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Submitted on 1 Jan 1910
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Les raies de Fraunhofer et la dispersion anomale de la lumière
W.H. Julius
To cite this version:
W.H. Julius. Les raies de Fraunhofer et la dispersion anomale de la lumière. Radium (Paris), 1910, 7
(10), pp.281-284. �10.1051/radium:01910007010028100�. �jpa-00242431�
MÉMOIRES ORIGINAUX
Les raies de Fraunhofer et la dispersion anomale de la lumière
Par W. H. JULIUS
[Laboratoire de physique de l’Université d’Utrecht].
Examinons ce qui arrive quand un faisceau de lu- mière blanche traverse un espace où se trouve de la matière à pouvoir absorhant sélectif. Les ondes dont les périodes correspondent exacte1nent aux périodes
des vibrations propres qui caractérisent cette matière,
sont absorbées, c’est-à-dire que leur énergie subit une transformation ; les électrons résonateurs reçoivent l’énergie de ces ondes pour la transmettre 2013 d’une manière encore peu connue
-aux autres corpus- cules constituant les systèmes moléculaires. G est ainsi que, dans le spectre de la lumière transmise, les
’l’1"a ies raies d’absorption prennent naissance.
Elles ne sont pas infiniment minces, car, pendant
les collisions des molécules, les périodes des r ihra- tions propres des électrons subissent de petits chan-
gements temporaires, et, d’autre part, le mouvement des mulécules fait entrer en considération le principe
de Doppler-Fizeau ; il s’ensuit que des ondes de pé-
riodes très voisines de celles des vibrations propres
sont aussi absorbées. Toutefois, si le milieu absor- bant est un gaz peu dense, les groupes d’ondes absor- bées ne constituent que des raies généralement très
étroites.
Il importe de ne pas confondre ces vraies raies
d’absorption avec les raies obscures des spectres du
soleil et des étoiles. Nous allons voir que les raies de Fraunhofer, que, depuis Iiirchlioff, on a toujours
considérées comme de simples raies d’absorption,
sont, en eflet, d’origine plus complexe et doivent
une partie quelquefois très iiotal)le de leur largeur à
une cause autre que l’absorption directe.
Pour le reconnaître, considérons encore notre fais-
ceau de lumière blanche qui traverse un absorbant
sélectif. L’influence des électrons à période propre ne
se borne pas à causer l’absorption de certaines ondes ;
elle se manifeste aussi dans la variation très marquée
du pouvoir réfringent du milieu pour les ondes si- tuées à proximité immédiate de part et d’autre de celles qui sont absorbées. C’est le phénomène connu
de la dispersion anomale.
Nous désignerons comme « lumière R
»les ondes voisines de la raie d’absorption du côté dirigé
versl’infra-rouge du spectre, comme
cclumière V )) celle
du côté de l’ultra-violet. Quand on approche de la ruie, l’indice de réfraction croît rapidement pour la lumière R et diminue rapidement pour la lumière V.
Reste à démontrer comment ce pouvoir dispersif rtl101nal, qui paraît être une propriété absolument générale de la matière, produit l’élargissement des
raies d’absorption.
Cela tient à ce que, pour les ondes voisines des raies d’absorption, il résulte de ladite propriété une augnentation de la diffusion et de la réfraction des
rayons lumineux.
Quant à la diffusion lord Rayleigli a montré, en
1 899 1, (lu’iiii faisceau de rayons parallèles traversait
une vaste masse gazeuse sans être absorbé, se trouve
pourtant affaibli, parce que les molécules dissipent
une partie de l’énergie rayonnante dans toutes les directions. Le faisceau sort du gaz avec l’intensité
où I0 représente l’intensité initiale, x la longueur
du chemin parcouru dans la masse gazeuse, et
le coefficient de diffusion. Ce dernier dépend non seu-
lelnent du nombre N des particules par unité de vo-
hune et de la longueur A des ondes considérées 2, mais
encore du pouvoir réfringent n -1. Tout près d’une
raie d’absorption, le facteur (u
-1)2 prend des
,a-leurs considérables, de sorte que les effets de dill’ll- sion seront toujours plus visibles au voisinage des
raies d’absorption que dans les autres régions du spectre. On peut donc dire qu’il y
aune diffusion
anomale ayant pour effet d’entourer la vraie raie
d’absorption d’une bande sombre, dégradée, dont
l’intensité dépend du degré de dispersion anomale est
de la quantité de gaz traversée, laquelle est deter-
minée par N et
x.A l’iniluence de la diffusion s’ajoute celle de la
réfraction, toutes les fois que la densité du milieu
1. HBBLI
icii,Phil. Mag. [3] 47 1899 375.
’2. On sait que lord Rayleigh e’l’liqnf’ !t’ ilti rinl par cette relation.
Article published online by EDP Sciences and available at http://dx.doi.org/10.1051/radium:01910007010028100
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absorbant présente des irrégularités, car alors le,
rayons de lumière se courbent,
-la divergence et.
par suite, l’intensité locale du faisceau varient d’un endroit à l’autre. Un reconnaît aisément qu’en gé-
néral il en résulte une diminution de l’intensité totale moyenne du faisceau primilir : 1° parce que le chemin parcouru dans le gaz se trouve allongé, ce qui
fait augmenter la perte par diffusion ; 2° parce qu’une partie de la lumière réfractée retourne à la source.
Or, cette infiaelce de la réfraction change avec A et doit, elle aussi, augmenter à mesure que l’on ap-
proche des raies; donc la réfraction anomale con-
tribue à l’obscurité de l’entourage des vraies raies d’absorption 1.
On ne peut pas donner ni exiger une preuve tout a fait di fecle de cc que dans les atmosphères du
soleil et des étoiles les effets de la dispersion anomale
sont assez forts pour produire un élargissement sen-
sible de leurs raies spectrales. )Ia:s quand on se rap-
pelle que, dans notre atmosphère terrestre, la diffu- sion et la réfraction de la lumière sont perceptibles
même pour des ondes ne subissant pas la dispersion
anomale; que l’atmosphère solaire est tellement plus
vaste, et montre des lignes d’absorption beaucoup plus prononcées que notre atmosphère,
-alors il n’est certainement pas hardi d’énoncer l’hypothèse que
les raies de Fraunhofer sont des raies d’absorption
entourées de bandes de dispersion.
Nous allons vériner l’évidence de cette hypothèse
par voie indirecte, en comparant les conclusions né- cessaires qui en découlent aux résultats récents de l’observation minutieuse du spectre solaire.
C’est surtout aux belles recherches de MM. Unisson
et Fabry en France, et de MM. Hale et Adams en
Amérique, clue l’on doit la découverte ou la confir- mation des lois empiriques suivantes :
10 Dans le spectre de la partie centralc du disque solaire, les raies de Fraunhofer sont déplacées vers le
rouge par rapport aux raies correspondantes des spec- tres d’émission observés au laboratoire. L’ordre de
grandeur des déplacements (très différents d’une raie a lllle autre) est de 0.005 unité d’Angström; ils sont
donc bien plus petits que la largeur des raies.
’2" Dans le spectre du bord du soleil, les déplace-
mcnts des raies de Fraunhofer
versle rouge sont plus grand qu’au centre, et les raies subissent en outre un élargissement du même ordre de grandeur que les
déplacements.
3° Les raies brillantes du spectre de la cllrolllo- sphère (aux endroits caln2es) ne montrent aucun dé- placement systématique par rapport aux raies de
1. Outre’ que la réfraction irrégulière affaiblit l’intensité moyenne des faisceaux incidents. elle
causeaussi
unedistri- biitioti très inertie de la lumière transmise. J’ai démontré aillï;urs
comment onpeut déduire de
ceprincipe
uneexpnca-
tion --impie de plusieurs phenomènes concernant, les taches solaires el les images spectrohéliographiques.
Fraunhofer dit spectre du bord ; elles sont donc dé- placée vcrs le rouge. exactement autant que ces der- nières.
1° Quand on compare les valeurs moyennes des
déplacements des raies du bord dans des sections suc- cessives dit spectre, on constate un accroissement en
passant du violet
aurouge.
La nouvelle conception du spectre solaire que noirs
venons de proposer i1plique que les raies de Fraun- liofrr doivent être asymétriques, les raies étroites
Fig. 1.
généralement dans une mesure plus forte que les raies
larges’. On pourra s’en convaincre en examinant la
li,,ure 1, qui représente une petitc partie de la courbe
de dispersion de l’atmosphère solaire au voisinage
d’une raie d’absorption.
Les longuetirs d’onde sont priscs pour abscisses:
une ordonnée zéro correspond à l’indice de réfraction
n = 1, de sorte que les ordonnées de la courbe re-
présentent les valeurs du pouvoir réfringent n
-’1.
Si a l’endroit considéré il n’existait point de raie,
le pouvoir réfringent serait donné par la ligne poin- tilléc, dont l’ordonnée a peu près constante est déter-
minée par l’action d’ensemble de tous les électrons à
périodes différentes qui, dans le mélange gazeux, influent sur la vitesse de propagation des ondes con-
sidérées.
Un coup d’0153il suffit pour voir que pour les ondes situées symétriquement par rapport n la raie d’absorp-
tion (comme celles en a et a’, b et b’, etc.), les
valeurs absolues rh (n - 1 ) du pouvoir réfringent sont Inégales: elles sont toutes plus grandes pour la lumière R que pour la lumière 1.
Le degré de diffusion et de réfraction irré;ulièrc
que les rayons subissent
surleur passage à travers
l’atmosphère solaire est déterminé par
cesvaleurs absolues du pouvoir réfringent : il est donc plus grand
1. Memoire cl. Soc d. Spelli. ital., 38 (1909) 184; Physik.
Zeutschr.. 11 1910) 67 : Arch Néerl. [2] 15 1910 73.
en moyenne du côté rouge que du côté violet de la - raie.
L’asymétrie de la bande de dispersion qui en résulte
doit se manifester comme un déplacement de la raie
de hrallnhol’el’
versle rouge. Yolla notre explication
de la première des quatre lois signalées.
La seconde loi se présente comme un cas parti-
culier de la première; l’explication est la même. En
effet, la lumière veinant du bord du disque a par-
couru en moyenne des chemins plus longs à travers
le milieu absorbant que la lumière venant des parties
centrales. Il est donc tout a fait naturel que lïn- fluence de la diffusion et de la réfraction anomales
se fasse sentir plus fortement dans le spectre du bord
que dans celui du centre, c’est-à-dire que les raies du bord doivent ètre déplacées vers le rouge par rap- port à celles du centre, et qu’en général elles sont plus larges.
Pour comparer les effets d’asymétrie dans des cas
où l’intensité de la dispersion anomae est très dif- férente, nous supposons constante, dans la figure 1,
la partie de la réfraction qui ne dépend pas de la
raie, et nous nous figurons que la dispersion anomale
soit d’abord très faible, puis qu’elle croisse, pour à la fin devenir très considérable. Nous voyons alors
l’asymétric de la partie centrale de la bande de dis- persion diminuer toujours. Or, quand on veut juger
du déplacement d’une raie large a bords dégradés. on
s’en rapporte à la place de la partie centrale; ces
raies fortes ne se trouveront donc pas sensiblement
déplacées. Pour lcs raies à dispersion anomale de
plils cn plus faible, les déplacements iront d’abord
en croissant, puis en diminuant.
Plusieurs particularités que l’on rencontre dans la table des déplacements des raics du bord, publiée
par M. Adams 1, se comprennent aisément en se pla-
çant à notre point de iule, ainsi que je l’ai démontré
ailleurs’. Nous ne nous arrêterons pas à ces détails,
dont l’étude intèressante lI’a guère commencé.
L’opinion généralement admise, qui considère les raies de Fraunhofer comme de simples raies d’ab- sorption, et leurs déplacements comme indiquant de
vrais changements de longueur d’onde, atlribue ces déplacements à la p’ession qui régnerait dans la
couche reversante.
En se basant sur les résultats d’un grand nombre d’expériences, faites avec l’arc électrique sous pres- --ion, et sur la comparaison des phénol11ènes ainsi
observés avec les déplacements des raies dans les spectres du cmnre et du bord du soleil, on
aconclu
clue la pression dans la couche renversante devrait être d’environ J 2 atmosphères a la base, 3 a 6 atmo- sphères en moyenne. On explique les déplacements
des raies du bord par rapport a celles du centre par 1. W.S. B1’BB:’- Astroph. Journ.. 31 (t9H) 30-61
2. W.H. JULLS. Astroph Journ.. 31 1910 428-429
;le fait que la lumière du bord a parcouru un chemin
plus long dans la moitié inférieure que dans la moitié
supérieure de la couche renversante,
Évidemment, on ne peut douter que des effets de
pression ne se manifestent à un certain degré dans le spectre solaire. Mais tant que d’autres moyens pour constater une telle pression dans la couche renver-
sante feront défaut, et puisqu’il y a la dispersion
anonlale, qui, elle aussi, produit des déplacements
de même allure, il faut s’abstenir de se prononcer
laquelle des deux causes devra être considérée comme
étant prédominante.
C’est ici que la troisième loi que nous venons
d’énoncer vient fournir un appui incontestable a notre
hypothèse, faisant sans aucun doute pencher la ba-
lance en faveur de la dispersion anomale.
Les raies brillantes de la chromosphère sont dépla-
cées vers le rouge exactement autant que les raies de Fraunhofer (1(i)is le spectre du bord. Notre théorie
n’a aucune difficulté il faire comprendrc ce phéno-
mène. En effet, la lumière qui, à cause de la diffu- sion et de la réfraction anomales, manque dans le spectre du bord, produisant ainsi l’élargissement asymétrique des raies d’absorption, n’est pas elle- même absorbée par l’atmosphérc solairc. Une partie
en retourne au soleil, mais une autre partie quitte
l’astre en nous donnant l’impression d’émaner de points qui ne sont pas situés sur la ligne droite qui joint l’0153il de l’observateur à la vraie source : la pho- tosphèrr. C’est là, d’après notre hypothèse, l’origine
de la lumière chromosphérique. Les raies brillantes de la chromosphère
secomposent donc de la même lu- miérc qui t’ait défaut dans le spectre du bord: donc les déplacements systématiques des deux classes de raies doivent être égaux.
La théorie fondée sur l’effet de pression devra admettre, pour expliquer le phénomène qui nous oc-
cupe, que dans toute la chromosphère il existe une pression sensiblement égale à celle qui détermine les
déplacements des raies obscures an bord du soleil, c’est-a-dirc une pression bien plus grande que la
pression moyenne admise dans la couche renversante.
Je crois qu’il y
alà une grave difficulté à vaincre pour la théorie des pressions.
Passons a la quatrième loi, à celle qui établit qu’en général les déplacements (les raies dans le spectre du
bord deviennent de plus en plus grands quand on
passe du violet au rouge.
L’interprétation des déplacement comme effets de pression s accorde
assezbien
aveccette loi :
carles déplacements par pression. lenlists dan; le labora- tnire, paraissent eaux aussi croître avec les longueurs
d’onde. Il convient pourtant de se rappeler qu’une
tJtc concordance
neprouve pas l’identité des causes.
Les séparations dues à l’effet Zeeman. par exemple
croissent tout aussi bien
avecles longueurs d’onde
284
hien que, d’après les recherches récentes de M. King i ,
l’effet Zeeman et l’effet de pression ne soient point
intimement liés.
La théorie fondée sur la dispersion anomale se
trouve dans une position analogue, pas moins favo- rable, vis-à-vis de notre quatrième loi.
Dans un travail antérieur’, en parlant de l’asvmé-
trie des bandes de dispersion, j’avais remarqué qu’elle
devait augmenter à mesure que l’on va de l’extrémité rouge du spectre à l’extrémité violette, si du moins la supposition était exacte, que le pouvoir réfringent
de l’atmosphère solaire, pour des ondes qui n’ap- partiennent pas à une région du spectre où ils a
une dispersion anomale, augmente du rouge vers le violet.
La théorie qui attribue les déplacements à cette asymétrie semblait donc conduire à une conclusion directement opposée aux faits.
Mais cette conclusion n’était pas bien fondée, parce que la supposition dont elle dépend ne se vérifie pas.
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