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Commandement de payer, mainlevée provisoire, action en libération de dette et Convention de Lugano : réflexions à l'occasion d'un arrêt du Tribunal fédéral

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Commandement de payer, mainlevée provisoire, action en libération de dette et Convention de Lugano : réflexions à l'occasion d'un arrêt

du Tribunal fédéral

KAUFMANN-KOHLER, Gabrielle

KAUFMANN-KOHLER, Gabrielle. Commandement de payer, mainlevée provisoire, action en libération de dette et Convention de Lugano : réflexions à l'occasion d'un arrêt du Tribunal fédéral. La Semaine judiciaire , 1995, vol. 117, no. 29, p. 537-562

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:44118

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SOMMAIRE. - Commandement de payer, mainlevée provisoire, action en libération de dette et Convention de Lugano. - Résumés d'arrêts. (Tribunal fédéral. Cour de cassation pénale). F. c. Ministère public de Zurich. Fixation de la peine. Prise en considération de condamnations antérieures radiées ou éliminées du casier judiciaire.

- (Cour de cassation pénale). Ministère public de Saint-Gall c. B.

Infractions commises avant et après que l'auteur ait accompli sa vingt- cinquième année. Mesures et sanctions. -(Cour de cassation pénale).

J. c. Ministère public du canton de Vaud. Prescription de l'action pénale. Interruption par le prononcé du jugement. Contravention.

COMMANDEMENT DE PAYER, MAINLEVÉE PROVISOIRE, ACTION EN LIBÉRATION DE DETTE

ET CONVENTION DE LUGANO.

RÉFLEXIONS À L'OCCASION D'UN ARRÊT DU TRIBUNAL FÉDÉRAL

par

Gabrielle KAUFMANN-KOHLER, docteur en droit, avocate,

chargée de cours à la Faculté de droit de l'Université de Genève

La coexistence de la Convention de Lugano concernant la compé- tence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale (ci-après CL) et de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite (ci-après LP) soulève de nombreuses et difficiles questions. Panni celles-ci, un récent arrêt du Tribunal fédéral (120

m

92; résumé SJ 1995 204), en résout une première (celle du for de la poursuite en validation de séquestre contre un défendeur domicilié dans un Etat contractant de la CL; ch. 2 ci-dessous) et en évoque une seconde (celle du for de la mainlevée provisoire dans Je champ d'ap- plication de la CL,_gui est étroitement liée à la question de la compé- tence pour l'action en libération de- dette; ch. 3 ci-dessous). Cette

(3)

décision est l'occasion de se pencher à nouveau sur ces questions de grande importance pratique, sur lesquelles les avis de doctrine ne manquent pas, mais divergent1•

1.

L'ARRÊT

Un créancier avait opéré un séquestre en Suisse sur les avoirs d'une société domiciliée en Italie. Il l'avait validé par une poursuite au lieu du séquestre, apparemment non suivie d'opposition, après quoi la saisie avait été exécutée. Par la voie de la plainte, le débiteur avait alors demandé l'annulation de tous les actes de poursuite, alléguant que ces actes violaient la CL, dont l'article 3 al. 2 exclut le for du séquestre.

Sans s'arrêter à l'article 3 al. 2 CL, le TF relève tout d'abord que l'appartenance du commandement de payer à l'exécution forcée, exécution «dont il ne s'agit pas (encore)» («um welche es (noch) nicht geht»; 120 III 92/93), est sans pertinence. Il affirme ensuite que la validation du séquestre par commandement de payer fait partie inté- grante de la procédure de mesures provisionnelles que constitue le séquestre. Or l'article 24 CL laisse les Etats contractants libres de déterminer la compétence pour les mesures provisionnelles, donc également pour la réquisition de poursuite et le commandement de payer qui en feraient partie («die Prosequierung durch Zahlungsbefehl ist jedoch als Bestandteil eines Verfahrens um einstweiligen Rechts- schutz zu verstehen, wofür Art. 24 LugUe ausdrücklich einen Vor-

De manière approfondie, STOFFEL, Ausschliessliche Gerichtsstande des Lugano- Ueberein.kommens und SchKG-Verfahren, insbesondere Rechtsôffnung, Wider- spruchsklage und Arrest, Beitrage zum schweizerischen und internationalen Zivil- prozessrecht, Festschrift für Oscar Vogel, Fribourg 1991 357; SCHWANDER, Die Gerichtszustandigkeiten im Lugano-Uebereinkommen, in Schwander (éd.), Das lugano-Uebereinkommen, St. Gall 1990 61; WALDER, Anerkennung und Voll- streckung von Entscheidungen, op. cit. 135; MEi ER, Besondere Vollstreckungstitel nach dem Lugano-Uebereinkommen, op. cit. 157; id

1, Die Europaisierung der provisorischen Rechtsôffnung - Ein Beitrag zum Lugano-Uebereinkommen, Mitteilungen aus dem Institut für zivilgerichtliches Verfahren in Zürich, décembre 1989 15; id., Das lugano-Uebereinkommen, Skizzen einer Einführungs-und Anpassungsgesetzgebung, Mitteilungen aus dem Institut für zivilgerichtliches Vertahren in Zürich, septembre 1990 23; VOLKEN, Rechtsprechung zum Lugano- Uebereinkommen (1993), RSDIE 1994 393/398 ss; STAEHELIN, Internationale Zustandigkeit im SchKG, AJP 95 27; VOUILLOZ, La compétence du juge de la mainlevée provisoire selon la CL, RSDIE 1995 51; id., Mainlevée provisoire et Convention de Lugano, Revue valaisanne de jurisprudence 1994 337; WALTER, Wechselwirkungen zwischen europaischem und nationalem Zivilprozessrecht:

lugano-Uebereinkommen und Schweizer Recht, ZZP 1994 301 ss.; voir enfin MARKUS, Provisorische Rechtsôflnung und Zustlindigkeit nach dem lugano- Uebereinkommen, RSJB 1995 323, article qui, vu sa date de parution, n'a pas été pris en compte dans ce qui suit, mais qui arrive largement aux mêmes conclusions.

(4)

behalt zu Gunsten des betreffenden Staates enthalt», 120 III 92193). Pour appuyer son affirmation, le TF se réfère aux avis de Stoffel et Ammon, cê 'dernier soutenant que le for du séquestre est compétent non seulement pour le commandement de payer mais également pour la mainlevée2.

Le Tribunal fédéral ajoute que l'émission d'un commandement de payer en validation d'un séquestre ne viole pas la CL dans la mesure où la compétence du juge qui tranchera l'existence de la créance n'en découle pas impérativement, ou en version originale: «Die blosse Ausstellung des Zahlungsbefehls zur Aufrechterhaltung des Arrestes im Sinne von Art. 278 SchKG verstësst insofern nicht gegen das Lugano-Uebereinkommen, ais sich daraus nicht zwingend die ôrtliche Zustandigkeit des Richters ergibt, der über den Bestand der Arrest- bzw. Betreibungsforderung zu befinden hat>> ( 120 III 92194). Il enchaîne pour laisser ouvert le bien-fondé de la position d'Amman concernant la compétence pour la mainlevée, question dont il n'était pas saisi et qui, en l'occurrence, était sans objet, le créancier ayant validé par le biais d'une action au fond au for prorogé3 .

En résumé, on sait désormais que, dans le champ d'application de la CL, le créancier peut requérir la poursuite en validation de séquestre au for du séquestre. On ne sait pas, en revanche, s'il peut également y requérir la mainlevée provisoire.

On notera ici pour éviter toute confusion que le commandement de payer et la requête de mainlevée définitive postérieurs à une décision au fond rendue à l'étranger ne posent pas de problème sous l'angle de la CL. Ils sont couverts par l'article 16 ch. 5 CL, qui prévoit la compé- tence exclusive de l'Etat du lieu d'exécution «en matière d'exécution des décisions»4.

2

3 4

STOFFEL, précité note 1, 393; AMMON, Grundriss. des Schuldbetreibungs-und Konkursrechts, 5e éd. Berne 1993 417; le TF écarte en revanche l'avis de MEIER, précité note 1 , selon lequel il n'y a pas de commandement de payer au for du séquestre avant décision au fond. Il se croit justifié par le fait que même MEIER admet la poursuite au for du séquestre après décision au fond. Or cela n'a rien à voir, puisque l'application de l'art. 16 ch. 5 est hors de doute dans ce dernier cas.

Bien évidemment compatible avec la CL (art. 17).

Not. STOFFEL, précité note 1, 372; SCHWANDER, précité note 1, 92-93; voir aussi note 33.

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Il. PREMIÈRE QUESTION: COMMANDEMENT DE PAYER ETCL

Si la solution que le TF apporte à cette première question ne surprend guère, la motivation laisse le lecteur sur sa faim. On aurait aimé que l'arrêt s'attarde un peu sur la solution diamétralement opposée donnée au même problème dans le cadre de la Convention franco-suisse (ch. 11. I ci-dessous), qu'il examine la fonction du commandement de payer (ch. 11.2 ci-dessous), ainsi que le système et les objectifs de la CL (ch. 11.3 ci-dessous), pour s'attacher ensuite, sur ces bases, à la qualification du commandement de payer selon la CL (ch. 11.4 ci-dessous).

1) Même problème-autre solution:

la Convention franco-suisse

Comme la CL, la Convention de 1869 entre la Suisse et la France sur la compétence judiciaire et l'exécution des jugements en matière civile, aujourd'hui abrogée5, réglait tant la compétence des tribunaux que l'exécution des jugements. Elle se distinguait par là des autres trai- tés bilatéraux conclus par la Suisse en la matière, qui se limitent eux à l'exécution des décisions6.

La Convention franco-suisse garantissait - avec quelques excep- tions - Je for du domicile du défendeur (art. ler)7. La CL garantit également - avec des exceptions plus nombreuses, il est vrai - ce même for. En effet, elle érige la compétence du domicile du défendeur en règle générale à l'article 2. Tous les autres chefs de compétence (art. 5-18) constituent des exceptions à cette règle générale, qui sont en conséquence interprétés restrictivement8•

6

7

8

RO 1992 1 200.

Dans la mesure où ils lient la Suisse à un Etat contractant de la CL, ces traités sont aujourd'hui remplacés par cette dernière dans son champ d'application (art.

55 CL). Ils ne subsistent donc plus que pour les matières non couvertes par la CL, surtout droit de la famille et successions (art. 56 et 1 al. 2 CL).

Dans les limites de la convention qui ne vise que les litiges opposant un national d'un pays à un national de l'autre pays. Sur ce sujet, not.

DUTOIT/KNOEPFLER/LAUVE/MERCIER, Répertoire de droit international privé suisse, t. 2, Berne 1983 20 ss.

CJCE Handelskwekerij G.J. Bier B.V./Mines de potasse d'Alsace S.A .. 30 novembre 1976, Rev crit 1977 563/565: Dumez France/Hessische Landesbank, 11 janvier 1990, Rev crit 1990 363/366; Handte & Co./Société de traitements mécano- chimiques des surfaces, 17 juin 1992, Rev crit 1992 726n29; Shearson Lehmann Hutten, lnc./T.V.B. Treuhandgesellschafl für Vermôgensverwaltung und Beteili·

gungen mbH, 19 janvier 1993, Rev crit 1993 320/323.

(6)

On aurait pu déduire de l'identité d'objet de la Convention franco- suisse et de la CL (réglementation de la compétence des tribunaux - règle générale de la compétence du for du domicile du défendeur) que la solution valant pour l'une s'appliquerait aussi à l'autre. Etrange- ment, tel ne fut pas le cas. Selon l'ordonnance du Tribunal fédéral de 1936 concernant l'application de la Convention franco-suisse, le séquestre exécuté en Suisse contre un Français domicilié en France pour une créance dont la détermination au fond devait être portée devant le juge français, devait être validé non pas par une poursuite en Suisse, mais par une action au fond en France. Le créancier devait requérir la poursuite ensuite seulement, dans les trente jours suivant la communication du jugement français9•

Dans un arrêt de 1948, le Tribunal fédéral s'est expliqué sur la genèse de cette ordonnance dans les termes suivants:

9

10

«Dans son message à l'Assemblée fédérale concernant l'acte additionnel à la Convention franco-suisse (Feuille fédérale 1936, p. 712/713), le Conseil fédéral admettait la possibilité d'une poursuite en validation du séquestre, sous cette réserve qu'en cas d'opposition, le créancier suisse ne pourrait pas demander la mainlevée provisoire; [ ... ].Dans la correspondance qu'il a échangée avec le Département fédéral de justice et police au sujet de l'ordonnance qu'il avait chargé d'édicter, le Tribunal fédéral a émis des doutes à ce sujet. Il a fait observer que dans l'éventualité où la poursuite ne serait pas frappée d'opposition, la garantie du juge naturel, que veut assurer le traité, serait rendue illusoire, puisque, par le seul jeu de la poursuite, le créancier suisse aurait acquis un titre exécutoire, tandis que le débiteur français ne disposerait plus que de l'action en répétition de l'indu qu'il aurait à porter devant un juge suisse (art. 86 LP).

Là-dessus, le Département fédéral de justice et police a laissé toute latitude au Tribunal fédéral pour n'admettre comme moyen de valider un séquestre que l'action en reconnaissance de dette devant le juge français.

C'est manifestement à cette solution que s'est arrêté le Tribunal fédéral dans son ordonnance[ ... ]» (c'est nous qui soulignons)10•

Ordonnance du 29.6.1936 concernant l'acte additionnel du 4 octobre 1935 à la Convention entre la Suisse et la France sur la compétence judiciaire et l'exécution des jugements en matière civile (RS 3, 188).

7411113/15.

(7)

Le Tribunal fédéral répéta ce principe par la suite en soulignant qu'il n'allait pas au-delà des dispositions de la Convention, mais ne faisait que les mettre en œuvre 11•

2) Fonction de titre exécutoire du commandement de payer Si le Tribunal fédéral avait opté alors contre la poursuite au for du séquestre dans le cadre de la Convention franco-suisse, c'était en raison de la fonction de titre exécutoire du commandement de payer.

La réquisition de poursuite et le commandement de payer font partie intégrante de la procédure d'exécution forcée12Emanant d'une auto- rité non judiciaire, le commandement de payer est émis sans examen au fond. Il est sans influence sur la situation de droit matériel et, bien entendu, dépourvu de toute force de chose jugée. Il tire sa force de la non-opposition. Si le créancier requiert la continuation de la poursuite dans l'année, le commandement de payer auquel le débiteur ne s'est pas opposé _constitue un titre exécutoire et le débiteur n'a plus d'autre moyen de défense que l'action en répétition de l'indu (art. 86 LP).

Dans le cas contraire, le commandement de payer resté sans opposi- tion perd toute force après l'écoulement du délai d'une année. Le but du commandement de payer est donc de créer, en cas de non-paiement et non-opposition, un titre exécutoire valable pour la poursuite en cours13

C'est cettl_! fonction de titre exécutoire qui a amené Meier14 à nier la possibilité d'une poursuite préalable à une décision au fond dans le champ d'application de la CL.

3) Système et objectifs de la CL: sécurité juridique et prévisibilité en matière de compétence des tribunaux La CL instaure un système de compétence complet. Ainsi, le défen- deur domicilié dans un Etat contractant sera normalement attrait devant les tribunaux de cet Etat (art. 2). La CL prévoit cependant

Il

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80 111149/159; voir aussi 74 Ill 13, 77 111140 et 90 11108/114; 79 Ill 39 qui étendait l'obligation de valider un séquestre effectué en Suisse par une action au fond en France à un litige entre Français (donc non couvert par la convention qui s'appli- quait entre Français et Suisse) fut renversé par 80 111149.

AMMON, précité note 2, 111.

AMMON, précité note 2, 115.

MEIER, Besondere Vollstreckungstitel, précité note 1, 208; dans le même sens, DUTOIT, La Convention de Lugano du 16 septembre 1988 concernant la compé- tence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, FJS 157 17.

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certains cas dans lesquels le demandeur est soit autorisé (art. 5-15, J 8), soit obligé à agir en un autre lieu (art. 16-17). Honnis ces cas, la compétence du for du domicile du défendeur est impérative15.

Ce système de compétence est non seulement complet, il est aussi fenné. Les Etats contractants ne peuvent prévoir de compétences supplémentaires. L'article 3 al. 2 énumère nommément un certain nombre de fors nationaux inadmissibles, dits exorbitants. Cependant, cette énumération n'est pas exhaustive16 ; toute compétence de droit national ne coïncidant pas avec la réglementation conventionnelle, qu'elle soit énumérée expressément ou non, est inadmissible.

Par l'instauration d'un numerus clausus des compétences, la CL cherche à renforcer la protection juridique des personnes établies dans les Etats contractants17 en assurant la sécurité et la prévisibilité de la répartition des compétences entre Etats contractants. Ainsi, dans les termes du rapport d'expert établi à l'occasion de l'élaboration de la convention:

«La convention, en établissant des règles de compétence communes, a [ ... ] pour but d'assurer, [ ... ] dans le domaine qu'elle est appelée à régir, un véritable ordre juridique duquel doit résulter la plus grande sécurité»18.

Ou encore dans les termes de la Cour de justice des Communautés européennes, interprétant la Convention de Bruxelles:

15 16 17

18 19

«Par ailleurs, l'objectif de la protection juridique des personnes établies dans la Communauté, que la Convention entend, entre autres, réaliser, exige que les règles de compétence qui dérogent au principe général de cette Convention soient interprétées de façon à permettre à un défendeur normalement averti de prévoir raisonnablement devant quelle juridiction, autre que celle de l'Etat de son domicile, il pourrait être attrait» (c'est nous qui soulignons)19.

Not. GAUDEMET-TALLON, La Convention de Bruxelles et Lugano, Paris 1993 53.

Comme l'indique l'adverbe .. notamment•; voir aussi GAUDEMET-TALLON, loc. cit.

Préambule de CL repris par de nombreuses décisions CJCE, not., outre les arrêts cités aux notes 18 et 20, Effer/Kantner, 4 mars t982, Rev crit 1982 570; Gubisch Maschinenfabrik/Palumbo, 8 décembre 1987, Rev crit 1988 370.

JOCE 1979, C 59 1/15.

CJCE Handte, précité note 8, 729; voir aussi Custom Made Commercial Ltd. / Metallbau GmbH, 29 juin 1994, Rev crit 1994 692/696, arrêt récent qui insiste sur .. l'objectif général de la convention, qui consiste à instaurer des règles garantissant une certitude quant à la répartition des compétences entre les différentes juridic- tions nationales" et qui cherche à éviter une solution qui pourrait «Compromettre la prévisibilité du for compétent et serait ainsi incompatible avec l'objectif de la

(9)

Les arrêts rendus par la Cour de justice des Communautés euro- péennes en interprétation de la Convention de Bruxelles, sur laquelle la CL est calquée2°, sont directement pertinents pour l'application de la Convention de Lugano. En effet, en vertu du protocole n° 2 sur l'interprétation unifonne de la CL, cette dernière a été conclue «en pleine connaissance des décisions rendues par la Cour de justice des Communautés européennes sur l'interprétation de la Convention de Bruxelles jusqu'au moment de la signature de la présente convention», les négociations de la CL ayant été «fondées sur la Convention de Bruxelles à la lumière de ces décisions» (préambule). Quant aux déci- sions de la Cour de justice postérieures à la conclusion de la CL le 16 septembre 1988, les Etats contractants membres de l'AELE ont déclaré, lors de la signature de la CL, qu'ils considéraient «approprié que leurs tribunaux, en interprétant la Convention de Lugano, tiennent dûment compte des principes contenus dans la jurisprudence résultant de la Cour de justice des Communautés européennes [ ... ] relative aux dispositions de la Convention de Bruxelles [ ... ]»21, Le juge suisse a donc l'obligation de tenir compte de la jurisprudence de la Cour de justice interprétant la Convention de Bruxelles lorsqu'il applique la CL.

4) Qualification du commandement de payer selon la CL En prenant en considération la jurisprudence suisse antérieure, la fonction du commandement de payer ainsi que le système et les objec- tifs de la CL, il faut maintenant qualifier le commandement de payer selon la CL. Quelle étiquette lui coller panni celles qu'offre la convention? S'agit-il d'une mesure d'exécution22 au sens de l'article 16

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convention•; voir en outre Duijnstee/Goderbauer, 15 novembre 1983, Rev crit 1984 361/363.

La Convention de Bruxelles fondée sur l'art. 220 du Traité de Rome n'était pas ouverte à la signature par des non-membres des Communautés européennes.

C'est pourquoi tes Etats AELE conclurent avec les Etats CE une convention paral- lèle, très largement fidèle au modèle, les différences existant lors de la conclusion ayant été intégrées (à quelques très rares exceptions près) à la dernière version de la Convention de Bruxelles (Convention d'adhésion de l'Espagne et du Portugal du 26.5.89, dite de San Sebastian, JOCE 1989, L 285, p. 1 ); à ce sujet voir not.

DROZ, La Convention de San Sebastian alignant la Convention de Bruxelles sur la Convention de Lugano, Rev crit 1990 1.

Déclaration des représentants des Gouvernements des Etats signataires de la Convention de Lugano qui sont membres de !'Association européenne de libre échange, annexée à la CL Cette déclaration vise aussi la prise en compte de la jurisprudence des tribunaux nationaux des Etats membres CE. Quant à la CJCE, selon une déclaration des Etats contractants membres CE, elle tiendra compte de la jurisprudence rendue en application de la CL.

Dans le texte allemand de l'art. 16 ch. 5 ·Zwangsvollstreckung•.

(10)

ch. 5 CL, ou d'une mesure provisionnelle régie par l'article 24, ou encore d'un «Erkenntnisverfahren», soit, selon la définition de Guldener, d'une procédure établissant le droit dans un cas particu- Jier23, soumise aux articles 2 ss., ou enfin d'autre chose?

Cette qualification ne peut s'opérer selon les étiquettes ou, autre- ment dit, les critères du droit suisse. Pour assurer l'égalité et l'uni- formité des droits et obligations des justiciables la Cour de justice interprète la Convention de Bruxelles - interprétation qui dicte celle de la CL, nous l'avons vu24 - de manière autonome, à savoir selon Je système (système de compétence fermé comprenant une règle géné- rale, le for du domicile du défendeur, et des exceptions énumérées limitativement et interprétées restrictivement) et les objectifs (protection et sécurité juridiques, prévisibilité des compétences) de la convention25•

(a) Dans l'arrêt commenté, le recourant cherchait à obtenir l'annula- tion des actes de poursuite sur la base de l'article 3 al. 2 CL, qui exclut le for du séquestre de l'article 4 LDIP. Implicitement Je TF rejette l'invocation de cette disposition. A première vue, cela pourrait paraître juste: l'article 4 LDIP vise uniquement l'action au fond, non la pour- suite préalable26, ce que les travaux préparatoires de la CL confir- ment27. Cependant, si pour les besoins de la CL les actes de poursuite doivent être assimilés à une action au fond - et toute la question est là (ch. II.4 d) ci-dessous)- ils tombent nécessairement dans le champ de l'article 3 al. 2 CL.

(b) La poursuite préalable à un jugement au fond tombe-t-elle dans le champ de l'article 16 ch. 5 CL, qui prévoit une compétence exclu- sive de l'Etat du lieu d'exécution «en matière d'exécution des décisions»?

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27

·Ziel des Erkenntnisverfahrens ist es. die Rechtsgewissheit im Einzelfall herzustel- len. Ziel des Vollstreckungsverfahrens ist die zwangsweise Verwirklichung des rechtsgem1issen Zustandes .. (GULDENER, Zwangsvollstreckung und Zivilprozess, ROS 1955 19/20 cité par STOFFEL, précité note 1, 368).

Ch. 11.3 ci-dessus in fine.

Not. CJCE L TU Lufttransportunternehmen GmbH & Co. KG/ Eurocontrol, 14 octobre 1976, Rev cri! 1977 7721774-775; Gourdain cl Nadler, 22 février 1979, Rev crit 1979 657/659; Kalfelis cl Bankhaus Schrooer, Münchmeyer, Hengst & Co., 27 septembre 1988, Rev crit 1989 112/116; Reichert cl Oresdner Bank, 1 O janvier 1990, Rev crit 1991 151/152; Shearson, précité note 8, 323.

FRITZSCHE/WALDER, Schuldbetreibung und Konkurs nach schweizerischem Recht, vol. Il, 3e éd., Zurich 1993 490-491 et 495 ss.

Publications de l'Institut suisse de droit comparé, Convention de Lugano, vol. Il travaux préparatoires, Zurich 1991 25-26.

(11)

A l'article 16, la CL instaure des compétences exclusives (uniques et impératives) en faveur des juridictions «les mieux placées» pour résoudrë certains types de litiges particulièrement ancrés dans un Etat28. Dans le cadre du chiffre 5, l'ancrage tient à la mise en œuvre de la puissance publique en matière d'exécution forcée et au fait que l'exécution proprement dite sera régie par la loi du lieu de réalisa- tion29.

Le rapport d'expert sur la Convention de Bruxelles parle de

«contestations relatives à l'exécution d'un jugement», qu'il définit comme celles «auxquelles peuvent donner lieu le recours à la force, à la contrainte ou à la dépossession de biens meubles et immeubles en vue d'assurer la mise en œuvre matérielle des décisions, des actes»3o.

A titre d'exemples la doctrine concernant la Convention de Bruxelles cite, pour le droit français, les demandes en mainlevée de saisie-arrêts et le,s incidents de saisie31 , et, pour le droit allemand, toute contesta- tion d'acte d'exécution particulier telle la revendication par un tiers des biens saisis ou encore les requêtes tendant à la levée ou à la limitation de l'exécution forcée 32.

La Cour de justice a eu l'occasion de statuer qu'en raison de ses liens étroits avec l'exécution forcée, l'action en opposition à exécution du droit allemand33 consistant à contester le caractère exécutoire d'un jugement en raison de faits survenus ultérieurement (paiement, remise de dette, compensation) relevait de l'article 16 ch. 5, mais que, dans le cadre de cette action, Je débiteur ne devait pas être autorisé à invoquer la compensation avec une créance pour la détermination de laquelle le tribunal allemand du lieu de l'exécution forcée n'était pas compétent, la compétence revenant aux juridictions françaises34.

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Not. CJCE Sanders/van der Putte, 14 décembre 1977, Recueil CJCE 1977 2383/2390; Reichert/Dresdner Bank, précité note 25, 153; Duijnstee/Goderbauer, précité note 19, 365; Hacker/Euro-Relais GmbH, 26 février 1992, Rev crit 1992 74/76; voir aussi SCHWANDER, précité note 1, 92; HUET, Note à l'arrêt AS-Auto- teile Service GmbH/Malhé, Clunet 1986 452, renvoyant à GOTHOT/HOLLEAUX, Clunet 1971 767.

GAUDEMET-TALLON, précité note 15, 69.

JOCE 1979, C 59 1/36.

GOTHOT/HOLLEAUX, La Convention de Bruxelles du 27.9.1968, Paris 1985 90;

voir LEREBOURS/PIGEONNIERE cités par le rapport JENARD, JOCE 1979, C 59 1/36 note 2.

KROPHOLLER, Europaisches Zivilprozessrecht, 4e éd. Heidelberg 1993 180.

Vollstreckungsgegenklage, 767 ZPO; les griefs qui y sont invoqués sont analogues aux objections que le débiteur peut faire valoir à l'encontre d'une requête de main- levée définitive (art. 81 LP), qui tombe dès lors dans le champ de l'art. 16 ch. 5 CL.

CJCE AS Autoteile Service GmbH/Malhé, 4 juillet 1985, Rev crit 1986 142.

(12)

Dans une autre décision, la Cour a dit pour droit que l'action paulienne du droit français, bien que préparant une exécution forcée ultérieure, ne visait pas à faire trancher une contestation relative au

«recours à la force, à la contrainte ou à la dépossession de biens meubles et immeubles en vue d'assurer la mise en œuvre matérielle des décisions, des actes» et, dès lors n'entrait pas dans le champ d'application de l'article 16 ch. 535.

Le Message du Conseil fédéral range la «Compétence pour établir un commandement de payer» dans l'article 16 ch. 5 sans autre expli- cation36. La majorité des auteurs suisses ont admis, souvent implici- tement, la même solution37. Stoffel, en particulier, estime que le lien entre commandement de payer et exécution forcée impose l'applica- tion de l'article 16 ch. 538. Certains se sont penchés sur un problème connexe, l'exécutabilité d'un commandement de payer suisse à l'étran- ger, pour y répondre par la négative39• Meier, en revanche, a admis la possibilité d'une exécution du commandement de payer à l'étranger4°

et considéré qu'en raison de sa fonction de titre exécutoire en cas de non-opposition, le commandement de payer émis au for du séquestre était incompatible avec le système de compétence exhaustif de la CL41.

Dans l'arrêt commenté, le Tribunal fédéral ne suit pas la voie de l'article 16 ch. 5. Il se borne à indiquer que la solution qu'il adopte (admissibilité du commandement de payer au for du séquestre) ne découle pas de la qualification du commandement de payer comme instrument de l'exécution forcée «dont il ne s'agit pas (encore)»

(120 III 92/93). Il semble bien que, ce faisant, le TF comprend l'article J 6 ch. 5 - sans même le mentionner - comme visant uniquement

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CJCE Reichert/Dresdner Bank, 26 mars 1992, Rev cri! 1992 714/719.

FF 199011269 para. 226.6.

Expressément, STOFFEL, précité note 1, 386; STAEHELIN, précité note 1, 270;

VOLKEN, Rechtsprechung zum Lugano-Uebereinkommen (1993/1994), RSDIE 1995 17/27, qui ignore l'avis de MEIER, Besondere Vollstreckungstitel, précité note 1, 206-209.

STOFFEL, précité note 1, 383-366; il récuse en particulier l'analogie faite avec le Mahnbescheid allemand et la jurisprudence CJCE Klomps/Michel, 16 juin 1961, Revcrit 1961 726.

PATOCCHI, La reconnaissance et l'exécution des jugements étrangers selon la Convention de Lugano du 16 septembre 1988, in Gillard (éd.), L'espace judiciaire européen, Lausanne 1992 106-107; KREN, Anerkennbare und vollstreckbare Titel nach IPR-Gesetz und Lugano-Uebereinkommen, in Beitrlige zum schweizerischen und internationalen Zivilprozessrecht, Festschrift Vogel, Fribourg 1991 442;

STOFFEL, précité note 1, 385.

MEIER, in Schwander (éd.) précité note 1, 21 O.

MEIER, in Schwander (éd.), précité note 1, 208.

(13)

l'exécution forcée après la décision au fond. Cela paraît juste. Il découle des tennes mêmes du chiffre 5 que les procédures d'exécution visées supposent l'existence d'une décision sujette à exécution42. Elle ne saurait donc inclure des procédures, telle la poursuite préalable, qui tendent précisément à l'obtention d'une telle décision. Le rapport d'expert et les exemples cités plus haut (notes 30 à 32) c°ônfinnent

cette conclusion. \

(c) Le commandement de payer peut-il être qualifié de mesure provisionnelle, ou de partie intégrante d'une mesure provisionnelle, comme le fait le Tribunal fédéral? L'article 24 CL prévoit, d'une part, que Je juge du fond est toujours compétent pour ordonner des mesures provisionnelles et que, d'autre part, le droit national des Etats contrac- tants peut ajouter d'autres fors en la matière43• Pour le TF, le for de la poursuite serait donc un tel for supplémentaire du droit national.

Mais la poursuite en validation de séquestre répond-elle à la notion (autonome) de mesures provisionnelles au sens de l'article 24 CL?

Pour le séquestre lui-même, la réponse est sans nul doute affinna- tive44. Elle est beaucoup moins certaine pour la poursuite en validation de séquestre. Selon la Cour de justice, sont des mesures provisoires au sens de l'article 24 celles qui sont «destinées à maintenir une situation de fait ou de droit afin de sauvegarder des droits dont la recon- naissance est par ailleurs demandée au juge du fond»45Quant au régime spécial de l'article 24, il a été conçu - selon la Cour - pour tenir compte de la «circonspection particulière et de la connaissance approfondie des circonstances concrètes qu'exigent l'octroi de telles mesures ainsi que la déte.rmination des modalités et conditions destinées à garantir le caractère provisoire et conservatoire de celles- ci» 46.

Ces considérations qui justifient le régime de l'article 24 ne s'appli- quent nullement au commandement de payer. Par ailleurs, il est vrai que la poursuite maintient le séquestre. Mais ne fait-elle pas plus? A savoir ouvrir la voie de la mainlevée47 et, en cas de non-opposition,

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STOFFEL, précité note 1, 368; SCHWANDER, précité note 1, 92.

GAUDEMET-TALLON, précitée note 15, 185-186.

JAMETil-GREINER, Der vorsorgliche Rechtsschutz im intemationalen Verhàltnis, 76 ZbJV 1994 649/667-668; MEIER in Schwander (éd.). précité note 1, 160;

STOFFEL, précité note 1, 391.

CJCE Reichert/Dresdner Bank, précité note 35, 718.

CJCE Reichert/Oresdner Bank, précité note 35, 719 se référant à Oenilauler/

Couche! Frères, 21 mai 1980, Rev crit 1980 801.

Ainsi STOFFEL, précité note 1, 383.

(14)

créer un titre exécutoire, qui permettra la réalisation des biens séquestrés?

(d) Si le commandement de payer ne relève ni de l'exécution forcée, ni des mesures provisionnelles, de quoi s'agit-il alors? Il y a deux possibilités: d'une part, il pourrait s'agir d'un Erkenntnisverfahren soumis aux règles de compétence des articles 2 ss. (à l'exclusion de ceJles des art. 16 ch. 5 et 24); d'autre part, il pourrait s'agir d'un instrument juridique qui n'est pas visé par la CL. Dans le premier cas, la poursuite ne serait possible que s'il existe une compétence

q_,

au for de la poursuite. Dans Je second cas, la poursuite serait admissible même en l'absence d'une compétence CL.

Le choix entre ces deux possibilités n'est pas aisé. En faveur de la première, on invoquera le fait que les objectifs de sécurité et de prévi- sibilité de la CL sont compromis par la création d'un titre exécutoire à un for non prévu par la convention. A quoi 'on pourrait objecter qu'en droit interne les effets du titre sont limités dans Je temps et dans J'espace.

L'objection de la limitation dans Je temps n'est pas fondée. En effet, la CL permet d'exécuter des décisions provisoires48. Il semble dès lors normal qu'elle cherche à régler la compétence des juridictions rendant de telles décisions.

L'argument de la limitation dans l'espace est plus délicat. Il revient à dire que, dès lors que le commandement de payer n'est pas exécutable à l'étranger selon la CL, ce que la doctrine majoritaire soutient49, la compétence pour l'établir échappe nécessairement à la convention.

Nous ne pensons pas que cet argument est fondé. D'une part, la CL régit bien la compétence pour toutes les mesures provisionnelles50,

alors que seules les mesures prononcées après une procédure contra- dictoire sont exécutables dans un autre Etat contractant51 . D'autre part, la création d'un titre exécutoire dans un Etat contractant en l'absence d'une compétence CL à l'encontre d'une personne domiciliée dans un autre Etat contractant n'est-eJle pas contraire aux objectifs de prévisibilité et de sécurité ainsi que d'égalité des droits des justiciables que poursuit la CL, même si les effets du titre sont limités au territoire

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CJCE de Cavel/de Cavel, 6 mars 1980, Rev crit 1980 621; à condition qu'elles aient été rendues en procédure contradictoire, CJCE Denilauler/Couchet, précité note 46.

Cl. note39.

Art. 24; même si c'est par renvoi partiel au droit national, il n'en reste pas moins que les fors internes subsistent grâce à la «délégation• de l'art. 24.

Art. 27 ch. 2; CJCE Denilauler/Couchet, précité note 46.

(15)

de L'Etat de sa création52? Est-il conforme à ces objectifs que les biens d'une personne domiciliée en Italie situés en Suisse puissent y être réalisés sans qu'une procédure à un for CL soit mise en œuvre, alors que les avoirs de la personne domiciliée en Suisse et saisis en Italie ne le seront pas? Mais, répondent certains53, l'italien pourra toujours intenter l'action en répétition de l'indu. Belle consolation! D'une part, c'est faire fi des réalités pratiques; d'autre part, cela revient à avancer à nouveau le caractère provisoire, dont nous avons vu qu'il n'était pas déterminant.

En faveur de la seconde possibilité (poursuite préalable échappant complètement à la CL), on alléguera que le commandement de payer émane d'une autorité administrative, alors que la CL semble viser des procédures juridictionnelles uniquement. Ainsi l'article premier précise que la convention s'applique «quelle que soit la nature de la juridiction». De manière similaire, les règles sur la reconnaissance et l'exécution des jugements vise des décisions rendues par une

«juridiction d'un Etat contractant» (art. 25)54. Il faut entendre par là un organe indépendant des autres organes de l'Etat55, dont la procédure respecte le principe du contradictoire et les droits de la défense56• Or,

!'Office des poursuites établit le commandement de payer sans audition du débiteur, qui n'aura l'occasion de se faire entendre qu'après, par le biais de l'opposition.

5) Conclusion sur la première question

Que conclure? L'analyse qui précède met à jour des arguments sérieux dans les deux sens. Face à cette situation, il ne nous intéresse pas tant de donner la priorité à un argument, plutôt qu'à un autre, d'autant moins qu'en l'état l'arrêt commenté a tranché. En revanche, au terme de l'examen qui précède, il nous semble important de retenir la

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De cet avis, MEIER, in Schwander (éd.) précité note 1, 204.

VOLKEN, précité note 1, 402 et id., Rechtsprechung zum Lugano-Ueberein·

kommen (1993/1994), RSDIE 1995 17/34.

Le rapport d'expert reprend uniquement les termes de la CB et précise qu'il peut s'agir d'une juridiction administrative saisie d'un litige civil ou commercial, d'un tribunal pénal tranchant des conclusions civiles, d'une procédure contentieuse comme d'une procédure gracieuse; JOCE 1979 C 59 1/9 et 43.

Qu'il s'agisse d'un tribunal ou non semble secondaire dans la mesure où les critères d'indépendance et de respect du droit d'être entendus sont remplis. Le Vollstreckungsbescheid allemand (para. 699 ZPO) soumis à la CL (compétence et exécution), est émis par le Rechtsplleger, ou greffier, non par le tribunal lui-même.

Il est néanmoins soumis à la CL, parce que la procédure respecte les droits de la défense; ci-<lessous ch. 111.3.

GAUDEMET-TALLON, précitée note 5, 217; KREN, précitée note 38, 442;

KROPHOLLER, précité note 32, 256.

(16)

difficulté de concilier des réglementations, CL et LP, qui ne sont pas conçues pour coexister. Nous reviendrons sur cette difficulté plus concrètement dans le cadre de la mainlevée (ch. IIl.4 ci-dessous).

Ill. SECONDE QUESTION MAINLEVÉE PROVISOIRE ETCL

Passons à la seconde question, plus controversée57, dont la réponse doit s'inspirer de considérations analogues à celles ayant guidé l'examen du commandement de payer.

Dans l'arrêt commenté, le TF n'avait pas à résoudre cette question. A-t-il quand même donné un indice en précisant que la détermination de la compétence pour la poursuite ne préjugeait pas de la compétence du juge «der über den Bestand der Arrest-bzw. Betreibungsforderung zu befinden hat» (120 III 92/94)?. Nous ne Je pensons pas. Dans la classification du droit des poursuites, que Je TF avait probablement à l'esprit plutôt qu'une qualification autonome selon la CL, seul Je juge de l'action en reconnaissance ou libération de dette tranche Je

«Bestand», l'existence, de la créance, à l'exclusion du juge de la main- levée. L'interrogation reste donc entière.

Les développements qui précèdent concernant la Convention franco-suisse (ch. II. l ci-dessus) ainsi que le système et les objectifs de la CL (ch. ll.3 ci-dessus) s'appliquent également à la mainlevée provisoire. En outre, il faut examiner la fonction de la mainlevée provisoire (ch. III.! ci-dessous), la jurisprudence cantonale en matière de for de la mainlevée et de CL (ch. III.2 ci-dessous), quelques éléments de droit comparé (ch. IIl.3 ci-dessous), pour passer ensuite au lien existant entre mainlevée provisoire et libération de dette (ch. III.4 ci-dessous), avant de qualifier la mainlevée sur cette base et de conclure (ch. III.5 ci-dessous).

1) Fonctions de la mainlevée provisoire

La procédure de mainlevée provisoire est qualifiée d'incident de la poursuite, contrairement aux actions en libération et reconnaissance de

57 Pour la soumission de la mainlevée provisoire aux compétences ordinaires CL:

SCHWANDER, précité note 1, 92-93; MEIER, in Schwander (éd.) précité note 1, 202-207; STOFFEL, précité note 1, 379-381; WALTER, précité note 1, 316 et id., Internationales Zivilprozessrecht der Schweiz, Berne 1995 199; STAEHELIN, précité note 1, 274-275; DUTOIT, précité note 14, 17. Contre: VOLKEN, précité note 1, 398 SS. et RSDIE 1995 28-29; VOUILLOZ, RSDIE, précité note 1, 58 ss.;

WALDER, précité note 1, 154-155; AMMON, précité note 2, 417.

(17)

dette, qui relèvent du droit matériel58. Il s'agit d'une procédure judi- ciaire, contradictoire, qui a pour but d'annuler les effets de l'opposition sur la base d'un titre qui rend la créance vraisemblable. Les moyens de preuve et de défense sont limités, de même que la cognition du juge, qui n'examine pas si la créance est fondée, mais uniquement si le titre remplit les conditions légales de la mainlevée59 . La décision de mainlevée n'a pas force de chose jugée; elle n'a d'effet que pour la poursuite en cours60• La mainlevée qui a été accordée peut être remise en cause par l'action en libération de dette (ou, à défaut, par l'action en répétition de l'indu), la mainlevée qui a été refusée, par l'action en reconnaissance de dette61Cette remise en cause implique une inversion des rôles des parties, le débiteur devenant demandeur et le créancier défendeur.

Comme le commandement de payer - mais plus fréquemment en pratique - la décision de mainlevée provisoire constitue un titre exé- cutoire chaque fois que le débiteur n'intente pas d'action en libération de dette. Comme le commandement de payer resté sans opposition, ce titre exécutoire est limité dans le temps et dans l'espace (ch. 11.4 ci- dessus). Il se distingue cependant du commandement de payer par le fait qu'il° est le résultat d'une procédure contradictoire, au terme de laquelle, après un examen limité, le juge statue sur un droit litigieux.

Certains ont, de ce fait, qualifié la mainlevée provisoire de «substitut de jugement»62.

En résumé, parmi ces caractéristiques, il en est trois qui importeront pour la suite de l'analyse: la création d'un titre exécutoire, la nature de

«substitut de j,ugement» et la fonction de répartition des rôles dans le procès ultérieur.

2) Jurisprudence cantonale

a) Citons tout d'abord quatre arrêts de la Cour de justice de Genève du 17 août 1993 qui traitent du for de la mainlevée provisoire dans le champ d'application de la CL. Trois de ces arrêts visent la validation de séquestres, fondés sur l'article 271 ch. 2 pour l'un et ch. 4 pour les

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AMMON, précité note 2, 145.

Not. STOFFEL, La mainlevée d'opposition - modèle d'une .procédure simple et rapide .. ? Mélanges Centenaire de la LP, Zurich 1989 239/241 ss.

AMMON, précité note 2, 132; voir aussi ATF 120 la 82/84.

STOFFEL, précité note 59.

Décision du Tribunal cantonal valaisan du 21 octobre 1994, RSDIE 1995 23/24.

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deux autres63, contre des débiteurs domiciliés en France. Le dernier arrêt a trait à une poursuite en réalisation d'un gage sur un immeuble situé en Suisse contre un débiteur domicilié en France64.

Après une analyse fouillée, la Cour conclut que la compétence pour la mainlevée provisoire est régie par la CL. En particulier, elle écarte l'application de l'article 16 ch. 5, tout d'abord parce qu'en vertu de la jurisprudence de la CJCE cette disposition doit être interprétée de manière autonome et restrictive, ensuite parce que, s'agissant d'une procédure par laquelle un juge statue sur un droit litigieux, la main- levée ne vise pas («au moins directement») l'exécution forcée et, enfin, parce que la solution contraire reviendrait à vider l'article 3 al. 2 CL de sa substance, le débiteur condamné en mainlevée ne pouvant agir au fond à son domicile étranger en raison de l'article 2.

Sur cette base, dans trois des arrêts, la compétence pour la main- levée est admise, car le for de la poursuite ou du séquestre coïncide avec des compétences prévues par la CL, en particulier les articles 16 ch. 1 (immeuble situé à Genève pour la réalisation du gage immobi- lier) et 5 ch. 1 (Genève lieu de paiement pour le remboursement de prêts). Une éventuelle clause d'élection de for en faveur des tribunaux genevois, dont l'existence n'était pas démontrée en l'espèce, aurait aussi pu fonder pour la mainlevée une coPlpétence conforme à la CL.

En revanche, dans un des cas aucune compétence au sens de la CL n'était établie à Genève, de telle sorte que la Cour de justice confirma la décision d'incompétence rendue par le Tribunal de première instance.

b) Un arrêt du Tribunal cantonal du Valais du 21 octobre 1994 arrive à la même conclusion dans le cadre de la validation d'un séquestre contre une personne domiciliée en France (RSDIE 1995 23).

Pour l'instance valaisanne, l'article 16 ch. 5 CL est inapplicable, la décision de mainlevée constituant un «substitut de jugement» (RSDIE 1995 23124). Dès lors, la compétence est régie par les articles 2 ss. CL, en l'occurrence l'article 5 ch. 1.

c) Même solution dans un jugement de Bâle-Campagne65, qui se réfère au système exhaustif de compétences directes qu'instaure la CL et considère qu'en raison de l'analogie avec le Mahnbescheid allemand et l'injonction de payer de droit français (ci-dessous ch. IIl.3), du

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La LP révisée limitera les séquestres contre les non-domiciliés, l'art. 271 ch. 4 modifié requérant - outre l'absence de domicile - que •la créance ait un lien suffisant avec la Suisse• (FF 1994 977/1038).

Trois de ces arrêts sont publiés dans VOLKEN, Rechtsprechung zum Lugano- Uebereinkommen (1993), RSDIE 1994 393/395 ss.

Bezirkgsgericht Arlesheim 31mai1994, BJM 1994 317 et RSDIE 1995 42.

(19)

caractère contradictoire de la procédure et de l'existence d'un examen prima facie, la mainlevée provisoire relève de l'Erkenntnisverfahren (ci-dessus ch. II.4).

d) Mentionnons enfin un arrêt du Tribunal cantonal vaudois du 5 décembre 1994 (RSDIE 1995 29). Un bailleur domicilié au Canada était en litige avec un locataire domicilié dans le canton de Vaud à propos du paiement du loyer d'un appartement situé à Paris. Il requiert la poursuite à Lausanne. Suit la séquence classique: commandement de payer - opposition - mainlevée provisoire. Le locataire intente alors une action en libération de dette au for de la poursuite (art. 83 al. 2 LP) et Je bailleur soulève l'incompétence.

Nonobstant l'article 16 ch. 1 CL qui impose le for de situation de l'immeuble, le Tribunal cantonal rejette l'exception d'incompétence. Il estime qu'en raison du lien étroit entre l'action en libération de dette et la mainlevée, il serait «inéquitable d'éconduire l'intimée», car on ignore si Je juge français accueillera une éventuelle action en libéra- tion de dette, qui lui est inconnue (RSDIE 1995 29/ 32).

3) Eléments de droit comparé

Le Mahnverfahren du droit allemand remplit le même rôle que, dans l'ordre juridique suisse, la séquence réquisition de poursuite - commandement de payer - mainlevée provisoire - libération de dette (sur le déroulement précis du Mahnverfahren66). Sans examen au fond, le Rechtspfleger, auxiliaire de la juridiction, notifie au débiteur, tout d'abord, un Mahnbescheid ou commandement de payer, puis un Vollstreckungsbescheid ou mandat d'exécution. A chacune de ces

66 Le créancier requiert auprès du tribunal l'émission d'un commandement de payer

(Mahnbescheid), qui a lieu sans examen au fond ni audition du débiteur (paras.

688 et 690 ss. ZPO). Dans les deux semaines de la notification, le débiteur peut faire opposition (Widerspruch; paras. 694 et 692 1 ch. 3 ZPO). S'il fait opposition, la cause est transférée au tribunal compétent au fond et une action ordinaire s'ensuit (paras. 696-698 ZPO).

En l'absence d'opposition, le créancier peut requérir un mandat d'exécution (Vollstreckungsbescheid; para. 699 ZPO). Faute de requête dans les six mois, le commandement de payer perd toute validité (para. 702 ZPO). Le mandat d'exécu·

lion est décerné sans examen au fond ni audition du débiteur (para. 699 ZPO). Le débiteur a alors à nouveau la possibilité de s'opposer au mandat d'exécution, cette fois par la voie de l'Einspruch (para. 700 Ill ZPO). S'il y recourt, la cause est trans·

férée au tribunal compétent au fond et une procédure ordinaire est ainsi instituée (para. 700 Ill ZPO). le mandat d'exécution est assimilé à un jugement par défaut, qui acquiert l'autorité de la chose jugée à l'expiration du délai non utilisé d'Eins·

pruch para. 700 1 ZPO). Il permet de procéder à l'exécution forcée (para. 794 1 ch.

4 ZPO). Mahn· et Vollstreckungsbescheid sont tous deux émis par le Rechts- pfleger (para. 20 ch. 1 Rechtspflegegesetz) du tribunal de première instance (Amtsgericht, para. 689 1), sorte d'auxiliaire de la juridiction.

(20)

notifications, le débiteur peut faire opposition, ce qui transforme de plein droit le Mahnverfahren en procédure ordinaire au fond.

Le Mahnverfahren est soumis aux règles de compétence des Conventions de Bruxelles et Lugano67. Lorsque le défendeur n'est pas domicilié en Allemagne, ce n'est que s'il existe une compétence au sens des articles 5 ss. des Conventions de Bruxelles ou Lugano que le Mahnverfahren pourra avoir lieu68.

Le droit français connaît une procédure similaire, celle de l'injonc- tion de payer (art. 1405-1425 NCPC)69 . Sur requête du créancier et après un examen sommaire sur titre, le juge rend une ordonnance portant injonction de payer (art. 1409). Si le débiteur y fait opposition, la procédure se poursuit par la voie ordinaire (art. 1416 ss.). A défaut d'opposition, l'ordonnance est déclarée exécutoire sur requête et produit les effets d'un jugement contradictoire (art. 1422).

Cette procédure respecte en principe les Conventions de Bruxelles et Lugano puisqu'elle ne peut être mise en œuvre qu'au domicile du défendeur (art. 1406 al. 2).

Les droits italien, belge, néerlandais, anglais connaissent tous des procédures analogues comprenant un examen sommaire et la possibi- lité pour le débiteur d'obtenir une résolution en procédure ordinaire par le simple effet de l'opposition7o.

Les convergences entre ces procédures étrangères, particulièrement françaises et allemandes, d'une part, et la procédure suisse, d'autre part, permettent-elles de tirer des déductions sur la compétence en matière de mainlevée provisoire ou, au contraire, les divergences interdisent-elles toute analogie? Au-delà des détails techniques, on distingue les convergences et divergences suivantes:

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Plus précisément: le Mahnverfahren est en principe de la compétence du for géné- ral du demandeur (para. 689 Il ZPO) (b), alors que l'action ordinaire déclenchée par l'opposition (Wider- ou Einspruch) est du ressort du tribunal ordinairement compétent, en général au domicile du défendeur. Toutefois, lorsque le défendeur est domicilié dans un Etat membre des Conventions de Bruxelles et Lugano, c'est l'une de celles-ci et non la ZPO qui régit la compétence non seulement pour l'action au fond, mais aussi pour le Mahnverfahren. Voir not. BUSL, Deutsches

«internationales» Mahnvertahren - para. 688 If. ZPO und EUGVü, IPAax 1986 272; KAOPHOLLEA, précité note 32, 71.

Pour ce cas, la loi d'application de la convention a not. étendu le délai de Wider- spruch à un mois et prévu que, lorsque la compétence pour le Mahnvertahren résulte de l'art. 17 de la convention, le créancier doit apporter la preuve de l'élec- tion de for (para. 36 Gesetz zur Ausführung des Uebereinkommens vom 27.

September 1968 über die gerichtliche Zustandigkeit und die Vollstreckung gericht- licher Entscheidungen in Zivil- und Handelssachen du 29 juillet 1972).

MIGUET, Jurisclasseur procédure civile, Procédures particulières, Procédure d'injonction de payer, fasc. 990; voir aussi BEL TZ, Unterschiede des Mahnver- fahrens im deutschen und franzbsischen Recht. AIW 1992 536.

STOFFEL, précité note 1, 3n avec références.

(21)

a) Convergences

absence d'examen au fond (droit allemand) ou examen limité à un titre (droits suisse et français);

création d'un titre exécutoire en cas de non-contestation. En droit français, si le débiteur ne conteste pas l'injonction, le créancier peut requérir l'apposition de la clause exécutoire. L'injonction est alors assimilée à un jugement contradictoire non soumis aux voies de droit ordinaire, sauf le recours en cassation (art. 1422 NCPC).

En droit allemand, si le débiteur ne s'oppose pas aux Mahn- et Vollstreckungsbescheide, ce dernier devient exécutoire et est assimilé à un jugement par défaut déclaré exécutoire à titre provi- soire (para. 700 I et 794 I ch. 4 ZPO). En droit suisse, en l'absence d'action en libération de dette, la mainlevée provisoire devient définitive pour la poursuite en cours (art. 83 al. 3 LP).

Il est évident que les titres exécutoires français et allemands sont plus «forts» que la mainlevée provisoire. Ils revêtent l'autorité de chose jugée; ils ne peuvent donc plus être remis en cause dans une action ultérieure. Ils pourront être exécutés à !' étranger71, ce que la CJCE a eu l'occasion de confirmer concernant le Vollstreckungs- bescheid allemand72. Il n'est pas certain, mais pas exclu non plus, qu'il en aille de même pour la décision de mainlevée73.

b) Divergences

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74

La première divergence correspond à la dernière convergence placée sous un autre éclairage. En droit interne, les décisions fran- çaises et allemandes sont assimilées à des jugements, ce qui n'est pas le cas du prononcé de la mainlevée;

Les procédures allemande et française ne sont pas intégrées au droit de l'exécution forcée, alors que la mainlevée l'est74Cette différence nous semble sans conséquence pour notre propos. En droit comparé, des institutions aux fonctions analogues sont souvent rangées dans des catégories différentes;

Le mandat d'exécution est expressément cité à l'art. 25 CL; le Vollstreckungsbefehl (aujourd'hui Vollstreckungsbescheid) allemand l'était déjà dans la Convention germano-suisse; voir en part. ZR 1990 30; ATF 86 1 33; sur le mandat d'exécution autrichien également exécuté en Suisse, Kantonsgericht St. Gall, 2 juin 1988, RSJ 1990 104; avis de !'Office fédéral de la justice, JAAC 1988 134.

CJCE Klomps/Michel, 16 juin 1981, Revcrit 1981 726.

En faveur, not. MEIER, précité note 1, 205-206; contre, PATOCCHI, précité note 39, 106-107.

STOFFEL, précité note 1, 379.

(22)

En cas de contestation, les procédures allemande et française basculent dans la procédure ordinaire. Il n'y a pas de dualité main- levée - libération de dette comme en droit suisse. Cette constata- tion illustre bien le lien étroit entre mainlevée et 1 ibération de dette, si étroit que, dans d'autres ordres juridiques, ces deux procédures forment une unité.

Que tirer de cette comparaison? On peut hésiter. Nous tendrions à considérer que - malgré des différences de degré - la convergence ou caractéristique commune de titre exécutoire, support du rôle que jouent ces procédures dans l'organisation sociale, l'emporte sur les divergences75Cela justifie donc de s'inspirer du droit comparé pour déterminer le for de la mainlevée.

4) Lien entre mainlevée provisoire et libération de dette L'action en libération de dette est le corollaire de la mainlevée provisoire. C'est parce qu'elle existe que l'on se contente du caractère

«approximatif» de la procédure de mainlevée76.

L'action en libération de dette a pour objet le fondement matériel de la créance. Pour cette raison, le Message du Conseil fédéral, qui estime que la mainlevée provisoire relève de l'article 16 ch. 5 CL, ainsi que les auteurs qui partagent cet avis, soumettent l'action en libé- ration de dette aux règles de compétence des articles 2 ss. CL (à l'exclusion bien sûr des art. 16-5 et 24)77.

Si l'on suivait cette position qu'en résulterait-il en pratique? Prenons un exemple: un créancier anglais séquestre à Genève les avoirs d'un débiteur domicilié en France, requiert la poursuite et, le commande- ment de payer ayant été frappé d'opposition, demande la mainlevée provisoire.

Si la mainlevée est prononcée, de par l'inversion des rôles qu'elle provoque, le débiteur devra agir en libération de dette devant le juge

75

76 77

Les objections résultant de la limitation à la poursuite en cours ont été traitées dans le cadre du commandement de payer, ch. 11.5. ci-dessus. STOFFEL, précité note 1, 379, conclut également que ces procédures étrangères ne se distinguent pas fondamentalement de la mainlevée.

STOFFEL, Mélanges Centenaire LP, précité note 59, 246.

Message, précité note 36, ch. 226.6; VOLKEN, précité note 1, 401 et 405;

WALDER, précité note 1, 154; VOUILLOZ, RSDIE, précité note 1, 59; id., Revue valaisanne de jurisprudence, précité note 1, 344. A noter qu'en matière Internatio- nale hors champ CL, la compétence ne saurait être régie par l'art. 83 al. 2 LP, l'art. 1 al. 1 a LDIP ayant exclu tous fors prévus par le droit cantonal et tous autres fors fédéraux; voir WALDER, Einführung in das Internationale Zivilprozessrecht der Schweiz, Zurich 1989, 183-184, qui admet la compétence du for de la poursuite sur la base de l'art. 3 LDIP.

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