• Aucun résultat trouvé

ESMO 2016 - Cancers digestifs

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "ESMO 2016 - Cancers digestifs"

Copied!
7
0
0

Texte intégral

(1)

DOSSIER

Actualités à l’ESMO 2016

La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 11 - décembre 2016 | 609

Cancers digestifs

Digestive cancers

É. François*

* Service d’oncologie digestive, centre Antoine-Lacassagne, Nice.

Cancers colorectaux

Cancers du rectum

Quel est le délai optimal entre la fin d’une radio- chimiothérapie et la chirurgie ? Une étude anglaise (Evans J et al., abstr. 452O) comparant un délai de 6 à 12 semaines vient en contre-point de l’étude GRECCAR-6, dont les résultats viennent d’être publiés (1). L’étude française a montré que l’al- longement du délai de 7 à 11 semaines avant la chirurgie était associé à une augmentation des complications postopératoires, sans bénéfice sur le taux de réponse complète histologique. Nos collègues anglais ont présenté les résultats d’une étude ayant inclus 237 patients randomisés entre un délai de 6 semaines et un délai de 12 semaines.

Les tumeurs étaient sélectionnées sur les données d’une IRM pelvienne et évaluées à 4-6 semaines par une IRM associée à un PET scan ; une deuxième évaluation à 10-12 semaines était réalisée dans le groupe long délai. Dans ce dernier groupe, le taux de régression complète en IRM était augmenté, passant de de 6 à 22 % (p < 0,05), et le taux de réponse complète histologique de la tumeur primitive était doublé (9 versus 20 % ; p < 0,05). Les complica- tions postopératoires n’étaient pas différentes entre les 2 groupes. Ces résultats sont donc contradic- toires avec ceux publiés par le groupe GRECCAR ; cependant, quelques imprécisions dans les résultats présentés font que nous attendons avec impatience la publication in extenso pour analyser précisément les différences entre les 2 études. En attendant, le délai de 6-7 semaines semble devoir toujours être la référence.

Par ailleurs, nous avons eu les résultats finaux de l’étude PETACC-6 (Schmoll HJ et al., abstr. 467PD), qui a comparé une radiochimiothérapie préopéra- toire suivie d’une chimiothérapie adjuvante avec capécitabine seule ou associée à de l’oxaliplatine dans les cancers du rectum localement évolués.

Au total, 1 090 patients ont été inclus. Avec un suivi médian de 5,5 ans, ni la survie sans récidive à 3 ans (76,5 [capécitabine] versus 75,4 % [capé-

citabine + oxaliplatine] ; HR = 1,04 ; p = 0,76), ni la survie globale à 3 ans (90,1 versus 87,6 % ; HR = 1,22 ; p = 0,18) n’ont été améliorées par l’oxa- liplatine. Ces résultats non seulement confirment l’absence d’intérêt de l’oxaliplatine en association avec la radiothérapie et une fluoropyrimidine, mais relancent également le débat de la chimiothérapie adjuvante et de la place de l’oxaliplatine dans les cancers du rectum ayant reçu une radiochimio- thérapie pré opératoire, car ces résultats sont en totale contradiction avec ceux de l’étude AIO.

Surveillance

Nos collègues anglais ont présenté une étude testant différentes modalités de surveillance après chirurgie en cas de cancer colorectal de stade II/III (Pugh SA et al., abstr. 453O). Plus de 1 200 patients ont été inclus entre 2003 et 2009, et répartis entre 4 groupes :

suivi clinique simple ;

taux d’antigène carcinoembryonnaire (ACE) trimestriel puis semestriel à partir de la troisième année ;

scanner thoraco-abdomino-pelvien (TAP) tous les 6 mois, puis annuel à partir de la troisième année ;

combinaison des 2 derniers groupes.

Les résultats préliminaires de cette étude ont été publiés en 2014 et avaient montré que la surveil- lance détectait plus de récidives mais que la combi- naison ACE et scanner TAP n’améliorait pas le taux de détection. Avec un suivi médian de 8,7 ans, si le taux de récidive détecté n’est pas statistiquement différent entre les 4 groupes (même s’il existe une tendance en faveur de la surveillance), il existe en revanche un avantage statistiquement significatif pour l’accès à une chirurgie potentiellement curative (tableau I, p. 610). Seulement 2,7 % des patients dans le groupe avec surveillance fondée unique- ment sur les symptômes – contre 6,3 %, 9,4 %, et 7 % respectivement pour les groupes ACE, TDM et combinaison (p = 0,008), la survie globale n’était pas différente entre les 4 groupes, ce qui n’est pas étonnant, étant donné le nombre de patients

(2)

610 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 11 - décembre 2016

Points forts

inclus dans chaque groupe (n = 300), sachant que 15 à 20 % des patients ont récidivé dans chacun des groupes, aboutissant donc à une très faible puissance statistique. Concrètement, ces résultats ne sont pas de nature à changer les pratiques en France, mais simplement à évaluer l’intérêt d’associer plusieurs techniques de surveillance.

Latéralité

et conséquences thérapeutiques

La communication de A.P. Venook à l’ASCO® 2016 (2) a non seulement confirmé le rôle pronostique de la localisation tumorale du cancer colorectal mais a également mis en avant son rôle prédictif vis-à-vis des thérapies ciblées. À l’ESMO 2016, une session spéciale consacrée à la localisation tumorale a permis de compléter nos connaissances.

L’étude CRYSTAL a comparé FOLFIRI (acide folinique, 5-FU, irinotécan) à ce même schéma associé au cétu- ximab, en fonction de la localisation tumorale. Sur les 1 200 patients initialement inclus, seuls 367 ont été étudiés : 280 cancers étaient localisés à gauche

et 84 à droite. Le plus mauvais pronostic des cancers du côlon droit a été confirmé, et ce quel que soit le traitement ; de plus, un impact prédictif de la locali- sation anatomique a été mis en évidence (tableau II).

Si le taux de réponse, la survie sans progression et la survie globale sont améliorés par le traitement par FOLFIRI + cétuximab chez les patients atteints d’un cancer du côlon gauche, aucun de ces résultats n’est statistiquement significatif à droite. La même méthodologie a été appliquée pour l’étude FIRE-3, qui a comparé cétuximab à bévacizumab en première ligne thérapeutique. Sur les 592 patients initialement inclus, 394 ont été analysés (306 cancers du côlon gauche, 88 cancers du côlon droit). Les cancers du côlon droit ont confirmé leur plus mauvais pronostic, quel que soit le bras thérapeutique. Pour le cétu- ximab, la survie sans progression et la survie globale sont statistiquement supérieures en cas de localisa- tion à gauche (respectivement 10,7 versus 7,6 mois, p < 0,001 ; 38,3 versus 18,3 mois, p < 0,0001) ; pour le bévacizumab, les différences sont moins nettes et ne sont significatives que pour la survie globale (survie sans progression : 10,7 versus 9,0 mois, p = 0,06 ; survie globale : 28,0 versus 23,0 mois, p = 0,04).

» Cancer colorectal : impact pronostique et prédictif de la localisation tumorale.

» De nouveaux marqueurs biologiques dans le cancer colorectal métastatique : miR-31-P, ERBB2.

» La centralisation chirurgicale obtient de meilleurs résultats en cas de cancer gastrique ou de l’œsophage, même chez les patients à faible risque opératoire.

» Les claudines : une nouvelle cible thérapeutique dans les cancers gastriques évolués.

» Le régorafénib est le nouveau standard chez les patients avec un carcinome hépatocellulaire résistant au sorafénib.

Mots-clés

Latéralité et cancers colorectaux

Cancer du rectum Cancer

de l’œsophage Cancer gastrique et anti-claudines Carcinome hépatocellulaire

Highlights

»Colorectal cancer: prognostic and predictive impact of tumor sideness.

»New biological markers in metastatic colorectal cancer:

miR-31-P, ERBB2.

»Surgical centralization achieves better results in gastric or esophageal cancer, even in patients with low operative risk.

»The Claudin family: a new target for advanced gastric cancer.

»Regorafenib: a new stan- dard of care for resistant HCC to sorafenib.

Keywords Colorectal carcinoma and sideness Rectal carcinoma Esophageal carcinoma Gastric cancer and claudin family

Hepatocellular carcinoma

Tableau I. Surveillance des cancers colorectaux de stade II/III.

Minimal

(n = 301) ACE

(n = 300) TDM

(n = 299) ACE et TDM

(n = 302) p

Récidive, n (%) 38 (12,6) 56 (12,7) 61 (20,4) 48 (15,9) 0,06

Chirurgie avec intention curative, n (%)

8 (2,7) 19 (6,3) 28 (9,4) 21 (7,0) 0,008

OR (IC95) 1 (ref) 2,4 (1,02-5,65) 3,69 (1,63-8,38) 2,78 (1,19-6,49)

Tableau II. Étude CRYSTAL : analyse des résultats en fonction de la localisation tumorale.

Cancers du côlon gauche (n = 280) Cancers du côlon droit (n = 84) FOLFIRI + cétuximab

(n = 142) FOLFIRI

(n = 138) FOLFIRI + cétuximab

(n = 33) FOLFIRI

(n = 51) Survie sans progression

(mois)

12,0 8,9 8,1 7,1

HR = 0,50 ; IC95 : 0,34-0,72 ; p = 0,0001 HR = 0,87 ; IC95 : 0,47-1,62 ; p = 0,66

Survie globale (mois) 28,7 21,7 18,5 15,0

HR = 0,65 ; IC95 : 0,50-0,86 ; p = 0,002 HR = 1,08 ; IC95 : 0,65-1,81 ; p = 0,76

Taux de réponse (%) 72,5 40,6 42,4 33,3

OR = 3,99 ; IC95 : 2,40-6,62 ; p < 0,001 OR = 1,45 ; IC95 : 0,58-3,64 ; p = 0,43

(3)

DOSSIER

La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 11 - décembre 2016 | 611

100 80

Survie globale (%)

60 40 20

00 12 24 36 48 60 72

38 50 Cétuximab + FOLFIRI Bévacizumab + FOLFIRI Patients à risque (n)

24 37

10 16

4 7

1 1

1 0

0 0 Mois

18,3 23,0

Cétuximab + FOLFIRI Bévacizumab + FOLFIRI HR = 1,31 ; IC95 : 0,81-2,11 ; p = 0,28

Cancers du côlon droit

100 80

Survie globale (%)

60 40 20

00 12 24 36 48 60 72

157 149

131 120

77 76

38 31

28 11

6 3

0 0 Mois

28,0 38,3

Cétuximab + FOLFIRI Bévacizumab + FOLFIRI HR = 0,63 ; IC95 : 0,48-0,85 ; p = 0,002

Cancers du côlon gauche

Figure 1. Étude FIRE-3. Survie globale en fonction de la localisation tumorale et du bras thérapeutique.

La comparaison des thérapies montre une fois encore des survies sans progression identiques entre les 2 molécules quelle que soit la localisation de la tumeur, aussi bien à droite qu’à gauche (tableau III).

En revanche, pour les cancers du côlon gauche, on peut observer une différence significative en termes de survie globale en faveur du cétuximab (38,3 versus 28 mois ; p = 0,002) [tableau III, figure 1]. Si l’on restreint la population aux patients RASwt et BRAFwt, éliminant ainsi les patients BRAFmut, les résultats sont très comparables à ceux de la population initiale.

Les résultats présentés aussi bien à l’ASCO® qu’à l’ESMO sont concordants et doivent inciter à aussi différencier les cancers en fonction de leur localisa- tion. Toutefois, ces résultats sont issus d’analyses rétrospectives initialement non prévues, qui ne prennent en compte qu’une faible partie des patients et sont focalisées sur la première ligne thérapeutique, sans pouvoir évaluer l’impact des traitements ulté- rieurs. Des recherches, en particulier biologiques, sont indispensables avant de modifier radicalement nos prescriptions.

Quadrithérapie

L’étude TRIBE a montré la supériorité de la quadri- thérapie FOLFOXIRI (acide folinique, 5-FU, oxali- platine, irinotécan) + bévacizumab sur l’association FOLFIRI + bévacizumab (3). Le groupe AIO a réalisé une étude de phase II ayant inclus 242 patients et qui a comparé l’association FOLFOX (acide folinique, 5-FU, oxaliplatine) + bévacizumab à la quadrithérapie (Schmoll HJ et al., abstr. LBA22). Le profil de tolérance a été classique (16 % de diarrhées sévères et 20 % de neutropénies, dont 1 % de neutropénie fébrile) et peu différent entre les 2 bras.

Si l’objectif principal a été atteint (survie sans progression de 9 mois), il n’était pas statistiquement différent du bras FOLFOX (survie sans progression à 9 mois : 68 versus 56 %, p = 0,08 ; médianes : 11,96 versus 9,76 mois ; HR = 0,77 ; p = 0,06). Ces améliorations se retrouvent dans tous les sous- groupes moléculaires (BRAFmut, RASmut et RASwt).

Les taux de réponse n’étaient pas différents entre la tri- et la bichimiothérapie (70 versus 60 % ; p = 0,16).

Tableau III. Étude FIRE-3 : analyse des résultats en fonction de la localisation tumorale.

Cancers du côlon gauche (n = 306) Cancers du côlon droit (n = 88) FOLFIRI + cétuximab

(n = 157) FOLFIRI + bévacizumab

(n = 149) FOLFIRI + cétuximab

(n = 38) FOLFIRI + bévacizumab (n = 50) Survie sans

progression (mois) 10,7 10,7 7,6 9,0

HR = 0,90 ; p = 0,38 HR = 1,44 ; p = 0,11

Survie globale (mois) 28,0 38,3 18,3 23,0

HR = 0,63 ; p = 0,002 HR = 1,31 ; p = 0,28

Taux de réponse (%) 68,8 61,7 52,6 50,0

OR = 1,31 ; p = 0,23 OR = 11,1 ; p = 0,83

(4)

Cancers digestifs

Actualités à l’ESMO 2016

612 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 11 - décembre 2016

Biologie

On sait qu’il existe des altérations d’ERBB2 dans les cancers colorectaux. L’activation de ce récepteur serait un des mécanismes de résistance aux anti- EGFR. F. Penault-Llorca (abstr. 459O) a présenté les résultats de l’analyse des altérations d’ERBB2 dans la population des patients inclus dans l’étude PETACC8, qui a comparé FOLFOX à FOLFOX + cétu- ximab en situation adjuvante dans les cancers du côlon de stade III. À partir de 1 795 prélèvements, 3,9 % d’altérations d’ERBB2 ont été retrouvés (FISH et NGS). Ces altérations étaient statistiquement plus fréquemment retrouvées en cas de statut RASwt (5,6 versus 2,4 % ; p < 0,001). La survie sans récidive était statistiquement diminuée dans cette popula- tion (HR = 1,8 ; p = 0,04), contrairement à la survie globale, qui n’était pas statistiquement modifiée.

Parmi les nouveaux marqueurs, P. Laurent-Puig a montré à partir des données des patients inclus dans l’étude FIRE-3, à l’ASCO® 2016, qu’un faible taux de miR-31-3P était associé à un meilleur pronostic chez les patients traités par cétuximab (amélioration de la survie globale, de la survie sans progression et du taux de réponse RECIST) [4]. À l’ESMO, il confirme ces données en montrant que les patients traités avec du cétuximab ayant un taux faible de miR-31-3P avaient des réponses plus précoces (OR = 4,11 ; IC95 : 2,14-7,92 ; p = 0,00002) et plus profondes (OR = 6,05 ; IC95 : 2,77-13,22 ; p = 0,000006) [Puig PL et al., abstr. 457O]. En revanche, dans le sous-groupe des patients avec un taux de miR-31-3P élevé, aucune différence n’a été observée entre les patients traités par cétuximab et ceux traités par bévaci- zumab concernant la précocité ou la profondeur de la réponse. De plus, on a pu noter que la proportion des patients atteints de tumeurs du côlon gauche avec un taux bas de miR-31-3P était quasiment 2 fois plus élevée qu’à droite (73 versus 39 %), ce qui pour- rait expliquer les très bons résultats retrouvés dans les cancers du côlon gauche traités par anti-EGFR.

Ce test n’est pour l’instant pas disponible en routine, mais une étude prospective française va débuter afin de confirmer ces résultats.

Dans l’étude METHEP-2, qui a évalué la place des trichimiothérapies associées aux thérapies ciblées chez les patients atteints de métastases hépatiques non résécables, des prélèvements sanguins avant traitement et au moment du troisième cycle, recher- chant les cellules tumorales circulantes (CTC) et l’ADN tumoral circulant (ADNtc), ont pu être réalisés chez 153 des 256 patients inclus dans l’étude (Bidard FC et al., abstr. 456O). La présence d’au moins 3 CTC

n’était retrouvée que chez 19 % de la population avant traitement et chez 3 % après 4 semaines, mais elle avait une forte valeur pronostique concer- nant la survie globale (respectivement HR = 2,8 et 10,4). De plus, dans le sous-groupe des patients avec KRASmut, la présence d’ADNtc à 4 semaines était associée à une plus grande probabilité de non- résection des métastases hépatiques.

Enfin, M.A. Glaire (abstr. 460O) a présenté les caractéristiques d’un petit sous-groupe de cancers colorectaux : les tumeurs mutées POLE (poly mérase E). À partir des patients inclus dans différentes études cliniques (VICTOR, QUASAR2, PETACC-3) et plusieurs cohortes, 66 patients sur 6 277 présentaient une mutation de POLE. Ces tumeurs ont des caractéristiques particulières : sexe masculin dans 75 % des cas, patients jeunes, porteurs de cancers du côlon droit, souvent de stade II, et de statut MMR dans 100 % des cas. Elles ont un excellent pronostic et présentent plus de mutations que les cancers MSI, ce qui en ferait une population idéale pour l’immunothérapie.

Cancers digestifs non colorectaux

Cancers de l’œsophage et du cardia La question de la centralisation de la prise en charge de la chirurgie lourde a été posée par C. Mariette, au nom du groupe d’étude FREGATE (Gronnier C et al., abstr. 609O). Le développement de stratégies thérapeutiques de plus en plus sophistiquées, associé à une exigence de plus en plus élevée concernant la qualité et les résultats, aboutit inévitablement à poser la question de l’organisation sanitaire autour de centres à haut volume. Tous les dossiers des patients ayant eu, en France, une résection gastrique ou œsophagienne pour cancer (en dehors des formes métastatiques) entre janvier 2010 et janvier 2012 ont été analysés à partir du codage informatique national. Tous les centres, publics et privés, ont été répartis entre 4 groupes, en fonction de leur volume opératoire, de faible (< 20 opérations/an) à très élevé (≥ 60 opérations/an) ; les patients ont été stratifiés en fonction de leurs comorbidités (score de Charlson).

Sur plus de 11 000 interventions, 7 000 ont été réali- sées dans des centres à faible volume et 500 dans des centres à très haut volume. Globalement, les patients opérés dans les centres à faible volume étaient plus âgés, avec plus de comorbidités,

(5)

Cancers digestifs

DOSSIER

Actualités à l’ESMO 2016

614 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 11 - décembre 2016

mais ils étaient moins dénutris et ont été opérés plus fréquemment d’un cancer gastrique. Dans les centres à très haut volume, ils étaient plus jeunes mais plus dénutris, même s’ils avaient moins de comorbidités et avaient proportionnellement plus de cancers de l’œsophage. La réalisation d’un traite- ment préopératoire augmentait avec le volume du centre, de 31,2 % pour les centres à faible volume à 50,8 % pour les très gros centres (p < 0,001). La réduction du risque de mortalité opératoire à 3 mois était globalement de 70 % en faveur des très gros centres par rapport aux petits centres, et ce indé- pendamment du score de comorbidités de Charlson (par exemple, il y a eu 30,9 % de décès à 3 mois chez les patients avec au moins 3 comorbidités selon la classification de Charlson dans les centres à faible volume contre 11,1 % dans les centres à très haut volume) ; la réduction du risque de mortalité est de 86 % pour les cancers de l’œsophage et de 46 % pour les cancers gastriques (tableau IV). Les limites de cette étude sont sa nature rétrospective et l’ab- sence d’informations sur le devenir à long terme des patients. La conclusion à tirer de cette étude est que le risque élevé de décès postopératoire pour ce type de chirurgie lourde est confirmé ; il faut donc aller vers une plus grande centralisation. Cependant, tout ne se résume pas au volume ; la structuration du système de santé influence fortement les résultats : ainsi, la Suède a des taux de mortalité postopéra- toire presque 3 fois plus faibles que l’Angleterre, bien qu’elle n’ait aucun centre de haut volume.

Le groupe AGITG a rapporté les premiers résultats d’une étude de phase II randomisée ayant évalué l’intérêt d’associer une radiochimiothérapie à une chimiothérapie néo-adjuvante en cas de chimio-

résistance dans les cancers résécables de l’œsophage ou du cardia (Barbour A et al., abstr. 610O). Après une première cure de chimiothérapie par platine + 5-FU, les patients ont eu un PET scan d’évaluation, comparé à celui réalisé lors du bilan initial. En l’ab- sence de réponse métabolique, une randomisa- tion était effectuée entre un schéma docétaxel + platine + 5-FU associé ou non à de la radiothérapie (45 Gy). L’objectif principal était d’évaluer le taux de réponse histologique majeure (< 10 % de cellules tumorales). Au total, 66 patients ont eu une rando- misation. Le taux de chirurgie R0 a été de 94 % dans le bras radiochimiothérapie et de 64 % dans le bras chimiothérapie seule. De plus, 67 % des patients ayant une radiochimiothérapie, contre 21 % de ceux qui ont une une chimiothérapie, avaient moins de 10 % de cellules tumorales

résiduelles. Ces premiers résultats suggèrent une synergie entre la radiothérapie et la chimiothérapie chez les patients chimiorésistants. Un suivi plus long est nécessaire pour démontrer un avantage en survie.

Une étude chinoise de phase III a évalué l’intérêt de la radiochimiothérapie préopératoire compa- rativement à la chirurgie seule dans les cancers épidermoïdes de l’œsophage localement évolués de stade IIB-III (Yang H et al., abstr. 611O). L’asso- ciation vinorelbine + cisplatine, assez peu utilisée en France, a été associée à une radiothérapie déli- vrant 40 Gy. Au total, 451 patients ont été inclus, dont 84 % avaient une tumeur de stade III. Le taux de résection R0 a été amélioré dans le bras radio- chimiothérapie (98,4 versus 91,2 % ; p = 0,002), mais l’analyse a été faite en per protocole, car 39 patients dans le groupe combiné n’ont pas été

Tableau IV. Analyse nationale française de la mortalité postopératoire pour cancer de l’estomac ou de l’œsophage.

Caractéristiques (%) Faible volume

(n = 7 184) Volume moyen

(n = 1 901) Haut volume

(n = 1 587) Très haut volume (n = 524)

Estomac/œsophage 80,5/19,5 55,3/44,7 56,5/43,5 33,6/66,4

Âge ≥ 60 ans 77,3 70,1 66,2 62,6

Score de Charlson ≥ 3 5,8 6,2 8,1 5,2

Malnutrition 22,8 31,8 21,8 55,3

Traitement néo-adjuvant 31,2 46,5 50,4 50,8

Décès postopératoire, 30 j (global) Score de Charlson 0

Score de Charlson ≥ 3

5,7 4,0 14,7

4,3 2,5 16,3

3,3 2,6 3,9

1,7 1,1 3,7 Décès postopératoire, 90 j

Score de Charlson 0 Score de Charlson ≥ 3

10,2 7,4 30,9

7,9 5,1 24,8

6,7 4,2 12,4

3,6 2,4 11,1

(6)

La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 11 - décembre 2016 | 615

100

80

Survie globale (%)

60

40

20

00 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11

Années Radiochimiothérapie + chirurgie

Chirurgie seule

HR = 0,71 ; IC95 : 0,52-0,98 ; p = 0,035

Figure 2. Cancers de l’œsophage : radiochimiothérapie + chirurgie versus chirurgie.

opérés et n’ont pas été inclus dans l’analyse du taux de résection R0. Le taux de stérilisation de la pièce opératoire a été particulièrement élevé – 43,2 % – dans le bras combiné ; de plus, la survie globale a été améliorée (HR = 0,71 ; IC95 : 0,52-0,98 ; p = 0,035) [figure 2]. Cette étude confirme les données de l’étude hollandaise CROSS (5). Cependant, on est surpris par une quasi-absence de retentissement de la radiochimiothérapie sur les suites opératoires et par un taux de décès postopératoire particulièrement bas (0,4 % dans le bras chirurgie seule, contre 2,2 % dans le bras combiné) ; de plus, le suivi est assez court (30,6 mois). Ces limites imposent donc de disposer de la totalité des données avant d’intégrer ces résultats dans nos référentiels.

Cancers gastriques

L’olaparib a été testé dans l’étude de phase III GOLD, dans le cancer gastrique évolué en deuxième ligne en association avec le paclitaxel (Bang YJ et al., abstr. LBA25). L’olaparib est un inhibiteur de PARP provoquant des cassures des brins d’ADN, commer- cialisé dans les cancers de l’ovaire avec mutation de BRCA. Lorsqu’elle est associée avec le paclitaxel, cette molécule a démontré, dans une étude de phase II randomisée (6), une amélioration de la survie globale des patients porteurs de cancers gastrique évolués, et tout particulièrement chez ceux dont la tumeur n’exprimait pas la protéine ATM (Ataxia Telangiectasia Mutated). Ces données ont servi de base à la concep- tion de l’étude GOLD, qui a inclus 525 patients. Il y avait 2 objectifs primaires : l’amélioration de la survie globale de tous les patients (objectif : HR = 0,7) et l’amélioration de la survie globale pour la population ATM– (objectif : HR = 0,35). La survie globale a été de 8,8 mois dans le bras olaparib + paclitaxel, contre 6,9 mois dans le bras placebo + paclitaxel ; le HR de 0,79 est en dessous de l’objectif préspécifié. De plus, dans le sous-groupe des patients ATM– (18 % de la population), la survie médiane est passée de 10 à 12 mois avec l’olaparib (HR = 0,73), là aussi très en deçà des objectifs initiaux. Ces résultats négatifs tranchent avec ceux, très prometteurs, de l’étude de phase II randomisée. Parmi les différences, on pourra noter une proportion plus faible de patients ATM– (18 versus 50 %) ; par ailleurs, la dose utilisée d’olaparib était assez faible. Cette étude ne clôt pas le développement de cette molécule dans les tumeurs BRCA muté ; une meilleure sélection de la popula- tion, en particulier chez les TP53 muté, semble une voie intéressante.

M. Schuler (abstr. 614O) a présenté les résultats finaux de l’étude de phase II randomisée FAST, qui évalué l’anticorps chimérique IMAB362 sur une protéine CDLN18-2. Cette protéine est membre de la famille des claudines, qui sont des composants majeurs des jonctions serrées intercellulaires. Les claudines ne sont pas exprimées dans les tissus sains, à l’exception de la muqueuse gastrique, mais sont difficilement accessibles à l’IMAB362. Le mécanisme d’action de l’IMAB362 est assez original, car il n’agit que par l’intermédiaire d’une cytotoxicité médiée par les anti- corps (ADCC) ou par le complément (CDC) ; il favorise également l’infiltration tumorale par les cellules T.

L’étude de phase II randomisée FAST a comparé une chimiothérapie de type EOX (épirubicine, oxaliplatine, capécitabine) associée ou non à l’IMAB362 dans les adénocarcinomes œsogastriques évolués ; les tumeurs devaient surexprimer la CDLN18-2 (score 2+ ou 3+

sur ≥ 40 % des cellules en immunohistochimie).

L’objectif principal de l’étude était d’améliorer la survie sans progression. Globalement, sur 730 patients sélec- tionnés, 252 avaient une surexpression de CDLN18-2 et 246 ont été traités par EOX seul (n = 84) ou associé à l’IMAB362 800/600 mg/m2 (n = 77) ou à l’IMAB362 1 000 mg/m2 (n = 85). La tolérance de l’IMAB362 a été excellente : malgré une augmentation des vomis- sements, de l’hypersalivation et des neutropénies.

La survie sans progression et la survie globale ont été significativement augmentées dans le bras avec IMAB362 600/800 mg/m2 par rapport à l’EOX seul (respectivement 7,9 versus 4,8 mois ; HR = 0,47 ; IC95 : 0,31-0,70 ; p = 0,0001, et 13,8 versus 8,4 mois ; HR = 0,51 ; IC95 : 0,36-0,73 ; p = 0,0001). Les résultats

(7)

Cancers digestifs

DOSSIER

Actualités à l’ESMO 2016

l e c o u r r i e r d u s p é c i a l is t e

SUPPLÉMENT

Société éditrice : EDIMARK SAS CPPAP : 0317 T 81579 – ISSN : 1165-113X PÉRIODIQUE DE FORMATION EN LANGUE FRANÇAISE Suppl. au vol. XXV - n° 11

Décembre 2016

Attention, ceci est un compte-rendu de congrès et/ou un recueil de résumés de communications de congrès dont l’objectif est de fournir des informations sur l’état actuel de la recherche

; ainsi, les données présentées sont susceptibles de ne pas être validées par les autorités de santé fr

ançaises et ne doivent donc pas être mises en pr atique. Le contenu est sous la seule

responsabilité du coordonnateur, des auteurs et du directeur de la publication qui sont gar ants de son objectivité. Experts :

Drs Philippe Beuzeboc (Paris) et Anne Visbecq (Cheffes-sur-Sarthe) Cancers de la prostate Cancers urothéliaux Cancers du rein Cancers du testicule Actualités sur les cancers urologiques d’après le congrès de l’ESMO European Society for Medical Oncology Copenhague, 7-11 octobre 2016

Ce numéro a été réalisé avec le soutien institutionnel de

Abonnez-vous

sur

www.edimark.fr

Avec ce numéro , un supplément UROLOGIE

Actualités

sur les cancers urologiques à l’ESMO 2016

Supplément rédigé par les Drs Philippe Beuzeboc (Paris) et Anne Visbecq (Cheff es-sur-Sarthe)

étaient similaires dans le bras IMAB362 1 000 mg/m 2 (survie sans progression : 7,1 mois [HR = 0,59] ; survie globale : 9,7 mois [HR = 0,76]). Les résultats de cette étude sont particulièrement encourageants, car ils pourraient s’appliquer particulièrement aux tumeurs à cellules indépendantes. Ils doivent cependant être confi rmés par une étude de phase III qui aura réglé auparavant la question du meilleur protocole de chimiothérapie à associer à l’IMAB362 et celle de la population sélectionnée (40 % ou 70 % des cellules exprimant CDLN18-2).

Carcinome hépatocellulaire primitif Le régorafénib a été évalué contre placebo dans une étude de phase III en seconde ligne chez les patients porteurs d’un hépatocarcinome résistant au sora- fénib : l’étude RESORCE (Bruix J et al., abstr. LBA28) . Les patients devaient avoir bien toléré le sorafénib en première ligne et devaient avoir une fonction hépatique conservée, Child-Pugh A. Les premiers résultats ont été présentés à Barcelone cet été. Le sorafénib a atteint son objectif en augmentant la médiane de survie globale par rapport au placebo (10,6 versus 7,8 mois ; HR = 0,63 ;

IC 95 : 0,50-0,79, p < 0,001), mais aussi la survie sans progression (3,1 versus 1,5 mois ; HR = 0,46 ; IC 95 : 0,37-0,56 ; p < 0,001), le taux de réponse (10,6 versus 4,1 % ; p = 0,009) et le taux de contrôle de la maladie (65,2 versus 36,1 % ; p < 0,001). Le taux d’effets indé- sirables de grade 3-4 était de 67 % pour le régorafénib, contre 39 % pour le placebo (on voit bien la diffi culté de faire la différence entre les symptômes liés à la maladie et les effets secondaires induits par un traitement).

Les effets indésirables des traitements ont abouti à un arrêt défi nitif du régora fénib ou du placebo chez respectivement 10 % et 4 % des patients. La qualité de vie a été évaluée par 5 questionnaires : 3 d’entre eux (EQ-5D index, EQ-5D VAS, FACT-G) n’ont retrouvé aucune différence statistique entre le régorafénib et le placebo ; pour les 2 autres (Fact-Hep Total et Trial Outcome Index), les résultats du régorafénib étaient inférieurs à ceux du placebo ; mais ces études n’ont pas été cliniquement pertinentes car les différences ne dépassaient pas le seuil minimal clinique. Au total, le régorafénib devrait prendre une place de choix chez les patients avec un hépatocarcinome évolué tolérants au sorafénib pour lesquels la maladie devient résistante.

La gestion des effets indésirables reste cependant un

problème au quotidien.

É. François déclare avoir des liens d’intérêts avec Roche, Merck, Sanofi , Novartis.

1. Lefevre JH, Mineur L, Kotti S et al. Effect of interval (7 or

11 weeks) between neoadjuvant radiochemotherapy and surgery on complete pathologic response in rectal cancer:

a multicenter, randomized, controlled trial (GRECCAR-6).

J Clin Oncol 2016. [Epub ahead of print]

2. Venook AP, Niedzwiecki D, Innocenti F et al. Impact

of primary (1º) tumor location on overall survival (OS) and progression-free survival (PFS) in patients (pts) with metastatic colorectal cancer (mCRC): analysis

of CALGB/SWOG 80405 (Alliance). ASCO ® 2016:

abstr. 3504.

3. Loupakis F, Cremolini C, Masi G et al. Initial therapy with FOLFOXIRI and bevacizumab for metastatic colorectal cancer. N Engl J Med 2014;371:1609-18.

4. Puig PL, Grisoni ML, Heinemann V et al. MiR 31 3p as a predictive biomarker of cetuximab effi cacy effect in meta- static colorectal cancer (mCRC) patients enrolled in FIRE-3 study. ASCO ® 2016: abstr. 3516.

5. van Hagen P, Hulshof MC, van Lanschot JJ, et col. Pre-

operative chemoradiotherapy for esophageal or junctional cancer. N Engl J Med 2012;366:2074-84.

6. Bang YJ, Im SA, Lee KW et al. Randomized, double-

blind phase II trial with prospective classification by ATM protein level to evaluate the efficacy and tolera- bility of olaparib plus paclitaxel in patients with recur- rent or metastatic gastric cancer. J Clin Oncol 2015;33:

3858-65.

Références bibliographiques

Références

Documents relatifs

 à l’attraction terrestre appelée poids verticale vers le bas et d’intensité 0,038N qui devrait donc faire couler le liquide à travers l’orifice.  à la force

Comme l’a clamé avec humour un vénérable cancérologue israélien : “Mes vieux yeux ne peuvent plus distinguer les 2 courbes de survie, mais de toute façon mes patients, tout

En revanche, dans le groupe CDX2– (n = 48), les patients qui avaient reçu une chimiothérapie adjuvante présentaient une survie sans récidive statistiquement améliorée par

➤ ARIEL 3, qui étudie un traitement d’entretien après chimiothérapie à base de sels de platine chez des patientes atteintes d’un cancer de l’ovaire séreux

Les résultats de cette étude ont été publiés dans le New England Journal of Medicine le jour même de sa présentation (3), et la FDA a enregistré le pembrolizumab comme trai-

L’étude de phase III, avec contrôle placebo, FALCON avait pour objectif de confirmer la supériorité en survie sans progression du fulvestrant par rapport à l’anastrozole chez

L’étude du CALGB/SWOG 80405, dont on rappelle qu’elle a comparé en première ligne une chimio- thérapie avec cétuximab à une chimiothérapie avec bévacizumab chez des

Les résultats intermédiaires de l’étude de phase II randomisée HALO-109-202, évaluant l’association du PEGPH20 à une CT par gemcitabine et nab-paclitaxel chez des patients