• Aucun résultat trouvé

Article pp.260-266 du Vol.1 n°4 (2011)

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "Article pp.260-266 du Vol.1 n°4 (2011)"

Copied!
7
0
0

Texte intégral

(1)

MISE AU POINT /UPDATE

Ventilation non invasive en médecine d ’ urgence

Non-invasive positive pressure ventilation in emergency medicine

X. Combes · P. Jabre · B. Vivien · P. Carli

Reçu le 16 février 2011 ; accepté le 10 mai 2011

© SFMU et Springer-Verlag France 2011

RésuméLa ventilation non invasive (VNI) est une technique qui après avoir été largement validée en réanimation est uti- lisée de manière quotidienne dans les structures d’urgences pré- et intrahospitalières. Les deux pathologies pour lesquel- les la VNI a démontré un bénéfice certain sont la décom- pensation de bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) et l’œdème aigu pulmonaire (OAP) cardiogénique sévère. Les deux modes ventilatoires les plus souvent utilisés sont la ventilation spontanée avec aide inspiratoire et pres- sion positive de fin d’expiration (VS AI-PEP), et la pression positive continue (VS PPC ou CPAP). La VS AI-PEP est le mode électif lors de la réalisation d’une VNI chez un patient BPCO en décompensation alors que VS AI-PEP et VS PPC peuvent être utilisées indifféremment en cas d’OAP. Le mode VS AI-PEP a été proposé dans d’autres indications que sont la préoxygénation avant intubation et l’insuffisance respiratoire aiguë hypocapnique. La VS AI-PEP peut être aussi utilisée dans le cadre d’une limitation thérapeutique chez des patients en détresse respiratoire. En médecine d’urgence, ces techniques de VNI doivent être mises en route le plus précocement possible soit en préhospitalier ou dès l’arrivée du patient au service d’accueil des urgences

(SAU). Bien que l’expérience clinique soit moins grande que pour le milieu intrahospitalier, les nouveaux ventilateurs, compacts, performants et autonomes sur le plan énergie permettent de débuter la VNI dès la prise en charge préhospi- talière par les équipes de Smur.Pour citer cette revue : Ann.

Fr. Med. Urgence 1 (2011).

Mots clésVentilation · Ventilation non invasive · Préhospitalier · Urgences

Abstract Non-invasive positive pressure ventilation (NIPPV) is a respiratory technique validated for several years in intensive care units, which has became a standard of care in emergency units in recent years. The best indica- tions for NIPPV are patients with chronic obstructive pulmo- nary disease (COPD) exacerbation and those with acute congestive heart failure (CHF). The two ventilatory modes usually used are spontaneous modes: the bi-level positive airway pressure (BiPAP) and the continuous positive airway pressure (CPAP). BiPAP is the only mode indicated for COPD decompensation, whereas CPAP or BiPAP can be used in CHF. BiPAP has been proposed in case of other indi- cations such as preoxygenation technique before tracheal intubation, in case of acute respiratory failure and in patients with“do not intubate”status. In emergency medicine, NIPPV should be started as earlier as possible either in the prehospital setting or at the patient’s arrival in the emergency department.

New ventilators are small with high performance capacities and are equipped with batteries which allow NIPPV to be started in the prehospital setting by the mobile medical units.

To cite this journal: Ann. Fr. Med. Urgence 1 (2011).

Keywords Ventilation · Non-invasive positive pressure ventilation · Prehospital · Emergency

La ventilation non invasive (VNI) est une technique de prise en charge respiratoire connue depuis plusieurs décennies qui est devenue une thérapeutique quotidienne dans les services de réanimation. C’est au début des années 1990 que les premières grandes études cliniques ont montré que la VNI

X. Combes (*) · P. Jabre · B. Vivien

Samu 75 et département d’anesthésie–réanimation, hôpital Necker–Enfants-Malades,

Assistance publique–Hôpitaux de Paris,

149, rue de Sèvres, F-75743 Paris cedex 15, France e-mail : xavier.combes@nck.aphp.fr

P. Carli

Samu 75 et département d’anesthésie–réanimation, hôpital Necker–Enfants-Malades,

Assistance publique–Hôpitaux de Paris, 149, rue de Sèvres, F-75743 Paris cedex 15,

université Paris-Descartes, 12, rue de l’Ecole de Médecine, F-75270 Paris Cedex 06, France

P. Jabre

Inserm U970, hôpital européen Georges–Pompidou, 56, rue Leblanc, F-75015 Paris, université Paris-Descartes, 12, rue de l’Ecole de Médecine,

F-75270 Paris Cedex 06, France DOI 10.1007/s13341-011-0076-6

(2)

améliorait le pronostic des patients bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) en décompensation [1,2].

Depuis, de très nombreux travaux ont confirmé ces résultats et ont évalué la VNI dans d’autres situations pathologiques.

La pratique de la VNI en dehors des structures de réani- mation et notamment dans les services d’urgences a été évaluée plus récemment [3–11]. La VNI n’est plus une tech- nique réservée aux unités de soins intensifs, et la mise en route précoce de ce support respiratoire, que ce soit dès la période préhospitalière ou dans un service d’accueil des urgences (SAU), se doit de bénéficier à un grand nombre de patients présentant une détresse respiratoire sévère.

D’importantes avancées technologiques ont permis la mise à disposition aux cliniciens ces dernières années de ventila- teurs performants, de petite taille et surtout pourvus de batteries leur conférant une autonomie électrique de plu- sieurs heures. Ces ventilateurs ont permis une utilisation de plus en plus large de ces techniques de VNI dans le contexte de la médecine d’urgence préhospitalière.

Différentes techniques ventilatoires non invasives

La VNI consiste à délivrer au patient une assistance respira- toire mécanique à travers un masque le plus souvent facial (nasobuccal). Elle se différencie de la ventilation invasive qui utilise comme interface entre le ventilateur et le patient soit une sonde d’intubation, soit une canule de trachéotomie.

Si en théorie tous les modes ventilatoires peuvent être utili- sés, les modes spontanés sont quasiment les seuls adaptés en situation d’urgence.

Deux modes ventilatoires sont utilisés en pratique cou- rante : la ventilation spontanée en pression positive continue (VS PPC ou CPAP pourcontinuous positive airway pres- sure) et la ventilation spontanée avec aide inspiratoire et pression positive de fin d’expiration (VS AI-PEP).

La VS PPC est le plus souvent désignée par son acronyme anglo-saxon CPAP, mais le terme VS PEP est aussi souvent utilisé. Ce n’est pas à proprement parler un mode ventila- toire, puisque le patient respire spontanément et qu’il n’y a pas d’aide à la ventilation, mais uniquement le maintien d’une pression positive tout au long du cycle respiratoire spontané du patient. Néanmoins la VS PPC est considérée comme faisant partie des techniques de VNI.

Il existe plusieurs systèmes permettant de générer une VS PPC : systèmes à débit continu et valves de contraintes assu- rant la pression positive expiratoire, systèmes avec valves à la demande, et système dit de « Boussignac ». Les systèmes avec valves à la demande sont ceux qui sont intégrés dans les ventilateurs de réanimation et dans un certain nombre de ventilateurs de transports. La sensibilité des valves pour ces systèmes dépend de la qualité des ventilateurs. Elle est

très variable d’un ventilateur à l’autre surtout pour les venti- lateurs de transports. La valve dite de « Boussignac » est un système simple, souvent utilisé en médecine d’urgence notamment en milieu préhospitalier. Le système de « Boussi- gnac » fonctionne en circuit ouvert et permet de créer une pression positive continue secondaire aux turbulences liées à la dépressurisation brutale d’un débit élevé d’oxygène injecté dans des microcanalicules situés dans la paroi de la valve [12]. La pression appliquée au niveau de la valve, et donc transmise aux voies aériennes du patient, dépend de deux paramètres : du débit d’oxygène administré et du débit inspiratoire du patient. Un monitorage des pressions au niveau de la valve est indispensable afin de régler le débit d’oxygène adéquat. Pour obtenir avec ce dispositif une pression moyenne comprise entre 5 et 10 cmH2O, un débit d’oxygène supérieur à 20 l/min est le plus souvent nécessaire et nécessite donc l’utilisation d’un débitmètre spécifique adapté à la délivrance de débits de gaz élevés (Fig. 1).

La VS AI-PEP (également dénommée BiPAP pour bi-level positive airway pressure ou VNI 2 P pour VNI à deux niveaux de pression) est un mode spontané pour lequel le ventilateur va pressuriser les voies aériennes du patient durant la phase inspiratoire à un niveau de pression réglé qui est le niveau d’aide inspiratoire. L’expiration dans ce mode est passive, et la pression de fin d’expiration ne revient pas à zéro mais reste positive au niveau auquel est réglée la PEP ou pression positive de fin d’expiration. Dans ce mode, plusieurs réglages doivent être effectués par le clinicien : le niveau d’aide inspiratoire, le niveau de pression de fin d’expiration, le seuil de déclenchement de l’inspiration (ou trigger inspiratoire) et la pente de l’aide correspondant au délai nécessaire à la montée en pression du ventilateur au cours de la phase inspiratoire [13].

Le niveau de système de déclenchement doit être réglé le plus bas possible afin de limiter les efforts inspiratoires du

Fig. 1 Circuit de Boussignac. Ce dispositif nécessite un débit- mètre spécifique capable de délivrer des débits doxygène allant jusquà 30 l/min

(3)

patient présentant une détresse respiratoire, tout en veillant à ce que n’apparaisse pas un phénomène d’autodéclenchement [13]. En effet, un seuil de déclenchement réglé trop bas peut être accompagné de phénomènes d’autodéclenchement : le ventilateur se déclenche alors que le patient n’a pas initié son inspiration. Ce phénomène est favorisé par la présence de fuites importantes au niveau de l’interface patient–ventila- teur. Deux actions sont possibles pour résoudre ce problème : il faut diminuer l’importance des fuites (réajustement du masque) et si le problème persiste, augmenter le niveau du seuil de déclenchement.

Une pente trop raide, donc une montée en pression trop rapide, peut générer un sentiment d’inconfort et un réflexe de toux qui peuvent interrompre trop précocement l’effort ins- piratoire. À l’opposé, une pente trop faible peut entraîner une augmentation non désirée du travail inspiratoire du patient.

Une des principales causes d’échec de la VNI est la pré- sence de fuites importantes. Ces fuites lorsqu’elles prédomi- nent à l’inspiration vont entraîner une insufflation trop prolongée, alors que si elles sont très importantes lors de l’exsufflation vont favoriser le phénomène délétère d’auto- déclenchement. Lors de la mise en route d’une VNI de type VS AI-PEP, il faut privilégier une augmentation progressive de l’aide inspiratoire en débutant par une valeur de 6 à 8 cmH2O, puis en augmentant progressivement le niveau d’aide en fonction des besoins du patient. Il est recommandé d’avoir comme objectif un volume courant expiré aux envi- rons de 6 à 8 ml/kg. La pression inspiratoire totale (somme de la pression d’aide inspiratoire et de la pression positive de fin d’expiration) ne doit pas dépasser 20 cmH2O. Au-delà de cette valeur de pression, le risque de fuites et d’insufflation gastrique devient important. Le niveau de PEP utilisé se situe entre 3 et 10 cmH2O, fonction de l’indication pour laquelle la VNI a été instaurée (de 3 à 5 cmH2O pour un patient BPCO en décompensation, de 5 à 10 cmH2O en cas d’œdème aigu pulmonaire [OAP] cardiogénique). Le seuil de déclenche- ment doit être réglé à des valeurs basses (–1 cmH2O pour un trigger en pression ou 1 à 2 l/min pour un trigger en débit).

Il est indispensable d’expliquer au patient à qui on propose une VNI ce qu’il va ressentir et le prévenir des sensations parfois inconfortables occasionnées par la mise en place du masque. Le masque doit être initialement appliqué à la main sans utiliser le système de fixation (sangle ou harnais). Au bout de quelques cycles respiratoires, lorsque le patient semble adapté au mode ventilatoire, le masque est alors sanglé.

Indications de la VNI

Une conférence de consensus nationale récente sur la VNI a précisé les niveaux de recommandations pour la pratique de la VNI en fonction des pathologies respiratoires (Tableau 1) [14].

Les deux pathologies pour lesquelles existent le plus de données cliniques validant l’intérêt de la VNI sont l’OAP et la décompensation de BPCO. La VNI a été évaluée dans de nombreuses autres situations mais le niveau de preuve de son intérêt est moindre [15].

OAP cardiogénique

L’OAP est la première cause de détresse respiratoire aiguë de l’adulte, et cette pathologie est donc très fréquemment prise en charge par les services d’urgence pré- ou intrahospitaliers.

L’OAP sévère est le plus souvent la conséquence d’une dys- fonction diastolique aiguë (insuffisance cardiaque à fonction systolique conservée) dont le facteur déclenchant le plus classique est la poussée hypertensive. Chez les patients les plus sévères, la VNI est une thérapeutique à part entière en plus du traitement pharmacologique habituellement repré- senté par l’utilisation de dérivés nitrés. Les deux modes VS PPC et VS AI-PEP peuvent être utilisés indifféremment [16,17]. Bien que certaines études aient remis en cause l’intérêt de la VNI dans l’OAP, cette technique ventilatoire reste recommandée en cas d’OAP sévère [18].

Dans ce contexte, la VNI permet une amélioration plus rapide de la détresse respiratoire que le traitement Tableau 1 Niveau de recommandations pour les indications de VNI en médecine durgence. Daprès la conférence de consen- sus nationale de 2006 [14]

Intérêt certain (il faut faire) Décompensation de BPCO

OAP cardiogénique Intérêt probable

(il faut probablement faire)

IRA hypoxémique de limmunodéprimé Traumatisme thoracique fermé isolé

Décompensation de maladies neuromusculaires chroniques IRC restrictives Préoxygénation Limitation thérapeutique Intérêt improbable (il ne faut

probablement pas faire)

Pneumopathie hypoxémiante SDRA

Pas de recommandations possibles Asthme aigu grave BPCO : bronchopneumopathie chronique obstructive ; OAP : œdème aigu pulmonaire ; IRA : insuffisance respiratoire aiguë ; IRC : insuffisance respiratoire chronique ; SDRA : syndrome de détresse respiratoire aiguë.

(4)

pharmacologique seul, une réduction du taux d’intubation, et certaines études rapportent une diminution de la mortalité lorsque la VS PPC est appliquée le plus précocement pos- sible dès la phase préhospitalière [19]. La durée de traite- ment par VNI en cas d’OAP est le plus souvent courte, de l’ordre de deux heures, car l’amélioration de cette insuffi- sance respiratoire aiguë (IRA) se fait le plus souvent très rapidement même pour les patients présentant des signes de gravité majeurs lors de la prise en charge initiale.

Décompensation de BPCO

C’est dans cette indication que la VS AI-PEP a été le plus évaluée. Depuis maintenant deux décennies, la VNI fait partie des thérapeutiques majeures proposées aux patients présentant une BPCO en décompensation. Si la VNI de type VS AI-PEP a été très largement validée en réanimation dans cette indication, il n’existe que très peu d’études réali- sées dans les services d’urgences. Il est admis que la VNI peut être débutée en dehors des services de réanimation dans cette indication mais il n’existe pas encore d’études de haut niveau de preuve validant la mise en route très précoce dès la phase préhospitalière ou dès l’arrivée aux urgences de cette technique chez des patients présentant une décompensation aiguë de BPCO. Néanmoins, il est probable que la précocité de la mise en route de la VNI soit un facteur important de succès de cette technique en cas de décompensation de BPCO. Ainsi, Brochard et al., dans son article princeps ayant validé la VS AI-PEP chez le BPCO en décompensa- tion, rapportaient que la majorité des patients intubés dans le groupe témoin de son étude l’était dans la première heure suivant leur inclusion dans le protocole [2]. Ce résultat plaide donc en faveur d’une mise en route la plus précoce possible de la VNI chez ces patients, à leur domicile en cas de prise en charge par le Smur, ou dès leur arrivée au SAU.

La décompensation de BPCO est une des rares patholo- gies pour laquelle un trouble de conscience initial ne repré- sente pas une contre-indication absolue à la mise en route d’une VNI. Plusieurs séries ont rapporté des résultats positifs chez des patients BPCO présentant une encéphalopathie hypercapnique sévère, qui ont pu être rapidement améliorés

par la VNI de type VS AI-PEP, et chez qui une intubation trachéale a pu être évitée [20,21]. Lors de la mise en route d’une VNI chez un patient présentant un trouble de cons- cience en rapport avec une hypercapnie sévère, la surveil- lance clinique initiale se doit d’être très rapprochée, et seule une amélioration rapide des troubles de conscience permet la poursuite de la VNI.

Une des problématiques posées par l’instauration de la VNI chez les patients BPCO est de savoir poser à temps l’indication d’intubation trachéale et donc d’échec de VNI.

Il a été rapporté que la VNI en retardant une intubation pou- vait aggraver le pronostic. Il faut savoir reconnaître assez tôt l’échec de la VNI pour pouvoir réaliser une intubation dans les meilleures conditions avant une aggravation trop impor- tante de l’état respiratoire du patient. Plusieurs critères pré- dictifs de l’échec de la VNI ont été proposés : ils sont le reflet de la gravité initiale et de la non-amélioration après une à deux heures de VNI. Ces critères associés à un risque élevé d’échec de cette technique sont résumés dans le Tableau 2.

IRA hypocapnique

L’IRA hypocapnique rassemble un grand nombre de patho- logies dont le point commun est l’atteinte alvéolaire prédomi- nante entraînant un trouble sévère de l’oxygénation. Ces pathologies sont à l’origine d’une hypoxémie sévère et d’une hyperventilation réactionnelle entraînant une hypo- capnie sur les gaz du sang artériel. Il existe de nombreuses étiologies responsables d’IRA dont la plus fréquente est la pneumopathie infectieuse. Les autres causes d’IRA les plus fréquemment rencontrées sont : l’inhalation pulmonaire, le traumatisme thoracique, le syndrome de détresse respiratoire aiguë de l’adulte dont les causes possibles sont nombreuses (choc septique, pancréatite aiguë, inhalation de fumées…).

L’indication de la mise en route d’une VNI chez ces patients est plus discutée que dans le cadre d’une BPCO décompensée ou d’un OAP cardiogénique. Les différentes études publiées évaluant l’intérêt de la VNI en cas d’IRA rapportent des résultats contradictoires, et le niveau de preuve de l’intérêt de cette technique dans le cadre de l’IRA est moins élevé que pour la BPCO décompensée ou l’OAP.

Tableau 2 Critères associés à un risque élevé déchec de la VNI. Daprès la conférence de consensus nationale de 2006 [14]

Indication Lors de la mise en route Lors de la réévaluation précoce

Décompensation de BPCO pH < 7,25 FR > 35/minute GCS < 11 Pneumonie Comorbidités cardiovasculaires

À la deuxiéme heure : pH < 7,25 FR > 35/minute GCS < 11

IRA hypoxémique sur cœur et poumons antérieurement sains

Âge > 40 ans FR > 38/minute Pneumopathie communautaire Sepsis

À la premiére heure : PaO2/FIO2< 200 mmHg

VNI : ventilation non invasive ; BPCO : bronchopneumopathie chronique obstructive ; GCS : score de Glasgow ; IRA : insuffisance respiratoire aiguë ; FR : fréquence respiratoire.

(5)

Bien que la conférence de consensus nationale portant sur la VNI ne recommande pas l’utilisation de la VNI dans ce cadre, plusieurs équipes de réanimation ont rapporté des expériences positives [22,23]. Il semble que pour l’instant il soit raisonnable de réaliser une VNI chez ce type de patients uniquement en milieu de réanimation et par des équipes particulièrement entraînées. Le mode ventilatoire qui doit être utilisé en cas d’IRA est la VS AI-PEP. L’utilisation de la VS PPC ne semble pas apporter un quelconque bénéfice à ces patients [24].

Asthme

Il n’est pas recommandé de réaliser une VNI chez un patient présentant un épisode d’asthme aigu grave [14]. Certaines études ont rapporté des résultats positifs chez des patients asthmatiques bénéficiant d’une assistance ventilatoire non invasive de type VS AI-PEP. Ces études, peu nombreuses, n’ont pour la plupart inclus qu’un faible nombre de patients dont le niveau de gravité était très variable [25,26]. Si quel- ques équipes particulièrement entraînées proposent la VNI chez l’asthmatique, cette technique ne saurait pour l’instant faire partie des standards de prise en charge de l’asthme aigu grave [27].

Utilisation de la VNI dans le cadre d’une décision de limitation thérapeutique

Une indication particulièrement intéressante en médecine d’urgence et notamment dans le cadre préhospitalier concerne les patients pour lesquels une décision de non-intubation a été déjà prise ou, au vu du contexte, pour lesquels l’intubation pourrait apparaître comme déraisonnable. Plusieurs études ont rapporté, en milieu hospitalier, l’intérêt de la mise en route d’une VNI pour des patients pour lesquels une décision de limitation thérapeutique incluant l’absence d’intubation trachéale est prise [28–30]. De même, la VNI a aussi été proposée à des patients ayant exprimé un désir de ne pas être intubés et présentant des critères d’intubation trachéale.

La mise en route d’une VNI a deux intérêts : d’une part un certain nombre de ces patients vont présenter sous VNI une amélioration clinique, voire la résolution complète de l’épisode de détresse respiratoire aiguë, d’autre part la VNI dans ce contexte permet d’apporter un plus grand niveau de confort à des patients présentant une dyspnée sévère.

En médecine préhospitalière, il arrive fréquemment que des patients doivent être pris en charge pour une détresse res- piratoire aiguë dans le cadre d’une maladie chronique évo- luée, notamment néoplasique. Le problème de l’indication d’une intubation trachéale ou d’une limitation des thérapeu- tiques actives peut se poser pour le médecin urgentiste qui dans cette situation ne possède pas toujours tous les éléments nécessaires pour prendre cette décision. De plus, le fait d’être

en situation préhospitalière exclut, généralement, une déci- sion collégiale. La mise en route d’une VNI dans ce contexte peut permettre de disposer du temps nécessaire pour contacter des proches et/ou le médecin référent du patient, et de trans- porter le patient vers une structure hospitalière où, le cas échéant, une décision de limitation des thérapeutiques actives pourra alors être prise de manière collégiale [31].

VNI comme méthode de préoxygénation

Une indication de la VNI réside dans la préoxygénation de patients nécessitant une intubation trachéale en situation d’urgence. Un travail récent réalisé en réanimation suggère que la préoxygénation avec une période de quatre minutes de VNI de type VS AI-PEP pour des patients nécessitant un abord trachéal invasif dans le cadre d’une détresse respira- toire aiguë permet de diminuer la fréquence et l’intensité des épisodes de désaturation artérielle associés au processus d’intubation [32]. Une des limites de l’indication de la VNI comme technique de préoxygénation réside dans le niveau de compliance du patient. Une agitation extrême ou un coma profond sont des contre-indications à la mise sous VNI, même sur une courte durée. La meilleure indication de la VNI en tant que technique de préoxygénation est représentée par le patient en détresse respiratoire mais conscient, pour lequel une indication de contrôle invasif des voies aériennes est posée. En cas de mise en route de la VNI chez un patient en détresse respiratoire et, si un échec de VNI est constaté et que la décision d’intubation trachéale est prise, il faut « pro- fiter » que le patient soit sous VNI pour le préoxygéner et donc ne pas interrompre la VNI avant la réalisation de l’induction en séquence rapide qui permettra l’intubation dans les meilleures conditions.

Réalisation de la VNI

dans des structures d’urgence

La mise en route de la VNI en structure d’urgence est asso- ciée à trois problématiques essentielles : la disponibilité de ventilateurs ayant des caractéristiques pneumatiques per- formantes, le niveau de formation nécessaire des équipes soignantes et l’intensité de la surveillance médicale et para- médicale devant être proposée à des patients bénéficiant d’une assistance respiratoire non invasive. L’expérience clinique de l’utilisation de la VNI en milieu préhospitalier est encore limitée et moindre que celle existante pour les services d’urgences intrahospitaliers. Les recommandations pour la mise en route de la VNI en préhospitalier sont de ce fait associées à un niveau de preuve plus faible.

Depuis quelques années, plusieurs ventilateurs de trans- ports permettent de réaliser une VNI dans d’excellentes condi- tions, ces ventilateurs ayant des systèmes de déclenchements

(6)

et de pressurisation qui deviennent similaires à ceux des ven- tilateurs utilisés en réanimation. Les ventilateurs dont la pres- surisation est assurée par une turbine sont plus performants (meilleure pressurisation, moindre fréquence des phénomènes d’autodéclenchement) que les ventilateurs de type tronçon- neurs de débit.

Une des causes majeures d’échecs de la VNI sous un mode VS AI-PEP est liée aux asynchronies qui peuvent survenir.

Une asynchronie est la survenue d’un effort inspiratoire du patient qui n’est pas suivi d’une insufflation du ventilateur.

Ce phénomène est essentiellement observé lorsque des fuites importantes sont présentes. C’est pourquoi l’un des princi- paux éléments de surveillance d’un patient sous VNI est la recherche de fuites au niveau de l’interface masque–patient.

Le niveau de formation nécessaire des équipes soignantes est différent selon la technique de ventilation utilisée. La for- mation initiale pour l’utilisation de la VS PPC est très courte, et il est probable qu’une formation de quelques heures soit suffisante pour les médecins et pour les équipes paramédicales pour pouvoir mettre en route cette technique et surveiller un patient sous VS PPC. Concernant le mode VS AI-PEP, la for- mation initiale minimale nécessaire est probablement plus longue que pour le mode VS PPC, bien qu’aucune étude n’ait évalué, précisément le niveau de formation dont avaient besoin les équipes d’urgence pour pouvoir utiliser en routine cette technique. Il est recommandé que les équipes pratiquant la VNI disposent de procédures de mise en route et de surveil- lance [14]. Un des principaux risques de la mise en route d’une VNI aux urgences est la réalisation de cette technique chez un patient ayant réellement une indication d’intubation et de ventilation invasive. Dans ce cadre-là, la VNI peut retarder le moment de l’intubation et entraîner une surmorbidité [33].

La problématique majeure concernant la VNI en structure d’urgence réside dans le ratio personnels soignants/patients.

Si en préhospitalier, cette question ne se pose pas car l’équipe soignante ne prend en charge par essence qu’un seul patient à la fois, elle représente en revanche un frein potentiel à l’utilisation de la VNI dans les services d’urgen- ces intrahospitaliers lorsque les flux de patients sont très importants. La mise sous VNI ne peut s’envisager au SAU que si un médecin et un(e) infirmier(e) sont disponibles durant la période de mise en route de la VNI, et que le patient puisse bénéficier d’une surveillance rapprochée durant la séance de VNI. Par ailleurs, le matériel d’intubation doit toujours être prêt et à proximité afin de pouvoir réaliser une intubation trachéale rapide en cas de non-amélioration ou d’aggravation de l’état respiratoire sous VNI.

Conclusion

La VNI n’est plus une technique uniquement réservée aux patients admis en réanimation. Il existe de nombreux argu-

ments pour que cette thérapeutique ventilatoire soit proposée à de nombreux patients en détresse respiratoire pris en charge dans les structures d’urgence. Les patients présentant une BPCO en décompensation et ceux présentant un OAP sévère sont ceux qui bénéficient le plus de la mise en route très précoce de la VNI. L’évolution technologique vers des ventilateurs de plus en plus petits, performants et disposant d’une autonomie électrique importante permet la mise en route de la VNI dès la phase préhospitalière. Un des freins majeurs quant à une utilisation plus large de la VNI au sein des SAU réside dans la fréquente inadéquation entre flux de patients et nombre de personnels soignants nécessaire à une surveillance rapprochée.

Références

1. Brochard L, Isabey D, Piquet J, et al (1990) Reversal of acute exacerbations of chronic obstructive lung disease by inspiratory assistance with a face mask. N Engl J Med 323:1523–30 2. Brochard L, Mancebo J, Wysocki M, et al (1995) Non-invasive

ventilation for acute exacerbations of chronic obstructive pulmo- nary disease. N Engl J Med 333:81722

3. Thys F, Roeseler J, Reynaert M, et al (2002) Non-invasive venti- lation for acute respiratory failure: a prospective randomised placebo-controlled trial. Eur Respir J 20:545–55

4. LHer E, Duquesne F, Girou E, et al (2004) Non-invasive conti- nuous positive airway pressure in elderly cardiogenic pulmonary edema patients. Intensive Care Med 30:8828

5. Nava S, Carbone G, DiBattista N, et al (2003) Non-invasive ven- tilation in cardiogenic pulmonary edema: a multicenter randomi- zed trial. Am J Respir Crit Care Med 168:1432–7

6. Bolton R, Bleetman A (2008) Non-invasive ventilation and conti- nuous positive pressure ventilation in emergency departments:

where are we now? Emerg Med J 25:1904

7. Bruge P, Jabre P, Dru M, et al (2008) An observational study of non-invasive positive pressure ventilation in an out-of-hospital setting. Am J Emerg Med 26:1659

8. Fort PA, Boussarie C, Hilbert G, Habachi M (2002) Prehospital non- invasive ventilation. Study of importance and feasibility (7 cases).

Presse Med 31:18869

9. Hastings D, Monahan J, Gray C, et al (1998) CPAP. A supportive adjunct for congestive heart failure in the prehospital setting.

Jems 23:5865

10. Hubble MW, Richards ME, Jarvis R, et al (2006) Effectiveness of prehospital continuous positive airway pressure in the manage- ment of acute pulmonary edema. Prehosp Emerg Care 10:4309 11. Kallio T, Kuisma M, Alaspaa A, Rosenberg PH (2003) The use of prehospital continuous positive airway pressure treatment in presumed acute severe pulmonary edema. Prehosp Emerg Care 7:209–13

12. Templier F, Dolveck F, Baer M, et al (2003) Laboratory testing measurement of FIO2 delivered by Boussignac CPAP system with an input of 100% oxygen. Ann Fr Anesth Reanim 22:1037 13. Girault C (2008) Pratique de la ventilation non invasive. Ventila-

tion artificielle. Masson, Paris, pp 15766

14. 3e Conférence de consensus commune (2006) Ventilation non invasive au cours de linsuffisance respiratoire aiguë (nouveau- né exclu). http://www.sfar.org/_docs/articles/83-vni_ccons06.pdf

(7)

15. Brochard L (2008) Bases physiopathologiques de lutilisation de la ventilation non invasive au cours de linsuffisance respiratoire aiguë. Ventilation artificielle. Masson, Paris, pp 99105 16. Wigder HN, Hoffmann P, Mazzolini D, et al (2001) Pressure sup-

port non-invasive positive pressure ventilation treatment of acute cardiogenic pulmonary edema. Am J Emerg Med 19:17981 17. Masip J, Roque M, Sanchez B, et al (2005) Non-invasive venti-

lation in acute cardiogenic pulmonary edema: systematic review and meta-analysis. JAMA 294:312430

18. Gray A, Goodacre S, Newby DE, et al (2008) Non-invasive ven- tilation in acute cardiogenic pulmonary edema. N Engl J Med 359:14251

19. Plaisance P, Pirracchio R, Berton C, et al (2007) A randomized study of out-of-hospital continuous positive airway pressure for acute cardiogenic pulmonary oedema: physiological and clinical effects. Eur Heart J 28:2895901

20. Diaz GG, Alcaraz AC, Talavera JC, et al (2005) Non-invasive positive-pressure ventilation to treat hypercapnic coma secondary to respiratory failure. Chest 127:95260

21. Scala R, Naldi M, Archinucci I, et al (2005) Non-invasive posi- tive pressure ventilation in patients with acute exacerbations of COPD and varying levels of consciousness. Chest 128:165766 22. Antonelli M, Conti G, Rocco M, et al (1998) A comparison of

non-invasive positive-pressure ventilation and conventional mechanical ventilation in patients with acute respiratory failure.

N Engl J Med 339:42935

23. Antonelli M, Conti G, Esquinas A, et al (2007) A multiple-center survey on the use in clinical practice of non-invasive ventilation as a first-line intervention for acute respiratory distress syndrome.

Crit Care Med 35:1825

24. Delclaux C, LHer E, Alberti C, et al (2000) Treatment of acute hypoxemic nonhypercapnic respiratory insufficiency with conti-

nuous positive airway pressure delivered by a face mask: a ran- domized controlled trial. JAMA 284:2352–60

25. Fernandez MM, Villagra A, Blanch L, Fernandez R (2001) Non- invasive mechanical ventilation in status asthmaticus. Intensive Care Med 27:48692

26. Soma T, Hino M, Kida K, Kudoh S (2008) A prospective and ran- domized study for improvement of acute asthma by non-invasive positive pressure ventilation (NPPV). Intern Med 47:493501 27. Ram FS, Wellington S, Rowe B, Wedzicha JA (2005) Non-

invasive positive pressure ventilation for treatment of respiratory failure due to severe acute exacerbations of asthma. Cochrane Database Syst Rev CD004360

28. Cuomo A, Delmastro M, Ceriana P, et al (2004) Non-invasive mechanical ventilation as a palliative treatment of acute respiratory failure in patients with end-stage solid cancer. Palliat Med 18:60210 29. Levy M, Tanios MA, Nelson D, et al (2004) Outcomes of patients with do-not-intubate orders treated with non-invasive ventilation. Crit Care Med 32:20027

30. Bulow HH, Thorsager B (2009) Non-invasive ventilation in do- not-intubate patients: five-year follow-up on a two-year prospec- tive, consecutive cohort study. Acta Anaesthesiol Scand 53:11537 31. Duchateau FX, Beaune S, Ricard-Hibon A, et al (2010) Prehospital non-invasive ventilation can help in management of patients with limitations of life-sustaining treatments. Eur J Emerg Med 17:79 32. Baillard C, Fosse JP, Sebbane M, et al (2006) Non-invasive ven-

tilation improves preoxygenation before intubation of hypoxic patients. Am J Respir Crit Care Med 174:1717

33. Wood KA, Lewis L, Von Harz B, Kollef MH (1998) The use of non-invasive positive pressure ventilation in the emergency depart- ment: results of a randomized clinical trial. Chest 113:133946

Références

Documents relatifs

Le score MASCC (Multinational Association for Supportive Care in Cancer) définit comme faible un risque de complications sérieuses inférieur à 10 %.. Le score maximum possible est

sévérité : pour les patients avec des signes de SS/CS : 1) une antibiothérapie intraveineuse (IV) adaptée débutée dans les 90 minutes (au moins une β -lactamine à large spec- tre)

Notre travail a pour but principal de déterminer la prévalence de l ’ augmentation des transaminases chez les patients consultant pour une douleur épigastrique aiguë et comme

Renaud B, Labarere J, Coma E, et al (2009) Risk Stratification of Early Admission to the Intensive Care Unit of patients with no major criteria of severe community-acquired

Tentillier E, Heydenreich C, Cros AM, et al (2008) Use of the intubating laryngeal mask airway in emergency prehospital diffi- cult intubation. Timmermann A, Russo SG, Rosenblatt WH,

Si aucun de ces trois critères n ’ est présent, qu ’ il existe des critères mineurs (coup du lapin, patient assis ou ambula- toire, douleur cervicale retardée, absence de

Le monitorage de la ventilation par le ventilateur de 27) transport doit comporter au minimum la surveillance de  la  pression  d’insufflation  avec  affichage  de  la 

Le bilan biologique, en détectant la baisse du TP et l ’ atteinte du facteur V, a permis, dans notre cas, de reprendre un interrogatoire directif et ciblé et de poser le diagnostic