A NNALES DE L ’I. H. P., SECTION A
G EORGES D URAND
Dépolarisation magnétique d’une vapeur et polarisation d’un laser Zeeman
Annales de l’I. H. P., section A, tome 4, n
o4 (1966), p. 263-384
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, p. 263
Dépolarisation magnétique d’une vapeur
et
polarisation d’un laser Zeeman
Georges
DURANDAnn. Inst. Henri Poincaré, Vol. IV, n°
4,
1966,Section A : .
Physique théorique.
RÉSUMÉ. - On fait une étude
théorique
etexpérimentale
de lapolari-
sation de la lumière émise par un laser à gaz soumis à un faible
champ magnétique;
on utilise la théorie self-consistante deLamb,
dansl’approxi-
mation de
l’équation pilote.
La saturation de la vapeur excitéepeut
se décrire par leséchanges d’énergie
et de momentangulaire
entre la lumièreet les atomes, lors du processus d’émission stimulée. La vapeur,
polarisée
par la
lumière,
estdépolarisée
par lechamp magnétique ;
le laserchoisit,
dans la mesure où la cavité le lui
permet,
unepolarisation
« cohérente » pourlaquelle
ladépolarisation magnétique
est laplus grande,
donc lasaturation la
plus
faible.L’expérience,
sur un laser monomode à miroirsplans
internes enchamp magnétique transversal,
confirme cesprévisions.
ABSTRACT. - One makes a theoretical and
experimental study
of thepolarization
oflight
emittedby
a gas laser submitted to a lowmagnetic
field. One uses the self-consistent Lamb’s
theory
in rateequations approximation.
Saturation of the excited vapour can be describedby
theexchanges
of energy andangular
momentum betweenlight
and atomsdue to the stimulated emission process. The vapour,
polarized by
laser
light,
isdepolarized by
themagnetic
field. The laserchooses,
if allowedby cavity,
a « cohérent ))polarization
for whichmagnetic depola-
rization is the
strongest
and then saturation the lowest.Experimental
evidence is
given
with a unimodeplane
inner mirrors laser in low transversemagnetic
field.ANN. INST. POINCARÉ, A-V-4 19
INTRODUCTION
En utilisant les méthodes de la double résonance
[1]
et du pompageoptique [2],
de nombreux chercheurs ont étudié lecomportement
d’une vapeur d’atomesinteragissant
avec différentschamps optiques
etmagné- tiques.
Dans toutes lesexpériences
de cetype,
on utilise de la lumière pourpolariser
les atomes dans un état excité ou dans leur étatfondamental;
des
champs magnétiques, statiques
ouhertziens, provoquent
la résonancemagnétique
de ces atomes dans l’étatcorrespondant;
les modifications despropriétés optiques
de la vapeurqui
en résultentpermettent
une détection extrêmement sensible de cette résonance. On sait[3]
leparti qui
a été tiréde ces
méthodes,
enparticulier
pour la détermination des durées de vie des états excités des atomes.Effectuer la résonance
magnétique,
c’est faireprécesser
enphase
lesdifférents moments
magnétiques
que la lumière induit ici dans la vapeur;on utilise donc des
champs magnétiques
« cohérents », c’est-à-direparfai-
tement connus
[4].
Par contre, leschamps optiques
surlesquels
on travaillesont
incohérents;
la lumièreexcitatrice,
parexemple, provient
d’une sourceclassique;
sonspectre
estlarge,
saphase aléatoire;
seules sonénergie
etsa
polarisation, caractéristiques
de sespropriétés statistiques,
sont utiliséespour
préparer
lesystème,
en excitant et enpolarisant
les atomes dans unétat
angulaire particulier. C’est,
demême, uniquement
sur les modifications d’intensité ou depolarisation
de la lumière(du
faisceau excitateur ou defluorescence)
queporte
la détection de la résonance. Dans le cas d’une transitiondipolaire électrique
parexemple,
il n’existe pas en moyenne dedipôle électrique optique
dans la vapeur; les atomesrayonnent l’énergie
lumineuse de
façon
incohérente(émission spontanée).
Contrairement à ce
qu’on pourrait
penser, l’incohérence de la lumière facilitebeaucoup
l’étude du mouvement de cessystèmes ;
lechamp optique
est décrit
quantiquement
par ses états propresd’énergie
et depolarisation,
et
l’opérateur
densité des atomes,qui permet
de connaître l’ensemble despropriétés statistiques
de la vapeur, se réduit à sesprojections
à l’intérieur de chacun des étatsconsidérés;
enprésence
dechamps,
l’évolution des atomes se réduit à l’évolution de leur étatangulaire.
Cette remarque sim-plifie,
dans une certaine mesure, l’étude d’effets aussi divers que, par exem-ple,
ladépolarisation magnétique
de la lumière de résonance[5],
lesphéno-
mènes de modulation de lumière en
absorption [6]
ou en fluorescence[7]
dus à la résonance
magnétique,
et la circulation des « cohérences » en265 DÉPOLARISATION MAGNÉTIQUE D’UNE VAPEUR
pompage
optique [8]
ou dans la diffusionmultiple
cohérente de la lumière[9].
Le
champ optique
cohérent d’unlaser,
aucontraire,
induit sur les atomesdes moments
dipolaires électriques
enphase;
ledipôle optique
moyen au sein de la vapeur n’estplus nul,
il rayonne une onde lumineusequi
peut interférer avec l’onde excitatrice(émission
ouabsorption induite).
La lumièrelaser, polarisée,
affecte aussi l’étatangulaire
des atomes,qui
sont alorsplacés
dans lasuperposition
cohérente laplus générale
des niveaux consi-dérés ;
bien que la lumière du laserpuisse
être décriteclassiquement,
l’évolu-tion des atomes en
présence
dechamps magnétiques
est alorsplus complexe
que
précédemment.
Il est néanmoins évidentqu’il
existe une relation entrele mouvement d’un tel
système
et l’évolutionplus simple qu’il
aurait si lechamp optique
étaitincohérent,
car il esttoujours possible
de construireun modèle de lumière incohérente par une
superposition stochastique
appro-priée
dechamps
cohérents. Onpeut
donc s’attendre à ce que tous lesphéno-
mènes
précédemment
étudiés dans lesexpériences
de double résonance aient unéquivalent
dans le domaine deschamps cohérents,
etplus parti-
culièrement dans la théorie des lasers. Le but du
présent
travail est de donnerun
exemple
d’une tellecorrespondance
dans le cas trèssimple
d’unsystème
à 4 niveaux
(J
=1,
J =0)
évoluant dans unchamp magnétique statique :
nous allons voir que la
polarisation
d’un laser Zeeman est un détecteur très sensible de ladépolarisation magnétique
de la vapeurqui
l’excite.Un laser est un oscillateur à
fréquence optique;
il est constitué d’unrésonateur
optique
peuamorti,
detype Pérot-Fabry, rempli
d’un milieuamplificateur,
une vapeur d’atomes excités. Comme dans toutoscillateur, l’amplitude
dusignal produit dépend
de deuxparamètres [10] :
legain
net en « boucle ouverte »
(excédent
relatif dugain
du milieu excité sur lespertes
de la cavitéPérot-Fabry),
et la saturation(qui n’apparaît
que sur la vapeurexcitée) ;
àl’amorçage
desoscillations,
cegain
net estpositif
et unfaible
signal («
bruit»)
croîtexponentiellement
avec letemps ;
c’est la satu- rationqui
limitel’amplitude
des oscillations : legain
est une fonctiondécroissante du
signal
et, à fortniveau,
il s’annule.Lamb
[11]
a fait la théorie de l’oscillation d’un laser dont lechamp optique
a un état de
polarisation imposé ;
lespropriétés
durésonateur,
du milieu actif et de la lumièrepeuvent
alors êtrereprésentées
par des scalaires. Legain
àfréquence optique
estproduit
par l’inversion depopulation
d’unevapeur d’atomes à deux
niveaux ;
la saturation résulte de la baisse de cetteinversion de
population
sous l’influence de l’émission stimulée de la lumière du laser. Gain et saturation sont déduits de lasusceptibilité optique
de lavapeur. L’entretien des oscillations se ramène à un
simple échange d’énergie
entre la vapeur excitée et les différents modes du
champ optique qui
luisont
couplés.
Dans une théorie vectorielle du laser où l’on
s’interroge,
par contre, sur lapolarisation
dusignal émis,
il faut aussi considérer lespropriétés
angu- laires de chacun des éléments de l’oscillateur. Pourreprésenter
les aniso-tropies
de lacavité,
il suffit d’attribuer des surtensions convenables à chacun de ses modesquasi
stationnaires[12] d’oscillation,
d’état depolarisation défini,
deux foisplus
nombreux queprécédemment.
Lasusceptibilité optique
de la vapeur est maintenant un tenseur; comme nous le verrons,
gain
etsaturation du milieu excité
dépendent
alors non seulement despopulations,
mais aussi de l’état
angulaire
des niveauxatomiques
reliés par la transition laser.On
comprend
facilement lerôle joué
par lesanisotropies
dugain
en « bou-cle ouverte »,
qu’elles proviennent
du résonateur ou du milieuexcité;
unedifférence de surtension entre modes favorise l’oscillation sur un état de
polarisation
bien défini(cavité
contenant des lames deBrewster,
par exem-ple) ;
demême,
un processus de pompagequi
excite la vapeur dans un étatangulaire particulier (des
collisionsélectroniques,
parexemple, qui peuvent aligner
lesatomes)
crée uneanisotropie optique
du milieu actif : legain
est maximum pour un état de
polarisation particulier
de lalumière,
dontl’oscillation est ainsi favorisée.
Il est moins
simple
de voir apriori,
lerôle joué
par lesanisotropies
dela saturation
optique.
D’unefaçon imagée,
onpeut
sereprésenter
la satu-ration comme la « mémoire » que les atomes
gardent
de leur interactionavec la
lumière;
pour une transitiondipolaire électrique
entre deux états(J
=1)
-(J
=0),
les atomes et la lumièreéchangent
non seulement del’énergie,
comme dans le modèlescalaire,
mais aussi du momentcinétique
et des « tensions »
(moment quadrupolaire) ;
la différence entre lespopula-
tions
globales
des niveaux considérésbaisse,
mais ces niveauxprennent
aussi un étatangulaire particulier;
onpeut
dire que, dans les processusd’absorption
ou d’émissioninduite,
la vapeur se désexcite et se «polarise » (orientation
oualignement provoqués
par lasaturation).
Cesphénomènes
sont bien connus en pompage
optique [8].
Bien
entendu,
lesanisotropies
de la saturationrespectent
lespropriétés
de
symétrie optique
du milieuactif; quand
le pompage de la vapeur estisotrope,
parexemple,
legain optique,
en l’absence desaturation,
est indé-pendant
de l’état depolarisation
de lalumière;
lesanisotropies optiques
induites par la saturation sont alors telles que toute lumière reste mode propre de
propagation
dans la vapeur,quel
que soit son état depolarisation ;
DÉPOLARISATION MAGNÉTIQUE D’UNE VAPEUR 267
le
gain optique
enprésence
de saturation nedépend
que del’énergie
del’onde lumineuse. Dans ce cas, c’est la cavité
qui impose
lapolarisation
du
laser;
il n’est pas nécessaire de faire une théorievectorielle;
le modèlede
Lamb [11] (champ
scalaire et atomes à deuxniveaux)
est suffisant.En
présence
d’unchamp magnétique,
ces considérations desymétrie
ne sont
plus
valables. Legain
de la vapeur, initialementisotrope,
est peu affecté par des écarts Zeeman de l’ordre deslargeurs naturelles, puisque
les raies
optiques
dans les gaz sontgénéralement
trèsélargies
par l’effetDoppler.
Lasaturation,
par contre, estprofondément modifiée ;
le momentcinétique (ou quadrupolaire) atomique précesse
autour duchamp
à lafréquence
deLarmor;
dès que les sous-niveaux Zeeman dechaque
atomese
séparent,
lescomposantes
transversales moyennes de l’orientation(ou
de
l’alignement)
des atomes se brouillent ets’annulent;
la vapeur negarde
en « mémoire » que les
composantes longitudinales
de ces moments parrapport
auchamp magnétique :
elle se «dépolarise
)) ; la saturationoptique dépend
alors de l’orientation relative duchamp magnétique
et de lapolari-
sation de l’onde lumineuse étudiée.
On
peut
se demanderquelle polarisation
vaprendre
lesignal
d’un laserZeeman,
dans un mode axial[12] unique
d’une cavitéPérot-Fabry quasi isotrope :
c’est ceproblème
que nous avons étudié. Onpeut déjà prévoir
que l’oscillation va
choisir,
dans la mesure où la cavité le luipermet,
un état depolarisation
tel que ladépolarisation magnétique
minimise la satu-ration du milieu actif.
Nous n’avons donc pas fait une étude exhaustive des
propriétés
deslasers Zeeman. De nombreux travaux
[13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 73]
théori-ques et
expérimentaux,
ont été consacrés à cettequestion ;
ont étéprinci- palement
étudiés lesproblèmes
d’entraînement defréquence
et desynchro-
nisation de
modes,
enchamp magnétique axial,
donc les effets dedispersion
non linéaire du milieu actif. C’est un autre
aspect
ducomportement
des lasersZeeman, complémentaire
de l’étude que nousprésentons
ici.Ce travail
comprend
unepartie théorique,
où nous avonsrepris
la méthodeself consistante de Lamb en l’étendant à un modèle à
quatre
niveaux(chap. I).
Nous avons suivil’approximation
del’équation pilote («
rateequations approximation
)) deLamb)
pour calculer lasusceptibilité optique
de la vapeur, en utilisant d’abord un modèle d’atomes immobiles
(chap. II)
et en introduisant l’effet
Doppler
ensuite(chap. III).
Nousprésentons
leséquations d’évolution,
en raiehomogène,
dans le formalismeplus compact
de Fano[20] (chap. IV)
pour endégager
lasignification physique.
Nousdonnons au
chapitre
V desdiagrammes théoriques
décrivant l’évolutionde la
polarisation
du laserZeeman,
en tenantcompte phénoménologique-
ment de certaines relaxations
(collisions).
Dans une deuxième
partie,
nous décrivons enfinquelques expériences
conçues pour vérifier les
prévisions précédentes;
nous décrivons successi- vement les méthodes utilisées(chap. VI)
et les résultatsexpérimentaux
obtenus sur un laser Zeeman en
champ magnétique
transversal(chap. VII).
Partie théorique
AVANT-PROPOS
Dans cette
étude,
les notions de « cohérence » et de «polarisation » jouent
un rôle
important;
cesdénominations,
consacrées parl’usage,
ont malheu-reusement
plusieurs significations qui peuvent prêter
àconfusion; rappelons-
les brièvement.
La « cohérence »
peut
d’abord être unepropriété
duchamp (optique
oumagnétique)
considéré :amplitude
etphase
bien définies dansl’espace
ou dans le
temps ;
c’est la définition desradioélectriciens,
suffisantepuisque
nous ne considérons que des
champs classiques.
La « cohérence »
peut
aussi être unepropriété atomique qui
décrit desrelations de
phase,
d’un atome à l’autre(ou,
pour desmélanges statistiques,
sur le même
atome),
entre certainesgrandeurs incompatibles
avecl’énergie;
il
peut,
parexemple,
exister une aimantationglobale
dans une vapeur,qui
n’est pas colinéaire auchamp magnétique; mathématiquement,
laprésence
de ces « cohérences » se traduit dans unereprésentation
standardpar l’existence d’éléments
non-diagonaux
del’opérateur
densité p définis-sant les
propriétés statistiques
des atomes.Considérons le cas de deux
multiplicités
de momentcinétique (J, M)
et(J’, M’),
reliées par une transitionoptique
11eù(de type dipolaire électrique,
par
exemple).
Les éléments p, del’opérateur
densité entre deux sous-niveaux J, M ~, J’, M’ )
deparités opposées
sont les « cohérencesopti-
ques )} : ils évoluent à la
pulsation
co etreprésentent
des vibrations enphase
des
dipôles électriques induits,
parexemple,
surchaque
atome par unchamp
optique
« cohérent » au sensprécédent ;
il existe alors un momentdipolaire
électrique macroscopique
non nul dont lerayonnement
peut interférer269 DÉPOLARISATION MAGNÉTIQUE D’UNE VAPEUR
avec la lumière incidente
(absorption
ou émissionprovoquée
delumière).
Les éléments non
diagonaux
dep à
l’intérieur desmultiplicités (J, M)
ou
(J’, M’),
dutype
PMIMz ou sont nommés « cohérences hertziennes » pourrappeler
que leursfréquences
propres d’évolutionappartiennent
au domaine
hertzien ;
leurprésence
est liée parexemple
à l’existence d’unecomposante
moyenne transversale du momentcinétique précessant,
dansun
champ magnétique uniforme,
à lafréquence
deLarmor;
pour cetteraison,
nous lesappelons
aussi « cohérencesmagnétiques
».L’ensemble des « cohérences
optiques »
et « hertziennes » définit la«
polarisation »
des atomes,qui comprend
donc deuxparties :
- la
polarisation
«optique
», depulsation
cô,représentant
ledipôle électrique
oscillant à lafréquence lumineuse ;
- la
polarisation
«quasi-statique
», defréquence
d’évolutionbeaucoup plus basse, qui
caractérise lespropriétés angulaires
des atomes à l’intérieur dechaque multiplicité J,
J’ : onparle
ainsi d’orientation si le momentcinétique
moyen est différent dezéro, d’alignement
si le momentquadru- polaire électrique
moyen n’est pasnul;
onpeut
yajouter
l’excitation pour caractériser lapopulation
totale de lamultiplicité.
Cettepolarisation quasi statique peut provenir
de causes diverses(bombardement électronique, etc.),
mais
peut
aussi être induite par unchamp optique,
même noncohérent;
l’orientation ou
l’alignement
donnent des « cohérences hertziennes »lorsqu’ils
ont descomposantes
transversales parrapport
à l’axe dequanti-
fication choisi.
La «
polarisation
» de la lumière est définieclassiquement, d’après Stokes,
par l’ensemble des valeurs moyennes des fonctionsquadratiques
du
champ optique
E exp -iwt,
de laforme EiEj* >;
on définit ainsil’énergie
duchamp,
son momentangulaire
et ses « tensions » au sensde
Maxwell; évidemment,
seule lapartie électrique
de ce « tenseur depolarisation »
nousintéresse;
nous considéronsplus particulièrement
des cas purs
(polarisation totale)
où ce tenseurfactorise;
lapolarisation
de la lumière se caractérise alors par un vecteur
ê ;
si elle ne se réduit pas à l’un des trois vecteurs de base standardê+, ê-, êz (polarisations
circulairesautour de oz, ou linéaire sur
oz),
lapolarisation ê
est dite « cohérente »puisque
la lumièrepeut
induire sur les atomes des « cohérences hertziennes ».Ainsi,
unchamp optique
induit les « cohérencesoptiques
» s’il est « cohé-rent » ; il suffit que sa «
polarisation
» soit « cohérente » pourqu’il
induisedes « cohérences hertziennes » dans une vapeur.
Pour décrire les
échanges
de «polarisation »
entre la lumière et une vapeur, lelangage global
de l’orientation et del’alignement
est leplus simple puisqu’il
nedépend
pas d’unereprésentation particulière;
toute lumièrepolarisée aligne (et,
suivant les cas,oriente)
la vapeur. Il faut se souvenir que lescomposantes
de cesgrandeurs
enprésence
d’unchamp magnétique
ont des évolutions propres différentes
(les composantes longitudinales,
liées aux
populations
sont des constantes du mouvement; les compo- santes transversales évoluent auxfréquences
deLarmor).
Cette distinctionest sans
objet
pour lapolarisation optique.
CHAPITRE PREMIER
MODÈLE
DE BASE D’UN LASER ZEEMANNous définissons d’abord un modèle
simplifié
pour décrire lapolarisa-
tion des atomes excités et de la
lumière,
dans un laser Zeeman. Nous réta- blissons ensuite leséquations
de la théorie de Lamb[11]
en lesadaptant
à ce
modèle,
ensoulignant
certainesapproximations
utilisées par la suite.A. - Choix du modèle.
1. Le modèle de Lamb pour un
champ
scalaire.Lamb a fait une théorie de l’oscillateur laser
multimode,
depolarisation
donnée. Il utilise une méthode self-consistante : un
champ électrique optique
dans la cavité distord la fonction d’onde de
chaque
atome,qui acquiert
un moment
électrique élémentaire;
la somme de tous cesdipôles,
pour l’ensemble des atomes, définit unepolarisation macroscopique
du gaz;cette
polarisation
rayonne un autrechamp optique
dans lacavité ;
si le laseroscille,
cechamp
doit êtreégal
auchamp
initial. Lamb écrit donc les condi- tions decompatibilité
des deux ensemblesd’équations
reliant lechamp électrique
E et lapolarisation
P :- les
équations
deMaxwell;
-
l’équation
deSchrôdinger.
DÉPOLARISATION MAGNÉTIQUE D’UNE VAPEUR 271
Ces conditions de
compatibilité
donnentl’amplitude
et lafréquence
del’oscillation dans chacun des modes du
laser, quand
l’excitation(la
« pompe
») dépasse
une certaine valeurcritique (seuil)
déterminée par lespertes
de la cavité.Lamb a choisi d’étudier l’oscillation sur les
pseudo-modes
axiauxTEMoon
de Fox et Li
[12] ;
il ne tient pascompte
du caractère vectoriel duchamp
E. M. : il suppose lapolarisation
de la lumière fixée suivant un vecteur donnéêi (par
laprésence,
parexemple,
de lames de Brewster dans lacavité; êi
définit alors unepolarisation rectiligne).
Il décrit lapartie spatiale
deschamps,
dans lacavité,
par un ensemblecomplet
orthonorméde fonctions scalaires
d’espace Un(r)
satisfaisant àl’équation
aux valeurspropres :
où kn
est la constante depropagation
du mode n. Une fonctionvectorielle f
se
représente
par sescomposantes
de Fourierspatiales
sur lesUn,
leproduit
scalaire étant défini par :
où
l’intégrale
estprise
sur le volume de la cavité.Comme l’a montré Slater
[21],
lesamplitudes
duchamp électrique
Edans les n modes normaux obéissent à n
équations
différentiellesindépen- dantes,
caractérisant n mouvements oscillatoiresharmoniques
amortis.La
polarisation
Pjoue
le rôle de force excitatrice sur ces oscillateurs.Comme P n’est pas une
simple
fonction linéaire deE,
à cause de la satura-tion, Pn dépend
de tous lesEm
et les oscillations forcées des n différents modes sontcouplées.
Algébriquement,
l’étude d’un laser se ramène à la détermination du mou- vement de n oscillateurscouplés,
assezcomplexe
engénéral.
Dans le casparticulier
de deux modes axiaux[12],
l’étude sesimplifie;
onpeut
suivre l’évolution dusystème depuis l’amorçage
des oscillationsjusqu’au régime
stationnaire : en
général,
ces deux modes de mêmepolarisation peuvent
osciller simultanément(couplage faible),
mais il existe des situations où l’oscillation dans un mode inhibe l’oscillation dans l’autre(couplage fort).
Le
système peut
être bistable etprésenter
del’hystérésis,
comme l’oscil-lateur de Van der Pol
2. Modèle décrivant la
polarisation
des atomes et du rayonne-ment.
En introduisant le caractère vectoriel du
champ
E.M.,
nous doublonsle nombre des modes excités : la
partie spatiale Un
dechaque TEMoon
seprojette
sur la base :Unêl, Unê2,
où(êi, ê2)
est unereprésentation
ortho-gonale
des vecteurs transverses à l’axe de lacavité;
leproblème
secomplique beaucoup.
Nous avonschoisi,
poursimplifier,
de n’exciterqu’un
seul modeaxial
TEMoon,
de distribution scalaired’amplitude U(r).
Nous nous proposons de déterminer la
polarisation
de la lumière émise par le laser dans ce mode axialunique dégénéré, quand
onsupprime l’isotropie spatiale
dusystème atomique,
parl’application
d’unchamp magnétique
extérieur.
10 Modèle de
champ électromagnétique.
- Nous étudions lesoscillations
couplées
du laser dans les deux modesTEM00n, 03BB (A = 1, 2)
avec
êi ê2
= 0 et n fixé. Leschamps électriques
de ces modes normauxsont
géométriquement orthogonaux
enchaque point,
commeê1
etê2,
choisis icirectilignes.
Les atomes sont soumis à un
champ magnétique homogène
H perpen- diculaire à l’axe de la cavitéPérot-Fabry. H
définit l’axe oz d’unrepère
trirectangle (fig. 1-1). ê1, ê2
sont les vecteurs unitairesêx
etêz
des axes oxDÉPOLARISATION MAGNÉTIQUE D’UNE VAPEUR 273
et oz. Le mode axial
unique
sedécompose
donc en deux modes(polarisés 03C0
et a par
rapport
àH)
dechamps électriques Ez et Ex,
de surtensions donnéesQz
etQx.
Il n’est
généralement
paspossible
de définir des surtensions pourchaque
mode : les
pertes,
fonctionsquadratiques
deschamps,
nepeuvent
pas serépartir
defaçon indépendante
entre deux modes et leséquations
d’évolu-tion libre des
champs
desUx
sontcouplées.
Par définition despseudo-
modes axiaux de Fox et
Li,
lespertes
par diffraction y sontnégligeables
devant les
pertes
par réflexion. Les conditions aux limites étant mal con- nues(la
réflexion est soitmétallique,
soitdiélectrique),
onreprésente
cespertes
par une conductivitéfictive s
du milieuexcité,
que lesanisotropies possibles suggèrent
deprendre
tensorielle. Nous verronsqu’on peut
alors définir sansambiguïté Qx
etQz,
ensupposant
que ox et oz sont les axesprincipaux
des. Qx
etQz
sontgrands (~ 107)
et peu différents :Ez
etEx
sont des fonctions circulaires dutemps
depulsations optiques vz
et vx; nous posons :
En
séparant
lapartie spatiale
et lapartie temporelle
deE,
nous définissons lesamplitudes
lentement variables par :Les ne doivent pas varier
beaucoup pendant
letemps L/c
car nousavons
remplacé
lespertes
localisées sur les miroirs par la conductivité fictiverépartie
dans la cavité. Enfait,
la finesse duPérot-Fabry
est élevée.Pour une distance entre modes axiaux
de 0394vM
= 203C0.c/2L,
les modes de la cavité vide ont unelargeur : 0394vc
=v/Q,
très inférieure lespectre
deEx(t)
ne doit donc pasdépasser
pour que( 1 .
A .2)
soitacceptable ;
la
première
condition est alorsautomatiquement vérifiée ;
dansl’hypothèse contraire,
il fautdévelopper
une théorie du laser en ondesprogressives [22].
En
présence
du milieuamplificateur, l’énergie
fournie par les atomespeut compenser les
pertes
de lacavité;
la constante detemps
du mode devient infinie : l’oscillation met untemps
infini pour atteindre sonrégime d’équilibre,
ou pour lequitter.
Onpeut
lever cette difficulté etexpliquer,
entre autres,
l’amorçage
desoscillations,
en introduisant du « bruit » dans le modèle : lespectre
de la lumière émiseprend
ainsi unelargeur
minimumque l’on ne
peut
réduire. Townes[23],
en utilisant une théorielinéaire,
adonné
l’expression
de cette finesseultime;
Lamb[24]
l’a déterminée en tenantcompte
des non-linéarités de l’oscillateur laser. Des théories récen- tes[25, 26, 27]
donnent uneexpression
de ce « bruit », en utilisant des modèles où lechamp
derayonnement
estquantifié.
Dans cetravail,
poursimplifier,
lechamp électrique, classique,
restemonochromatique.
Toujours
poursimplifier,
nous supposons queU(r)
nedépend
quede y :
les
amplitudes
deschamps
sont constantes danschaque plan
transversal.Il est facile de voir
qu’une répartition
finie dechamp électrique,
d’état depolarisation
donné etd’amplitude
constante, ne satisfait pas à la condi- tion div E = 0(fig. 1-2) :
lechamp
réel est donné parb,
mais le modèlea est valable
quand
larépartition
transversale dechamp
estindéfinie,
ouquand
la décroissance de E est très localisée sur lesbords,
ce que nous supposons ici.Il
peut paraître
déraisonnable de donner une mêmerépartition spatiale
aux deux modes et de leur attribuer des
pulsations distinctes;
enfait,
Uet 03C6 ne jouent
pas le même rôle : une faible différence dans leschange
peu les
composantes
de Fourierspatiales
des diversesfonctions,
et enparti-
culier de l’excitation. Comme on ne connaît
jamais
leurrépartition réelle,
ces différences n’ont pas d’intérêt
pratique.
Parcontre, 03C6
module les « cohé-rences » des atomes : en donnant à p la
valeur 0394vM = 7r.c/L,
ce modèlepourrait
aussireprésenter,
à une assezlarge approximation,
lecouplage
entre deux modes axiaux
consécutifs,
depolarisations orthogonales;
auvoisinage
duseuil,
cette situation a étéfréquemment
observée[28]
sur desDÉPOLARISATION MAGNÉTIQUE D’UNE VAPEUR 275
lasers à miroirs
internes,
où lapolarisation
de la lumière n’est pasimposée
par la cavité. D’autre
part,
cp est mesurable par battementsoptiques
suivantla méthode de Forrester
[29].
Nous conservons donc cp différent de zéro.2° Modèle
atomique. -
Les atomes ont deux niveaux deparités opposées
reliés par la transitiondipolaire électrique
du laser. Le niveausupérieur a
est untriplet (J
=1 ) ;
le niveau inférieur b est unsingulet (J
=0).
L’écart Zeeman linéaire du
triplet (pas
dedécouplage)
pour lechamp
Hvaut e
(en
unités depulsation). a
et b ont desénergies fzWa
et11.W b
enchamp nul; Wb)
vaut fim.Nous
appelons 1 ~)
le vecteur d’état d’un atome. Nousreprésentons 1 ~ )
sur une basestandard,
ensemble des vecteurs propres communs à J2et
Jz,
enappelant
Jl’opérateur
momentcinétique atomique.
Letriplet a
est donc sous-entendu par les trois
vecteurs 1 a, m ) (m
=0,
:f::1)
où m estla valeur propre, en unité de de la
projection Jz
de J sur oz. Le vecteurpropre associé à b est
noté b. ~.
L’axe oz a été défini comme celui des axesprincipaux de s
surlequel
nousplaçons
lechamp magnétique
H. Les niveauxa et b se
dépeuplent
par émissionspontanée
sur des niveaux extérieursqui
n’interviennent pas
ici ; chaque
état a(ou b)
subit ainsi une décroissanceexponentielle, représentée phénoménologiquement
par un terme en exp(- yat/2)
ouexp (- ybt/2)
dans sa fonction d’onde[30].
Nous posons :2yoo
= Ya + Yb et : Ya =1/Ta?
où Ta est la durée de vie radiative de a.Dans un modèle de laser où l’on cherche à « inverser » les
populations
desétats a et
b,
il estlogique
de choisir une relaxation ybbeaucoup plus
forteque ya, ce que nous faisons par la suite. Nous
négligeons
l’émission spon- tanée de a surb,
ainsi que pourl’instant,
toute autre cause de relaxation(collisions,
diffusionmultiple, etc.).
B. - Les
équations
de base.1. Calcul du
champ rayonné
dans la cavité par lapolarisation
des atomes.
On détermine un
premier
ensemble de relations entre P et E enproje-
tant les
équations
de Maxwell sur les deux modes normauxUx
de lacavité.
On
part
de :.
ou :
avec des notations évidentes.
Après
élimination deH, j
etD,
on obtient :Appelons Ax
lesprojections ( Ux, E )
de E sur lesUx.
LesUx,
ortho-normés,
sont par définition les vecteurs propres del’opérateur
rot rot,de valeurs propres :
où les sont les
pulsations
propres de la cavité vide. Utilisant cette pro-priété,
nous obtenonsaprès projection
de(1 . B . 2)
surUx, l’équation :
où
Pa = ( UÀ, P )
est laprojection
de Fourierspatiale
de P surU~.
Avec la conductivité tensorielle
fictive s,
les évolutions libres desAI.
sont
couplées, puisque :
est en
général
différent de zéro. Comme la définition des modes normauximplique l’indépendance
des évolutionslibres,
nous choisissons lesêx
pour avoir : =sx8x, ;
nous les prenons donc sur les axesprincipaux x
des.
Dans ce
repère particulier,
leséquations ( 1 . B . 3)
sans second membre sedécouplent;
elles s’écrivent dans le casgénéral :
On
peut
alors définir des surtensionsQx
pour les modesux
par :Qx=
v est la
pulsation
moyenne de E et n’a pas besoin d’êtrebeaucoup précisée.
Les
Qx
étantgrands, l’amplitude
de P varie lentement devant v et on peut écrire :-7g
P = -v2P’
on obtient finalement :DÉPOLARISATION MAGNÉTIQUE D’UNE VAPEUR 277 Avec la définition
( 1 .
A .2),
nous avons évidemment :En
général, Px
n’est pas enphase
avecAx.
Nous l’écrivons :En substituant dans
(1. B . 5), après
avoirnégligé
des termes en(Ex(t)
est lentementvariable),
onsépare
les coefficients des sinus et cosinus(termes
enquadrature
et enphase
avec lechamp électrique),
et on obtientpour
chaque
mode les deuxéquations :
La
première équation
fixe lafréquence v03BB
duchamp électrique A03BB, quand
on connaît la
partie Cx
de lapolarisation Px
enphase
avecAx (dispersion).
La deuxième
équation
fixel’amplitude Ex
deAx quand
on connaît lapartie Sx
dePa
enquadrature
avecAx (perte
ougain
parabsorption
ou émissionstimulée).
2. Calcul de la
polarisation
induite sur les atomespar
unchamp électrique
dans la cavité.Par un processus
quelconque (collisions, etc.),
les atomes sontsupposés
«
pompés »
dans unesuperposition
« incohérente » des étatspurs 1 ~ ) (j a, m ~ ou 1 b ~).
En l’absence deperturbation électrique,
lespopulations
des états de base
prennent
des valeursstationnaires,
déterminées par letaux de pompage À et les durées de vie des différents
niveaux ;
il n’existepas de « cohérence
optique
» ; ledipôle moyen ( P )
est nul. Sous l’action d’unchamp électrique
donnéE(r, t)
dans lacavité,
les atomespassent
dansune
superposition
cohérente des états debase,
et ilapparaît
unepolarisa-
tion
P(E),
que nous allons calculer.Considérons les atomes
qui
se trouvent en r à l’instant t. Si l’onpouvait
définir un
opérateur
densitéglobal p(r, t)
pour décrire leurcomportement statistique,
il suffiraitd’intégrer l’équation
deSchrôdinger
donnant p, pourcalculer ( P )
par larelation : ( P(r, t) )
= trace(p(r, t) . P)
oùP est l’opérateur dipôle électrique. Malheureusement,
bien quesemblables,
cesatomes sont animés de vitesse v