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Interprètes de l'ombre et du silence: entre cris et chuchotements (Réflexion sur l'interprétation dans un contexte humanitaire auprès du CICR)

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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Master

Reference

Interprètes de l'ombre et du silence: entre cris et chuchotements (Réflexion sur l'interprétation dans un contexte humanitaire auprès du

CICR)

KHERBICHE, Leila

Abstract

This research, done on the basis of a mission-report, aims at giving an account of the daily work of interpreters working for the International Committe of the Red Cross (ICRC). Mainly because of the numerous scandals disclosed by the media regarding abductions and murders of interpreters both in Afghanistan and Iraq, the current context is starting to bring to light a profession that is little-known yet demanding, and at times dangerous. The low awareness of this work entails both a kind of depreciation and perception issues. Nevertheless, be they called linguists, interpreters or translators, multilingual communication agents represent a major link in the humanitarian aid chain. They should therefore have access to a minimum of training which would help them to deliver a quality service while providing them with tools in order to make sure that the principles of their work are known and respected. A trained interpreter, recruited not only because he knows languages, is an interpreter who is actually able to facilitate communication and help his recruiting institution to meet its mandate in accordance with the law.

KHERBICHE, Leila. Interprètes de l'ombre et du silence: entre cris et chuchotements (Réflexion sur l'interprétation dans un contexte humanitaire auprès du CICR). Master : Univ. Genève, 2009

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:17040

Disclaimer: layout of this document may differ from the published version.

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KHERBICHE LEÏLA

Interprètes de l’ombre et du silence:

entre cris et chuchotements

Réflexion sur l’interprétation dans un contexte humanitaire auprès du CICR

Mémoire présenté à l’Ecole de Traduction et d’Interprétation pour l’obtention du MA en Interprétation de Conférence

Directeur de mémoire : Prof. Barbara Moser-Mercer Jurée : Ruth Griffiths, Cheffe de l’Unité linguistique du CICR

Janvier 2009

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MOTS-CLÉS :

Interprétation en zones de crise et de guerre, humanitaire, formation, qualité.

RÉSUMÉ :

Ce travail vise, par le biais d’un rapport de mission, à rendre compte du travail quotidien des interprètes exerçant sur le terrain auprès du Comité international de la Croix-Rouge (CICR). Le contexte actuel, notamment en raison des nombreux scandales révélés par la presse concernant les enlèvements et les assassinats d’interprètes en Afghanistan et en Irak, commence à mettre en lumière un métier autant méconnu qu’exigeant, et parfois dangereux. La méconnaissance de ce métier est à l’origine d’une forme de dévalorisation et de problèmes de perception. Pourtant, qu’ils s’appellent linguistes, interprètes ou traducteurs, les agents de la communication multilingue constituent désormais un maillon incontournable dans la chaîne de l’aide humanitaire. Il conviendrait dès lors de leur assurer une formation minimale qui permette de garantir un service de qualité tout en leur donnant les moyens de faire connaître et respecter les principes du métier qu’ils exercent. Un interprète formé, et non pas engagé uniquement pour ses connaissances linguistiques, est un interprète qui est à même de véritablement faciliter la communication et d’aider l’institution pour laquelle il exerce à s’acquitter de son mandat dans le respect du droit.

COORDONNÉES DE L’ÉTUDIANT :

Kherbiche Leïla

11 allée Mendès-France

94240 L’Haÿ les Roses, France leilakherbich@yahoo.fr

BIOGRAPHIE DE L’ÉTUDIANT :

Leïla Kherbiche est interprète de conférence diplômée de l’Ecole de traduction et d’interprétation à Genève (ETI). Elle a exercé en tant qu’interprète auprès du CICR pendant une mission d’un an. Elle est également titulaire d’un DEA de littérature comparée à la Sorbonne Nouvelle et d’une licence d’arabe à la Sorbonne à Paris.

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Remerciements

Je tiens à remercier :

Mme Moser-Mercer pour son soutien, son attention et sa confiance tout au long de ce travail et de cette formation

Mme Griffiths pour l’intérêt qu’elle a porté à ce travail et pour sa disponibilité.

Mme Dessimoz, M. Bouarar, M. Gasser, ainsi que Sophie Hengl pour leurs précieux conseils et leur disponibilité.

Mes collègues sans qui ce travail n’aurait pas été possible.

Et pour finir, tous ceux qui m’ont confié leur histoire faite de silences et de mots qui m’accompagnent encore aujourd’hui.

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Table des matières

Remerciements ... 3

Table des matières ... 4

Introduction ... 7

Avant-propos ... 13

1. Les interprètes de terrain au CICR : présentation générale ... 20

1.1. Présentation du CICR ... 20

1.1.1. Un peu d’histoire ... 20

1.1.2. Les activités de l’organisation ... 23

1.1.3. Les modalités de travail du CICR ... 26

1.2. Les interprètes du CICR ... 31

1.2.1. Le recrutement et les profils recherchés ... 32

1.2.2. La formation offerte par l’organisation ... 37

1.2.3. Les aptitudes requises ... 42

2. Le travail en mission : Amman-IQS ... 50

2.1. Présentation du contexte Jordanie-Irak ... 50

2.1.1. La délégation Amman-IQS ... 51

2.1.2. Le « remote-control » ... 53

2.1.3. La détention ... 56

2.2. Les tâches ... 59

2.2.1. Traduction ... 59

2.2.2. Interprétation ... 62

2.2.3. Tâches diverses ... 64

2.3. Les difficultés rencontrées ... 67

2.3.1. Difficultés d’ordre linguistique ... 67

2.3.2. Conditions matérielles de travail ... 69

2.3.3. L’aspect culturel et émotionnel ... 71

2.3.4. La question de la définition des rôles ... 74

3. Interpréter dans l’humanitaire : défis et perspectives ... 80

3.1. Une éthique irréprochable : les trois piliers ... 81

3.1.1. L’éthique individuelle ... 85

3.1.2. L’éthique institutionnelle ... 86

3.1.3. L’éthique professionnelle ... 88

3.1.4. Synthèse ... 91

3.2. Un rôle qui reste à définir : l’interprète-médiateur culturel ... 92

3.2.1. Rôles et responsabilités interprète/délégué : trouver l’équilibre ... 93

(6)

3.2.2. Établir la confiance avec « le client » ... 96

3.2.3. Interpréter au-delà des mots : la communication avant tout ... 98

3.3. Pistes de réflexion pour une professionnalisation du métier ... 101

3.3.1. Au niveau du recrutement et de l’institution ... 102

3.3.2. Ce que peuvent apporter les professionnels de la traduction et de l’interprétation : vers une formation académique ? ... 104

3.3.3. Boîte à idées ... 107

Conclusion ... 109

Annexes ... 112

Bibliographie ... 133

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« Language like desire disrupts – refuses to be contained within boundaries » (Bell Hooks, 1995)

« Les lois se taisent dans le fracas des armes » (Cicéron)

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Introduction

Interprètes de l’ombre et du silence, entre cris et chuchotements… C’est à dessein que ce titre a été choisi. Les interprètes dits « de terrain », qu’ils exercent pour des organisations humanitaires, internationales, de défense des droits de l’homme, ou même auprès des forces armées, jouent un rôle clé dont on ignore tout, ou presque. Ils sont dans l’ombre, mais pas uniquement parce qu’un bon interprète est celui qui sait le mieux se faire oublier. Les interprètes de terrain du Comité International de la Croix Rouge (CICR), à l’instar des délégués, sont dans l’ombre au sens presque propre du terme. En effet, ils exercent majoritairement pour le département de la protection dont la principale activité est la détention, c’est-à-dire la visite des personnes privées de liberté relevant des Conventions de Genève, ou d’autres textes, suite à un accord avec le gouvernement concerné. Cette activité est au cœur du mandat du CICR, qui, en tant que gardien des Conventions de Genève et de leurs protocoles, doit s’assurer que les personnes privées de liberté en cas de conflit sont traitées avec respect et sans atteinte à leur dignité. En d’autres termes, plus de la moitié du travail consiste à visiter des lieux de détention. Or, l’univers carcéral est d’une grande violence, qu’on y reste ou qu’on y soit de passage.

Entre silence, cris et chuchotements, c’est la souffrance humaine que l’on essaie rendre. Ce n’est pas toujours une question de mots. L’interprète n’est pas seulement un intermédiaire ou un canal facilitant la communication, ni un médium d’une neutralité à

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toute épreuve. Il ne s’agit pas ici de discuter du professionnalisme de l’interprète mais simplement de souligner que la neutralité, aussi essentielle fût-elle à l’exercice de cette profession, se heurte parfois à des limites pour des raisons purement psychologiques et émotionnelles. Comme le rappelle Stahuljak Zrinka dans son article « Violence of neutrality in and of the war (Croatia, 1991-92) » :

« [] the violence of an event such as a war, cannot be translated/processed without ‘shocking’ the very structure of its transmission, and especially its claim to neutrality […] But the failure of translation forewarns that the war is unassimilable to a mere, smooth, non-disrupted translation. The scandal of war cannot be neutrally translated [] What distinguishes this event is that it does not leave room for neutrality, that it ‘shocks’ one out of any neutral stance, precisely because failure in translation is unavoidable : either the translator ‘jumps in’ or a smooth uninterrupted translation fails to convey that history is passed on in erasure. »1

C’est l’humain qui parle du profond de l’être. Mais c’est l’humain qui est mis en péril par une crise ébranlant la plupart de nos conceptions et de nos valeurs. Dès lors, le message véhiculé par l’interprète ne fait pas que passer, et il ne peut pas « faire que passer ». La réussite de la communication n’est pas seulement une question de mots, il ne s’agit pas d’aplanir la douleur coûte que coûte par des jolies phrases. Quelque chose reste, une histoire, des bribes de phrases, l’expression d’un visage, ou encore un regard qui nous renvoie à notre propre impuissance. Il est des récits auxquels on ne prête pas sa voix impunément.

1STAHULJAK Zrinka (1999). In « The Violence of Neutrality in and of the War (Croatia, 1991-1992) ».

College Litterature 26 (1), Special Issue, Cultural Violence, p. 13 de l’article imprimé en ligne depuis : http://findarticles.com/p/articles/mi_qa3709/is_199901/ai_n8850626, consulté le 26 décembre 2008.

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Ce mémoire a pour objet de rendre compte de ce qu’est le travail d’un interprète/traducteur de terrain auprès du CICR ; il s’appuie sur l’expérience de son auteur pendant un an. Une réflexion sur le rôle de l’interprète sous-tend cet exposé et permettra d’analyser les difficultés rencontrées afin de proposer des pistes de réflexion en vue d’optimiser la qualité du service. Le travail d’un interprète/traducteur en mission au sein d’une organisation humanitaire diffère de par son contexte et sa nature, à la fois de celui d’un interprète de conférence, mais aussi de celui que l’on nomme un

« community interpreter »2. En effet, étant employé par une organisation dotée d’un mandat humanitaire et intervenant en zones de crises et de guerre la plupart du temps, l’interprète est avant tout chargé d’une mission humanitaire, et participe à l’accomplissement du mandat de l’organisation. Rappelons ici la mission du CICR qui sera abordée plus en détail ultérieurement :

« Organisation impartiale, neutre et indépendante, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a la mission exclusivement humanitaire de protéger la vie et la dignité des victimes de la guerre et de la violence interne, et de leur porter assistance »3.

Il ne s’agit pas seulement d’assurer la communication entre des interlocuteurs qui s’expriment dans deux langues différentes, mais également d’aider à porter secours aux victimes. À ce titre, Roy Thomas évoque le cas de la Canadian Disaster Response Team (DART) qui est intervenue suite au tremblement de terre survenu en Turquie en

2 Nous désignons ici par « community interpreting » l’interprétation auprès des services publics en général, qu’il s’agisse du domaine médical ou judiciaire, ou même des demandeurs d’asile, sans distinction. Nous examinerons cependant par le suite les différentes implications de ces situations d’interprétation.

3 Extrait de « La mission du CICR » in

http://www.icrc.org/HOME.NSF/060a34982cae624ec12566fe00326312/b0b420c039178308c1256ae3004 3e89d?OpenDocument, consulté le 26 décembre 2008. Nous soulignons.

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1999 4. Les équipes médicales de la Canadian DART ont ainsi reconnu avoir des difficultés à accomplir leur mission avant l’intégration d’interprètes dans leurs équipes.

La communication multilingue est loin d’être accessoire dans ce type de situation ; c’est d’elle que dépend l’accomplissement du mandat d’une organisation et l’efficacité du secours porté aux victimes. Cependant, en raison du caractère humanitaire du mandat de l’organisation, un interprète est rarement, uniquement interprète. Il joue un rôle clé qui lui confère parfois de très grandes responsabilités.

C’est pourquoi ce travail s’ouvrira sur une présentation de l’organisation, c’est- à-dire son histoire, son mandat, et ses activités, afin de comprendre dans quel domaine le CICR recourt à des interprètes. Nous tenterons ensuite de présenter les interprètes qui exercent sur le terrain pour le CICR : comment sont-ils recrutés ? Quel est leur profil ? Quelle est leur formation ? Ceci permettra de mieux définir leur rôle et de rendre compte des spécificités de ce contexte d’interprétation. En effet, un interprète de terrain, et un interprète de conférence ou un « community interpreter » ont des compétences et des qualités communes, mais le contexte d’exercice de la profession impose des exigences particulières. Il convient dès lors de cerner ces besoins spécifiques. Souvent, ces interprètes/traducteurs ne sont pas des professionnels, dans la mesure où ils n’ont pas toujours suivi une formation. Or, une fois en mission, ils ont le titre de professionnel, et même de « spécialiste » en raison de leur connaissance de la langue, ce qui ne garantit pas une bonne prestation en matière de traduction ou d’interprétation. Un service linguistique de qualité qui laisse à désirer peut nuire à l’image de l’organisation,

4 THOMAS Roy (2003). « There’s No I in Team ? Why and How Interpreters Must Be Made Members of the Team », in The Liaison. Numéro 1 Vol.111. 1. Article disponible en ligne à l’adresse http://www.coe- dmha.org/Liaison/Vol_3No_1/Feat06.htm, consulté le 26 décembre 2008.

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et de ce fait, entraver son travail, ce qui n’est dans l’intérêt de personne. Identifier les spécificités, les difficultés, et les défis du travail dans ce type de contexte pourrait aider à cerner les besoins afin de mieux y répondre. Proposer une réflexion sur lesdits besoins est l’objet principal de ce travail. Le constat de départ étant que, comme bien d’autres métiers méconnus ou non professionnalisés, celui de l’interprète/traducteur de terrain souffre d’un problème de perception. Son travail peut être très apprécié et reconnu, mais il est parfois aussi sous-estimé et incompris, souvent par ignorance.

La seconde partie de ce travail se propose de décrire plus en détail en quoi consiste le travail en mission, en s’appuyant sur une expérience personnelle dans le contexte spécifique jordano-irakien. Cet exposé, en précisant les différentes tâches effectuées permettra de faire état des difficultés rencontrées en situation afin d’en dresser une typologie. D’après, l’étude menée par Barbara Moser-Mercer et Grégoire Bali auprès d’interprètes du CICR en mission5, 76,92% des personnes expriment un besoin en formation aux techniques de l’interprétation. Ce point sera évoqué. Nous ne nous attarderons cependant pas sur cette difficulté dans la mesure où les outils pour répondre à cette demande existent déjà dans les écoles d’interprètes. La recherche dans ce domaine est par ailleurs déjà bien avancée. Enfin, le caractère limité de ce travail ne permet pas de traiter cette question de façon approfondie comme elle le mériterait.

L’autre besoin exprimé à 53,85% par les interprètes, dans cette même étude, concerne le

« training on coping with particular issues (stress, ethics, role definition, etc) »6. C’est

5 MOSER-MERCER Barbara et BALI Grégoire (2007). « Interpreting in Zones of Crisis and War:

Improving Multilingual Communication through Virtual Learning* », Proceedings of the MIT/LINC Conference "Technology-enabled education: A catalyst for positive change", October 28-30, 2007, Amman, Jordan. CD-Rom, no pagination. Cambridge, MA: MIT.

6 Ibid.

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pourquoi nous tenterons de proposer une réflexion un peu plus poussée sur l’éthique de la profession et les instruments sur lesquels elle peut s’appuyer afin de rester pertinente.

Nous aborderons ensuite la question du manque de précision et de définition des rôles, notamment celui de l’interprète qui joue un rôle certain de médiateur culturel. Ce travail s’achèvera sur quelques pistes de réflexion pour tenter de remédier aux autres besoins en formation et difficultés du métier qui ont été laissés de côté au cours de ce travail.

Ces réflexions s’inspireront à la fois de ce que peuvent apporter les professionnels de la traduction et de l’interprétation, mais aussi d’autres professions ayant un statut similaire, ou s’exerçant dans des conditions difficiles émotionnellement.

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Avant-propos : Problèmes méthodologiques

Un élément frappant mérite d'être mentionné avant de commencer la rédaction de ce travail : après voir cherché des études ou textes théoriques sur la question des interprètes en zones de conflits afin d'étayer ce mémoire et de nourrir la réflexion, il a fallu se rendre à l'évidence qu'il n'y a pas d'études ou presque sur le sujet. La littérature sur les interprètes en zones de crise et de guerre travaillant pour des organisations humanitaires ou de défense des droits de l'homme est en effet loin d'être pléthorique. On observe cependant un intérêt croissant à l'égard du rôle joué par les interprètes dans les conflits armés sous la houlette de Mona Baker et Myriam Salama-Carr. A ce titre, soulignons que la seconde édition de la conférence intitulée « Conflict and Translation » qui s'est tenue à Manchester en novembre 2006, est révélatrice. Mona Baker, à cette occasion, avait publié un appel à contribution sur son site avec une série de thèmes dont celui de « Translating and interpreting for human rights organizations ». Or, sur la vingtaine de résumés7 retenus pour la conférence, aucun ne traite directement de ce sujet du point de vue de l'interprétation. Le seul cas évoqué concerne les audiences de la Commission vérité et réconciliation en Afrique du Sud, l’interprétation dans ce contexte est cependant différente. Une question s'imposait dès lors : pourquoi ? Il semblait difficile rentrer dans le corps de ce travail sans tenter d'y apporter une réponse.

7 Document de présentation de la conférence Translation and Conflict II, Manchester, 17-19 novembre 2006.

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Il convient dans un premier temps de revenir sur le champ vaste que constitue l'intitulé « interprétation en zones de crise et de guerre ». Il y a en effet plusieurs sortes d'interprètes dans ce type de situation. Il convient donc de les distinguer, par principe de précaution tout d'abord, mais aussi parce que les problèmes ne sont pas du tout du même registre, semble-t-il. En effet, les interprètes en zone de crises et de conflits au sens large sont plutôt un sujet d'actualité, si l'on en croit les articles qui font régulièrement la une de la presse depuis quelques années. Comme le signale M.

Eduardo Kahane dans son article « Intérpretes en conflictos: los límites de la neutralidad »8:

« He ido guardando recortes de los intérpretes muertos en acto de servicio; ya llenan una caja de zapatos. La única cifra que los contabiliza ha sido revelada por la Federación Internacional de Traductores (FIT) y son 216. Sólo en Irak. Despues de los soldados constituyen el mayor grupo de víctimas civiles de ese conflicto. »9

Et l’auteur de citer plusieurs exemples de conflits où des interprètes ont perdu la vie ou ont encouru de sérieux dangers : de l'Afghanistan à l'Irak, en passant par la Croatie. Ce ne sont pas les exemples qui manquent, et quelques scandales ont fini par attirer l'attention des interprètes de conférence professionnels sur les dangers encourus par leurs collègues dans des contrées aux prises avec des conflits sanglants et très médiatisés. Le dernier exemple en date sans doute celui des interprètes irakiens locaux recrutés par l'armée britannique; ces derniers se sont vu refuser le droit d'asile par la

8 KAHANE Eduardo (2007). « Intérpretes en conflictos: los límites de la neutralidad », extrait de : http://www.aiic.net/ViewPage.cfm/page2690.htm, consulté le 26 décembre 2008.

9 « Je garde les coupures de presse sur les interprètes morts en service : elles remplissent déjà une boîte à chaussures. Les seules statistiques dont nous disposons sont celles de la Fédération Internationale des Traducteurs (FIT) qui font état de 216 morts. En Irak seulement. Ils constituent, après les soldats, le plus gros contingent de victimes civiles de ce conflits ». Extrait de :

http://www.aiic.net/ViewPage.cfm?article_id=1981&plg=2&slg=2, consulté le 26 décembre 2008.

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Grande Bretagne au moment où elle retirait se troupes en août 200710. Dans les cas cités précédemment, les interprètes risquent leur vie et celle de leur famille car ils sont souvent perçus comme des « traîtres ».

Ces interprètes, ainsi que les traducteurs qui exercent dans une situation de conflit — avant, pendant ou après —, jouent indéniablement un rôle décisif dans la collecte de renseignement. Comme le soulignent Mme Barbara Moser-Mercer et M.

Grégoire Bali dans l'introduction de l'article intitulé « Interpreting in Zones of Crisis and War : Improving Multilingual Communication through Collaborative Virtual Learning *»11 :

« War and conflict know no linguistic boundaries and language specialists play an essential role in intelligence gathering before and during a conflict ».

L'article se concentre cependant sur les linguistes intervenant auprès des organisations humanitaires, ce travail en fera de même. En effet, le champ de l'interprétation en zones de guerre est à la fois inexploré et vaste, mais aussi très sensible. Ce travail n'a pas pour objet de traiter de l'interprétation et de la traduction pour l'une ou l'autre partie à un conflit, ni des questions politiques et éthiques que suppose l'exercice de ce métier dans ce type de situation. Au sein de cette catégorie de « linguistes » directement impliqués dans les conflits, il conviendrait, dans le cadre d'une éventuelle étude, de distinguer au moins deux groupes. D'une part les personnes formées par, et travaillant directement

10 Voir à ce propos (entre autres) la lettre de Larry Miller intitulée « UK turns its back on Iraq interpreters », datée du 18 août 2007, et disponible sur le site CBS News : http://www.cbsnews.com/stories/2007/08/17/london/main3179344.shtml, consulté le 26 décembre 2008.

11 MOSER-MERCER Barbara et BALI Grégoire (2007) in « Interpreting in Zones of Crisis and War:

Improving Multilingual Communication through Virtual Learning* », op. cit.

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avec les forces armées ; de l'autre, les personnes recrutées sur place, dans l'urgence, qui sont souvent bien plus exposées au danger, et qui se trouvent dans une situation d'entre- deux infiniment plus complexe que les premiers. Ces derniers, les interprètes et traducteurs locaux, n'ont en effet nulle part où aller une fois le conflit terminé, s'ils sont encore en vie.

La plupart des articles et des études sur la question des interprètes dans les conflits sont très récents et traitent de cette catégorie d'interprètes relativement médiatisée, suscitant émoi, indignation et toute sorte de sentiments contradictoires. Il était de ce fait difficile d'aborder ce travail en les passant sous silence, même s'il ne relèvent pas directement de notre champ d'investigation. Pour ce qui est des interprètes et traducteurs exerçant auprès des organisations humanitaires, nous nous sommes heurtés à une absence de documentation flagrante qui rend difficile une véritable réflexion théorique sur le sujet. Le silence qui entoure les interprètes de terrain des organisations humanitaires ne signifie cependant pas que leur métier s’exerce en toute facilité. Ces interprètes sont rarement des professionnels, ils sont souvent recrutés pour leur connaissance de la langue et leur motivation humanitaire. Ils sont par ailleurs sur le terrain, donc au bout de la chaîne, et n'ont pas toujours conscience de l'enjeu de la tâche dont ils s'acquittent. Enfin, ils sont tenus au secret professionnel ce qui rend la documentation de leur travail difficile.

L'auteur de ce travail ayant exercé comme interprète/traducteur pour le Comité International de la Croix-Rouge (CICR) en mission pendant un an, est également tenu à la confidentialité. En l'absence d'études substantielles sur la question ⎯ lesquelles

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auraient permis d'étayer ce travail avec des exemples plus concrets, ce travail s'appuie sur de la matière brute qui relève de l'expérience personnelle et de la mémoire. Il était dès lors essentiel d'informer le lecteur du caractère très personnel de ce matériau, et de solliciter sa bienveillance quant à de l'éventuel manque d'objectivité que suppose la position à la fois sujet/objet dans le cadre d'un travail scientifique. En outre, l'expérience qui sous-tend ce travail s'avère difficile à exploiter pour des raisons évidentes de confidentialité.

Une étude sur cette question se voit ainsi d'emblée limitée et doit tenir compte de ces contraintes en vue de définir une méthode de travail pertinente. Prenons un contre-exemple : ce que l'on appelle « community interpreting » est un domaine relativement documenté et la réflexion sur les enjeux de la situation d'interprétation, tout comme la documentation sur la qualité du service offert, sont déjà bien avancées. Pour ne citer que l'étude menée par Sonja Pöllabauer intitulée « Interpreting in asylum hearings: Issues of saving face »12. Dans ce article, l'auteur s'appuie sur une transcription d'enregistrement d'un entretien de demandeur d'asile pour mettre en évidence les stratégies mises en œuvre par chacun des trois acteurs à savoir : l'officier, l'interprète et le demandeur d'asile. Ces stratégies permettent à chacun de préserver

« une image positive » de soi durant l’entretien. Il apparaît notamment que l'interprète filtre certaines remarques désobligeantes des deux interlocuteurs qui risqueraient d'entraver le bon déroulement de l'entretien, en remettant en question la crédibilité ou le statut de l'un ou l'autre des acteurs. Cette approche est le meilleur moyen de montrer ce qui se joue dans ce type de situation, mais elle n'est pas envisageable dans le cas qui

12 PÖLLABAUER Sonja (2004). « Interpreting in asylum hearings: Issues of saving face », in The Critical Link 4: Professionalisation of interpreting in the community , J. Benjamins, Amsterdam &

Philadelphia, pp. 39-52.

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nous occupe. En effet, la tâche principale des interprètes de terrain du CICR consiste à interpréter pendant les « entretiens sans témoin » (EST), durant les visites des lieux de détention. Or, un tel entretien est par définition sans témoin, et de ce fait strictement confidentiel. La confidentialité est en effet une condition sine qua non du travail au CICR. Il convient ici de la définir plus précisément.

La confidentialité appartient aux modalités de travail du CICR, ces modalités seront exposées plus en détail par la suite. Elle est un moyen et non une fin en soi. Elle sert à préserver le dialogue avec les différents interlocuteurs et établir un climat de confiance. Elle permet également de protéger les victimes tout en maintenant un dialogue constructif avec les autorités afin d'améliorer le sort des personnes dont elles sont responsables en cas de problème ; en ce sens, la confidentialité permet à l’organisation de créer les conditions favorables à l’accomplissement de son mandat.

Cette confidentialité ponctue le travail quotidien du personnel du CICR, qui doit faire preuve d'une grande discrétion et prendre les précautions qui s'imposent afin de protéger ses documents de travail. Le personnel expatrié du CICR jouit également d'une immunité. Ainsi, en aucun cas un employé du CICR ne peut être contraint à témoigner13, qu'il s'agisse d'innocenter ou de prouver la culpabilité d’un accusé. Le principe est simple, en apparence du moins : « au CICR on dit ce que l'on fait mais pas ce que l'on voit ». Les exemples qui seront cités ne le seront que dans le but d'illustrer les difficultés du métier et de tenter de comprendre comment y remédier. Les exemples sur lesquels s'appuie ce travail sont parfois des expériences vécues par l’auteur de ce

13 Voir à ce propos l'article de RONA Gabor (2000) intitulé « Le CICR et le privilège de ne pas témoigner : la confidentialité dans l'action » rédigé suite à la décision rendue par le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) qui reconnaît au CICR le « privilège absolu de ne pas divulguer son information confidentielle », http://icrc.org/Web/fre/sitefre0.nsf/html/5WSEGG, consulté le 26 décembre 2008.

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travail ou des collègues Ils sont empruntés à différents contextes. La terminologie pour décrire les situations évoquera l'interprète, le délégué CICR qui est la personne représentant le CICR, et le client qui renvoie à toute personne relevant du mandat du CICR, ce afin de préserver la neutralité. Nous nous sommes efforcés par ailleurs de vérifier systématiquement le caractère public des informations mentionnées, qu’elles portent sur le contexte ou les activités de l'organisation.

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1. Les interprètes de terrain au CICR : présentation générale

L’objet de cette première partie est à la fois de proposer une présentation générale de l’organisation afin d’en exposer les spécificités, de mieux comprendre le rôle que les interprètes sont amenés à y jouer, et la place qu’ils occupent. La présentation du CICR n’est en rien exhaustive, elle se concentre sur les spécificités et les activités de l’organisation où les interprètes exercent, et, qui ont, ou peuvent avoir, une incidence directe sur l’exercice du métier. Il s’agit d’offrir un cadre général pour la suite de ce travail en identifiant ce qui caractérise le métier d’interprète-traducteur de terrain auprès du CICR, à savoir : les conditions qu’il faut remplir, les aptitudes qui sont indispensables, et les compétences qu’il convient de développer.

1.1. Présentation du CICR

1.1.1. Un peu d’histoire

Le CICR est né il y a presque cent cinquante ans. C’est en effet en 1862 que l’idée de créer « des sociétés de secours pour les blessés »14 est formulée suite à l’effroyable spectacle contemplé par Henry Dunant quelques années auparavant. Le 24 juin 1859, Henry Dunant, un commerçant genevois, traverse le champ de bataille de Solférino, au nord de l’Italie. Après seize heures d’affrontements entre les armées française et autrichienne on comptait 6 000 morts et 40 000 victimes abandonnées à leur

14 DUNANT Henry in Un souvenir de Solférino. Genève, Comité international de la Croix-Rouge, p. 124.

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sort, ce qui fait de cette bataille l’une des plus meurtrières de l’histoire. Le commerçant suisse fut horrifié par cette vision de corps gisants et de blessés mourants sur le champ de bataille sans qu’aucun soin ne leur soit prodigué, les services sanitaires des deux armées étant débordés. Il se mêle aux sauveteurs et improvise les premiers secours avec les femmes du village durant trois jours et trois nuits dans l’église de Castiglione non loin de là. De retour à Genève, Henry Dunant rédige Un souvenir de Solférino, publié en 1862, ouvrage dans lequel il fait plusieurs propositions résumées ainsi par Hans Haug :

« Les propositions émises par Dunant avaient deux buts : d’une part, la création, dans tous les pays, de ‘sociétés de volontaires de secours ayant pour but de donner, en temps de guerre, des soins aux blessés’, d’autre part, la formulation d’un ‘principe international, conventionnel et sacré’ devant servir de base et d’appui aux sociétés de secours »15.

Suite à la publication de ce texte, en 1863, un Comité privé dit « le Comité des Cinq »16 convoqua un Congrès à Genève pour examiner comment mettre en pratique les idées de Dunant. C’est ainsi que fut fondé le Comité international de la Croix-Rouge.

Un an plus tard, en 1864, une Conférence diplomatique se tint à Genève aboutissant à la signature le 22 août de la « Convention de Genève pour l’amélioration du sort des militaires blessés dans les armées en campagne ». Au fil des années et des guerres, les instruments juridiques se sont développés pour aboutir aux quatre Conventions de Genève de 1949 et leur deux Protocoles additionnels, qui constituent les piliers du droit

15 Ibid., postface de HAUG Hans, p. 128.

16 Ce comité était composé notamment de Gustave Moynier, du général Guillaume-Henry Dufour, des médecins Louis Appia et Théodore Maunoir, et de Henry Dunant lui même. Ils sont considérés comme les fondateurs de la Croix-Rouge.

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international humanitaire (DIH)17. Nous reviendrons plus en détail sur ce point ultérieurement18.

Les guerres étant malheureusement toujours d’actualité, malgré leur interdiction par le droit international formulée dans la Charte des Nations Unies19, le CICR préserve son mandat qui en fait le garant du DIH et lui permet d’intervenir auprès des victimes de conflits à travers le monde en toute indépendance et neutralité. Ces deux notions sont essentielles pour que l’organisation puisse s’acquitter de son mandat. En effet

« tant son mandat que son statut juridique confèrent un caractère particulier au CICR »20.

Revenons plus précisément sur ce point. Le CICR est une organisation humanitaire privée régie par le droit suisse, et, dotée d’un mandat international. En ce sens, elle se distingue des organisations intergouvernementales, comme les institutions des Nations Unies, mais aussi des organisations non gouvernementales (ONG). En effet, le CICR conclut, dans la plupart des pays où il intervient, accord de siège avec les autorités.

« Ces accords qui relèvent du droit international octroient au CICR les privilèges et immunités dont bénéficient normalement les organisations intergouvernementales. [] Ces privilèges et immunités [] sont garants de

17 Le DIH est une branche du droit international public, appelé aussi droit des gens. Les expressions

« DIH », « droit des conflits armés », et « droit de la guerre » sont à peu près équivalentes.

18 Cf. 1.2.3.

19 « Les Membres de l’Organisation s’abstiennent, dans leurs relations internationales, de recourir à la menace ou à l’emploi de la force, soit contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de tout Etat, soit de toute autre manière incompatible avec les buts de Nations Unies », Charte des Nations Unies, article 2, chiffre 4.

20 In Découvrez le CICR, brochure de présentation de l’organisation. Genève, Publications du CICR, p. 6.

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sa neutralité et de son indépendance, deux conditions essentielles à son action. »21

Un accord du même type a également été conclu avec le gouvernement fédéral afin d’assurer l’indépendance de l’organisation par rapport aux autorités suisses.

Autrement dit, la neutralité, l’indépendance (par rapport à tout gouvernement ou mouvement), et, l’impartialité22 à l’égard des bénéficiaires servent un seul et même but : agir dans l’intérêt des victimes de conflits conformément à la mission humanitaire dévolue à l’organisation.

1.1.2. Les activités de l’organisation

De la mission du CICR, que nous nous permettons de citer intégralement ci- dessous, découle un ensemble d’activités que nous exposerons brièvement. Le but n’est pas ici d’être exhaustif mais d’offrir une vue d’ensemble des principaux domaines d’intervention de l’organisation.

« Organisation impartiale, neutre et indépendante, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a la mission exclusivement humanitaire de protéger la vie et la dignité des victimes de la guerre et de la violence interne, et de leur porter assistance. Il dirige et coordonne les activités internationales de secours du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant- Rouge dans les situations de conflit. Il s’efforce également de prévenir la souffrance par la promotion et le renforcement du droit et des principes

21 Ibid.

22 L’impartialité étant l’un des sept principes fondamentaux du Mouvement international de la Croix- Rouge et du Croissant-Rouge auquel appartient le CICR. Le Mouvement, et, de ce fait le CICR : « ne fait aucune distinction de nationalité, de race, de religion, de condition sociale et d’appartenance politique. Il s’applique seulement à secourir les individus à la mesure de leur souffrance et à subvenir par priorité aux détresses les plus urgentes », in Manuel du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant- Rouge, treizième édition 1994, Genève, CICR et Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, 2ème de couverture.

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humanitaires universels. Créé en 1863, le CICR est à l’origine du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge. »23

Dès lors, les activités du CICR à travers le monde comportent trois volets : protection, assistance, et promotion du DIH. La promotion du DIH consiste à mieux faire connaître le DIH afin d’en assurer le respect, ainsi qu’à attirer l’attention sur les violations du DIH, et, contribuer à son développement24. Autrement dit, le CICR étant le gardien du DIH, il est chargé de le faire connaître aux forces armées, aux parties à un conflit, aux Etats, tout en incitant ces derniers à intégrer le DIH et les droits de l’homme dans leur législation nationale. L’intégration du DIH et des droits de l’homme dans la législation nationale est le meilleur garant, à long terme, d’un outil efficace pour lutter contre l’impunité. La diffusion du DIH s’adresse donc aux acteurs directs au sein d’un conflit, que l’on appelle les « porteurs d’armes », ainsi qu’aux décideurs pendant un conflit, mais aussi en temps de paix. Le développement du DIH consiste par exemple à inviter les Etats à ratifier les textes existants, comme c’est le cas pour les mines antipersonnel, ou encore à rédiger et adopter de nouveaux textes juridiques ad hoc comme en témoigne le processus qui a donné naissance aux quatre Conventions de Genève. Ainsi la troisième Convention de Genève du 12 août 1949 relative au traitement des prisonniers de guerre a-t-elle été élaborée suite et à la première guerre mondiale et développée après la seconde, après avoir constaté le cruel manque de protection juridique offert à cette catégorie de personnes.

23 In Découvrez le CICR, op.cit., p. 53.

24 Ibid., p.3.

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L’assistance consiste essentiellement à « fournir nourriture, eau et soin de santé aux civils privés d’accès à ces biens et services essentiels »25. Cela peut passer par une assistance alimentaire directe sous forme de denrées alimentaires en cas de pénurie, ou encore, une aide matérielle d’urgence en cas de déplacements de population dus aux hostilités engendrant un grand nombre de réfugiés. Dans le cas précédent, il s’agira d’articles comme des tentes, des couvertures de survie et des articles de cuisine par exemple. L’assistance peut également être d’ordre médical : matériel pour soigner les blessés en cas d’affluence, et aide aux services orthopédiques à plus long terme. Enfin, l’assistance de manière générale suppose une action de réhabilitation ⎯en cas d’incapacité des autorités à intervenir ⎯ des services essentiels nécessaires à la vie de la population à plus long terme. Ainsi, le département eau et habitat du CICR peut proposer son aide soit pour réhabiliter le système d’assainissement des eaux ou encore pour mettre en place un système viable garantissant l’accès à l’eau potable aux civils touchés par un conflit.

Enfin, la protection est au cœur du mandat de l’organisation et de l’action qu’elle mène. La protection englobe plusieurs tâches pour le CICR, notamment les visites des prisonniers de guerre et des détenus civils, ce sont les activités liées à la détention, sur lesquelles nous reviendrons plus longuement par la suite. C’est en effet principalement pour la détention que le CICR recourt à des interprètes de terrain. Mais la protection s’occupe également « de rechercher les personnes dont les proches sont sans nouvelles ou portées disparues », ainsi que « d’organiser l’échange de messages entre les membres des familles séparés par un conflit ». Pour finir, c’est aussi à la

25 Ibid.

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protection qu’il revient « de faciliter le regroupement des familles dispersées »26. L’activité de « l’agence de recherche des disparus et rétablissement des liens familiaux », pour laquelle le terme « tracing » en anglais est beaucoup plus économique, est sans doute la plus fastidieuse ; il n’y a qu’à imaginer le travail d’archivage et de classement que supposent les caisses de fiches de prisonniers de guerre de la première guerre mondiale, qui remplissent une salle entière du Musée international de la Croix- Rouge et du Croissant-Rouge27. Cette activité est cependant essentielle et parfois très gratifiante, par exemple lorsque l’on doit annoncer à une famille sans nouvelle d’un fils depuis des mois, que la personne en question est bien vivante.

1.1.3. Les modalités de travail du CICR

Après avoir exposé les différentes activités de l’organisation, nous nous concentrerons essentiellement sur la protection et plus spécifiquement sur la détention et le tracing qui sont indissociables. En effet, les visites de lieux de détention supposent tout un travail de fond qui est mené par l’agence, pour ne citer que la censure des fameux messages Croix-Rouge (MCR) qui permet ensuite d’acheminer les nouvelles aux familles et aux personnes privées de liberté. Cet exemple permet par ailleurs d’aborder la question des modalités de travail du CICR. En effet, il peut paraître étonnant de censurer des messages. Or, le CICR se doit de le faire pour préserver sa neutralité, son impartialité et sa crédibilité auprès des autorités. Il ne suffit pas d’avoir de la bonne volonté pour travailler dans l’humanitaire, que ce soit comme interprète ou délégué, comme nous le verrons plus amplement par la suite. C’est un domaine où il

26 Ibid.

27 Musée International de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, 17 avenue de la Paix, 1202 Genève.

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faut en effet faire preuve d’un grand professionnalisme. Ainsi, les messages sont censurés, dans la mesure où ils sont destinés exclusivement à donner des nouvelles d’ordre familial et ne doivent donc contenir aucune information de type politique ou militaire ; le cas échéant, ils sont renvoyés à l’expéditeur. Cette procédure est essentielle dans la mesure où le CICR n’est pas un service postal. Si l’organisation servait à faire passer des messages entre un détenu et un membre d’un groupe armé partie au conflit, elle perdrait sa crédibilité en tant qu’institution neutre et impartiale auprès des autorités, ce qui nuirait au dialogue qu’elle s’efforce d’entretenir avec toutes les parties au conflit.

C’est pourquoi il convient ici de revenir sur les principaux éléments des modalités de travail de l’organisation en matière de protection. Ces éléments sont mentionnés parce qu’ils sont spécifiques à l’approche du CICR et ont, de surcroît, un impact direct sur le travail de l’interprète. En effet, l’efficacité de l’action du CICR, particulièrement en ce qui concerne les visites de lieux détention, est intimement liée

« au respect d’une méthode de travail constante et rigoureuse dont font partie les modalités de visite et la confidentialité des démarches auprès des autorités »28. Comme le souligne Alain Aeschlimann dans le même article, le dialogue est la « pierre angulaire » de l’approche du CICR, avec les autorités et les détenus. Il explique plus loin que :

« Pour être fructueux et constructif, le dialogue continu tel que le conçoit le CICR doit s’ancrer solidement dans une relation de confiance. Cette confiance [] est instaurée et développée grâce, entre autres, à la nature

28 AESCHLIMANN Alain (2005) in « La protection des détenus : l’action du CICR derrière les barreaux » in Revue internationale de la Croix-Rouge. Genève, CICR, vol. 87, n°857, p. 33. Article traduit en anglais. Egalement disponible à l’adresse :

http://www.icrc.org/Web/fre/sitefre0.nsf/htmlall/review-857-p83/$File/irrc_857_Aeschelimann.pdf, consulté le 26 décembre 2008.

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confidentielle de la démarche du CICR. La confidentialité est une méthode de travail et un choix stratégique. Elle n’est donc pas une fin en soi. Elle permet aussi de travailler sur des questions généralement très sensibles, en toute indépendance et sans subir la pression de l’opinion publique, des médias ou d’organisations politiques. En outre, il est indéniable que la confidentialité facilite l’accès, surtout à des endroits que les autorités sont réticentes à ouvrir à des personnes externes. »29

La confidentialité est donc un moyen de mener à bien l’action de l’organisation et elle a des répercussions sur le travail quotidien des délégués et des interprètes. Ces derniers sont en effet tenus de protéger leurs différents documents de travail : notes, rapports confidentiels, etc. Cette confidentialité du travail est bien plus contraignante que celle dont doit faire preuve un interprète de conférence. Elle touche en effet l’intégralité du travail ou du moins la majeure partie. Un interprète de conférence peut être amené à exercer dans le cadre de réunions hautement confidentielles à certaines occasions. À ce titre, l’article 2 du Code d’éthique professionnelle de l’AIIC stipule que :

« a) Les membres de l'Association sont tenus au secret professionnel total et absolu. Celui-ci doit être observé à l'égard de quiconque et concerne tout ce qui a été appris dans l'exercice de la profession à l'occasion de réunions non publiques.

b) Ils s'interdisent de tirer un profit personnel quelconque de toute information confidentielle qu'ils auraient pu recevoir dans l'exercice de leurs fonctions d'interprète. »30

Mais de manière générale, la confidentialité, qui fait partie intégrante de la déontologie du métier d’interprète, n’est pas aussi contraignante que celle imposée au personnel du CICR. Signalons à ce propos que les « Règles à observer par les

29 Ibid., p. 50.

30 Nous soulignons ici « non publiques », en effet, la quasi-totalité du travail d’un interprète de terrain au CICR n’est pas publique. Article en ligne :

http://www.aiic.net/ViewPage.cfm?article_id=24&plg=2&slg=2, consulté en le 26 décembre 2008.

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collaborateurs du CICR », comprennent un paragraphe (§7) entier, très détaillé, sur l’engagement de discrétion. Citons par exemple l’alinéa 7.2. qui stipule que le collaborateur s’engage :

« À éviter de faire allusion à la situation politique ou militaire dans des communications privées ou officielles ouvertes, y compris dans des conversations, des appels téléphoniques, des messages radio, des télégrammes, des e-mails ou tout autre support de communication électronique et papier »31.

Le travail dans le domaine de la protection et plus particulièrement de la détention impose en effet une extrême rigueur au personnel qui a accès a des lieux que les autorités n’ouvrent pas facilement. Par exemple, une partie de l’information en question ne peut être partagée avec les collègues nationaux. Par ailleurs, l’accès à de tels lieux fait que le personnel expatrié fait souvent l’objet d’une surveillance rapprochée, qui peut passer par des écoutes téléphoniques, tant de la part des autorités que des autres interlocuteurs avec qui le CICR est en contact.

Un autre pilier garantissant l’efficacité de l’action menée par le CICR est sa neutralité, déjà évoquée ci-dessus. Il ne relève pas de ce travail de débattre des liens entre la neutralité historique de la Confédération helvétique et la neutralité du CICR en tant qu’institution32. Signalons cependant que jusqu’en 1989, c’est-à-dire la fin de la Guerre froide marquée par la chute du mur de Berlin, l’exercice du métier de délégué (qui entre autres se devait d’être polyglotte) auprès du CICR était réservé aux détenteurs

31 In « Règles à observer par les collaborateurs du CICR », p. 7.

32 Voir à ce propos l’article de Brigitte TROYON et Daniel PALMIERI (2007) intitulé « Délégué du CICR : un acteur humanitaire exemplaire ? » in Revue internationale de la Croix-Rouge. Genève, CICR, n°865, pp. 97-112. Article traduit en anglais. Egalement disponible à l’adresse :

http://www.icrc.org/Web/fre/sitefre0.nsf/htmlall/review-865-p97/$File/IRC_89_1_Troyon_fre.pdf, consulté le 26 décembre 2008.

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d’un passeport suisse. Cette mesure était censée garantir la neutralité et l’impartialité des représentants de l’institution. Or, la neutralité n’est pas seulement une question de nationalité, comme en témoigne l’internationalisation du personnel du CICR qui eut lieu par la suite. La neutralité va de pair avec l’impartialité, toutes deux sont préservées par un certain nombre de mesures. Ainsi, un délégué ou un interprète ne sera jamais envoyé en mission dans le ou les pays dont il est ressortissant, ni dans les pays limitrophes.

Cette mesure vise à assurer la neutralité du personnel ainsi que sa sécurité, tout en rendant difficile la tâche des ressources humaines en matière de recrutement. En effet, les activités liées à la protection, et plus spécifiquement à la détention, relèvent du personnel expatrié exclusivement pour deux raisons. Tout d’abord, il est difficile d’être neutre et impartial dans un conflit qui nous touche directement33, ce qui pourrait nuire à la neutralité et l’impartialité de la démarche du CICR. De plus, le caractère sensible de l’information exposerait au danger un employé national ressortissant du pays34. Une conclusion découle de cette pratique : il n’y a pas d’interprètes (particulièrement dans la protection) recrutés « sur place », au sens où ils seraient ressortissants du pays, dans les zones de conflit où intervient le CICR. En effet, contrairement aux différentes missions d’observateurs militaires de l’ONU, entre autres, qui emploient des assistants linguistiques recrutés sur place35, la politique du CICR en la matière élimine d’emblée un certain nombre de problématiques d’ordinaire associées à ce domaine d’interprétation.

33 Comme le souligne dans son article Zrinka Stahuljak, rapportant l’expérience de locaux interprétant pour la Mission de surveillance en ex-Yougoslavie de l’Union européenne. Voir Zrinka STAHULJAK in

« The Violence of Neutrality in and of the War (Croatia 1991-1992) », op. cit.

34 Voir au sujet de la sécurité, l’article de THOMAS Roy (2003). « There’s No I in Team ? Why and How Interpreters Must Be Made Members of the Team », in The Liaison, op. cit.

35 Ibid.

(32)

Enfin, il convient de mentionner brièvement les modalités de travail du CICR en détention plus spécifiquement. En effet, le CICR ne visite des lieux de détention que si certaines conditions lui permettant d’accomplir sa mission sont remplies. Pour commencer il lui faut obtenir l’autorisation des autorités qui est en général prévue par l’accord de siège conclu avec les autorités locales. Ensuite, le CICR ne visite un lieu de détention que s’il peut visiter quand il le souhaite, et, s’il a accès à l’ensemble des locaux du lieu visité. Les autorités doivent en outre, fournir une liste des personnes détenues dans le lieu. Cette liste permet d’avoir un suivi et d’éviter notamment la disparition de personnes. Enfin, les délégués doivent avoir la possibilité de mener des entretiens sans témoins (EST) avec les personnes privées de liberté. Cette mesure est essentielle car elle vise à pouvoir véritablement établir un dialogue de confiance avec la victime sans crainte de mesures de représailles ou d’intimidation de la part des autorités.

1.2. Les interprètes du CICR

Après avoir présenté l’organisation et certaines de ses modalités de travail qui ont, ou peuvent avoir, un impact direct sur l’exercice du métier d’interprète, cette seconde partie vise à présenter les interprètes-traducteurs en mission pour le CICR. Ces derniers ne sont en effet pas toujours, voire rarement, des interprètes professionnels. À ce titre, d’après l’étude menée par Barbara Moser-Mercer et Grégoire Bali36 auprès des interprètes de terrain du CICR, 80,77% d’entre eux affirment n’avoir reçu aucune formation préalable, contre 11,54% qui ont suivi une formation d’interprète de

36 MOSER-MERCER Barbara et BALI Grégoire (2007) in « Interpreting in Zones of Crisis and War:

Improving Multilingual Communication through Virtual Learning* », op. cit.

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conférence. Être interprète de terrain suppose un certain nombre de compétences qui sont similaires à celles des interprètes de conférence, mais également d’autres aptitudes qui sont spécifiques au contexte de l’exercice de ce métier. C’est pourquoi nous proposons ici d’identifier plus précisément lesdites compétences. Cet exposé nous permettra par la suite d’analyser plus systématiquement les besoins afin d’y apporter quelques éléments de réponse. Précisons, cependant, que nous nous attacherons ici uniquement au cas des interprètes/traducteurs de langue arabe, en raison de notre connaissance de ce domaine particulier.

1.2.1. Le recrutement et les profils recherchés

Afin de mieux cerner le profil des interprètes du CICR, revenons à l’annonce de recrutement. Les tâches décrites par l’offre sont les suivantes :

« Profession : Interprète / Traducteur arabe. Sur le terrain.

Votre tâche :

traduction orale de l'arabe à l'anglais et de l'anglais à l'arabe lors d'entretiens confidentiels avec des détenus, de diffusions institutionnelles, de distributions de messages Croix-Rouge et de visites de familles

traduction de l'arabe écrit (articles de journaux, correspondance, etc.) à l'anglais écrit

analyse et reporting des conditions de détention, de la situation de sécurité ainsi que tout ce qui a trait au mandat du CICR. »37

On constate immédiatement que le cahier des charges est assez varié et suppose des compétences de traducteur et d’interprète mais aussi une flexibilité certaine en fonction

37 Extrait de l’offre d’emploi en ligne du CICR pour traducteur/interprète de langue arabe, disponible au lien suivant : http://icrc.org/web/fre/sitefre0.nsf/html/fd-arabic-interp, consulté le 26 décembre 2008.

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des besoins opérationnels. En matière de compétences linguistiques, l’annonce précise plus loin qu’une « maîtrise de l'arabe et de l’anglais » est requise tandis qu’une connaissance du français constitue « un atout ». Quant à la formation, une « formation universitaire ou un minimum de 2 ans d'expérience professionnelle »38 sont mentionnés parmi les critères d’engagement. Il ressort clairement ici que les candidats recherchés le sont pour leurs compétences linguistiques qui n’ont pas besoin d’être assorties d’une formation préalable, ni d’une expérience particulière comme traducteur et/ou interprète.

L’expérience montre cependant qu’une partie des interprètes arabophones ou arabisants possèdent une expérience antérieure dans la traduction ou l’interprétation39. Il n’y a pas vraiment de pré-requis non plus pour ce qui est de la langue maternelle. Les compétences linguistiques requises sont à ce titre bien différentes de celles exigées dans le domaine de la traduction ou de l’interprétation de conférence, qu’il s’agisse du métier lui-même ou même de postuler à une formation en interprétation de conférence.

Le candidat au poste envoie un dossier, qui, s’il est retenu, est suivi d’une journée de tests et d’entretiens. Cette journée prévoit plusieurs tests, l’un d’une demi- heure porte sur la connaissance de l’organisation, et, un second vise à examiner les capacités rédactionnelles et de synthèse du candidat. Deux autres tests sont à

38 Ibid.

39 Voir à ce propos l’article de MOSER-MERCER Barbara et BALI Grégoire (2007) in « Interpreting in Zones of Crisis and War: Improving Multilingual Communication through Virtual Learning* », op. cit.

Un tableau rapporte en effet le type de formation reçue d’après les réponses des interprètes en mission (toutes langues confondues) au questionnaire conçu par l’ETI. Il s’agissait d’une question à choix multiple portant sur la formation en interprétation, avec la possibilité de cocher plusieurs options. 7,69%

des personnes ayant répondu affirment avoir une expérience antérieure en tant qu’interprète communautaire ou auprès des tribunaux. 11,54 % affirment avoir reçu une formation d’interprète de conférence et 3,85 % une formation d’interprète de terrain. Ces résultats ne permettent pas d’identifier les personnes ayant une formation ou une expérience de traducteur. Néanmoins, si l’on considère qu’il n’y a pas de redondance pour les trois réponses citées ci-dessus (or, il est fort probable qu’il y en ait), cela signifierait qu’à peine 23% des interprètes en mission ayant répondu au questionnaire ont reçu une formation ou ont une expérience antérieure en interprétation. Nous ne sommes pas en mesure de fournir d’estimation chiffrée pour l’arabe uniquement.

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proprement parler des tests d’évaluation du niveau linguistique. Ce sont ces deux derniers qui nous intéressent particulièrement. Le premier est un examen d’une heure environ visant à évaluer le niveau d’anglais écrit, pour les candidats dont l’anglais n’est pas la langue maternelle. Cet écrit est suivi d’un entretien oral à partir d’un texte afin d’apprécier le niveau de langue oral du candidat. Enfin, le dernier test est un test d’une heure environ, portant sur le niveau de langue arabe ainsi que l’aptitude à traduire de l’arabe vers l’anglais et inversement.40 L’entretien se déroule en arabe en vue d’évaluer les capacités du candidat en arabe littéraire. En fonction de l’examinateur, le candidat peut être soumis à un court entretien visant à évaluer sa compréhension des différents dialectes. Il est ensuite invité à traduire deux courts textes de l’arabe vers l’anglais et de l’anglais vers l’arabe. Enfin, le dernier exercice est une dictée d’arabe afin d’apprécier son orthographe. Signalons que de manière générale les examinateurs pour ces tests sont des interprètes de conférence de langue arabe. L’auteur de ce travail n’a pas été soumis à un exercice d’interprétation à proprement parler, mais il semblerait que certains candidats aient un exercice de traduction à vue pendant le test de langue arabe. Enfin, le candidat a deux entretiens de motivation en plus des exercices évoqués ci-dessus.

Lesdits entretiens portent essentiellement sur la motivation humanitaire du candidat, ainsi que ses capacités d’adaptation, de travail en équipe. Enfin ils visent à apprécier l’aptitude du candidat à supporter psychologiquement de vivre pendant une longue période dans des contextes difficiles. Si le candidat est retenu, il doit également effectuer un bilan médical afin de s’assurer que son état de santé psychique et mental lui permette de partir en mission.

40 Cette description s’appuie sur l’expérience de l’auteur de ce travail et ne peut être considérée comme la façon dont se déroulent systématiquement les tests. En effet, cela peut varier d’un examinateur à l’autre, et d’un candidat à l’autre, en fonction de s’il est de langue maternelle arabe ou non notamment. L’objet de cette description est de donner une idée générale sur le recrutement des interprètes.

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