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soutenu par Kang CHENG CIP Promotion Louis Pasteur (2017-2018) Voyage au bout de la nuit : l’UNESCO face à la crise et au retour vers ses missions

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Texte intégral

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Université Paris 1

Ecole nationale d’administration

Juin 2018

Master Etudes européennes et relations internationales Spécialité Relations internationales et Actions à l’Etranger

Parcours "Action internationale"

soutenu par Kang CHENG

CIP Promotion Louis Pasteur (2017-2018)

Sous la direction de Robert FRANK

Professeur émérite à l’Université Paris 1

Voyage au bout de la nuit :

l’UNESCO face à la crise et au retour vers ses missions

(2)
(3)

SOMMAIRE(

REMERCIEMENTS(!...!(2(

INTRODUCTION(!...!(3(

PARTIE(I(:(LES(CRISES(MULTIDIMENSIONNELLES(QUE(SUBIT(L’UNESCO(AUJOURD’HUI( !....!(7(

! ! ! Chapitre 1. Les symptômes du dysfonctionnement de l’Organisation!

!...!

!

7

!

! ! ! ! ! ! ! ! A. Le choc financier à la suite de la suspension du versement de la contribution des États-Unis!

!...!

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7

!

! ! B. La perte de visibilité dans le monde due à la mauvaise gestion et à la concurrence d’autres agences onusiennes

!...!

!

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!

Chapitre 2. Le diagnostic de la crise

!...!

!

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!

! ! ! ! A. De la coopération intellectuelle à la politisation : une contradiction! ! ! ! ! ! ! fondamentale de la nature de l’UNESCO

!...!

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!

! ! B. La prolifération des institutions et la centralisation de la structure

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PARTIE(II(:(L’UNESCO(A(LA(RECHERCHE(D’UNE(SORTIE(DE(CRISE( !...!! 27(

Chapitre 3. Les réactions de la direction face aux crises!

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!

! ! ! ! ! ! ! ! A. Irina Bokova et ses mesures d’urgence!

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!

27

!

! ! B. Audrey Azoulay et sa transformation stratégique

!...!

!

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!

Chapitre 4. Pour un retour aux origines et un meilleur équilibre

!...!

!

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!

! ! ! ! A. Le rôle de laboratoire mondial d’idées

!...!

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34

!

! ! ! ! ! ! ! ! B. Le point d’équilibre entre l’intergouvernementalité et les missions supranationales

!...!

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!

CONCLUSION(!...!(40(

BIBLIOGRAPHIE(!...!! 43( (

ANNEXES(!...!(48(

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Remerciements

Je voudrais tout d’abord adresser ma sincère gratitude à mon tuteur de mémoire, M.

Robert FRANK, Professeur émérite à l’Université de Paris 1, pour sa patience, sa disponibilité et surtout ses judicieux conseils!qui ont contribué à alimenter ma réflexion.

Mes reconnaissances profondes vont également à M. Daniel JANICOT, Président de la Commission nationale française pour l’UNESCO, et toute son équipe pour les soutiens qu’ils m’ont généreusement accordés pendant mon stage.

Je tiens à remercier Mme Lian XUE, chargée des affaires éducatives à la Délégation permanente de la République populaire de Chine auprès de l’UNESCO, ainsi que M.

Jean-Michel VERN, Chef de bureau du commerce du ministère de l’Économie et des Finances, pour les inspirations et les conseils qu’il m’ont donnés dans le cadre de la rédaction du présent mémoire.

Enfin, je désire témoigner tous mes remerciements à ma famille pour leur confiance et

leur soutien inestimable.

(5)

Introduction

« Les guerres prenant naissance dans l’esprit des hommes, c’est dans l’esprit des hommes que doivent être élevées les défenses de la paix »

1

. Telle est l’idée originelle de la création de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO). Créée en 1945 au sortir de la Seconde Guerre Mondiale dans un esprit pacifiste et universaliste, elle s’est efforcée pendant plus de 70 ans de contribuer au développement intellectuel des peuples et au rapprochement des civilisations. Aujourd’hui elle compte 195 États membres

2

et travaille dans le monde entier avec une grande variété de partenaires.

En tant qu’agence spécialisée de l’ONU, l’UNESCO est dotée d’un mandat particulier, celui de « contribuer au maintien de la paix et de la sécurité en resserrant, par l’éducation, la science et la culture, la collaboration entre nations, afin d’assurer le respect universel de la justice, de la loi, des droits de l’homme et des libertés fondamentales pour tous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion, que la Charte des Nations Unies reconnaît à tous les peuples »

3

.

Au fil du temps, à la mission primordiale de l’édification de la paix se sont ajoutées celles de l’élimination de la pauvreté, du développement durable et du dialogue interculturel par l’éducation, les sciences, la culture, la communication et l’information. Afin d’être toujours en phase avec les besoins mondiaux, ces missions ont connu une évolution

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1 UNESCO, Textes fondamentaux, Paris, 2018, p. 5.

2 Le retrait des États-Unis d’Amérique et d’Israël prendra effet le 31 décembre de l’année 2018.

3 Ibid.

(6)

progressive dans leurs interprétations. Par exemple, la « consolidation de la paix » qui visait à combler le fossé idéologique pendant la Guerre froide se représente aujourd’hui par la facilitation du dialogue entre les différentes civilisations et l’assistance aux pays en situation de post-conflit ou de post-catastrophe

4

. Au XXI

e

siècle, les missions se traduisent concrètement par les modalités d’intervention suivantes : offrir une plate-forme pour le dialogue et l’action concernant l’indivis intellectuel mondial ; promouvoir la libre circulation et le partage de l’information et des connaissances et faire office de courtier du savoir à l’échelle mondiale dans tous ses domaines de compétence ; contribuer à la sécurité humaine et à la gestion des évolutions et du changement social ainsi que des ressources naturelles ; promouvoir l’application du nouvel engagement en faveur de la science ; offrir un forum aux débats sur les nouveaux problèmes éthiques, en particulier ceux qui ont trait à la science et la technologie ; donner accès à une meilleure compréhension de la diversité culturelle

5

.

Certes, il convient de dire que les missions sont aussi pertinentes et essentielles dans le contexte du système international actuel qu’elles l’étaient à la création de l’Organisation, mais les nouveaux défis que confronte le monde depuis le nouveau millénaire, tels que le terrorisme, les changements climatiques, les problèmes démographiques, la tendance nationaliste et l’affaiblissement du multilatéralisme, ont mis en évidence l’insuffisance de capacités de l’UNESCO à remplir ses missions très vastes. Cette insuffisance est non seulement financière (l’Organisation dispose de ressources très limitées par rapport à ses objectifs nombreux et ambitieux), mais aussi organisationnelle (elle présente depuis

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4 UNESCO, Rapport final de l’Évaluation externe indépendante de l’UNESCO, IOS/EVS/PI/107, Paris, le 30 septembre 2010, p. 24.

5 UNESCO, Contribuer à la paix et au développement humain à l’ère de la mondialisation par l’éducation, les sciences, la culture et la communication, 31C/4, Paris, 2002, p. 6.

(7)

longtemps des faiblesses structurelles). Avec cette déficience congénitale, l’Organisation a rencontré beaucoup de difficultés au cours de son histoire.

En 2011, une nouvelle crise a surgi à cause de la suspension des financements de certains États membres, notamment les Etats-Unis d’Amérique, suite à l’admission de la Palestine comme État membre de l’UNESCO. Cette crise financière a eu immédiatement des impacts sur le fonctionnement de l’UNESCO dans tous ses domaines de compétence de sorte que la raison d’être de l’Organisation a été mise en cause. Il est à noter que le terme de « crise » employé ici correspond bien à son sens pathologique : une aggravation brusque d’une maladie chronique.

Quels sont les symptômes et où résident les causes de cette crise ? Comment l’UNESCO pourrait-elle en trouver une sortie ? Pour répondre à ces questions-là, ce présent travail s’appuie sur la combinaison d’une étude de la littérature scientifique et officielle concernant l’UNESCO et d’une expérience professionnelle

6

au sein des Commission nationales chinoise et française, organes de liaison de ces deux États membres. L’une me donne une connaissance générale du fonctionnement de l’Organisation alors que l’autre me permet d’examiner en détail sa performance du point de vue d’États membres et de partenaires. Grâce à mon stage en particulier, j’ai pu assister entièrement à la 204

e

session du Conseil exécutif en avril 2018 qui a fait un bilan de la crise et a relancé une nouvelle réforme pour résoudre les problèmes.

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6 J’ai travaillé depuis 2015 comme chargée de mission à la Commission nationale chinoise et effectué un stage du 12 mars au 27 avril 2018 à la Commission nationale française.

(8)

Cette étude se présente en deux parties. La première est consacrée à décrire les

symptômes de la crise majeure du financement et de visibilité pour en faire ensuite un

diagnostic. La deuxième réfléchit sur les effets des mesures prises par les deux Directrices

générales récentes et cherche à formuler des propositions pour que l’UNESCO puisse mieux

répondre à son mandat.

(9)

Partie I : Les crises multidimensionnelles que subit l’UNESCO aujourd’hui

À la quasi-paralysie de l’UNESCO aujourd’hui, on peut trouver deux explications : son financement et ses performances. Cette première partie essaie de présenter les symptômes et d’examiner les causes de la crise.

Chapitre 1. Les symptômes du dysfonctionnement de l’organisation

L’UNESCO a traversé plusieurs périodes difficiles dans son histoire, dont une crise grave suite au retrait des États-Unis et du Royaume Uni dans les années 1980. Toutefois, la crise financière que connaît l’institution depuis 2011 pose la question de sa capacité à remplir ses missions au point qu’elle est susceptible de remettre en cause son existence même.

A. Le choc financier à la suite de la suspension du versement de la contribution des États-Unis

Cette tension budgétaire est loin d’être nouvelle pour une organisation recouvrant tant de domaines.

Selon l’Acte constitutif de l’UNESCO, le budget ordinaire est financé par les

contributions des États membres, dont le montant est fixé d’après le barème de répartition

établi par la Conférence générale. Pour chaque exercice financier de deux années, le Directeur

(10)

général prépare les prévisions budgétaires, le Conseil exécutif les examine et les soumet à la Conférence générale qui les adopte finalement

7

. Ainsi la situation financière de l’Organisation dépend-elle fortement de la volonté et de la capacité des États membres. Les divergences entre les différents groupes d’États et entre les trois organes directeurs existent depuis la fondation de l’Organisation. Jaime Torres Bodet, Directeur général mexicain de 1948 à 1952 a démissionné deux fois de son poste pour protester contre la réduction du budget par la Conférence générale. Il a exprimé ses regrets dans un discours en 1949 : « we feel like a doctor prescribing costly remedies to a patient who has not the money to buy them. »

8

Une croissance nominale zéro a toujours été la demande des principaux États contributeurs. À part la croissance négative en raison des retraits de Américains et des Britanniques de 1984 à 1987, l’Organisation a réalisé deux périodes de croissance zéro : 1998-2003 (544 millions de dollars pour chaque exercice de deux ans) et 2004-2007 (610 millions de dollars)

9

.

Pauvre et malade, elle a eu une crise grave quand les États-Unis ont décidé de suspendre leur contribution annuelle en 2011. En tant que première économie mondiale, les États-Unis ont toujours été le plus gros contributeur pour l’UNESCO, bien que leur quote-part ait baissé de 49,89% en 1947 à 22% en 2011. La suspension de 80 millions de dollars annuels s’est effectivement appliquée dès l’année 2011 car la contribution des États-Unis due au titre de cette année n’avait pas encore été versée. Pour l’exercice 2012-2013, comme la Directrice

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7 UNESCO, Textes fondamentaux, Paris, 2018, pp. 97-101.

8 Sewell James Patrick, UNESCO and World Politics: Engaging In International Relations, New Jersy, Princeton University Press, 1975, p. 144.

9 Hüfner Klaus, What can save UNESCO ? Berlin, Frank & Timme GmbH, 2015, p. 63.

(11)

générale Irina Bokova l’a précisé dans son discours, en considérant l’inflation et l’augmentation statutaire, « [the] result is a spending envelope of USD 450 M overall, which is equivalent to 30% reduction »

10

. Ce défaut de contribution a des conséquences lourdes dans certains domaines : Eric Falt, sous-directeur général en charge des relations extérieures, précise dans un entretien que « dans certains secteurs, c’est une perte de 50!% »

11

. D’ailleurs, il faut rappeler que les États-Unis ont également coupé les contributions volontaires extrabudgétaires. C’est le cas par exemple du versement au Fonds du patrimoine mondial qui représentait 1% de sa contribution annuelle au budget ordinaire (soit 718 300 dollars prévus pour 2012)

12

.

Ce défaut d’exécution de paiement a conduit à une crise financière

13

alors même que l’Organisation se trouvait déjà limitée dans son fonctionnement normal. Le tableau suivant montre le budget des différentes agences spécialisées et programmes onusiens pour l’exercice 2018-2019 (il faut souligner que les autres organismes se concentrent plutôt sur un seul domaine)

14

:

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10 UNESCO, Discours de la Directrice générale de l’UNESCO Irina Bokova, à l’occasion de l’introduction à la Session extraordinaire du Conseil exécutif, UNESCO, le 4 juillet 2013.

11 https://www.ouest-france.fr/monde/organismes-internationaux/unesco/l-unesco-est-tres-menacee-avec-le-de part-des-etats-unis-5310550.

12 UNESCO, État des contributions obligatoires et volontaires au 31 janvier 2012, Paris, 2012, p. 3.

13 Israël a pris la même décision que celle des États-Unis et a causé à l’UNESCO une perte de 1.3 millions de dollars annuels.

14 Les chiffres cités ici sont ceux des documents budgétaires officiels des organisations internationales : Organisation internationale du travail, Programme et budget pour la période biennale 2018-19, Genève, 2017 ; Programme des Nations unies pour l’environnement, Proposed programme of work and budget for the biennium 2018-2019, Nairobi, 2016 ; Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, The Director-General’s Medium Term Plan 2018-21 and Programme of Work and Budget 2018-19, Rome, 2017 ; ONU Femmes, Integrated budget estimates for the United Nations Entity for Gender Equality and the Empowerment of Women for the biennium 2018-2019, New York, 2017 ; UNESCO, Projets de résolution, Premier biennium 2018-2019, 39C/5 Volume 1, Paris, 2017 ; Organisation mondiale de la santé, Proposed programme budget 2018–2019, Genève, 2017 ; Le Fonds des Nations unies pour l’enfance, UNICEF Integrated Budget 2018-2021, New York, 2017.

(12)

Note : 1. Le montant de l’UNESCO est basé sur le scénario budgétaire prévoyant un budget ordinaire de 667 millions de dollars, c’est-à-dire incluant la contribution théorique américaine, tandis que le budget ordinaire réel ne compte que 518 millions.

2. L’exercice financier de l’UNICEF étant de 2018 à 2021, le chiffre ici est le résultat d’une division par deux du montant publié par le Fonds.

15

Privée d’un tiers de son budget initial, l’Organisation a dû suspendre ou reporter des programmes, supprimer des postes, annuler des missions et désactiver des évaluations internes. In fine, ce manque d’argent a eu un effet de dominos au sein de l’UNESCO, ce qui a accentué et aggravé d’autres problèmes existants.

B. La perte de visibilité dans le monde due à la mauvaise gestion et à la concurrence d’autres agences onusiennes

Le « trou budgétaire » oblige l’Organisation à examiner sérieusement sa situation et ses faiblesses. Le rapport d’évaluation externe indépendante (EEI) concluait déjà en 2010,

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15 Les notes sont rédigées par moi-même.

784 784 1005 1158 1296

4421

11986

OIT$ PNUE$ ONUAA$ ONU$Femmes$ UNESCO$ OMS$ UNICEF$

BUDGET'POUR'2018/2019'

En millions de dollars E.U

(13)

c’est-à-dire avant le début de la crise financière, que « l’UNESCO est considérée comme insuffisamment performante eu égard à la contribution attendue d’elle et à son mandat »

16

. En tant que principal organisme de coopération intellectuelle, l’UNESCO est en train de perdre sa visibilité et sa capacité dans le monde. Cela pour deux raisons : la mauvaise gestion et la concurrence.

Les missions de l’UNESCO l’ont orientée vers un engagement international et une action globale. Pourtant, faute de logique et de clarté dans la définition de ses priorités, l’Organisation se perd souvent dans de nombreux programmes trop dispersés pour exercer une influence significative dans ses domaines de compétence. Au moment où la crise est survenue, le nombre total de plans de travail du Programme ordinaire était 1 191. D’ailleurs, les priorités décrites dans le cadre du document C/5

17

sont multiples et leur formulation est souvent très large. Prenons l’exemple du Programme de participation pour illustrer ce point.

C’est un programme caractérisé par l’aide directe qu’il apporte aux États membres, selon des priorités en partie définies par eux-mêmes, pour mener des actions qui ne sont pas directement prises en compte dans le Programme ordinaire de l’UNESCO. Dans la pratique, plus de 80% pays membres ou associés sont devenus prioritaires pour l’attribution des crédits du Programme de participation. Par conséquent, la notion de priorité est privée de substance et la stratégie qui en résulte se manifeste par une dispersion des financements dans une multitude de pays

18

.

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16 UNESCO, Rapport final de l’Évaluation externe indépendante de l’UNESCO, Paris, 2010, p. 29.

17 Le document C/5 (programme et budget de l’Organisation) définit le programme d’activités et le budget pour un exercice de deux ans.

18 UNESCO, Nouveaux audits du Commissaire aux comptes, 191EX/28 Partie I, Paris, le 10 avril 2013, p. 2.

(14)

De plus, à cause de ses moyens limités, l’Organisation se trouve dans la nécessité de recourir à des soutiens extrabudgétaires. Dans ce cas, les contributeurs, tenant compte de leurs propres intérêts, ont tendance à faire dévier les projets des objectifs prioritaires. Par conséquent, les fonds extrabudgétaires contribuent fortement à l’éparpillement d’activités ponctuelles au lieu des programmes ordinaires et sont privés de tout effet complémentaire.

À part les programmes innombrables, l’UNESCO a également produit beaucoup de conventions internationales. Certaines ont pris une grande importance, telles que la Convention sur la protection du patrimoine mondial culturel et naturel et l’Accord pour l’importation d’objets de caractère éducatif, scientifique ou culturel. Mais les plus nombreuses sont devenues « une longue liste d’instruments juridiques moribonds et qui ne donnent lieu à aucune activité de programme »

19

. Sans même mentionner les déclarations, les consensus et les recommandations, fruits des réunions internationales redondantes, qui n’ont pas de force contraignante pour les États participants.

Bon nombre de branches de l’UNESCO, à savoir les bureaux hors Siège, les réseaux, les Instituts et Centres de catégorie 1 et 2

20

, n’ont pas un bon fonctionnement et leurs missions restent parfois « lettres mortes ». L’EEI a conclu en 2010 que « la situation actuelle du réseau hors Siège ne peut durer et nuit à la réputation de l’UNESCO ainsi qu’à son efficacité »

21

.

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19 Courrier Yves : L’UNESCO sans peine, Paris, L’Harmattan, 2005, p.54.

20 Les Instituts et Centres de catégorie 1 sont des départements spécialisés des l’Organisation. Bien que fonctionnant avec une grande autonomie, les programmes de ces institutions font partie du programme ordinaire de l’UNESCO. Les Instituts et Centre de catégorie 2 ne font juridiquement pas partie de l’Organisation, mais lui sont associés suivant des modalités officiellement approuvées par la Conférence générale et s’engagent à soutenir les objectifs stratégiques du programme de l’UNESCO.

21 UNESCO, Rapport final de l’Évaluation externe indépendante de l’UNESCO, IOS/EVS/PI/107, Paris, le 30 septembre 2010, p. 24.

(15)

À titre d’illustration, le réseau des réserves de biosphère compte 669 sites dans 120 pays et vise à faciliter le partage des connaissances, les échanges d’expériences et le développement des capacités. Les réserves sont « des sites de soutien pour la science au service de la durabilité » – des lieux spéciaux où tester des approches interdisciplinaires afin de comprendre et de gérer les changements et les interactions entre systèmes sociaux et écologiques, y compris la prévention des conflits et la gestion de la biodiversité

22

. Cependant, en réalité, la plupart des sites n’ont fait rien de plus concret que d’utiliser cette appellation comme une publicité touristique. D’autres réseaux pour la protection de l’environnement tels que les Géoparcs et l’Alliance des mégapoles pour l’eau et le climat se trouvent dans la même situation.

Le conflit entre la Commission nationale française pour l’UNESCO (CNFU) et la Fédération française des Clubs UNESCO en est un autre exemple. D’après le Cadre réglementaire relatif aux associations, centres et clubs UNESCO adopté par la 39

e

Conférence générale en 2017, seules les commissions nationales ont le droit d’accréditer les associations et les clubs pour l’UNESCO, tandis que les fédérations nationales ne jouent qu’un rôle de plateforme et de conseiller

23

. Mais la Fédération française continue à empiéter sur l’autorité de la CNFU en accréditant de nouveaux clubs qui ne satisfont pas tous aux critères. Elle a insisté pour changer son nom en Fédération française pour l’UNESCO malgré l’opposition par lettre officielle du sous-directeur général Eric Falt. Ce comportement a jeté le trouble dans nombre d’associations candidates et risque de jeter le discrédit sur l’UNESCO de

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22 http://www.unesco.org/new/fr/natural-sciences/environment/ecological-sciences/biosphere-reserves/.

23 UNESCO, Cadre réglementaire relatif aux associations, centres et clubs UNESCO, 39C/LEG/7, Paris, le 3 novembre 2017.

(16)

la part de la société civile.

Un autre problème de mauvaise gestion dû au manque d’argent est celui de la recherche de fonds à l’extérieur. Il convient d’observer que « dans les couloirs de l’Organisation, on estime que certaines initiatives, destinées à trouver des fonds, ont pu être mal perçues, comme l’encouragement des partenariats avec des entreprises privées. Ces dernières se serviraient de l’image de l’Unesco pour ' blanchir ' la leur. »

24

Mue par la recherche de l’argent, on pourrait craindre que l’Organisation ne finisse par se détourner de ses objectifs par les demandes des donateurs.

Parallèlement à la faible performance de l’UNESCO, d’autres organismes des Nations Unies ou banques multilatérales de développement émergent et débordent sur ses champs de compétence. Ces fournisseurs sont dotés de meilleures ressources et sont souvent considérés comme plus efficaces sur le terrain.

Prenons l’exemple du domaine de l’éducation. D’après le Budget intégré de l’UNICEF

25

pour la période 2018-2021, le montant total des ressources disponibles s’élèvera à 24,5

milliards de dollars, dont 4,05 milliards (environ 20 %) seront consacrés durant les quatre ans à l’objectif 2 : « Chaque enfant apprend »

26

. Le budget de l’UNESCO pour son Grand Programme I – Education ne compte que 417,3 millions pour les deux ans suivants, soit un

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24 Robert Anne-Cécile, « L’UNESCO en danger (suite) », Le Monde diplomatique (carnets), le 23 septembre 2013.

25 Le Fonds des Nations unies pour l’enfance, agence de l’Organisation des Nations unies consacrée à l’amélioration et à la promotion de la condition des enfants.

26 UNICEF, Budget intégré de l’UNICEF pour la période 2018-2021, New York, 13 juillet 2017, pp. 11-13.

(17)

cinquième de celui de l’UNICEF par an. Les axes d’action de l’UNICEF – l’apprentissage précoce, l’égalité d’accès, les situations d’urgence, la qualité d’éducation, les partenaires et les systèmes éducatifs – recouvrent la plupart des objectifs stratégiques du Secteur de l’éducation de l’UNESCO. Quant à la mission d’élaboration des normes, l’OCDE

27

qui a initié le Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) semble l’emporter sur l’UNESCO, même si ce dernier, avec son Institut de statistiques, joue un rôle de collaborateur dans ce programme.

La concurrence de ces organisations affaiblit davantage la visibilité de l’UNESCO.

Comme l’indique l’EEI dans le rapport : « Dans les domaines où l’UNESCO n’est pas performante, elle laisse la place à d’autres. L’UNESCO a perdu de nombreuses occasions. »

28

Cette crise n’est qu’un accélérateur qui a poussé ce « train long et lourd » de l’UNESCO jusqu’au bord du gouffre. Pour le sauver, il faut d’abord trouver les raisons.

Chapitre 2. Le diagnostic de la crise

La crise dont souffre l’UNESCO aujourd’hui est le produit de la combinaison d’une politisation et de problèmes structurels qui resurgissent dans un contexte historique compliqué.

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27 L’Organisation de coopération et de développement économiques, organisation internationale d’études économiques qui a succédé en 1961 à l’Organisation européenne de coopération économique qui avait été créée en 1948.

28 UNESCO, Rapport final de l’Évaluation externe indépendante de l’UNESCO, Paris, 2010, p. 32.

(18)

A. De la coopération intellectuelle à la politisation : une contradiction fondamentale de la nature de l’UNESCO

La suspension du financement de leur quote-part par les États-Unis a pour origine l’admission de la Palestine comme État membre de l’Organisation durant la 36

e

Conférence générale en 2011. La résolution a été votée le 31 octobre à Paris par 107 voix pour, 52 abstentions et 14 voix contre.

Cette admission a été qualifiée comme « prématurée » par les Américains. La délégation permanente a indiqué dans la déclaration pour expliquer son vote sur la résolution que : « the only path to the Palestinian State that we all seek is through direct negotiations. There are no shortcuts, and we believe efforts such as the one we have witnessed today are counterproductive. »

29

Ils craignaient que certains aient utilisé l’UNESCO comme « a means to single out Israel »

30

en traitant des problèmes qui ne relevaient pas de sa compétence. La suspension de la contribution financière est venue naturellement après l’adoption de cette résolution, car deux lois américaines du début des années 1990 avaient interdit au gouvernement de financer une agence spécialisée des Nations unies qui reconnaîtrait à la Palestine le statut d’Etat membre à part entière, en l’absence d’accord de paix avec Israël.

Ainsi la crise financière éclata.

Toutefois, l’admission de la Palestine est loin d’être la seule raison de la détérioration de

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29 U.S. Mission to UNESCO, U.S. Statement in Explanation of Vote on Draft Resolution 9.1 Regarding Membership for Palestine in UNESCO, Paris, le 31 octobre 2011.

30 U.S. Mission to UNESCO, Explanation of Vote For Middle East Resolutions, Paris, le 1 mars 2012.

(19)

la situation. En fait, l’État palestinien a été reconnu par d’autres organisations internationales non onusiennes : le Comité international olympique (OIC) en 1995, la Cour pénale internationale (CPI) en 2015 et l’Organisation internationale de police criminelle (OIPC) en 2017. Il a obtenu le statut d’État observateur à l’ONU en 2012. Les États-Unis n’ont pas pris de contre-mesures envers ces organisations. Pourtant, en janvier 2018, ils ont annoncé que leur contribution financière au budget de l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) pour cette année sera de 60 millions de dollars, soit moins de la moitié du montant prévu

31

.

En réalité, le gel du financement américain est une manière de faire pression sur l’UNESCO afin d’influencer sur les orientations générales. Le retrait des États-Unis est ainsi une arme tactique à des fins plus globales. Le mot-clé de leurs accusations est la

« politisation » : « This act [of admitting the Palestinians with Member State status] was premature, politicized[...] [...] Our decision to withdraw from UNESCO was influenced by persistent politicization and anti-Israel bias at UNESCO. »

32

On peut trouver presque les mêmes critiques lors de leur dernier retrait en 1984 : « We feel that [trends in the policy, ideological emphasis, budget and management] have served the political purposes of member states, rather than the international vocation of UNESCO. »

33

Pour le Directeur général Amadou-Mahtar M’Bow, cette accusation était injuste. Il

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31 https://news.un.org/fr/story/2018/01/1001682.

32 U.S. Mission to UNESCO, United States National Statement to the 39th General Conference, Paris, le 4 novembre 2017.

33 Lettre du Secrétaire d’État des États-Unis George Shultz au Directeur général de l’UNESCO Amadou-Mahtar M’Bow, voir UNESCO, Communication du Secrétaire d’État des États-Unis d’Amérique concernant le retrait des États-Unis D’Amérique, 119EX/14, Paris, le 9 avril 1984, Annexe 1.

(20)

jugeait que c’étaient les États membres qui décidaient des orientations, des programmes et des activités de l’Organisation, qu’il fallait distinguer les points de vue des États membres de l’action de l’Organisation elle-même, et qu’il n’y avait rien de contraire aux idéaux proclamés par l’Acte constitutif

34

. C’est la même argumentation qu’a prise Irina Bokova considérant que l’admission de l’État palestinien résulte d’un vote des États membres dans le cadre de la Conférence générale.

Cependant, est-il possible de séparer les débats politiques et la position de ces deux organes directeurs de l’Organisation, étant entendu que l’admission à l’UNESCO des États qui ne sont pas membres des Nations Unies nécessite une recommandation du Conseil exécutif avant d’être examinée par la Conférence générale

35

? Après l’adoption de la résolution, Bokova a exprimé ses souhaits d’y voir « an opportunity to strengthen the Organization and not weaken it, a chance for all to commit once again to the values we share and not to be divided »

36

. Ce propos est diplomatique et montre un espoir presque illusoire, parce que la politisation a été dès le début un « péché » par rapport à la noblesse de ses missions, et qu’il y a toujours des dommages à l’issue des conflits politiques.

En fait, en tant qu’organisation intergouvernementale, tous les problèmes que traite l’UNESCO, à savoir l’éducation, la culture, la science et la communication, touchent profondément aux intérêts des États, membres ou non, et à leurs diverses idéologies.

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34 Lettre du Directeur général de l’UNESCO Amadou-Mahtar M’Bow au Secrétaire d’État des États-Unis George Shultz. Ibid, Annexe 2.

35 UNESCO, Textes fondamentaux, Paris, 2018, p. 56.

36 UNESCO, Discours de la Directrice générale de l’UNESCO Irina Bokova, à l’occasion de l’examen du point relatif à l’admission de la Palestine comme État membre de l’UNESCO, Paris, le 31 octobre 2011.

(21)

L’histoire de l’UNESCO elle même est une évolution de politisation.

Traumatisés par la guerre et encouragés par la victoire, les fondateurs principaux de cette organisation – les États-Unis, le Royaume Uni et la France – ont développé une vision supranationale et idéaliste de la paix, la sécurité et le bien-être de l’humanité. Ils ont choisi pour elle un modèle qui combinait la nature intergouvernementale et le rôle central des intellectuels

37

, en espérant que le monde irait mieux à l’aide de la bonne coopération et le partage d’expertise. Or cet optimisme a été bientôt frappé par le changement conjoncturel en 1946-1947 : le « rideau de fer » en Europe qui marquait le début de la guerre froide. Le poids du politique est désormais omniprésent.

À l’époque de sa création, l’Organisation était très occidentalocentrée. Bien que deux tiers des États membres fondateurs soient non-occidentaux, ils n’ont pas pesé dans l’élaboration du concept de l’UNESCO. La majorité écrasante des postes au Secrétariat étaient détenus par des Occidentaux

38

. Les trois seuls pays communistes (la Pologne, la Hongrie et la Tchécoslovaquie) ont quitté l’Organisation pour contester son usage politique par les États-Unis. Les conflits est-ouest sont devenus plus sévères depuis que l’URSS a adhéré à l’UNESCO en 1954.

De plus, pendant les années 1960, beaucoup de pays du Tiers-monde nouvellement indépendants et sous-développées sont entrés dans l’Organisation, et leurs besoins largement

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37 Berki Chikh, L’UNESCO : une entreprise erronée ? Paris, 1991, p. 13.

38 Maurel Chloë, L’UNESCO de 1945 à 1974, Paris, Université Panthéon-Sorbonne - Paris I, 2006, p. 73.

(22)

différents de ceux de l’Occident s’imposaient de plus en plus clairement. Dans ce contexte de décolonisation dans le monde, la priorité de l’UNESCO se tournait vers l’aide au développement qui est très liée aux enjeux géopolitiques

39

. Les tensions nord-sud s’approfondissaient également.

Une des conséquences de cette évolution géopolitique est la transformation du Conseil exécutif. Originellement prévu pour « tempérer le caractère intergouvernemental de l’organisation »

40

, cet organe directeur était formé de personnalités indépendantes, issues du monde intellectuel, soit des personnalités « compétentes dans les domaines des arts, des lettres et des sciences, de l’éducation et de la diffusion de la pensée [...] »

41

. En 1954, à l’initiative du gouvernement des États Unis, les membres du Conseil exécutif représenteraient désormais chacun le gouvernement de 1’État dont il est ressortissant. Ils perdaient ainsi leur liberté d’opinion et d’action par rapport à ce dernier.

Un autre impact de la politisation sur l’Organisation ressort des crises répétitives entraînées par les contre-mesures des gros contributeurs depuis les années 1980. Construite sur le principe d’égalité des États souverains, l’UNESCO ne s’appuie pourtant pas de la même façon sur tous ses pays membres. La coupe budgétaire des Américains en 2011 conduit non seulement à handicaper, par l’effet cumulatif, le fonctionnement de l’Organisation d’aujourd’hui, mais est également porteur d’un effet de contagion en donnant l’exemple à d’autres États qui souhaiteraient faire entendre leurs buts politiques. C’est le cas du Japon qui

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39 Archibald Gail, Les États-Unis et l’UNESCO 1944-1963, Paris, Publication de la Sorbonne, 1993, p. 191.

40 Berki Chikh, L’UNESCO : une entreprise erronée ? Paris, Publisud, 1991, p. 173.

41 Acte constitutif de l’UNESCO tel qu’il est rédigé et adopté par la Conférence de Londres le 16 novembre 1945.

(23)

a protesté contre l’inscription des documents relatifs au massacre de Nanjing (Chine)

42

sur le Registre de la Mémoire du monde en suspendant sa part de financement de 38 millions de dollars, soit 10,83% du budget ordinaire, en octobre 2016. Premier contributeur de facto, il a relancé le versement deux mois plus tard en estimant qu’il y avait des progrès dans la réforme du Programme. En 2017, il a retenu de nouveau sa contribution toujours pour la même raison

43

jusqu’au moment où le 202

e

Conseil exécutif a décidé de reporter la demande en question et qu’une résolution invitant la Directrice générale et les parties prenantes à « éviter toutes nouvelles tensions politiques en rapport avec le Programme »

44

a été adoptée. Ce programme a été interrompu et passera sous un examen approfondi depuis début 2018

45

.

Aujourd’hui, la politisation n’est plus un tabou pour les dirigeants de l’Organisation.

Dans son discours à l’occasion de l’ouverture de sa première session du Conseil exécutif, l’actuelle Directrice générale Audrey Azoulay a admis qu’« [il] ne s’agit pas, bien entendu, de dire que le mandat de l’UNESCO n’est pas politique, car il est évident que l’éducation, la

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42 Le massacre de Nanjing (Nankin) est l’une des plus terrifiantes crimes commise pendant la Seconde Guerre Mondiale. La Chine chiffre à 300 000 le nombre des morts imputables aux militaires nippons durant les six semaines qui ont suivi leur entrée dans la ville. Selon certains universitaires étrangers, le nombre de victimes serait moins élevé. La position officielle du Japon est que “le meurtre d’un grand nombre de non-combattants, des pillages et autres actes ont été commis”, mais qu'il est “difficile de déterminer” le nombre exact de victimes.

Des nationalistes nient cependant ces atrocités. Voir http://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2015/10/10/le- japon-deplore-l-inscription-du-massacre-de-nankin-au-registre-de-la-memoire-du-monde_4786772_3216.html.

43 Cette fois il s’agit de la demande d’inscription des documents relatifs aux “femmes de réconfort” proposés par des groupes civiques de huit pays, dont la Corée du Sud et la Chine. Le terme “femmes de réconfort” est l’euphémisme employé au Japon à propos des victimes, souvent mineures, du système d'esclavage sexuel de masse organisé à travers l’Asie par et pour l’armée et la marine impériales japonaises, en particulier durant la Seconde Guerre mondiale. Les Japonais se sont plaints, en particulier auprès du gouvernement sud-coréen. Ils estiment que l’inscription de tels documents sur la liste de l’Unesco irait à l’encontre de l’esprit de l’accord controversé signé entre Séoul et Tokyo pour traiter les griefs sur les atrocités commises par le Japon. Voir http://french.yonhapnews.co.kr/national/2017/10/31/0300000000AFR20171031000900884.HTML.

44 UNESCO, Rapport final du Comité consultatif international sur l’examen du Programme Mémoire du monde, 202 EX/PX/DR.15.8, Paris, le 16 octobre 2017.

45 UNESCO, Projet de plan d’action pour un examen approfondi du Programme Mémoire du monde, 204EX/8, Paris, le 21 mars 2018.

(24)

culture, la science et la liberté d’expression sont des piliers fondamentaux de la vie [civique – donc] politiques. Le problème survient lorsque l’UNESCO sert de terrain de jeu par l’instrumentalisation de questions ayant vocation à être réglées dans d’autres enceintes. »

46

Le diagnostic est fait. Mais le caractère politisé étant intrinsèque à l’Organisation, il lui reste un très long chemin à faire.

B. La prolifération des institutions et la centralisation de la structure

Les difficultés financières connues par l’UNESCO étant principalement causées par les différends politiques, il ne faut pas négliger les problèmes institutionnels qui engendrent un excès de bureaucratie et une mauvaise administration. D’un côté, l’Organisation née

« tricéphale » devient de plus en plus lourde et dispersée avec un nombre croissant d’institutions affiliées ; de l’autre côté, la structure hyper centralisée entrave sa capacité d’agir

« hors siège ».

L’Acte constitutif de l’UNESCO définit les différentes compétences de ses trois institutions : les deux organes directeurs (la Conférence générale, le Conseil exécutif) et le Secrétariat. La Conférence générale détermine l’orientation et la ligne de conduite générale de l’Organisation, convoque des conférences internationales, produit des recommandations et des conventions internationales, reçoit et examine les rapports adressés par les États membres.

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46 UNESCO, Discours de la Directrice générale de l’UNESCO Audrey Azoulay à l’occasion de l’ouverture de la 204e session du Conseil exécutif, Paris, le 9 avril 2018.

(25)

Le Conseil exécutif est chargé de préparer l’ordre du jour des sessions de la Conférence générale et d’étudier le programme de travail ainsi que les prévisions budgétaires correspondantes. En outre, le Conseil exécutif assure la gestion efficace et rationnelle de l’exécution du programme adopté. Le Directeur général, chef du Secrétariat, « formule des propositions en vue des mesures à prendre par la Conférence et le Conseil » et « prépare [...]

un projet de programme de travail pour l’Organisation, accompagné des prévisions budgétaires correspondantes ». Il doit aussi établir et communiquer des rapports périodiques sur l’activité de l’Organisation

47

.

En pratique, l’analyse démontre qu’il existe des problèmes de la répartition des compétences entre ces trois organes :

1) des chevauchements d’activités : des activités se recoupent et risquent de faire double emploi ;

2) la déconnexion : les fonctions n’étant pas toujours claires, des activités et des tâches risquent d’être subitement interrompues et de ne pas recevoir une attention suffisante ;

3) le glissement de responsabilités : il arrive souvent qu’un organe empiète sur le territoire d’un autre, par exemple le Conseil élabore des politiques à la place de la Conférence générale, ou celle-ci surveille l’exécution du programme. Il en va de même lorsque le

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47 UNESCO, Textes fondamentaux, Paris, 2018, pp. 8-15.

(26)

Secrétariat fixe des priorités et que les organes directeurs font de la « microgestion »

48

.

Le mécanisme administratif s’alourdit avec la croissance des États membres et leur prolifération dans l’Organisation. La difficulté d’atteindre un consensus par 195 États membres conduit souvent à des accords sur des visions abstraites et floues. Cela montre une perte de pouvoir de la Conférence générale dont la fonction de décision s’est dégradée au profit de la fonction de représentation

49

. Par ailleurs, le temps dévolu aux discours de déclaration nationale en langue de bois prend de plus en plus d’importance durant les débats, ce qui n’apporte pas une vraie contribution à l’action et aggrave l’inefficacité de l’organe qui est ainsi devenu un lieu incantatoire.

En outre, au delà de la Conférence générale et du Conseil exécutif, il existe beaucoup de comités intergouvernementaux et groupes d’experts qui administrent des conventions, des programmes intergouvernementaux et des instituts de Catégorie 1. D’une part, cette multiplication des moyens de gouvernance retarde souvent la consultation et la coordination entre l’UNESCO et ses États membres au sujet des programmes ; d’autre part, l’autonomie décisionnelle et financière des institutions affiliées contribue à l’incohérence de ses activités par rapport au programme ordinaire de l’Organisation.

En parallèle, la centralisation au sein de l’UNESCO est un problème chronique qui entraîne des décalages entre les objectifs fixés au siège et la performance sur le terrain.

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48 UNESCO, Rapport final de l’Évaluation externe indépendante de l’UNESCO, Paris, 2010, p. 44.

49 Maurel Chloë, op. cit., p. 389.

(27)

Constitué de 49 bureaux nationaux et régionaux, 4 bureaux de liaison et 10 Instituts spécialisés de Catégorie 1

50

, le réseau hors siège de l’UNESCO est censé contribuer fortement à la collaboration entre l’Organisation et les autorités nationales. Cependant, dotés de pouvoir et de ressources extrêmement limités, la plupart des cellules décentralisées n’arrivent pas à bien jouer ce rôle. D’après le document 39C/5, le budget distribué aux bureaux hors siège ne représente que 8% du budget total pour le biennal 2018-2019

51

. Leurs capacités d’agir dépendent beaucoup du soutien local qui pourrait varier de façon considérable entre les pays hôtes et les différentes périodes. Il en va de même pour les Instituts spécialisés

52

. Beaucoup d’agents du Siège considèrent l’affectation aux bureaux comme un « exil », car « la préparation du programme et sa mise en œuvre, les décisions en matière de finances ou de personnes, les relations avec les États membres ou les milieux intellectuels, tout ce qui est important se traite à Paris »

53

. Le dynamisme des différents bureaux est variable selon la capacité du Directeur, mais on constate habituellement des « mini UNESCO » aussi bureaucratique que son Siège à Paris.

Le réseau des bureaux hors siège a connu deux réformes sous la direction de Koïchiro Matsuura

54

et d’Irina Bokova, mais les résultats de ces efforts se révèlent peu tangibles, et la structure de l’Organisation reste toujours hautement centralisée. La décentralisation comme remède à la mauvaise performance sur le terrain n’est qu’un essai non réussi, et cela est

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50 https://fr.unesco.org/countries/field-offices et http://www.unesco.org/new/fr/unesco/about-us/where-we-are/

institutes-and-centres/

51 UNESCO, Projets de résolution, Premier biennium 2018-2019, 39C/5 Volume 1, Paris, 2017, p. 1.

52 A titre d’exemple, la Suisse, pays hôte du Bureau international d’éducation (BIE) et deuxième plus gros contributeur de celui-ci après le siège, a annoncé qu’elle cesserait son financement depuis 2018. Voir UNESCO, Gestion des Instituts de Catégorie 1, 204EX/11, Paris, le 9 mars 2018.

53 Courrier Yves, op. cit., p.136.

54 Directeur général japonais de 1999 à 2009.

(28)

d’autant plus vrai dans le contexte de crise financière.

(29)

Partie II : L’UNESCO à la recherche d’une sortie de crise

Être ou ne pas être, telle est la question. Il est arrivé à l’UNESCO le moment de se poser cette question existentielle. Les trois quarts du mandat de la dernière Directrice a été perturbé par la crise financière. Reste à savoir si la nouvelle élue mettra un terme à cette crise et permettra un nouveau souffle à l’organisation onusienne.!Il est encore trop tôt pour prévoir les résultats de cette transformation, mais deux points extrêmement pertinents sont à souligner pour un redressement de l’Organisation : le retour vers un rôle de laboratoire d’idées et la recherche d’un équilibre entre le caractère intergouvernemental et les missions supranationales.

Chapitre 3. Les réactions de la direction face aux crises

Ce chapitre présente les mesures prises par l’ancienne Directrice générale, Irina Bokova face à la situation de crise ainsi que la stratégie de réforme de sa successeure, Audrey Azoulay, qui se projette au plus loin dans l’avenir de l’Organisation.

A. Irina Bokova et ses mesures d’urgence

Née le 12 juillet 1952 à Sofia, en Bulgarie, Irina Gueorguieva Bokova a assumé les

fonctions de Directrice générale de l’UNESCO depuis le 15 novembre 2009. Réélue pour un

second mandat en octobre 2013, elle est la première femme et la première personne originaire

(30)

d’Europe de l’Est à avoir dirigé cette Organisation

55

. Son double mandat de huit ans à la tête de l’UNESCO a été fortement marqué par la crise. En 2011, au moment où le financement américain est coupé, elle n’a exercé que la moitié de son premier mandat. Face à la crise, elle a pris une série de mesures d’urgence qui visait à la fois à diminuer les dépenses et à mobiliser les nouvelles ressources.

S’agissant de la fin de l’exercice 2011, après un réexamen minutieux de toutes les activités programmées! dans les domaines autorisant une certaine souplesse opérationnelle, l’Organisation a reporté la plupart des activités prévues en novembre et décembre. Elle n’a pas renouvelé les emplois contractuels parvenant à échéance et a lancé un programme de cessation volontaire de services par accord mutuel. Un groupe de travail intersectoriel comprenant des représentants des associations du personnel a été constitué afin de rechercher des mesures visant à réduire les coûts, à réaliser des gains d’efficacité et à développer une culture de « conscience des coûts » au sein du Secrétariat

56

.

Parmi les mesures d’économie, figurent principalement la réduction du nombre des missions (passées d’une moyenne de 319 par mois à 70 en décembre 2011) ; la suppression ou le non-renouvellement des contrats temporaires (passés de 482 en décembre 2011 à 160 en janvier 2012) ; l’abandon du projet de rénovation du système de communications ; la limitation du nombre de publications (passées de 805 pour 2010-2011 à 443 pour

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55 https://fr.unesco.org/director-general/former-dgs.

56 UNESCO, Situation financière de l’Organisation et incidences sur l’exécution du 36C/5, 189EX/15, Paris, le 7 février 2012, p. 1.

(31)

2012-2013)

57

.

Parallèlement, pour attirer des contributions exceptionnelles destinées à combler le déficit de financement, la Directrice générale a créé le Fonds d’urgence multi-donateurs spécial pour les programmes prioritaires et les initiatives de réforme de l’UNESCO. Ce fonds visait à financer les programmes prioritaires

58

.

Grâce également à l’utilisation du fonds de roulement (30 millions de dollars) et au versement anticipé de contributions, notamment par la France, au titre de l’année 2012, l’UNESCO a pu éviter de recourir à un emprunt et a même terminé l’année avec un excédent de 14 millions de dollars.

Au-delà de ces mesures d’urgence, Bokova a poursuivi son programme de réforme structurelle de l’Organisation qui avait commencé dès son installation. Comme elle l’a indiqué dans un entretien de radio sur France Culture, « il ne faut jamais rater une crise pour avoir des réformes »

59

. Conformément aux recommandations de l’EEI, cette réforme porte sur trois principes : préserver le leadership de l’Organisation dans les domaines de programme prioritaires, transformer le mode de travail de l’Organisation, mobiliser les ressources

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57 UNESCO, Allocution prononcée par la Directrice générale de l’UNESCO, Irina Bokova, à l’occasion de l’ouverture de la 189e session du Conseil exécutif, Paris, le 1 mars 2012.

58 Les priorités sont, entre autres, l’Afrique, l’égalité entre les sexes, l’éducation pour tous (EPT), l’éducation en vue du développement durable (EDD), l’enseignement et la formation techniques et professionnels (EFTP), la science, la technologie et l’innovation, la biodiversité, la Commission océanographique intergouvernementale (COI), la culture et le développement, le patrimoine mondial et le patrimoine immatériel, la liberté d’expression et les médias. Voir UNESCO, op. cit., 189EX/15, p. 2.

59 France Culture, Unesco : le bilan des deux mandats d’Irina Bokova, Paris, le 1 octobre 2017. Voir https://www.franceculture.fr/emissions/soft-power/unesco-le-bilan-des-deux-mandats-dirina-bokova.

(32)

extrabudgétaires et les partenariats. En mars 2012, le 189

e

Conseil exécutif de l’UNESCO a adopté une feuille de route qui encadre l’ensemble de ces mesures de réforme

60

. Dans le rapport de suivi en mars 2014, 10 parmi les 18 objectifs ont été terminés.

Néanmoins, un rapport d’audit mené par la Cour des comptes française intitulé Gestion de la crise budgétaire et financière de l’UNESCO: impacts des réformes en cours, des mesures d’urgence et des mesures structurelles consécutives a dénoncé les faiblesses de ces mesures sur le long terme. Il a d’abord jugé que les réformes préexistantes à la crise étaient

« purement formelles et théoriques »

61

, parce qu’elles n’avaient pas permis à l’UNESCO d’être mieux armée pour affronter une telle crise. Ensuite, il a indiqué que toutes les mesures d’urgence manquaient d’évaluation sérieuse, qualitative ou quantitative, de l’impact à long terme, et que la gouvernance de la gestion de crise manquait de rigueur et de méthodologie

62

. Troisièmement, la Cour a estimé que la feuille de route était ambiguë, avec des objectifs

« difficilement mesurables, biaisés dans leur mesure éventuelle, génériques et non spécifiques »

63

. Le rapport concluait qu’il était « dommageable de ne pas profiter de la crise actuelle pour poser des questions longtemps éludées »

64

.

La pertinence des problèmes exposés dans ce rapport adopté en 2013 a été justifiée par la réalité. Durant son second mandat de 2014 à 2017, le fil conducteur de la gouvernance d’Irina Bokova n’a pas changé. Compte tenu de la performance actuelle de l’UNESCO qui n’est pas

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60 Voir UNESCO, op. cit., 189EX/15, Partie I Add.

61 UNESCO, Nouveaux audits du Commissaire aux comptes, 191EX/28 Partie II, Paris, le 10 avril 2013, p. 4.

62 UNESCO, op. cit., p. 6.

63 UNESCO, op. cit., p. 11.

64 UNESCO, op. cit., p. 16.

(33)

beaucoup plus satisfaisante que celle de 2011

65

, nous avons des raisons de croire que les mesures d’urgence et la réforme structurelle de Bokova n’ont eu des effets qu’à court terme et n’ont pas permis à l’Organisation de retrouver son rayonnement.

B. Audrey Azoulay et sa transformation stratégique

La 39

e

session de la Conférence générale a élu Audrey Azoulay Directrice générale de l’UNESCO, succédant ainsi à Irina Bokova. Élue pour un mandat de 4 ans, Azoulay a pris ses fonctions le 15 novembre 2017

66

.

Poussée par François Hollande et ensuite soutenue par Emmanuel Macron, la candidature de cette ancienne ministre de la Culture française a suscité une polémique. En effet, il existait un arrangement secret à la création de l’UNESCO : le Siège serait à Paris, mais en échange le Directeur général ne serait jamais un Français

67

. Certes, il y a déjà eu une exception qui est celle de René Maheu, sixième patron de l’Organisation, ce qui atténue le choc d’une candidature française ; mais une tradition tacite propre aux organisations internationales veut qu’il y ait un roulement par régions du monde pour la nationalité du plus haut dirigeant, et cette fois la fonction de Directeur général revenait à un représentant du

« monde arabe ». C’est pourquoi les pays arabes ont remis une pétition au ministre des Affaires étrangères français dans laquelle ils accusaient « une tentative de profiter des

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65 Certains problèmes sont devenus plus graves, par exemple la prolifération excessive des instituts et des centres de Catégorie 2 dont plus que la moitié sont inactifs et la mauvaise qualité de certains partenariats du secteur privé.

66 https://fr.unesco.org/director-general.

67 Maurel Chloë, op. cit., pp. 177-178.

(34)

procédures démocratiques en vue d’accaparer des postes de direction qu’il est convenu d’attribuer sur la base de l’alternance»

68

. Cette contestation n’a pas remis en cause l’élection d’Azoulay, mais cette dissension ajoutée au retrait des États-Unis annoncé la veille du dernier tour de l’élection, perturbera sans doute son mandat à la tête de l’UNESCO.

Durant le 204

e

Conseil exécutif, Azoulay a annoncé son plan de réforme intitulé la

« transformation stratégique ». Elle a précisé les quatre principes directeurs de la réforme

69

:

1) Renforcer les programmes et cibler davantage encore les programmes sur les priorités identifiées dans la Stratégie à moyen terme. Mieux identifier les domaines dans lesquels l’UNESCO fournit une valeur ajoutée ;

2) Renforcer l’institution dans son rôle primordial de laboratoire d’idées et de définition de socles normatifs sur les thématiques contemporaines liées au mandat de l’UNESCO, par une vision enracinée dans des principes éthiques et tournée vers l’action ;

3) Ouvrir plus largement l’UNESCO à la société civile, aux organisations non gouvernementales, aux universitaires, à la jeunesse, au secteur privé ;

4) Faire évoluer l’organisation pour la rendre plus efficace, plus fluide et plus agile tout en renforçant la maîtrise des risques et la culture de gestion.

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68 http://www.liberation.fr/planete/2017/10/13/audrey-azoulay-la-france-ravit-l-unesco_1603076.

69 UNESCO, Les étapes de la transformation stratégique de l’UNESCO, 204EX/31, Paris, le 26 mars 2018.

(35)

Sur le dernier point, il s’agit précisément d’une série d’ajustements de la structure hiérarchique : la suppression du Secteur ERI (relations extérieures et information publique) et la création d’un nouveau Secteur « Administration et Management »

70

. Les autres points restent encore un cadre d’action flou qui n’est pas tellement nouveau par rapport aux réformes précédentes. Il faut souligner que la nouvelle Directrice générale a demandé, avant de faire la moindre proposition sur les mesures concrètes ou sur le budget, un montant de 2,1 millions de dollars pour lancer cette transformation. Au bout de deux journées de débats et de négociations, bien que beaucoup d’États membres soient restés sceptiques, le Conseil exécutif a adopté les grandes lignes de la réforme avec une ventilation indicative des coûts préliminaires rajoutés

71

. Les informations complètes sont censées être soumises à la prochaine session du Conseil exécutif en octobre 2018.

La nouvelle direction ouvrira-t-elle une nouvelle ère plus prometteuse à l’UNESCO ? C’est trop tôt pour le dire. Jusqu’à maintenant, l’équipe entièrement française d’Azoulay ne s’est pas encore familiarisée avec les activités professionnelles, c’est pourquoi son efficacité est à ce stade remise en question – telle est l’hypothèse qu’a formulée ironiquement l’Ambassadrice nigériane d’un « trou noir » dans le Secrétariat où se bloquent tous les documents

72

. Or, le plan d’Azoulay a permis de mettre en avant des mots-clés porteurs d’un meilleur positionnement de l’UNESCO par rapport à ses missions, ce que l’on développera

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70 UNESCO, L’évolution de la structure des unités au Siège pour renforcer la culture de gestion, 204EX/3.INF, Paris, le 3 avril 2018.

71 UNESCO, Projets de décision recommandés par la Commission du programme et des relations extérieures (PX) et la Commission financière et administrative (FA) à leur réunion conjointe, 204EX/37, Paris, le 16 avril 2018, p. 6.

72 Intervention de Mariam Y. KATAGUM, Ambassadrice du Nigéria auprès de l’UNESCO au 204e Conseil exécutif, Paris, le 9 avril 2018.

(36)

dans le chapitre suivant.

Chapitre 4. Pour un retour aux origines et un meilleur équilibre

Ayant présenté les réactions des deux Directrices générales face à la crise chronique, il y a lieu de formuler des propositions à plus long terme concernant la recherche d’un bon chemin pour l’UNESCO : exploiter son potentiel en tant que laboratoire d’idées et trouver l’équilibre entre les positions de l’Organisation et celles de ses États membres.

A. Le rôle de laboratoire mondial d’idées

La fonction de « laboratoire d’idées » n’existe pas en tant que telle dans l’Acte constitutif ; pourtant, elle dérive des missions originelles de « contribuer au maintien de la paix et de la sécurité », d’aider « à l’avancement [...] du savoir » et d’encourager la coopération « dans toutes les branches de l’activité intellectuelle »

73

. Il s’agit d’aider la communauté internationale à progresser dans la compréhension des mutations du monde contemporain et de proposer des solutions aux grands problèmes mondiaux en développant des concepts et des stratégies novateurs qui répondent au besoin changeant de l’ensemble de l’humanité. Ce rôle clé – trouver des idées – est souligné de façon répétée dans les documents importants tels que les Plans à moyen terme de l’UNESCO.

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73 UNESCO, Textes fondamentaux, Paris, 2018, p. 6.

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