Abidjan, via le projet de l’Organisation maritime internationale (OMI) qu'il finance à hauteur de 14,6 millions de dollars en faveur de divers Fonds, tel que le Fonds fiduciaire de la sécurité maritime en Afrique de l’Ouest, et par l’envoi d’intervenants japonais 53 . De plus, le Garde-côtes japonais invite régulièrement les

51 Ministères japonais liés à la réunion de liaison antipiratage au large de la Somalie et dans le golfe d’Aden, Rapport de contre-mesures de piratage de 2017, 2018, p. 30. Disponible sur :

https://www.cas.go.jp/jp/gaiyou/jimu/pdf/siryou2/report2017.pdf

52 IMB, le rapport annuel du Bureau maritime international (IMB) de la Chambre de commerce international (ICC), report for the period 1 january – 31 december 2017, janvier 2018.

53 Ministère japonais des Affaires étrangères, « Situation actuelle et efforts de lutte contre la piraterie au large de la Somalie et dans le golfe d’Aden [traduction libre] » Disponible sur :

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commandements de l’Asie et de l’Afrique des agences d’application de la loi maritime dans le cadre de la JICA et mène des formations visant à améliorer la capacité de maritime contrôle criminel. En 2017 un pays du Golfe, le Nigeria (2 personnes) y a participé pour la première fois54. Pour développer la coopération, il faut tout d’abord présenter ce que le Japon fait sur la scène internationale, par exemple à la réunion annuelle du G7 des Amis du golfe de Guinée (G7++FOGG). Cela aiderait à trouver de nouvelles coopérations avec la France en discutant de ce que les deux pays peuvent développer ensemble dans cette zone.

En outre, l’engagement du Japon dans le golfe de Guinée devrait ttre plus important en raison de la capture d’un bateau coréen par des pirates en mars 2018.55 Comme contre- mesure, un navire coréen qui était dans le golfe d’Aden a été envoyé de l’autre côté de l’Afrique pour le sauver. Cela démontre qu’il est possible à l’avenir qu’un bateau japonais soit pris à partie par des pirates dans le golfe de Guinée.

A.3 En Indo-Pacifique

Le Japon contribue à renforcer les capacités maritimes des pays d’Asie. Par exemple, il a donné des bâtiments de surveillance maritime aux garde-côtes des Philippines et du Vittnam.

Il assure également des missions de formation au profit de ces pays en participant à des exercices conjoints avec eux. Historiquement, le soutien au renforcement des capacités maritimes était centré sur l’Asie du Sud-Est qui se situe sur la voie maritime depuis le Moyen- Orient, voie par laquelle le Japon importe du pétrole. Cependant, le Japon a décidé de l’étendre vers l’Asie du Sud et a commencé le soutien au renforcement des capacités maritimes pour la première fois au Sri Lanka, qui est également un point clé de la voie maritime reliant le

http://www.mofa.go.jp/mofaj/gaiko/pirate/africa.html, consulté le 10 mai 2018.

54 Ministère japonais des Affaires étrangères, « Situation actuelle et efforts de lutte contre la piraterie dans le golfe de Guinée [traduction libre] ». Disponible sur :

http://www.mofa.go.jp/mofaj/gaiko/page22_000613.html, consulté le 10 mai 2018.

55 Selon un officiel au Ministère des Armées lors de l’entretien du 3 avril 2018.

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