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Cancers digestifs

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Academic year: 2022

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542 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXVI - n° 11 - décembre 2017

DOSSIER

Actualités à l’ESMO 2017

Cancers digestifs

Digestive cancers

É. François*

* Centre Antoine-Lacassagne, Nice.

Cancers de l’œsophage

La chirurgie du cancer de l’œsophage est une opéra- tion lourde associée à une morbidité, en particu- lier respiratoire, importante. Une étude contrôlée, MIRO, a montré qu’une approche complètement mini- invasive diminue les complications respiratoires postopératoires et améliore la qualité de vie, sans altérer les résultats carcinologiques à moyen terme.

G. Piessen, au nom de C. Mariette, a présenté les résul- tats actualisés de l’étude MIRO (abstr. 615O_PR), qui a comparé une approche classique ouverte (laparotomie et thoracotomie) à une approche hybride (laparoscopie et thoracotomie) dans les cancers résécables du tiers moyen ou du tiers inférieur de l’œsophage. L’objectif principal de cette étude, qui a inclus 207 patients, était le taux de morbidité sévère 30 jours après l’opé- ration. Les caractéristiques des 2 populations étaient comparables (59,5 % d’adénocarcinomes, 69,1 % de tumeurs du tiers inférieur, 73,4 % de patients ayant reçu un traitement néo-adjuvant).

L’approche hybride a diminué de manière très significa- tive les complications postopératoires de grade II-IV, de 64,4 à 35,9 % (OR = 0,31 ; IC95 : 0,18-0,55 ; p < 0,000 1).

Ces résultats ont été particulièrement nets pour les complications respiratoires, qui sont passées de 30,1 à 17,7 %. D’un point de vue oncologique, les résultats étaient identiques dans les 2 groupes : il y a eu 95,1 % de résections R0 dans le groupe hybride, contre 98,1 % dans le groupe ouvert, avec une survie sans récidive à 3 ans de respectivement 57 et 48 % (p = 0,15). Il y a même une tendance non significative à une meilleure survie globale à 3 ans pour les patients traités par l’ap- proche hybride (67 versus 55 % ; p = 0,054), dont on doit cependant pondérer le résultat en raison de la taille de l’étude. Cette approche hybride est donc un nouveau standard de la chirurgie carcinologique œsophagienne, mais elle nécessite une véritable expertise.

Cancers gastriques

Le cancer gastrique se distingue particulièrement cette année par la qualité des études qui lui ont été

consacrées. Tout d’abord, le groupe AIO a actua- lisé les résultats d’une étude de phase III de grande ampleur (Al-Batran S et al., abstr. LBA27). Celle-ci a inclus 716 patients atteints d’un cancer de l’estomac ou du cardia opérable (≥ cT2 ou N+). Ils ont été randomisés entre une chimiothérapie péri opératoire de type FLOT4 (5-FU, acide folinique, oxaliplatine et docétaxel) et un schéma ECF/ECX (épirubicine, cisplatine et 5-FU ou capécitabine).

Une première présentation au congrès américain en oncologie clinique avait permis de montrer un béné- fice en termes de survie globale (50 versus 35 mois ; p = 0,0012), de survie sans récidive (18 versus 30 mois ; p = 0,004) et de taux de chirurgie R0 (77 versus 84 % ; p = 0,011) en faveur du groupe FLOT4. À Madrid, ces résultats ont été confirmés, y compris dans les sous-groupes pronostiques. Cette tri thérapie à base de docétaxel était supérieure en cas de petites (cT1-2) ou de grosses (cT3-4) tumeurs, en présence ou non d’atteintes ganglionnaires (cN+

et cN−), dans les cancers de Barrett, chez les sujets âgés et surtout en présence de cellules en bague à chaton. Ce schéma (4 cures avant et 4 cures après l’opération) s’impose donc comme le nouveau stan- dard de la chimiothérapie périopératoire dans les cancers localement évolués de l’estomac ou du cardia.

L’immunothérapie occupe une place de plus en plus importante dans la prise en charge du cancer gastrique.

Tout d’abord, l’étude de phase II multicohortes KEYNOTE-059 (Wainberg ZA et al., abstr. LBA28_PR) a testé le pembrolizumab dans différentes configura- tions : en monothérapie chez des patients déjà traités (cohorte 1), en association avec une chimiothérapie par fluoropyrimidine + cis platine chez des patients en première ligne (cohorte 2) et en monothérapie chez des patients naïfs de tout traitement atteints de tumeurs exprimant PD-L1 (cohorte 3).

En ce qui concerne la cohorte 1, 259 patients ont été inclus ; sur les 224 évaluables, le taux de réponses RECIST global a été de 12 %, avec des chiffres plus élevés en troisième ligne (16 %) qu’en quatrième (7 %) et chez les patients PD-L1+ (16 %, contre 6 % pour les patients PD-L1–). Pour les 25 patients inclus dans la cohorte 2, les taux de réponses ont été de 60 %

(2)

0 100

80 60 40 20

0 2 4 6 8 10 12

27 mois 12 mois 4,1 mois

(IC95 : 3,4-4,9)

5,3 mois (IC95 : 4,6-6,4)

5 mois12 mois 14

HR = 0,62 ; IC95 : 0,50-0,76 ; p < 0,0001 Suivi médian : 15,7 mois (extrêmes : 12,1-27,2)

Patients à risque (n) Mois

Probabilité de survie globale (%)

16 18 20 22 24 26 28

Nivolumab Placebo

330 275 192 143 123 97 84 54 34 22 12 7 6 1 0

163 121 82 54 37 24 18 8 6 5 4 3 3 2 0

Figure 1. Étude ATTRACTION-02 (nivolumab versus placebo) : résultats de survie globale dans les cancers gastriques évolués.

(IC 95 : 39-79), là aussi plus élevés dans le groupe PD-L1+ (69 % ; IC 95 : 41-89) que dans le groupe PD-L1–

(38 % ; IC 95 : 9-76). Les résultats de de survie sans progression médiane (6,6 mois ; IC 95 : 5,9-10,6) et de survie globale médiane (13,8 mois ; IC 95 : 8,6-NA), bien qu’intéressants, devront être confi rmés. Un suivi plus long et des études de phase III permettront de mieux déterminer la place de l’immunothérapie au début de la phase métastatique.

En monothérapie, un taux de réponses de 26 % (IC 95 : 12-45) et une survie globale de 20,7 mois ont été observés avec le pembrolizumab, en première ligne, chez des patients ayant une tumeur PD-L1+ (cohorte 3).

Il y a eu 23 % de toxicités sévères (grade 3-5), dont 1 cas de pneumopathie ayant entraîné le décès du patient.

Les études de phase III en cours confi rmeront la place de l’immunothérapie en début de phase métastatique et l’intérêt de l’analyse du statut de PD-L1.

Enfi n, les résultats de l’étude asiatique ATTRAC- TION-02, qui a comparé le nivolumab à un placebo (randomisation : 2:1) chez 493 patients atteints d’un cancer gastrique ou de la jonction œsogastrique, réfractaires ou intolérants à 2 lignes de chimio- thérapie minimum, ont été actualisés (Boku N et al., abstr. 617O). L’objectif principal de l’étude, l’amélio- ration de la survie globale, a été atteint (fi gure 1) .

Avec un suivi de 15,7 mois, la médiane de survie globale est passée de 4,1 à 5,3 mois (HR = 0,62 ; IC 95 : 0,50-0,76 ; p < 0,000 1). À 12 mois, 27 % des patients étaient vivants dans le bras nivolumab, contre 12 % dans le bras placebo ; à 2 ans, ces chiffres étaient de 12 versus 5 %. Cette étude est la première à démon- trer un bénéfi ce en survie globale dans une étude de phase III dans le cancer gastrique évolué. Y a-t-il un intérêt à reproduire le même schéma d’étude dans une population occidentale ?

Cancers du pancréas

La voie métabolique peut-elle mener au succès dans le traitement du cancer du pancréas ?

Le CPI-613, associé au FOLFIRINOX (5-FU, oxali- platine et irinotécan), a montré des résultats très prometteurs dans les cancers du pancréas (Alistar AT et al., abstr. 1733PD). Le CPI-613, premier de sa classe thérapeutique, est un inhibiteur du métabolisme mitochondrial qui bloque 2 enzymes clés (la pyruvate déshydrogénase et l’ α- kétoglutarate déshydrogénase) de l’activité mitochondriale. Associé au FOLFIRINOX, il augmenterait la production de radicaux libres et favoriserait l’apoptose. Dans l’étude de phase I/II,

zumab pourrait être une option acceptable pour les tumeurs RAS muté. Voie métabolique

Highlights

» Overall survival is improved in pretreated advanced gastric carcinoma by immunotherapy.

» Locally advanced gastric cancer: the FLOT-4 regimen is the new standard for periope- rative chemotherapy, effective in all subgroups of patients.

» IDEA study: 3 months of adjuvant chemotherapy with capecitabine-oxaliplatin regimen are suffi cient for colon cancer pT3N1.

» Metastatic colorectal cancer:

sequential treatment with fl uoro pyrimidine and bevaci- zumab could be an acceptable option for mutated RAS tumors.

Keywords

Immunotherapy

Perioperative chemotherapy:

FLOT4 IDEA

Metabolic pathway

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544 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXVI - n° 11 - décembre 2017

Cancers digestifs

DOSSIER

Actualités à l’ESMO 2017

0 100

80 60 40 20

0 20

18,5 mois (IC95 : 12,6-38,2)

30,4 mois (IC95 : 15,4-43,0)

40 60

Mois

80 GEMOX

GEMOX SSR à 36 mois (%) 4743 Surveillance

Surveillance

HR = 0,88 ; IC95 : 0,62-1,25 ; p = 0,47 Suivi médian : 46,5 mois

Survie sans récidive (%)

Figure 2. Étude PRODIGE 12 : survie sans récidive en cas d’adénocarcinome des voies biliaires.

dont les résultats ont été présentés à l’ESMO et récemment publiés (1) , le taux de réponses RECIST a été de 61 % (11/18), dont 3 réponses complètes. La survie sans progression était de 10,4 mois, et la survie globale, de 20,1 mois. Les principaux événements indésirables, en dehors d’une hyperglycémie sévère retrouvée chez 61 % des patients, sont ceux habi- tuellement observés avec le schéma FOLFIRINOX : diarrhées, douleurs abdominales, neuropathies, leucopénie, thrombo pénie. Une étude contrôlée doit confi rmer ces débuts prometteurs.

Dans les cancers du pancréas, on observe une sur expression de l’asparagine synthétase (ASNS) en réponse à l’hypoxie et au déficit glucidique aboutissant à la néo-synthèse d’asparagine.

La L -asparaginase catalyse l’hydrolyse de la L-asparagine et pourrait donc agir sur le métabo- lisme tumoral. L’eryaspase est de la L-asparaginase encapsulée dans des globules rouges. Elle a été associée à de la gemcitabine ou du FOLFOX (oxali- platine, acide folinique et 5-FU) en deuxième ligne métastatique. L’étude française de phase II rando- misée GRANSPANC (Hamel P et al., abstr. 621PD) a évalué gemcitabine ou FOLFOX en fonction du type de chimiothérapie de première ligne avec et sans eryaspase. L’objectif principal était un coprimaire : amélioration de la de la survie globale et de la survie sans progression chez les patients ayant une expression tumorale 0/1+ de l’ASNS. Les résultats étaient positifs pour l’ensemble de la population : 8,6 versus 7 semaines de survie sans progression (HR = 0,59 ; p = 0,011) et 26,1 versus 19,0 semaines de survie globale (HR = 0,60 ; p = 0,009) ; les taux

de réponses RECIST étaient de 11 versus 3 %. En revanche, malgré des résultats encourageants dans la population cible (ASNS 0/1+), la signifi cativité statistique n’a pas été atteinte (survie sans progres- sion : HR = 0,72, p = 0,164 ; survie globale : HR = 0,65, p = 0,07). La tolérance a été tout à fait satisfaisante et non différente dans les 2 bras (troubles digestifs et hématotoxicité). Cette étude très originale et prometteuse devrait confi rmer ces résultats dans le cadre d’une phase III.

Cancers des voies biliaires

Cette année a été riche en ce qui concerne les trai- tements adjuvants des cholangiocarcinomes, avec la présentation de l’étude française à l’ASCO® GI à San Francisco et de l’étude anglaise à Chicago. J. Edeline et al. (abstr. LBA29) ont présenté les résultats actua- lisés de l’étude PRODIGE 12-ACCORD 18, qui a comparé, chez 196 patients opérés d’un cholangio- carcinome, 6 mois de GEMOX (gemcitabine, sel de platine et oxaliplatine) à une simple surveillance (fi gure 2) . L’objectif principal était double : améliorer la survie sans récidive et la qualité de vie.

Bien que la médiane de survie soit passée de 18,5 à 30,4 mois, le HR était de 0,88 (IC 95 : 0,62-1,25), non signifi catif, avec p = 0,47. La qualité de vie n’était pas différente dans les 2 groupes. De même, la survie globale n’était pas améliorée dans le groupe traité (50,8 versus 75,8 mois) [HR = 1,08 ; IC 95 : 0,70-1,66 ; p = 0,74]. L’analyse de sous-groupes à risques (N+, R1, cholangiocarcinomes intra- ou extrahépatiques) n’a pas montré d’élément positif en faveur de la chimiothérapie adjuvante, à l’exception notable des cancers de la vésicule biliaire. En effet, dans ce groupe, la chimiothérapie adjuvante a fait statisti- quement moins bien que la surveillance (HR = 2,56 ; p = 0,042), et ce, sans explication à ce jour. Le schéma GEMOX ne peut donc pas être recom- mandé après exérèse d’un cholangio carcinome.

L’essai à venir (ACTICCA-01) et des analyses grou- pées permettront de mieux comprendre les résultats des études PRODIGE, BILCAP et ATTICA-01.

Cancers colorectaux

Cancers du rectum

La chirurgie du rectum a considérablement évolué ces 20 dernières années. La laparotomie a peu à peu cédé sa place à la cœlioscopie, dont plusieurs

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études de phase III ont validé l’intérêt. La chirurgie robotique est la dernière venue.

Une équipe de Shanghai (Xu J et al., abstr. 482PD) a comparé, dans une étude de phase III, laparo- tomie, cœlioscopie et chirurgie robotique. En 4 ans, 506 patients atteints d’une tumeur du tiers inférieur du rectum (moins de 5 cm de la marge anale) ont été inclus par une seule équipe ! Avec 10,4 % de morbidité à 30 jours, la chirurgie robotique a été supérieure à la laparoscopie (18,8 % ; p = 0,027) et à la laparotomie (26,0 % ; p < 0,001). Si la procé- dure opératoire était plus longue, elle entraînait moins souvent une hémorragie, et la reprise du transit était plus rapide : la sortie du patient a pu être envisagée plus tôt. La limite majeure de cette étude est son caractère unicentrique et les résultats extraordinairement bons : 0 % de mortalité, 0 % de conversion en laparotomie. Ces résultats devront donc être confirmés par une étude multicentrique contrôlée.

Cancers du côlon :

traitements adjuvants et néo-adjuvants

Traitements néo-adjuvants

Une chimiothérapie première dans les cancers coliques pourrait éliminer très tôt les micro- métastases, induire une régression de stade, augmenter le taux de chirurgie R0, et, de ce fait, améliorer la survie globale. C’est cette hypothèse qui a été testée par l’étude PRODIGE 22 ECKINOXE, présentée par M. Karoui (abstr. 476O). Les tumeurs

“gros T3”, T4 et N2 ont été sélectionnées à partir de données scanographiques ; les traitements ont ensuite été randomisés entre une attitude classique chirurgicale suivie de 6 mois de chimiothérapie adjuvante par FOLFOX et une chimiothérapie néo- adjuvante par FOLFOX (4 cures) puis 8 cycles de chimiothérapie postopératoire. Les tumeurs RAS sauvage avaient également la possibilité de rece- voir une association FOLFOX + cétuximab (rando- misation à 3 bras). L’objectif principal de l’étude était d’obtenir au moins 10 % de stérilisation ou de quasi-stérilisation tumorale (TRG1) selon la classi- fication de Ryan (2). Une analyse intermédiaire, réalisée après l’inclusion de 13 patients dans chaque bras, a conduit à l’arrêt du bras FOLFOX + cétu- ximab en raison d’une toxicité excessive (15,3 % de toxicités postopératoires sévères) et de l’absence de régression tumorale.

Au total, 120 patients ont été inclus, dont 104 avec chirurgie seule ou précédée par du FOLFOX. L’objectif

principal n’a pas été atteint, car le taux de TRG1 n’a été que de 8 %. En revanche, le taux de régression complète ou majeure (TRG1 ou TRG2) a été de 44 % dans le bras chimiothérapie, contre 8 % dans le bras chirurgie seule (p < 0,001). La diminution de stade a été effective : 37,5 % de tumeurs T4 ou N2 dans le bras chimiothérapie, 59 % dans le bras chirurgie (p = 0,033). Cette étude négative fournit néan- moins des informations très intéressantes, comme la difficulté de classer les tumeurs à partir de données scanographiques, puisque, dans le bras chirurgie, 39 % des tumeurs étaient de stade II.

Traitements adjuvants

L’étude IDEA, qui a regroupé les données de 6 études adjuvantes de phase III ayant évalué la réduction de la chimiothérapie de 6 à 3 mois chez des patients atteints d’un cancer de stade III, a été initialement présentée au congrès améri- cain en oncologie clinique de 2017. Une session spéciale lui a été consacrée à l’ESMO (Grothey A et al., abstr. LBA21_PR). L’objectif de l’étude IDEA était d’évaluer la non-infériorité d’un schéma de 3 mois, par rapport à 6 mois, de chimiothérapie à base d’oxaliplatine sur la survie sans récidive à 3 ans. Les données des patients des 6 études ayant participé (SCOT, principalement anglaise ; TOSCA, italienne ; ALLIANCE, nord-américaine ; ACHIEVE, japonaise ; HORG, grecque ; IDEA, française) ont été analysées ; seuls 12 834 patients atteints d’un cancer du côlon de stade III ont été inclus dans cette analyse (certaines études ont admis les cancers du rectum et/ou les stades II). Les caractéristiques des patients étaient différentes suivant les études. Ainsi, si 95 % des patients avaient un PS de 0 dans l’étude TOSCA, ils n’étaient que 71 % dans l’étude SCOT.

Par ailleurs, 12, 14 et 29 % des tumeurs étaient T4 dans les études TOSCA, HORG et SCOT, respec- tivement. De plus, la répartition des schémas de chimiothérapie (FOLFOX ou CAPOX [capécitabine et oxaliplatine]) a différé considérablement d’une étude à l’autre, de même que la médiane de suivi, qui s’échelonnait de 35 à 62 mois. Comme on pouvait s’y attendre, les schémas courts ont été mieux tolérés que les traitements de 6 mois. Les toxicités de grade 3-4 sont passées de 57 à 38 % avec des schémas de type FOLFOX et de 37 à 24 % pour ceux de type CAPOX, lorsque le traitement est diminué de 6 à 3 mois. Si, globalement, toutes les toxicités sévères ont diminué, ce sont surtout les neuropathies de grade 3-4 qui ont connu les plus fortes baisses, passant de 16 à 3 % avec le FOLFOX et de 9 à 3 % avec le CAPOX.

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546 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXVI - n° 11 - décembre 2017

Cancers digestifs

DOSSIER

Actualités à l’ESMO 2017

0 100

80 60 40 20

0 1 2 3

75,5 % 74,6 %

Années depuis randomisation 4 5 6

6 424 5 446 4 464 3 000 1 609 826 321

6 410 5 530 4 477 3 065 1 679 873 334

FOLFOX ou XELOX 3 mois FOLFOX ou XELOX 6 mois

Patients à risque (n)

HR = 1,07 ; IC95 : 1,00-1,15

Probabilité sans événement (%)

Survie sans progression 3 ans diff. = –0,9 % ; IC95 : –2,4 ; 0,6)

Figure 3. Étude IDEA : survie sans récidive.

Tableau I. Survie sans récidive à 3 ans en fonction du stade tumoral et du schéma thérapeutique.

HR (IC95) CAPOX FOLFOX CAPOX/FOLFOX

3 mois 6 mois HR 3 mois 6 mois HR 3 mois 6 mois HR

Bas risque

(T3N1) ≈ 60 % 85

(83,1-86,9) 83,1

(81,1-85,2) 0,85

(0,71-1,01) 81,9

(80,2-83,6) 83,5

(81,9-85,1) 1,10

(0,96-1,26) 83,1

(81,8-84,4) 83,3

(82,1-84,6) 1,01 (0,90-1,12) Haut risque

(T4 ou N2) ≈ 40 % 64,1

(61,3-67,1) 64,0

(61,2-67,0) 1,02

(0,89-1,17) 61,5

(58,9-64,1) 64,7

(62,2-67,3) 1,20

(1,07-1,15) 62,7

(60,8-64,4) 64,4

(62,6-66,4) 1,12 (1,03-1,23) Groupes

combinés 75,9

(74,2-77,6) 74,8

(73,1-76,6) 0,95

(0,85-1,06) 73,6

(72,2-75,1) 76,0

(74,6-77,5) 1,16

(1,06-1,26) Test d’interaction

Schéma : p = 0,006 1 ; groupe à risque : p = 0,11 Vert : non inférieur ; orange : non prouvé ; rouge : inférieur.

Sur le plan statistique, IDEA est une étude de non-infériorité estimant que les schémas courts ne devaient pas faire perdre plus de 12 % du bénéfi ce du traitement adjuvant – autrement dit, la limite supérieure de l’IC 95 ne devait pas dépasser 1,12. La survie sans récidive à 3 ans était de 74,6 % pour le bras 3 mois et de 75,5 % pour le bras 6 mois, avec un HR de 1,07 (IC 95 : 1,00-1,15) [fi gure 3] . Du point de vue du plan d’analyse statistique, l’étude IDEA est négative. La différence entre les 2 bras est cependant minime et doit être mise en regard avec l’amélio- ration des toxicités, en particulier chroniques. Une analyse préplanifi ée en fonction des groupes à risque a montré que, pour les tumeurs T3N1, un schéma de 3 mois est acceptable au vu des contraintes statis- tiques (83,1 versus 83,3 % ; HR = 1,01, IC 95 : 0,90- 1,12).

En revanche, pour les tumeurs T4 ou N2, les résul- tats sont clairement en défaveur des schémas courts (62,7 versus 64,4 % ; HR = 1,12, IC 95 : 1,03-1,23). Si l’on combine schémas thérapeutiques et stades pronos- tiques, 2 certitudes apparaissent : avec 3 mois de CAPOX, le HR est de 0,85 (IC 95 : 0,71-1,01), tout à

fait favorable pour les tumeurs T3N1 tandis que, avec 3 mois de FOLFOX, le HR est de 1,20 (IC 95 : 1,07-1,35) pour les tumeurs T4 ou N2, clairement défavorable à un schéma raccourci. L’interprétation des résultats est incertaine pour 3 mois de CAPOX en présence d’une tumeur T4 ou N2 et pour 3 mois de FOLFOX en présence d’une tumeur T3N1 (tableau I) . Dans l’ensemble, les résultats de l’étude IDEA ont montré que la durée de la chimiothérapie doit être fonction du stade de la maladie, que le schéma joue probablement un rôle, dont il faudra déterminer plus précisément l’importance, et qu’il convient encore plus de recueillir l’avis du patient après l’avoir informé des bénéfi ces et des risques attendus.

Un nouveau facteur pronostique biologique dans les cancers du côlon de stade III a été trouvé : le phénotype méthylateur (CIMP+). À côté de l’insta- bilité chromosomique et de l’instabilité micro- satellitaire, l’hyperméthylation est une troisième cause de carcinogenèse colique. Les données de la littérature, contradictoires, sont fondées sur l’ana- lyse d’un nombre limité de patients.

(6)

Les valeurs pronostique et prédictive concernant l’effet du cétuximab ont été analysées à partir de 1 907 échantillons tumoraux issus de l’étude PETACC-8 (FOLFOX versus FOLFOX + cétuximab), dont 1 867 ont pu être analysés (Gallois C et al., abstr. 480O). Au total, 14,7 % des tumeurs étaient CIMP+ ; les caractéristiques des patients de ce groupe étaient différentes de celles des patients CIMP– : il s’agissait plus souvent de femmes, plus âgées, avec plus de T3-T4, plus de N2 et plus de cancers du côlon droit. Du point de vue biologique, les tumeurs CIMP+ étaient indifférenciées, avec une mutation de BRAF dans 50 % des cas, moins de mutations de RAS et un statut MSI chez 34 % des patients.

La survie sans récidive n’était pas différente chez les patients CIMP+ et CIMP– (HR = 1,1 ; IC95 : 0,9-1,5 ; p = 0,34) ; en revanche, leur survie globale était moins bonne (HR = 1,4 ; IC95 : 1,02-1,9 ; p = 0,04), en raison d’une survie après récidive nettement moins favorable (HR = 1,8 ; IC95 : 1,2-2,6 ; p < 0,004). En fonction du statut MSI, ces résultats ne sont restés significatifs que pour les patients MSS. Concernant le caractère prédictif, les tests statistiques étaient négatifs, mais avec une tendance marginale en défaveur du cétu- ximab. Le phénotype CIMP n’aura donc probablement pas ou peu d’importance pour la décision du traite- ment adjuvant, en raison de l’absence de différence de survie sans récidive, mais il est un nouveau facteur potentiel de stratification en situation métastatique.

Cancers colorectaux métastatiques La stratégie thérapeutique dans les cancers colorec- taux métastatiques reste débattue ; à côté des duels entre thérapies ciblées, il y a, plus fondamentalement, la discussion entre polychimiothérapie d’emblée et monochimiothérapie. Trois études randomisées, réali- sées avant l’ère des thérapies ciblées, avaient montré l’absence de différence de survie globale entre ces 2 stratégies. Une conclusion définitive n’avait pu être tirée, en raison de l’absence d’étude intégrant les thérapies ciblées.

Nos collègues allemands ont réalisé une étude de phase III de non-infériorité (Modest DP et al., abstr. 486O), qui a comparé une fluoropyrimidine i.v.

ou orale, associée à du bévacizumab, suivie en cas de progression par cette même association + irinotécan (bras séquentiel), à un schéma comportant d’emblée, en plus de la fluoropyrimidine et du bévacizumab, de l’irinotécan (bras combiné). L’objectif principal était le temps jusqu’à échec de la stratégie (survie sans progression du bras combiné et somme des 2 survies

sans progression du bras séquentiel) puis, en cas de démonstration positive, la comparaison des toxicités entre les 2 bras. Initialement, 600 patients devaient être inclus ; les objectifs statistiques ont été revus à la baisse en raison de la lenteur du recrutement, et, au total, seuls 421 patients ont été traités.

L’objectif principal n’a pas été atteint, il n’a pas été possible de démontrer la non-infériorité d’une stra- tégie commençant par une monochimio thérapie, le temps jusqu’à échec de la stratégie du bras de réfé- rence (traitement combiné) était de 9,9 mois, contre 9,6 mois pour le schéma séquentiel (HR = 0,86 ; IC95 : 0,73-1,02 ; p = 0,16). Il est à noter que seuls 38 % des patients du bras séquentiel ont reçu une séquence complète incluant l’irinotécan. Le taux de réponses RECIST était inférieur dans le bras séquentiel (36,8 versus 53,6 % ; p = 0,005), les médianes de survie globale étaient, elles, identiques (21,9 versus 23,5 mois ; p = 0,14). Les toxicités étaient plus importantes dans le bras combiné, mais sans retentissement sur la qualité de vie. De manière très intéressante, les tests statistiques d’interaction étaient significatifs concernant le statut RAS et le bras thérapeutique. L’analyse par sous-groupes molé- culaires a montré un effet délétère du traitement séquentiel chez les patients RAS et BRAF sauvages (temps jusqu’à échec de la stratégie : 9,1 versus 12,6 mois ; survie globale : 25,2 versus 32,2 mois).

En revanche, il n’y avait pas de différence en cas de présence de RAS muté (temps jusqu’à échec de la stratégie : 10,0 versus 9,4 mois ; survie globale : 21,3 versus 23,2 mois) ou de BRAF muté (temps jusqu’à échec de la stratégie : 6,9 versus 4,5 mois ; survie globale : 12,4 versus 7,8 mois). Une limite importante des conclusions que l’on peut tirer de cette analyse par sous-groupes moléculaires est la faible taille des échantillons (22 patients BRAF muté, moins de 200 patients RAS muté). Le statut RASsauvage semble prédictif d’une réponse à une polychimiothérapie d’emblée. AIO KRK0110 est la première étude stratégique analysant l’effet d’un trai- tement séquentiel incluant une thérapie ciblée. Elle nous incite à développer des stratégies spécifiques basées sur la chimiothérapie et le statut moléculaire.

La quadrithérapie prend de l’ampleur dans la prise en charge des cancers colorectaux métastatiques.

Après l’étude de phase III TRIBE et les études de phase II randomisées METHEP-2, STEAM et OLIVIA, voici l’étude VOLFI. Cette nouvelle étude de phase II randomisée a l’intérêt d’évaluer l’association tri thérapie + anticorps anti-EGFR panitumumab (Geissler M et al., abstr. 475O). C’est la seule, avec l’étude METHEP-2, à avoir testé cette association

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548 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXVI - n° 11 - décembre 2017

Cancers digestifs

DOSSIER

Actualités à l’ESMO 2017

dans une étude contrôlée. Elle a comparé un schéma FOLFOXIRI tel que décrit par nos collègues italiens à un schéma FOLFOXIRI adapté (diminution des doses d’irinotécan de 165 à 150 mg/m2 et des doses de 5-FU de 3 200 à 3 000 mg/m2) associé à du pani- tumumab 6 mg/kg chez des patients métastatiques KRAS sauvage puis RASsauvage. L’objectif de cette étude était le taux de réponses (non revu), le ratio de randomisation était de 2:1. Sur les 105 patients inclus, 101 ont été traités.

Le taux de réponses RECIST a été statistiquement amélioré dans le bras quadrithérapie (85,7 versus 60,6 % ; OR = 3,9, IC95 : 1,44-10,52 ; p = 0,009 6).

Ce bénéfice est retrouvé à gauche (90,6 versus 68,0 % ; p = 0,02) et, de manière non significa- tive, par manque de puissance statistique, à droite (60 versus 37,5 % ; p = 0,63), chez les “super wild type” (86 versus 64,7 % ; p = 0,08) et chez les sujets BRAF muté (71,4 versus 22,2 % ; p = 0,12).

Le taux de résections secondaires est passé de 12,1 à 23,8 % dans l’ensemble de la population et de 36,4 à 70,0 % chez les patients potentiellement opérables (valeurs non significatives). La survie sans progression n’a pas été améliorée dans le bras expérimental : 10,5 versus 10,8 mois (y a-t-il eu un problème de censure lors de la chirurgie ?).

Les effets indésirables étaient assez importants, en particulier les événements digestifs (toxicités de grade 3-5 : 25 versus 3 % ; p = 0,009 3). Ce protocole est donc intéressant pour les patients sélectionnés PS 0-1, potentiellement résécables ; une attention toute particulière doit être portée à la tolérance digestive. Ces résultats devront être confirmés au niveau de la survie globale et, surtout, après une relecture centralisée des scanners, et enfin, si possible, dans le cadre d’une étude de phase III.

Le maintien d’un blocage antiangiogénique continu a démontré son intérêt quand la première ligne

comprend un antiangiogénique et quand le bras contrôle de la deuxième ligne ne comporte pas de thérapie ciblée.

Mais, s’il est logique de changer de protocole de chimio- thérapie, faut-il poursuivre le blocage antiangiogénique ou est-il préférable de cibler les patients RASsauvage ayant des anticorps anti-EGFR ? C’est à cette question qu’a essayé de répondre l’étude PRODIGE 18, dont les résultats préliminaires ont été initialement présentés à Chicago en 2015. J. Bennouna (abstr. 477O) nous a donné les résultats finaux de cette étude de phase II randomisée, qui a inclus 133 patients atteints d’un cancer colorectal métastatique traité initialement par une première ligne de polychimiothérapie comprenant du bévacizumab. En cas de progression, une rando- misation répartissait les patients entre poursuite du bévazicumab (stratégie TML), changement de chimio- thérapie, et remplacement de la thérapie ciblée par le cétuximab. L’objectif principal était le taux de survie sans progression à 4 mois ; il y avait un avantage en faveur du bras bévacizumab (80,3 versus 66,6 %). La médiane de survie sans progression était en faveur du bévacizumab (7,1 mois, contre 5,6 mois pour le cétu- ximab) ; de même pour la survie globale (15,8 versus 10,4 mois). Ces résultats n’étaient pas significatifs du point de vue statistique (respectivement, p = 0,062 et p = 0,075. Bien que toujours non significatifs, ils étaient encore plus nets lorsque les patients étaient sélectionnés (RAS et BRAFsauvages) [tableau II]. Cette étude confirme les premières données disponibles dans les études SPIRITT et COMETS. Il semble que les anticorps anti-EGFR aient une efficacité modérée en deuxième ligne après les antiangiogéniques ; si la première ligne comprend du bévacizumab, l’utilisa- tion des antiangiogéniques semble préférable, ce qui repousse les anticorps anti-EGFR à la troisième ligne.

Deux limites de l’étude PRODIGE 18 sont sa taille et son manque de puissance, qui ne permettent pas de

conclure définitivement. ■

Tableau II. Étude PRODIGE 18 : survie sans progression et survie globale.

KRAS sauvage (n = 132) RAS sauvage (n = 82) RAS/BRAF sauvage (n = 73)

Bévacizumab Cétuximab Bévacizumab Cétuximab Bévacizumab Cétuximab

Survie sans progression

à 4 mois (%) 80,3 66,6 88,8 65,7 90,9 68,6

Survie sans progression

médiane, mois (extrêmes) 7,1 5,6 7,8 5,6 8,2 5,7

Survie globale médiane,

mois (extrêmes) 15,8 10,4 21,0 10,7 21,1 12,6

Aucun de ces résultats n’est statistiquement significatif.

É. François déclare avoir des liens d’intérêts avec Amgen, Lilly, Merck, Novartis, Roche, Sanofi et Servier.

1. Alistar A, Morris BB, Des- noyer R et al. Safety and tole- rability of the first-in-class agent CPI-613 in combination with modified FOLFIRINOX in patients with metastatic pancreatic cancer: a single- centre, open-label, dose-es- calation, phase 1 trial. Lancet Oncol 2017;18(6):770-8.

2. Ryan R, Gibbons D, Hyland JM et al. Pathological res- ponse following long-course neoadjuvant chemoradio- therapy for locally advanced rectal cancer. Histopathology 2005 ;47(2) :141-6.

Référence bibliographique

Références

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