COURS DE PROBABILITES
Cycle Pr´ eparatoire Int´ egr´ e ` a l’EILCO Semestre 2
N. CHENAVIER
Table des mati` eres
1 Quelques notions pour les probabilit´ es 5
1.1 Th´ eorie des ensembles . . . . 5
1.2 D´ enombrement . . . . 6
1.3 D´ enombrabilit´ e . . . . 7
2 Ev´ enements 9 2.1 Tribus, ´ ev´ enements, probabilit´ es . . . . 9
2.2 Ev´ enements ind´ ependants . . . . 11
2.3 Probabilit´ es conditionnelles . . . . 12
3 Variables al´ eatoires discr` etes 15 3.1 Loi d’une variable al´ eatoire discr` ete . . . . 15
3.2 Lois usuelles . . . . 17
3.3 Ind´ ependance de variables al´ eatoires discr` etes . . . . 19
3.4 Esp´ erance, variance d’une variable al´ eatoire discr` ete . . . . 20
4 Variables al´ eatoires ` a densit´ e 23 4.1 Loi, densit´ e de probabilit´ e . . . . 23
4.2 Lois usuelles . . . . 25
4.3 Ind´ ependance de variables al´ eatoires ` a densit´ e . . . . 26
4.4 Esp´ erance, variance . . . . 26
5 Th´ eor` emes limites 29 5.1 Deux modes de convergence . . . . 29
5.2 Loi des grands nombres . . . . 30
5.3 Th´ eor` eme central limite . . . . 30
TABLE DES MATI ` ERES
Chapitre 1
Quelques notions pour les probabilit´ es
Sommaire
1.1 Th´ eorie des ensembles . . . . 5 1.2 D´ enombrement . . . . 6 1.3 D´ enombrabilit´ e . . . . 7
1.1 Th´ eorie des ensembles
R´ eunion, intersection, produit, compl´ ementaire
D´ efinition 1.1.1. Soient A et B deux sous-ensembles d’un ensemble E.
• On appelle r´ eunion de A et de B l’ensemble suivant : A ∪ B = {x : x ∈ A ou x ∈ B}.
• On appelle intersection de A et de B l’ensemble suivant : A ∩ B = {x : x ∈ A et x ∈ B}.
Exemple 1.1.2. Prenons A = [1, 3] et B =]2, 4]. Alors A ∪ B = [1, 4] et A ∩ B =]2, 3].
D´ efinition 1.1.3. Soit (A
i)
i∈Iune famille de sous-ensembles d’un ensemble E.
• On appelle r´ eunion des A
i, i ∈ I, l’ensemble suivant : [
i∈I
A
i= {x ∈ E : ∃i ∈ I, x ∈ A
i} .
• On appelle intersection des A
i, i ∈ I, l’ensemble suivant :
\
i∈I
A
i= {x ∈ E : ∀i ∈ I, x ∈ A
i} .
D´ efinition 1.1.4. Soient E un ensemble et A un sous-ensemble de E. On appelle compl´ ementaire de A dans E l’ensemble suivant :
A
c= {x ∈ E : x 6∈ A}.
CHAPITRE 1. QUELQUES NOTIONS POUR LES PROBABILIT ´ ES Exemple 1.1.5. Prenons E = R et A = [0, 1]. Alors A
c=] − ∞, 0[∪]1, +∞[.
D´ efinition 1.1.6. Soient A et B deux ensembles. On appelle produit cart´ esien de A et de B l’ensemble suivant :
A × B = {(x, y) : x ∈ A et y ∈ B}.
Exemple 1.1.7. Prenons A = [0, 1] et B = [2, 3]. Alors A × B = {(x, y) ∈ R
2: 0 ≤ x ≤ 1 et 2 ≤ y ≤ 3}. En particulier, A × B est un rectangle.
Notation. Soit E un ensemble. On d´ esigne par P(E) l’ensemble des parties de E (c’est-` a-dire de ses sous-ensembles). En d’autres termes,
P (E) = {A : A ⊂ E}.
Images directes et r´ eciproques
D´ efinition 1.1.8. Soit f une application de E vers F et A un sous-ensemble de E. On appelle image directe de l’ensemble A par f l’ensemble, not´ e f (A), des images des ´ el´ ements de A par f . En d’autres termes,
f (A) = {f (x) : x ∈ A}.
Exemple 1.1.9. Prenons E = R, f : R → R, x 7→ x
2et A = {−2, 1, 2, 3}. Alors f (A) = {1, 4, 9}.
D´ efinition 1.1.10. Soit f une application de E vers F et B un sous-ensemble de F. On appelle image r´ eciproque de l’ensemble B par f l’ensemble, not´ e f
−1(B), des ant´ ec´ edants des ´ el´ ements de B par f . En d’autres termes
f
−1(B) = {x ∈ E : f (x) ∈ B}.
Exemple 1.1.11. Prenons E = R, f : R → R, x 7→ 2x et B = {−2, 3, 8}. Alors f
−1(B) = {−1,
32, 4}.
1.2 D´ enombrement
D´ efinition 1.2.1. Soit E un ensemble ayant un nombre fini d’´ el´ ements. On appelle cardinal de E le nombre d’´ el´ ements de E. On note ce nombre |E|.
Proposition 1.2.2. (Cardinal d’une r´ eunion, intersection) Soient A et B deux ensembles ayant un nombre fini d’´ el´ ements. Alors |A ∪ B| = |A| + |B| − |A ∩ B|.
Proposition 1.2.3. Soit (A
n) une suite de sous-ensembles deux ` a deux disjoints (cad A
n∩A
m=
∅ d` es lors que n 6= m) d’un ensemble E. Alors
n
G
k=1
A
k=
n
X
k=1
|A
k|.
Proposition 1.2.4. (Cardinal d’un produit) Soient A et B deux ensembles ayant un nombre
fini d’´ el´ ements. Alors |A × B| = |A| × |B|.
CHAPITRE 1. QUELQUES NOTIONS POUR LES PROBABILIT ´ ES
Proposition 1.2.5. (Cardinal du compl´ ementaire) Si E est un ensemble ayant un nombre fini d’´ el´ ements, alors il en est de mˆ eme pour tout sous-ensemble A. De plus, |A
c| = |E| − |A|.
Proposition 1.2.6. (Cardinal de l’ensemble des parties) Soit E un ensemble ayant un nombre fini d’´ el´ ements. Alors |P(E)| = 2
|E|.
Exemple 1.2.7. Prenons E = {a, b, c}. Alors P (E) = {∅, {a}, {b}, {c}, {a, b}, {a, c}, {b, c}, {a, b, c}}.
De plus |P(E)| = 8 = 2
3= 2
|E|.
D´ efinition 1.2.8. Soit n un entier naturel et 0 ≤ k ≤ n. On appelle coefficient binomial de k parmi n le nombre entier suivant :
n k
= n!
k!(n − k)! . La quantit´ e
nkest ´ egal au nombre de sous-ensembles ` a k ´ el´ ements dans un ensemble ` a n
´
el´ ements.
Exemple 1.2.9. Prenons un ensemble ` a n = 4 ´ el´ ements, disons E = {a, b, c, d}. Le nombre de sous-ensembles ` a k = 2 ´ el´ ements (cad le nombre de pairs) de E est ´ egal ` a
42=
2!2!4!=
4×32= 6.
Ces sous-ensembles sont {a, b}, {a, c}, {a, d}, {b, c}, {b, d} et {c, d}.
Le coefficient binomial intervient naturellement dans des probl` emes de d´ enombrement comme en t´ emoigne l’exemple ci-dessous.
Exemple 1.2.10. On pr´ el` eve simultan´ ement trois boules dans une urne contenant quatre boules rouges, trois boules vertes et une boule noire.
• Le nombre de possibilit´ es de tirer trois boules rouges est ´ egal ` a
43= 4.
• Le nombre de tirages avec deux boules rouges et une boule verte est ´ egale ` a
42×
31= 6 × 3 = 18.
1.3 D´ enombrabilit´ e
D´ efinition 1.3.1. Soit E un ensemble. On dit que E est :
• d´ enombrable s’il est en bijection avec N, cad s’il existe une application bijective φ : N → E ;
• au plus d´ enombrable s’il est fini ou d´ enombrable.
Informellement, un ensemble est d´ enombrable s’il est ”suffisamment petit” pour que l’on puisse ”num´ eroter” ces ´ el´ ements. Plus pr´ ecis´ ement, un ensemble est d´ enombrable s’il peut s’´ ecrire sous la forme E = {x
n}
n∈N, o` u les x
isont des ´ el´ ements deux ` a deux diff´ erents.
Proposition 1.3.2. Soit E un ensemble infini. Les propri´ et´ es suivantes sont ´ equivalentes : (i) E est d´ enombrable ;
(ii) il existe une injection i : E → N ; (iii) il existe une surjection s : N → E.
Remarque 1.3.3. Si E est un ensemble au plus d´ enombrable, et s’il existe une injection i : F → E, alors F est au plus d´ enombrable.
Exemple 1.3.4. Les ensembles N, N
∗, Z, N
2, Q sont d´ enombrables.
CHAPITRE 1. QUELQUES NOTIONS POUR LES PROBABILIT ´ ES Contre-exemple 1.3.5. Les ensembles R, R \ Q, {0, 1}
N, P(N) ne sont pas d´ enombrables.
Proposition 1.3.6. (i) Soient E et F deux ensembles au plus d´ enombrables. Alors l’ensemble E ∪ F est au plus d´ enombrable.
(ii) Plus g´ en´ eralement, soient (E
n) une suite d’ensembles au plus d´ enombrables. Alors S
n≥0
E
nest au plus d´ enombrable.
Proposition 1.3.7. Soient A et B deux ensembles au plus d´ enombrables. Alors E × F est au
plus d´ enombrable.
Chapitre 2
Ev´ enements
Sommaire
2.1 Tribus, ´ ev´ enements, probabilit´ es . . . . 9 2.2 Ev´ enements ind´ ependants . . . . 11 2.3 Probabilit´ es conditionnelles . . . . 12
2.1 Tribus, ´ ev´ enements, probabilit´ es
D´ efinition 2.1.1. Soit Ω un ensemble non vide non vide. On appelle tribu sur Ω toute partie de P (Ω) satisfaisant les trois propri´ et´ es suivantes :
(i) Ω ∈ A et ∅ ∈ A ;
(ii) A est stable par passage au compl´ ementaire : pour tout A ∈ A, on a A
c∈ A ; (iii) A est stable par r´ eunion d´ enombrable : pour toute suite (A
n) d’´ el´ ements de A, on a
[
n≥0
A
n∈ Ω;
(iv) A est stable par intersection d´ enombrable : pour toute suite (A
n) d’´ el´ ements de A, on a
\
n≥0
A
n∈ Ω.
Exemple 2.1.2. 1. Soit Ω un ensemble. Les familles A = P(Ω) et A
0= {∅, Ω} sont des tribus sur Ω.
2. Prenons Ω = R et A = {∅, [0, 1], R \ [0, 1], R}. Alors A est une tribu.
3. Prenons Ω = {1, 2} et A = {∅, {1}, {1, 2}}. Alors A n’est pas une tribu.
Remarque 2.1.3. Pour montrer qu’une famille est une tribu, il suffit de v´ erifier que : (i’) Ω ∈ A ou ∅ ∈ A ; (ii’) A est stable par passage au compl´ ementaire ; (iii’) A est stable par r´ eunion ou intersection d´ enombrable.
Dans le cas o` u l’univers Ω est fini ou d´ enombrable, la tribu que l’on consid´ erera sera en
pratique A = P (Ω).
CHAPITRE 2. EV ´ ENEMENTS D´ efinition 2.1.4. Soient Ω un ensemble et A une tribu sur Ω :
• l’ensemble Ω s’appelle l’univers (on l’appelle aussi l’ensemble de tous les possibles) ;
• le couple (Ω, A) s’appelle un espace probabilisable ;
• les ´ el´ ements ω de Ω s’appellent des ´ eventualit´ es ;
• les ´ el´ ements A de A s’appellent des ´ ev´ enements ;
• on dit que deux ´ ev´ enements A et B sont incompatibles si A ∩ B = ∅ ;
Exemple 2.1.5. 1. On lance un d´ e au hasard num´ erot´ e de 1 ` a 6 et on regarde la valeur obtenue. L’univers est Ω = {1, 2, 3, 4, 5, 6}. Les ´ ev´ enements
A = {le d´ e est pair} = {2, 4, 6} et B = {5}
sont incompatibles. Le nombre 5 est une ´ eventualit´ e.
2. On lance deux d´ es (l’un apr` es l’autre par exemple) au hasard num´ erot´ es de 1 ` a 6. L’univers est
Ω = {1, 2, 3, 4, 5, 6}
2= {(i, j) : 1 ≤ i, j ≤ 6} = {(1, 1), (1, 2), (1, 3), . . . , (6, 5), (6, 6)}.
La premi` ere coordonn´ ee d’un couple indique la valeur du premier d´ e, et la seconde du second d´ e. Les ´ ev´ enements
A = {la valeur du 1
erd´ e est le double de celle du second} = {(2, 1), (4, 2), (6, 3)}
et
B = {la somme des valeurs obtenues par les deux d´ es est 3} = {(1, 2), (2, 1)}
ne sont pas incompatibles : l’´ eventualit´ e (2, 1) est commune ` a ces deux ´ ev´ enements.
D´ efinition 2.1.6. Soit (Ω, A) un espace probabilis´ e. On appelle (mesure de) probabilit´ e sur (Ω, A) toute application P : A → [0, 1] telle que :
(i) P (Ω) = 1 ;
(ii) pour toute suite d’´ ev´ enements (A
n) deux ` a deux disjoints (cad tels que A
n∩ A
m= ∅ pour tous n 6= m),
P
∞
G
n=0
A
n!
=
∞
X
n=0
P (A
n) .
Exemple 2.1.7. 1. Soit Ω un ensemble fini. Prenons A = P (Ω). L’application P d´ efinie, pour tout A ∈ P(Ω), par P (A) =
|A||Ω|est une probabilit´ e.
2. Prenons Ω = N, A = P(N). L’application P d´ efinie par P (A) =
( 1 si 5 ∈ A 0 sinon est une probabilit´ e.
D´ efinition 2.1.8. Soit (Ω, A) un espace probabilisable et P une probabilit´ e sur (Ω, A). Le triplet
(Ω, A, P) s’appelle un espace probabilis´ e.
CHAPITRE 2. EV ´ ENEMENTS
Remarque 2.1.9. Supposons que Ω soit fini ou d´ enombrable et que A = P (Ω). Alors, pour tout ´ ev´ enement A ∈ A, on a
P (A) = P [
ω∈A
{ω}
!
= X
ω∈A
P ({ω}) .
Exemple 2.1.10. Prenons Ω = N, A = P(N) et A = {1, 2, 3}. Alors pour toute probabilit´ e P sur N, on a P (A) = P ({1, 2, 3}) = P ({1}) + P ({2}) + P ({3}).
D´ efinition 2.1.11. Soit (Ω, A, P) un espace probabilis´ e. On dit qu’un ´ ev´ enement A ∈ A est :
• n´ egligeable si P (A) = 0 ;
• presque sˆ ur si P (A) = 1.
Remarque 2.1.12. 1. Si A = ∅, alors A est n´ egligeable. La r´ eciproque n’est pas vraie.
2. Si A = Ω, alors A est presque sˆ ur. La r´ eciproque n’est pas vraie.
D´ efinition 2.1.13. Soit (Ω, A, P) un espace probabilis´ e. On appelle syst` eme complet d’´ ev´ enements toute suite (finie ou infinie) d’´ ev´ enements (A
n) telle que :
(i) pour tout n, on a P (A
n) 6= 0 ;
(ii) pour tous m 6= n, on a P (A
m∩ A
n) = 0 ; (iii) P
S
n≥0
A
n= 1.
Exemple 2.1.14. On consid` ere un jeu classique de 52 cartes (ARDV..., pique, coeur, car- reau, tr` efle). Les ´ ev´ enements A = {la carte est un coeur}, B = {la carte est un carreau} et C = {la carte est de couleur noire (pique, tr` efle)} forment un syst` eme complet d’´ ev´ enements.
Proposition 2.1.15. Soit (Ω, A, P) un espace probabilis´ e.
(i) Pour tout A ∈ A, on a P (A
c) = 1 − P (A).
(ii) Pour tous A, B ∈ A tels que A ⊂ B, on a P (B \ A) = P (B ) − P (A) et P (A) ≤ P (B).
(iii) Pour tous A, B ∈ A, on a
P (A ∪ B) = P (A) + P (B) − P (A ∩ B) .
(iv) Pour tous A
1, . . . , A
n∈ A deux ` a deux disjoints, on a
P
n
G
k=1
A
k!
=
n
X
k=1
P (A
k) .
2.2 Ev´ enements ind´ ependants
D´ efinition 2.2.1. Soit (Ω, A, P) un espace probabilis´ e. On dit que deux ´ ev´ enements A, B ∈ A sont ind´ ependants si P (A ∩ B) = P (A) P (B).
D´ efinition 2.2.2. Soit (Ω, A, P) un espace probabilis´ e et (A
i)
i∈Iune famille d’´ ev´ enements. On dit que les ´ ev´ enements (A
i)
i∈Isont :
• deux ` a deux ind´ ependants si A
iet A
jsont ind´ ependants pour tous i, j ∈ I, i 6= j ;
• mutuel lement ind´ ependants si pour toute famille finie J ⊂ I,
P \
i∈J
A
j!
= Y
i∈J
P (A
i) .
CHAPITRE 2. EV ´ ENEMENTS Exemple 2.2.3. On lance deux pi` eces au hasard et on note P (resp. F) lorsqu’on on obtient pile (resp. face). L’univers est Ω = {(P, P ), (P, F ), (F, P ), (F, F )}. On consid` ere les ´ ev´ enements suivants :
A = {le premier lancer est pile} = {(P, P ), (P, F )};
B = {le second lancer est face} = {(P, F ), (F, F )};
C = {le r´ esultat est le mˆ eme aux deux lancers} = {(P, P ), (F, F )}.
On a P (A) = P (B) = P (C) =
12et P (A ∩ B) = P (A ∩ C) = P (B ∩ C) =
14. Les ´ ev´ enements A, B, C sont donc deux ` a deux ind´ ependants. En revanche, ils ne sont pas mutuellement ind´ ependants puisque P (A ∩ B ∩ C) = 0 6=
18= P (A) P (B) P (C).
Remarque 2.2.4. 1. Il ne faut pas confondre les notions d’ind´ ependance (A et B sont ind´ ependants si P (A ∩ B) = P (A) P (B)) et d’incompatibilit´ e (A et B sont incompatibles si A ∩ B = ∅) de deux ´ ev´ enements.
2. La notion d’ind´ ependance est relative ` a la probabilit´ e : deux ´ ev´ enements peuvent ˆ etre ind´ ependants relativement ` a une probabilit´ e P mais pas ` a une probabilit´ e P
0.
3. Si (A
i)
i∈Iest une famille d’´ ev´ enements mutuellement ind´ ependants (resp. deux ` a deux ind´ ependants) alors (A
ci)
i∈Iest une famille d’´ ev´ enements mutuellement ind´ ependants (resp.
deux ` a deux ind´ ependants).
2.3 Probabilit´ es conditionnelles
Proposition 2.3.1. Soient (Ω, A, P) un espace probabilis´ e et A ∈ A un ´ ev´ enement non n´ egligeable.
L’application P
A: A → [0, 1] d´ efinie, pour tout B ∈ A, par : P
A(B) = P (A ∩ B )
P (A) est une probabilit´ e.
D´ efinition 2.3.2. Soient (Ω, A, P) un espace probabilis´ e, et A et B deux ´ ev´ enements tels que A n’est pas n´ egligeable. On appelle probabilit´ e de B conditionnel lement ` a A (ou probabilit´ e de B sachant A) la quantit´ e d´ efinie par :
P (B|A) = P
A(B) = P (A ∩ B ) P (A) .
Proposition 2.3.3. Soient (Ω, A, P) un espace probabilis´ e, et A et B deux ´ ev´ enements tels que A n’est pas n´ egligeable. Alors A et B sont ind´ ependants si et seulement si P (B |A) = P (B ).
Th´ eor` eme 2.3.4. (Formule des probabilit´ es totales) Soient (Ω, A, P) un espace probabilis´ e et (A
n) un syst` eme complet d’´ ev´ enements non n´ egligeables. Alors, pour tout B ∈ A,
P (B) =
∞
X
n=1
P (B ∩ A
n) =
∞
X
n=1
P (B|A
n) P (A
n) .
Th´ eor` eme 2.3.5. (Formule de Bayes) Soit (Ω, A, P) un espace probabilis´ e. Soit B ∈ A un
´ ev´ enement non n´ egligeable.
CHAPITRE 2. EV ´ ENEMENTS
(i) Pour tout ´ ev´ enement A ∈ A non n´ egligeable, on a
P (A|B ) = P (B|A) P (A) P (B) .
(ii) Pour tout syst` eme complet d’´ ev´ enements (A
n) non n´ egligeables, on a P (A
j|B) = P (B|A
j) P (A
j)
P
n≥1
P (B|A
n) P (A
n) .
Exemple 2.3.6. Deux op´ erateurs de saisie, A et B, entrent respectivement 100 et 200 tableaux sur informatique. Les tableaux de A comportent des fautes dans 5.2% des cas et ceux de B dans 6,7% des cas. On prend un tableau au hasard. Il comporte des fautes. On souhaite calculer la probabilit´ e pour que A se soit occup´ e de ce tableau. Pour cela, on consid` ere les ´ ev´ enements :
• T
A: ”le tableau est entr´ e par A” ;
• T
B= T
Ac: ”le tableau est entr´ e par B” ;
• F : ”le tableau comporte des fautes”.
D’apr` es la formule de Bayes, on a P (T
A|F ) = P (F |T
A)
P (F |T
A) P (T
A) + P (F |T
B) P (T
B)
= 0.052 × 1/3 0.052 × 1/3 + 0.067 × 2/3
= 0.279.
L’essentiel
• avoir en tˆ ete le vocabulaire probabiliste (univers, ´ ev´ enements, probabilit´ e, probabilit´ e condi- tionnelle, ind´ ependance) ;
• calculer des probabilit´ es et des probabilit´ es conditionnelles ;
• ´ etudier l’ind´ ependance d’une famille d’´ ev´ enements.
CHAPITRE 2. EV ´ ENEMENTS
Chapitre 3
Variables al´ eatoires discr` etes
Sommaire
3.1 Loi d’une variable al´ eatoire discr` ete . . . . 15
3.2 Lois usuelles . . . . 17
3.3 Ind´ ependance de variables al´ eatoires discr` etes . . . . 19
3.4 Esp´ erance, variance d’une variable al´ eatoire discr` ete . . . . 20
3.1 Loi d’une variable al´ eatoire discr` ete
D´ efinition 3.1.1. Soient (Ω, A) un espace probabilisable et E un ensemble. On appelle variable al´ eatoire discr` ete toute fonction X : Ω → E telle que X(Ω) soit finie ou d´ enombrable et telle que :
∀x ∈ X(Ω), X
−1({x}) ∈ A.
L’ensemble X (Ω) s’appelle l’espace d’´ etat ou le support de X. En pratique, pour une variable al´ eatoire discr` ete, l’univers Ω est le plus souvent fini ou d´ enombrable et la tribu sous- jacent est A = P (Ω). En d’autres termes, il faut penser une variable al´ eatoire discr` ete comme
´
etant simplement une fonction d´ efinie sur Ω et ne prenant qu’un nombre fini, ou d´ enombrable, de valeurs.
Dans ce qui suit, on d´ esigne par x
i, i ∈ N, les valeurs prises par X . En d’autres termes, X(Ω) = {x
i, i ∈ N}.
Exemple 3.1.2. On lance une pi` ece au hasard. Si l’on tombe sur pile (P), on gagne 1 euro, et si c’est sur face (F ) on en gagne 0. Ici, l’univers est Ω = {P, F } et la variable al´ eatoire qui nous int´ eresse est :
X :{P, F } → {0, 1}
P 7→ 1 F 7→ 0.
Proposition 3.1.3. Soient (Ω, A, P) un espace probabilis´ e. Soient X, Y deux variables al´ eatoires
r´ eelles (cad ` a valeurs dans R) et λ un nombre r´ eel. Alors X + Y et λX sont des variables
al´ eatoires.
CHAPITRE 3. VARIABLES AL ´ EATOIRES DISCR ` ETES Proposition 3.1.4. Soit (Ω, A, P) un espace probabilis´ e et X une variable al´ eatoire discr` ete ` a valeurs dans un ensemble E. Soit P
X: P (E) → [0, 1] l’application d´ efinie, pour tout A ∈ P(E), par :
P
X(A) = P X
−1(A) .
Alors l’application P
Xest une probabilit´ e sur l’espace probabilisable (E, P (E)).
Par d´ efinition de P
X, on a donc P
X(A) = P ({ω ∈ Ω : X(ω) ∈ A}). Il est d’usage, en proba- bilit´ es, d’all´ eger les ´ ecritures en prenant la notation suivante :
{X ∈ A} = {ω ∈ Ω : X(ω) ∈ A} = X
−1(A).
Par exemple, si X est ` a valeurs r´ eelles, l’´ ev´ enement {X ≤ x} est ´ egal ` a {ω ∈ Ω : X(ω) ≤ x}.
On ´ ecrit ´ egalement P (X ∈ A) au lieu de P ({X ∈ A}) en omettant les parenth` eses. En d’autres termes, on a
P
X(A) = P X
−1(A)
= P ({ω ∈ Ω : X (ω) ∈ A})
= P ({X ∈ A})
= P (X ∈ A) .
D´ efinition 3.1.5. Soit (Ω, A, P) un espace probabilis´ e et X une variable al´ eatoire discr` ete ` a valeurs dans un ensemble E. L’application P
Xd´ efinie ci-dessus s’appelle la loi de X .
La loi d’une variable al´ eatoire est donc, par d´ efinition, une probabilit´ e sur l’ensemble d’arriv´ ee de la variable al´ eatoire.
Proposition 3.1.6. Soit (Ω, A, P) un espace probabilis´ e et X une variable al´ eatoire discr` ete
`
a valeurs dans un ensemble E. La loi de X est caract´ eris´ ee de mani` ere unique par les valeurs P (X = x
i) pour tout i ≥ 1.
En particulier, on a P
i≥1
P (X = x
i) = 1.
Exemple 3.1.7. On jette deux d´ es parfaits au hasard, num´ erot´ es de 1 ` a 6, et on s’int´ eresse
`
a la somme des valeurs obtenues par les deux d´ es. L’univers est Ω = {1, . . . , 6}
2, la tribu est A = P(Ω) et la variable al´ eatoire qui nous int´ eresse est :
X :{1, . . . , 6}
2−→ {2, . . . , 12}
(ω
1, ω
2) 7−→ ω
1+ ω
2.
Sa loi P
Xest une probabilit´ e sur X (Ω) = {2, . . . , 12}. On a par exemple : P
X({2}) = P (X = 2) = P le 1
erd´ e donne 1, le 2
nddonne 1
= 1 36 ; P
X({3}) = P (X = 3)
= P le 1
erd´ e donne 1, le 2
nddonne 2
+ P le 1
erdonne 2, le 2
ndd´ e donne 1
= 2 36 ;
Plus g´ en´ eralement, on a les r´ esultats suivants :
CHAPITRE 3. VARIABLES AL ´ EATOIRES DISCR ` ETES
sommes possibles 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
probabilit´ es 1/36 2/36 3/36 4/36 5/36 6/36 5/36 4/36 3/36 2/36 1/36
D´ efinition 3.1.8. Soit (Ω, A) un espace probabilisable.
(i) Soient X
1, . . . , X
pdes variables al´ eatoires discr` etes, d´ efinies sur Ω, ` a valeurs dans E
1, . . . , E
prespectivement. On appelle loi jointe de X
1, . . . , X
pla loi du p-uplet X = (X
1, . . . , X
p).
On la note P
X.
(ii) Soit X = (X
1, . . . , X
p) une variable al´ eatoire, d´ efinie sur Ω, ` a valeurs dans E
1× · · · × E
p. Pour tout 1 ≤ k ≤ p, on appelle k-i` eme marginale de X la loi de la variable al´ eatoire X
k.
Proposition 3.1.9. Soit X = (X
1, . . . , X
p) une variable al´ eatoire ` a valeurs dans E
1× · · · × E
pde loi P
X. Alors, pour tout 1 ≤ i ≤ p, la loi de X
iest donn´ ee par :
∀A ⊂ E
i, P
Xi(A) = P
X(E
1× E
2× · · · × E
i−1× A × E
i+1× · · · × E
p).
Le r´ esultat ci-dessus implique qu’on peut avoir les lois marginales ` a partir de la loi jointe. La r´ eciproque est en revanche fausse. En d’autres termes, il est possible que l’on ait deux couples de variables al´ eatoires (X
1, X
2) et (Y
1, Y
2) telles que P
X1= P
Y1et P
X2= P
Y2mais telles que P
(X1,X2)6= P
(Y1,Y2).
D´ efinition 3.1.10. Une variable al´ eatoire X est dite d´ eterministe si, presque sˆ urement, elle est ´ egale ` a une certaine valeur ; en d’autres termes il existe c tel que P (X = c) = 1.
3.2 Lois usuelles
D´ efinition 3.2.1. Soient E un ensemble fini et X : Ω → E une variable al´ eatoire discr` ete. On dit que X suit la loi uniforme sur E si :
∀x ∈ E, P (X = x) = 1
|E| . On note alors X ∼ U (E).
La loi uniforme apparait naturellement comme la mod´ elisation d’un choix d’un ´ el´ ement au hasard dans un ensemble fini en situation d’´ equiprobabilit´ e. Par exemple, on prend une carte au hasard dans un jeu (classique) de 52 cartes. On 1/52 chance de tirer l’as de pique ; 1/52 chance de tirer le 3 de tr` efle ; 1/52 de chance de tirer le valet de coeur.
D´ efinition 3.2.2. Soient p ∈ [0, 1] et X : Ω → {0, 1} une variable al´ eatoire discr` ete. On dit que X suit la loi de Bernoul li de param` etre p si :
P (X = 1) = p et P (X = 0) = 1 − p.
On note alors X ∼ B(p).
La loi de Bernoulli mod´ elise le succ` es ou l’´ echec d’une exp´ erience.
CHAPITRE 3. VARIABLES AL ´ EATOIRES DISCR ` ETES Exemple 3.2.3. On lance une pi` ece au hasard : si l’on tombe sur pile (avec probabilit´ e p), on consid` ere que l’on a un succ` es et on affecte la valeur 1 ; et dans le cas oppos´ e (cad si on tombe sur face), on consid` ere qu’on a un ´ echec et on affecte la valeur 0. La variable al´ eatoire consid´ er´ ee est :
X :{P, F } → {0, 1}
P 7→ 1 F 7→ 0.
On a X ∼ B(p).
D´ efinition 3.2.4. Soient p ∈ [0, 1], n ≥ 1 et X : Ω → {0, 1, . . . , n} une variable al´ eatoire discr` ete. On dit que X suit la loi binomiale de param` etres n, p si :
∀0 ≤ k ≤ n, P (X = k) = n
k
p
k(1 − p)
n−k. On note alors X ∼ B(n, p).
La loi binomiale intervient dans le comptage du nombre de succ` es d’une exp´ erience al´ eatoire.
Plus pr´ ecis´ ement, la somme de n variables al´ eatoires ind´ ependantes (on d´ efinira cette notion dans la section suivante) de loi de Bernoulli de param` etre p est une variable al´ eatoire de loi binomiale de param` etres n et p.
Exemple 3.2.5. On lance 10 fois une pi` ece (ind´ ependamment des autres lancers) qui a une probabilit´ e p de tomber sur pile. L’univers est Ω = {P, F }
10. On note X la variable al´ eatoire X qui d´ esigne le nombre de fois que l’on tombe sur pile. En d’autres termes
X :{P, F }
10−→ {0, . . . , 10}
(ω
1, . . . , ω
10) 7−→ #{1 ≤ i ≤ 10 : ω
i= P }.
On a X ∼ B(10, p).
Remarque 3.2.6. La loi binomiale intervient naturellement dans des probl` emes de tirages de boules avec remise. Consid´ erons, par exemple, la situation suivante : on a N boules dans une urne, N
Bd’entre elles sont blanches et N
R= N − N
Bsont rouges.
• On pr´ el` eve au hasard, et avec remise, n ≤ N boules dans l’urne. On d´ esigne par X le nombre de boules blanches que l’on tire. Alors X suit la loi B(n, p), avec p =
NNB, cad pour tout k ≤ n,
P (X = k) = n
k
p
k(1 − p)
n−k.
• On pr´ el` eve au hasard, et sans remise, n ≤ N boules dans l’urne. On note Y le nombre de boules blanches que l’on tire. Alors la loi de Y est donn´ ee par :
P (Y = k) =
NB
k
NRn−k
N n
,
pour tout k ≤ n. On dit que Y suit une loi hyperg´ eom´ etrique.
CHAPITRE 3. VARIABLES AL ´ EATOIRES DISCR ` ETES
D´ efinition 3.2.7. Soit p ∈ [0, 1] et X : Ω → N
∗une variable al´ eatoire discr` ete. On dit que X suit la loi g´ eom´ etrique de param` etre p si :
∀k ∈ N
∗, P (X = k) = p(1 − p)
k−1. On note alors X ∼ G(p).
La loi g´ eom´ etrique apparait comme l’instant du premier succ` es lorsqu’on it` ere ind´ ependamment une mˆ eme exp´ erience al´ eatoire ayant une probabilit´ e p de succ` es et 1 − p d’´ echec.
Exemple 3.2.8. On lance ` a plusieurs reprises une pi` ece qui a une probabilit´ e p ∈]0, 1[ de tomber sur pile. On d´ esigne par X le num´ ero du lancer o` u on a obtenu pour la premi` ere fois pile. On a X ∼ G(p).
D´ efinition 3.2.9. Soit λ > 0 et X : Ω → N une variable al´ eatoire discr` ete. On dit que X suit la loi de Poisson de param` etre λ si :
∀k ∈ N, P (X = k) = e
−λ· λ
kk! . On note alors X ∼ P (λ).
La loi de Poisson est souvent utilis´ ee pour mod´ eliser le nombre d’occurrences d’un ph´ enom` ene al´ eatoire extrˆ eme/rare. Le r´ esultat suivant garantit qu’une loi binomiale de param` etres n, p
n, avec np
n→ λ > 0, est proche d’une loi de Poisson de param` etre λ.
Proposition 3.2.10. Soit λ > 0 et soit (p
n) une suite de nombres r´ eels compris dans [0, 1] telle que np
n−→
n→∞
λ. Alors
∀k ∈ N, n
k
p
kn(1 − p
n)
n−k−→
n→∞
e
−λ· λ
kk! .
En d’autres termes, si X est une variable al´ eatoire telle que X ∼ P(λ) et si (X
n) est une suite de variables al´ eatoires telles que X
n∼ B(n, p
n) pour tout n ≥ 1, alors
∀k ∈ N, P (X
n= k) −→
n→∞
P (X = k) .
On dit qu’une suite de variables al´ eatoires (X
n) qui satisfait l’´ equation ci-dessus converge en loi vers la variable al´ eatoire X . On abordera ce type de notion dans le dernier chapitre.
3.3 Ind´ ependance de variables al´ eatoires discr` etes
D´ efinition 3.3.1. Soit (Ω, A, P) un espace probabilis´ e. On dit qu’une famille de variables al´ eatoires discr` etes (X
i)
i∈Iest ind´ ependante si, pour toute partie finie J ⊂ I, et toute famille (A
j)
j∈Javec A
j⊂ X
j(Ω) pour tout j ∈ J , on a
P (∀j ∈ J, X
j∈ A
j) = Y
j∈J
P (X
j∈ A
j) .
Proposition 3.3.2. Soitent X et Y deux variables al´ eatoires discr` etes, d´ efinies sur Ω. D´ esignons par X (Ω) = {x
i, ≥ 1} (resp. Y (Ω) = {y
j, j ≥ 1}) l’ensemble des valeurs prises par X (resp. Y).
Les propri´ et´ es suivantes sont ´ equivalentes :
CHAPITRE 3. VARIABLES AL ´ EATOIRES DISCR ` ETES (i) X et Y sont ind´ ependantes ;
(ii) ∀i, j ≥ 1, P (X = x
i, Y = y
j) = P (X = x
i) P (Y = y
j).
Proposition 3.3.3. Soient (Ω, A, P) un espace probabilis´ e, I un ensemble et (X
i)
i∈Ides va- riables al´ eatoires discr` etes d´ efinies sur (Ω, A). On suppose que les variables al´ eatoires sont ind´ ependantes.
(i) Pour tout i ∈ I, d´ esignons par f
iune application d´ efinie sur X
i(Ω). Alors les variables al´ eatoires (f
i(X
i))
i∈Isont ind´ ependantes.
(ii) Soient J, J
0⊂ I deux sous-ensembles disjoints de I. Alors les deux vecteurs (X
i)
i∈Jet (X
j)
j∈J0sont ind´ ependants.
3.4 Esp´ erance, variance d’une variable al´ eatoire discr` ete
Dans ce chapitre, nous nous limitons aux variables al´ eatoires discr` etes r´ eelles (cad ` a valeurs dans un sous-ensemble d´ enombrable de R).
D´ efinition 3.4.1. Soit X une variable al´ eatoire discr` ete ` a valeurs dans R.
• On dit que X admet une esp´ erance si P
i≥1
|x
i|P (X = x
i) < ∞.
• Lorsque X admet une esp´ erance, on appelle esp´ erance de X le nombre r´ eel d´ efini par :
E [X ] =
∞
X
i=1
x
iP (X = x
i) .
Une variable al´ eatoire dont l’esp´ erance est nulle est dite centr´ ee.
Remarque 3.4.2. Deux variables al´ eatoires discr` etes (r´ eelles) qui ont la mˆ eme loi ont la mˆ eme esp´ erance. La r´ eciproque n’est pas vraie.
Exemple 3.4.3. 1. Soit X ∼ U ({1, 2, 3, 4}). Alors E [X] = 2.5.
2. Soit X ∼ B(p), p ∈ [0, 1]. Alors E [X ] = p.
3. Soit X ∼ B(n, p), n ≥ 1, p ∈ [0, 1]. Alors E [X ] = np.
4. Soit X ∼ G(p), p ∈]0, 1]. Alors E [X ] =
1p. 5. Soit X ∼ P(λ), λ > 0. Alors E [X ] = λ.
Th´ eor` eme 3.4.4. (Th´ eor` eme de transfert, cas discret) Soient (Ω, A, P) un espace probabilis´ e, E un ensemble, X : (Ω, A) → E une variable al´ eatoire discr` ete et f : X(Ω) → R une application.
Si P
i≥1
|f (x
i)|P (X = x
i) < ∞, alors f (X ) admet une esp´ erance et celle-ci est donn´ ee par : E [f (X)] =
∞
X
i=1
f (x
i)P (X = x
i) .
Proposition 3.4.5. Soient X, Y deux variables al´ eatoires discr` etes r´ eelles qui admettent une esp´ erance. Alors
(i) lin´ earit´ e : pour tout λ ∈ R, la variable al´ eatoire X + λY admet une esp´ erance et celle-ci est donn´ ee par :
E [X + λY ] = E [X ] + λE [Y ] .
(ii) croissance : si X ≤ Y presque sˆ urement, alors E [X ] ≤ E [Y ].
CHAPITRE 3. VARIABLES AL ´ EATOIRES DISCR ` ETES (iii) in´ egalit´ e triangulaire : |E [X ] | ≤ E [|X|].
Corollaire 3.4.6. Soient X, Y deux variables al´ eatoires discr` etes r´ eelles telles que |X| ≤ Y presque sˆ urement. Si Y admet une esp´ erance, alors X admet une esp´ erance.
Proposition 3.4.7. Soit (Ω, A, P) un espace probabilis´ e. Pour tout i ≤ n, soient X
i: (Ω, A) → E
iune variable al´ eatoire et f
i: E
i→ R une application telle que f
i(X
i) admette une esp´ erance.
Supposons que les variables al´ eatoires X
1, . . . , X
nsoient ind´ ependantes. Alors Q
ni=1
f
i(X
i) admet une esp´ erance et
E
"
nY
i=1
f
i(X
i)
#
=
n
Y
i=1
E [f
i(X
i)] .
D´ efinition 3.4.8. Soit X une variable al´ eatoire discr` ete telle que E X
2< ∞. On appelle :
• variance de X le nombre r´ eel positif V [ X ] = E
(X − E [X])
2;
• ´ ecart-type de X le nombre r´ eel positif σ(X) = p
V [ X ].
Une variable al´ eatoire centr´ ee dont la variance est ´ egale ` a 1 est dite r´ eduite.
Exemple 3.4.9. 1. Soit X ∼ B(p), p ∈ [0, 1]. Alors V [ X ] = p(1 − p).
2. Soit X ∼ B(n, p), n ≥ 1, p ∈ [0, 1]. Alors V [ X ] = np(1 − p).
3. Soit X ∼ G(p), p ∈]0, 1]. Alors E [X] =
1−pp2. 4. Soit X ∼ P(λ), λ > 0. Alors E [X ] = λ.
Proposition 3.4.10. Soit X une variable al´ eatoire discr` ete telle que E X
2< ∞. Alors X admet une esp´ erance.
Proposition 3.4.11. (Formule de K¨ onig-Huygens) Soit X une variable al´ eatoire discr` ete telle que E
X
2< ∞. Alors V [ X ] = E
X
2− E [X ]
2.
Proposition 3.4.12. Soit X une variable al´ eatoire discr` ete telle que E X
2< ∞. Alors (i) V [ X ] = 0 si et seulement si X est d´ eterministe.
(ii) Soient a, b ∈ R. Alors V [ aX + b ] = a
2V [ X ] .
Proposition 3.4.13. Soient X et Y deux variables al´ eatoires discr` etes r´ eelles ind´ ependantes telles que E
X
2, E
Y
2< ∞. Alors V [ X + Y ] = V [ X ] + V [ Y ].
L’hypoth` ese d’ind´ ependance dans la proposition ci-dessus est essentielle. Sans supposer cela, il n’est en g´ en´ eral pas vrai que V [ X + Y ] = V [ X ] + V [ Y ]. Par exemple, si X est une variable al´ eatoire r´ eelle et Y = 2X, alors
V [ X + Y ] = V [ 3X ] = 9 V [ X ] mais
V [ X ] + V [ Y ] = V [ X ] + V [ 2X ] = V [ X ] + 4 V [ X ] = 5 V [ X ] .
CHAPITRE 3. VARIABLES AL ´ EATOIRES DISCR ` ETES D´ efinition 3.4.14. Soient X et Y deux variables al´ eatoires discr` etes r´ eelles telles que E
X
2, E
Y
2<
∞. On appelle covariance de X et de Y le nombre r´ eel
Cov(X, Y ) = E [(X − E [X])(Y − E [Y ])] = E [XY ] − E [X] E [Y ] .
Remarque 3.4.15. 1. La covariance ”g´ en´ eralise” la notion de variance : Cov(X, X) = V [ X ].
2. La covariance est bilin´ eaire cad Cov(X, aY + Z) = aCov(X, Y ) + Cov(X, Z).
3. La covariance est sym´ etrique cad Cov(X, Y ) = Cov(Y, X).
D´ efinition 3.4.16. Deux variables al´ eatoires dont la covariance existe et est ´ egale ` a 0 sont dites non corr´ el´ ees.
Proposition 3.4.17. Si deux variables al´ eatoires sont ind´ ependantes alors elles sont non corr´ el´ ees.
La r´ eciproque de la proposition pr´ ec´ edente n’est pas vraie. Voici un contre-exemple.
Contre-exemple 3.4.18. Soit X une variable al´ eatoire telle que P (X = 0) = P (X = 1) = P (X = −1) =
13. Soit Y la variable al´ eatoire d´ efinie par :
Y =
( 0 si X 6= 0 1 si X = 0.
On a Cov(X, Y ) = 0 et pourtant les variables al´ eatoires X et Y ne sont pas ind´ ependantes puisque
P (X = 0, Y = 0) = 0 6= 2
9 = P (X = 0) P (Y = 0) . L’essentiel
• calculer la loi d’une variable al´ eatoire ;
• reconnaitre les lois usuelles (uniforme, Bernoulli, binomiale, Poisson, g´ eom´ etrique) ;
• ´ etudier l’ind´ ependance d’une famille de variables al´ eatoires ;
• calculer des esp´ erances et des variances.
Chapitre 4
Variables al´ eatoires ` a densit´ e
Sommaire
4.1 Loi, densit´ e de probabilit´ e . . . . 23
4.2 Lois usuelles . . . . 25
4.3 Ind´ ependance de variables al´ eatoires ` a densit´ e . . . . 26
4.4 Esp´ erance, variance . . . . 26
Dans ce chapitre, nous introduisons la notion de variables al´ eatoires r´ eelles poss´ edant une certain densit´ e de probabilit´ e. L’essentiel des notions que nous avons vues pour les variables al´ eatoires discr` etes (loi, esp´ erance, variance) s’´ etendent dans ce nouveau cadre.
4.1 Loi, densit´ e de probabilit´ e
D´ efinition 4.1.1. Soit (Ω, A, P) un espace probabilis´ e. On appelle variable al´ eatoire r´ eel le toute fonction X : Ω → R telle que, pour tout x ∈ R, on a :
X
−1(] − ∞, x]) ∈ A.
D´ efinition 4.1.2. Soit X une variable al´ eatoire r´ eelle. On appelle loi de X la probabilit´ e P
Xd´ efinie, pour tout a < b, par
P
X(]a, b]) = P X
−1(]a, b])
= P (X ∈]a, b]) .
En pratique, on ne calcule pas P
X(]a, b]) pour d´ eterminer la loi de X . On pr´ ef` ere calculer la fonction, dite de r´ epartition, plus commode ` a manipuler.
D´ efinition 4.1.3. Soit X une variable al´ eatoire continue. On appelle fonction de r´ epartition de X , l’application F
X: R → [0, 1] d´ efinie, pour tout x ∈ R, par
F
X(x) = P (X ≤ x) .
Proposition 4.1.4. La fonction de r´ epartition F
Xest croissante, continue ` a droite et limit´ ee ` a gauche. De plus,
x→−∞
lim F
X(x) = 0 et lim
x→+∞
F
X(x) = 1.
CHAPITRE 4. VARIABLES AL ´ EATOIRES ` A DENSIT ´ E Les fonctions de r´ epartitions que nous consid´ ererons seront toutes continues. La proposition suivante garantit que la fonction de r´ epartition caract´ erise la loi.
Proposition 4.1.5. Soient X et Y deux variables al´ eatoires. Alors P
X= P
Ysi et seulement si F
X= F
Y.
En pratique, les variables al´ eatoires r´ eelles (non discr` etes) que nous consid´ ererons sont toutes caract´ eris´ ees par leurs densit´ es. Pour cela, nous introduisons ci-dessous la notion de densit´ e de probabilit´ e.
D´ efinition 4.1.6. On dit qu’une fonction f : R → R
+est une densit´ e de probabilit´ e (ddp) si les deux propri´ et´ es suivantes sont satisfaites :
(i) f (t) ≥ 0 pour tout t ∈ R ; (ii) R
+∞−∞
f (t)dt = 1.
Exemple 4.1.7. 1. La fonction f : R → [0, 1] d´ efinie par : f (t) =
( 1 si t ∈ [0, 1];
0 sinon (4.1.1)
est une densit´ e de probabilit´ e.
2. La fonction f : R → R
+d´ efinie par : f (t) =
( 0 si t < 0
e
−tsi t ≥ 0 (4.1.2)
est une densit´ e de probabilit´ e.
D´ efinition 4.1.8. On dit qu’une variable al´ eatoire X poss` ede une densit´ e f
X: R → R
+si f
Xest une ddp et si, pour tout a < b, on a :
P (X ∈]a, b]) = Z
ba
f
X(t)dt.
Remarque 4.1.9. 1. Si X poss` ede une densit´ e f
X, alors pour tout x ∈ R, on a : F
X(x) =
Z
x−∞
f
X(t)dt. (4.1.3)
2. Dans la relation (4.1.3), il y a deux variables : x et t. La variable x est associ´ ee ` a la fonction F
X. La variable t est muette : il s’agit de la variable d’int´ egration.
Exemple 4.1.10. 1. Soit X une variable al´ eatoire dont la densit´ e est ´ egale ` a la fonction d´ efinie dans l’´ equation (4.1.1). Alors la fonction de r´ epartition de X est la fonction F
Xd´ efinie, pour tout x ∈ R, par :
F
X(x) =
0 si x < 0 x si x ∈ [0, 1]
1 si x > 1.
CHAPITRE 4. VARIABLES AL ´ EATOIRES ` A DENSIT ´ E
2. Soit X une variable al´ eatoire dont la densit´ e est ´ egale ` a la fonction d´ efinie dans l’´ equation (4.1.2). Alors la fonction de r´ epartition de X est la fonction F
Xd´ efinie, pour tout x ∈ R, par :
F
X(x) =
( 0 si x < 0 1 − e
−xsi x ≥ 0.
La relation (4.1.3) garantit que, si l’on connaˆıt la densit´ e, on peut calculer la fonction de r´ epartition par int´ egration. La proposition suivante donne une r´ eciproque : si l’on connaˆıt la fonction de r´ epartition, alors on peut calculer la densit´ e.
Proposition 4.1.11. Soit X une variable al´ eatoire r´ eelle. Si F
Xest d´ erivable et que sa d´ eriv´ ee F
X0est continue
1, alors X poss` ede une densit´ e f
Xet, pour tout x ∈ R, on a :
f
X(x) = F
X0(x).
Informellement, si dx est un nombre r´ eel positif infiniment petit, alors P (X ∈ [x, x + dx]) ' f
X(x)dx.
4.2 Lois usuelles
D´ efinition 4.2.1. Soient a < b deux nombres et X une variable al´ eatoire r´ eelle. On dit que X suit la loi uniforme sur l’intervalle [a, b] si X poss` ede une densit´ e f
Xd´ efinie par :
f
X(t) =
0 si t 6∈ [a, b];
1
b − a si t ∈ [a, b].
On note alors cette loi X ∼ U(a, b).
La loi uniforme intervient, en particulier, en statistique param´ etrique ` a travers les p-values.
D´ efinition 4.2.2. Soit λ > 0 et soit X une variable al´ eatoire r´ eelle. On dit que X suit la loi exponentiel le de param` etre λ si X poss` ede une densit´ e f
Xd´ efinie par :
f
X(t) =
( 0 si t < 0;
λe
−λtsi t ≥ 0.
On note alors X ∼ E(λ).
La dur´ ee de vie d’un appareil est r´ eguli` erement mod´ elis´ ee par une variable al´ eatoire expo- nentielle.
D´ efinition 4.2.3. Soit X une variable al´ eatoire r´ eelle. On dit que X suit la loi normale (ou gaussienne) centr´ ee r´ eduite si X poss` ede une densit´ e f
Xd´ efinie, pour tout t ∈ R, par :
f
X(t) = 1
√ 2π e
−t2 2
. On note alors X ∼ N (0, 1).
1. On dit alors que la fonctionFXestC1.