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Recherches sur la catégorie juridique de Constitution et son adaptation aux mutations du droit contemporain.

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Submitted on 29 Mar 2018

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Recherches sur la catégorie juridique de Constitution et son adaptation aux mutations du droit contemporain.

Yann Laurans

To cite this version:

Yann Laurans. Recherches sur la catégorie juridique de Constitution et son adaptation aux mutations du droit contemporain.. Droit. Université Nancy 2, 2009. Français. �NNT : 2009NAN20009�. �tel- 01752976�

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AVERTISSEMENT

Ce document est le fruit d'un long travail approuvé par le jury de soutenance et mis à disposition de l'ensemble de la communauté universitaire élargie.

Il est soumis à la propriété intellectuelle de l'auteur. Ceci implique une obligation de citation et de référencement lors de l’utilisation de ce document.

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http://www.culture.gouv.fr/culture/infos-pratiques/droits/protection.htm

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Université de Nancy 2

Recherches sur la catégorie juridique de constitution et son adaptation aux mutations du droit

contemporain

Thèse

en vue de l’obtention du grade de Docteur en droit

(doctorat nouveau régime – mention droit public) présentée et soutenue publiquement le 20 novembre 2009

par Yann Laurans

Membres du jury Pierre Brunet

Professeur de droit public à l’Université de Paris X-Nanterre, rapporteur.

Olivier Cayla

Directeur d'études à l'EHESS.

Jean-Denis Mouton

Professeur de droit public à l’Université de Nancy 2.

Stéphane Pierré-Caps

Professeur de droit public à l’Université de Nancy 2, directeur de thèse.

Alexandre Viala

Professeur de droit public à l’Université de Montpellier I, rapporteur.

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La faculté n’entend donner ni approbation ni improbation aux opinions émises dans la thèse,

celles-ci devant être considérées comme propres à leur auteur.

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C ORPS ENSEIGNANT DE LA F ACULTE DE DROIT , SCIENCES ECONOMIQUES ET GESTION A NNEE UNIVERSITAIRE 2008-2009

Doyen M. Cachard Olivier

Doyens honoraires MM. Tallon, Gross, Jacquet, Criqui Professeurs émérites

M. Vitu Professeur de droit pénal

M. Charpentier Professeur de droit public

M. Jacquet Professeur de droit public

M. Coudert Professeur d’histoire du droit

Mme Gay Professeur d’histoire du droit

M. Borella Professeur de droit public

Mme Marraud Professeur de droit privé

M. Gross Professeur de droit privé

Professeurs

M. Ray Jean-Claude Professeur de sciences économiques M. Seurot François Professeur de sciences économiques M. Seuvic Jean-François Professeur de droit privé

M. Mouton Jean-Denis Professeur de droit public M. Jacquot François Professeur de droit privé

M. Criqui Etienne Professeur de science politique

M. Billoret Jean-Louis Professeur de sciences économiques M. Pierré-Caps Stéphane Professeur de droit public

M. Gartner Fabrice Professeur de droit public

M. Eboue Chicot Professeur de sciences économiques

M. Maziau Nicolas Professeur de droit public

M. Dereu Yves Professeur de droit privé

M. Bismans Francis Professeur de sciences économiques M. Astaing Antoine Professeur d’histoire du droit

M. Stasiak Frédéric Professeur de droit privé M. Cachard Olivier Professeur de droit privé

M. Gry Yves Professeur de droit public

M. Lambert Thierry Professeur de droit privé

M. Henry Xavier Professeur de droit privé

M. Plessix Benoît Professeur de droit public

Mme Spaeter-Loehrer Sandrine Professeur de sciences économiques M. Tafforeau Patrick Professeur de droit privé

M. Parent Antoine Professeur de sciences économiques

M. Perreau-Saussine Louis Professeur de droit privé Mme Tuffery-Andrieu Jeanne-Marie Professeur d’histoire du droit

Mme Gramain Agnès Professeur de sciences économiques

M. Foncel Jérôme Professeur de sciences économiques

M. Petit Yves Professeur de droit public

Mme Goldie-Genicon Charlotte Professeur de droit privé

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Mme Marino Laure Professeur de droit privé Maîtres de conférences

M. Bourgaux Claude Maître de conférences de droit privé

M. Pellissier Dominique Maître de conférences de sciences éconimiques Mme Chardin France Maître de conférences de droit privé

M. Germain Eric Maître de conférences de droit public

M. Luisin Bernard Maître de conférences de droit public Mme Mansuy Francine Maître de conférences de droit privé

M. Venandet Guy Maître de conférences de droit privé

Mme Tillement Geneviève Maître de conférences de droit privé Mme Ganzer Annette Maître de conférences de droit privé M. Olivier Laurent Maître de conférences de science politique M. Dieller Bernard Maître de conférences de sciences économiques M. Guigou Jean-Daniel Maître de conférences de sciences économiques M. Gasser Jean-Michel Maître de conférences de droit privé

Mme Jankeliowitch-Laval Eliane Maître de conférences de sciences économiques M. Aimar Thierry Maître de conferences de sciences économiques

Mme Kuhn Nicole Maître de conférences de droit public

Mme David-Balestriero Véronique Maître de conférences de droit privé Mme Etiennot Pascale Maître de conférences de droit privé Mlle Barbier Madeleine Maitre de conférences d’histoire du droit M. Andolfatto Dominique Maître de conférences de science politique Mme Deffains Nathalie Maître de conférences de droit public Mme Sierpinski Batyah Maître de conférences de droit public

M. Moine André Maître de conférences de droit public

Mlle Lebel Christine Maître de conférences de droit privé Mlle Le Guellaf Florence Maître de conférences d’histoire du droit

M. Py Bruno Maître de conférences de droit privé

M. Evrard Sébastien Maître de conférences d’histoire du droit

M. Fenoglio Philippe Maître de conférences de sciences économiques Mme Bourreau Dubois Cécile Maître de conférences de sciences économiques Mlle Gardin Alexia Maître de conférences de droit privé

M. Klotgen Paul Maître de conférences de droit privé

Mme Derdaele Elodie Maître de conférences de droit public

M. Damas Nicolas Maître de conférences de droit privé

M. Gicquel Jean-François Maître de conférences d’histoire du droit

Mme Lelievre Valérie Maître de conférences de sciences économiques M. Prevot Jean-Luc Maître de conférences de sciences économiques M. Weber Jean-Paul Maître de conférences de sciences économiques Mme Chaupain-Guillot Sabine Maître de conférences de sciences économiques M. Chopard Bertrand Maître de conférences de sciences économiques Mlle Pierre Nathalie Maître de conférences de droit privé

M. Pierrard Didier Maître de conférences de droit public Mme Houin-Bressand Caroline Maître de conférences de droit privé

M. Ziane Ydriss Maître de conférences de sciences économiques

M. Gabuthy Yannick Maître de conférences de sciences économiques Mlle Blairon Katia Maître de conférences de droit public

M. Ferey Samuel Maître de conférences de sciences économiques

M. Muller François Maître de conférences de droit public

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Mlle Aballea Armelle Maître de conférences de droit public M. Thierry Jean-Baptiste Maître de conférences de droit privé Mlle Dubuy Mélanie Maître de conférences de droit public Maîtres de conférences associés

M. Ferry Frédéric Maître de conférences de droit privé Mme Moukha Stéphane Maître de conférences de droit privé M. Gaudel Pierre-Jean Maître de conférences de droit public M. Guenot Jacques Maître de conférences de droit privé

M. Gregoire Christian Maître de conférences de sciences économiques M. Bernardeau Ludovic Maître de conférences de droit privé

Assistants – PRAG

M. Eckersley David Assistant d’anglais

M. Lovat Bruno PRAG de mathématiques

Mme Diehl Christel PRAG d’anglais

M. Perrin Yves PRAG d’économie et gestion

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R EMERCIEMENTS

Je tiens tout d’abord à exprimer ma profonde reconnaissance au Professeur Pierré-Caps qui a accepté de diriger ce travail. Son soutien constant et ses précieux conseils ont été déterminants mener à bien ce projet.

Je remercie également les Professeurs Brunet, Cayla, Mouton et Viala pour avoir bien voulu faire partie du jury de soutenance et le Professeur Viala pour avoir nourri ma réflexion.

J’adresse aussi mes remerciements au personnel des bibliothèques universitaires de Nancy pour leur aide essentielle et leur professionnalisme.

Je souhaite enfin remercier mes proches pour leur patience et leurs encouragements durant ces

années de thèse.

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L ISTE DES ABREVIATIONS AFDI Annuaire français de droit international

AFHIP Association française des historiens des idées politiques AIDC Association internationale de droit constitutionnel AIJC Annuaire international de justice constitutionnelle AJDA Actualités juridiques – Droit administratif

AJIL American Journal of International Law AOC Appellation d’origine contrôlée

APD Archives de philosophie du droit BYBIL British Yearbook of International Law CCC Cahiers du Conseil constitutionnel CDE Cahiers de droit européen

CE Conseil d’État

CECA Communauté européenne du charbon et de l’acier.

CEDECE Commission pour l’étude des Communautés européennes CEDH Cour européenne des droits de l’homme

CIJ Cour internationale de justice Civ. Eur. Civitas Europa

CJCE Cour de justice des Communautés européennes

CMLR Common Market Law Review

Cons. const. Conseil constitutionnel

Conv. EDH Convention européenne des droits de l’homme CPJI Cour permanente de justice internationale

CUP Cambridge University Press

CURAPP Centre universitaire de recherche sur l’action publique et la politique

D Recueil Dalloz

DA Droit administratif

DUDH Déclaration universelle des droits de l’homme EDCE Études et documents du Conseil d’État

EJIL European Journal of International Law

ELJ European Law Journal

ELR European Law Review

EUI European University Institute FAO Food and agriculture organization

FIDE Fédération internationale pour le droit européen FMI Fond monétaire international

HLR Harvard Law Review

HUP Harvard University Press

ICLQ International and Comparative Law Quarterly ICON International Journal of Constitutional Law JCMS Journal of Common Market Studies

JCP Juris-classeur périodique – La Semaine juridique JDI Journal du droit international

JSLC Journées de la Société de législation comparée

JT Journal des tribunaux

JTDE Journal des tribunaux – Droit européen

LGDJ Librairie générale de droit et de jurisprudence

LGF Librairie générale française

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LPA Les petites affiches

LQR Law Quarterly Review

MLR Modern Law Review

NoFo No Foundations – The Journal of Extrem Legal Positivism OJLS Oxford Journal of Legal Studies

OMC Organisation mondiale du commerce ONU Organisation des Nations Unies

OUP Oxford University Press

PU Presses universitaires

PUAM Presses universitaires d’Aix-Marseille PUB Presses universitaires de Bruxelles PUF Presses universitaires de France PUG Presses universitaires de Grenoble PUR Presses universitaires de Rennes PUS Presses universitaires de Strasbourg

PUSST Presses de l’université de sciences sociales de Toulouse RAE Revue des affaires européennes

RBDI Revue belge de droit international

RCADC Recueil des cours de l’Académie de droit constitutionnel RCADE Recueil des cours de l’Académie de droit européen RCADI Recueil des cours de l’Académie de droit international RDP Revue du droit public et de la science politique

RDS Revue de droit suisse

RDUE Revue du droit de l’Union européenne

Rec. Recueil

Rev. adm. Revue administrative

RFDA Revue française de droit administratif RFDC Revue française de droit constitutionnel RFSP Revue française de science politique

RGDIP Revue générale de droit international public RHDFE Revue historique de droit français et étranger

RHFDSJ Revue d’histoire des facultés de droit et des sciences juridiques RIDC Revue internationale de droit comparé

RIEJ Revue interdisciplinaire d’études juridiques RJEP Revue juridique de l’économie publique

RMCUE Revue du Marché commun et de l’Union européenne RMM Revue de métaphysique et de morale

RRJ Revue de la recherche juridique – Droit prospectif RTDC Revue trimestrielle de droit civil

RUDH Revue universelle des droits de l’homme

S Recueil Sirey

SCR The Supreme Court Review

SFDI Société française de droit international TCE Traité instituant la Communauté européenne

TPICE Tribunal de première instance des Communautés européennes TUE Traité sur l’Union européenne

UE Union européenne

ULB Université libre de Bruxelles

UNESCO United Nations educational, scientific and cultural organization

YEL Yearbook of European Law

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S OMMAIRE

Introduction ...17

Partie I : La catégorie dogmatique de constitution...93

Titre I : La difficile identification de la constitution en tant que norme positive ... 97

Titre II : La règle constitutive, vecteur de la compréhension de l’adaptation de la constitution ... 239

Conclusion de la première partie... 373

Partie II : La catégorie théorique de constitution...377

Titre I : Présentation critique des critères classiques de la catégorie théorique de constitution ... 381

Titre II : L’adaptation de la catégorie théorique de constitution... 539

Conclusion de la deuxième partie ... 731

Conclusion générale...733

Bibliographie générale ...739

Index...955

Table des matières...961

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I NTRODUCTION

L’important travail de théorisation entamé dans les années 1980 et achevé par deux célèbres articles publiés en 1990

1

a semblé un temps mettre fin aux incertitudes entourant la notion de constitution dans la doctrine française. Les débats anciens sur sa disparition

2

ou sur la réduction de la constitution à la loi

3

paraissaient dépassés par l’évolution doctrinale induite par la juridictionnalisation croissante du droit constitutionnel. L’étude du concept même de constitution devait alors logiquement être délaissée au profit d’approches plus concrètes ou remplacée par des travaux abstraits sur la justice constitutionnelle.

En réalité, la doctrine postérieure a emprunté une toute autre direction. La réflexion conceptuelle consacrée à la constitution a connu un véritable regain en raison du défi représenté par l’internationalisation du droit. En effet, le droit contemporain est marqué par un renforcement considérable des relations entre les droits international et communautaire

4

et le droit interne, y compris le droit constitutionnel. Cette mutation est caractérisée par la combinaison de multiples phénomènes allant de l’accentuation de la tendance historique à l’ouverture accrue des ordres juridiques nationaux au droit international

5

à l’émergence d’organisations internationales aux fonctions de plus en plus importantes, en passant par l’apparition de normes internationales dans des sujets traditionnellement délaissés par le droit international public

6

. Elle a déclenché des interrogations sur le concept de constitution chez les internationalistes et les communautaristes qui ont finalement atteint les spécialistes du droit interne. Face aux hésitations sur l’existence d’une ou plusieurs constitutions

1 FAVOREU Louis, « Le droit constitutionnel : droit de la Constitution et constitution du droit », RFDC 1990, p. 71-89 et ROUSSEAU Dominique, « Une résurrection : la notion de constitution », RDP 1990, p. 5-22. Malgré quelques divergences et des styles très différents, ces deux articles esquissent les caractéristiques fondamentales de la nouvelle conception française de la constitution : une constitution incontestablement juridique et protégée par un juge, qui donne ses fondations à l’ensemble du système juridique et garantit l’État de droit.

2 Dans un fameux article, Georges Burdeau annonçait ainsi la « déchéance [du] concept de constitution » qui n’était plus qu’un « temple allégorique habité par des ombres » (« Une survivance : la notion de Constitution », in L’évolution du droit public. Études en l’honneur d’Achille Mestre, Paris, Sirey, 1956, p. 55 et 62).

3 Pour un exemple typique, voir CARRÉ DE MALBERG Raymond, La loi : expression de la volonté générale, Paris, Sirey, 1931, notamment p. 103, 111 et 119. Notons pour être précis que l’auteur ne rejette pas le concept de constitution mais estime qu’il n’a aucune place en droit français.

4 Nous ne nous engageons pas à ce stade sur l’épineuse question du caractère international du droit communautaire. Ce point sera abordé dans le dernier chapitre de la deuxième partie.

5 Ce mouvement est ancien puisqu’il a déjà pu être souligné à propos des constitutions « rationalisées » élaborées dans les années 1920 (MIRKINE-GUETZÉVITCH Boris, « Les nouvelles tendances du droit constitutionnel », RDP 1928, p. 49) puis dans celles qui ont suivi le second conflit mondial (pour un bilan, voir par exemple CASSESE Antonio, « Modern Constitutions and International Law », RCADI 1985-III, p. 331-476). Il tend toutefois à s’accélérer, particulièrement dans les États membres de l’Union européenne. Pour quelques exemples de révisions constitutionnelles réalisées dans ce cadre, voir DE BERRANGER Thibaut, Constitutions nationales et construction communautaire, Paris, LGDJ, 1995, 564 p. ou RIDEAU Joël (dir.), Les États-membres de l’Union européenne : adaptations, mutations, résistances, Paris, LGDJ, 1997, 540 p.

6 Nous pensons notamment ici à la multiplication des normes internationales, aussi bien conventionnelles que coutumières voire unilatérales, portant sur les droits de l’homme et sur le mode de gouvernement des États.

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internationales ou européennes, la doctrine a parfois proposé de redéfinir la constitution

1

et a en tout cas recommencé à s’interroger sur l’usage qu’il convient de faire de ce terme

2

. Les certitudes apparentes du début des années 1990 n’ont finalement permis qu’une stabilité précaire, vite remplacée par de nouveaux questionnements. Leur légitimité n’est pas contestée car il règne une forme de consensus sur le caractère significatif de l’acquisition d’une qualité constitutionnelle par des normes inter-étatiques au regard de la transformation qu’elle marquerait pour le droit constitutionnel comme corps de règles et comme discipline.

Cette unanimité a mené à de nouveaux efforts théoriques qui ne visent pas simplement à éclairer la notion classique de constitution mais portent aussi sur la nécessité et l’opportunité de son adaptation aux mutations actuelles du droit

3

. Des questions inédites se posent en effet, puisque l’on sort du cadre purement national qui a toujours caractérisé les constitutions. Dans ce contexte, l’idée d’adaptation renvoie tout d’abord au changement de la notion même de constitution, éventuellement nécessaire pour rendre compte de la variation du droit contemporain. Elle couvre ensuite la survenance de nouvelles constitutions qualitativement différentes des normes usuellement considérées comme constitutionnelles, même si elle intervient sans transformation du concept de constitution. Ce dernier cas de figure concerne évidemment l’hypothèse de normes internationales répondant aux conditions habituellement exigées des normes constitutionnelles. Cependant, il est tentant de croire que ce débat appartient désormais au passé. L’adoption d’un projet de traité établissant une Constitution pour l’Europe l’avait mené à son apogée, du moins si l’on se fie au nombre d’études qui lui étaient consacrées. De ce fait, l’échec final de ce projet et le retour de la construction européenne à une sorte de modestie sémantique aurait pu déboucher sur son recul, voire sa disparition. Toutefois, l’idée de constitutionnalité inter-étatique préexistait au projet de traité rejeté par les référendums de 2005. Elle ne s’est jamais limitée à l’émergence d’un acte international unique revendiquant clairement une qualité constitutionnelle. Au contraire, le traité établissant une Constitution pour l’Europe a parfois été considéré comme une trahison

1 Comme nous le verrons, cette idée est extrêmement répandue dans la doctrine communautaire. Pour un exemple, voir MICHEL Valérie et BOUVERESSE Aude, « La notion de constitution », in CONSTANTINESCO Vlad, GAUTIER Yves et MICHEL Valérie (dir.), Le traité établissant une Constitution pour l’Europe. Analyses et commentaires, Strasbourg, PUS, 2005, p. 52.

2 Le meilleur exemple de cette attitude est la place laissée à des contributions générales portant sur le concept même de constitution dans les colloques et ouvrages collectifs consacrés au thème de la constitution européenne. Outre l’article cité à la note précédente, l’on peut relever deux articles qui partagent le titre évocateur « Qu’est-ce qu’une constitution ? » écrits par les professeurs Aubert (in KADDOUS Christine et AUER Andreas (dir.), Les principes fondamentaux de la Constitution européenne, Bruxelles, Bruylant, 2006, p. 107-114) et Pini (RAE 2001-2002/6, p. 655-658).

3 La construction européenne est ainsi souvent présentée comme l’occasion de proposer une révision générale des concepts de la science du droit construits dans le cadre étatique. En ce sens, voir SNYDER Francis, « Editorial : Ratification, the European Union Constitution and European Union Legal Scholarship », ELJ 2005, p. 259 et TROPER Michel, « L’Europe et les principes », Droit et Société n°20-21/1992, p. 259. Notons que le concept de constitution est mentionné dans le second article.

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de l’originalité du constitutionnalisme post-moderne qui caractériserait la sphère internationale

1

. Ce serait donc une erreur de réduire l’adaptation de la constitution à une telle hypothèse et d’abandonner les recherches à ce sujet en raison du caractère improbable de sa réalisation dans un futur prévisible. Surtout, les problèmes théoriques rencontrés lors de l’analyse du traité de 2004 sont révélés, et non pas créés, par ce traité. Si nous sommes incapables de concevoir l’idée même de constitution internationale, ou en tout cas s’il existe des désaccords fondamentaux à ce propos, le fait que les situations ayant démontré l’existence de cette incapacité ou de ces désaccords n’aient pas vocation à se reproduire ne change rien aux imperfections ou à l’imprécision de la notion de constitution que nous utilisons.

Les réflexions consacrées à l’internationalisation du concept de constitution ont justement été marquées par l’apparition de fortes divergences et par l’adoption de positions apparemment inconciliables sur la notion de constitution. Par exemple, il a pu être soutenu que l’Union européenne avait déjà une constitution

2

, qu’elle connaissait un processus de constitutionnalisation

3

ou qu’elle était incapable de se doter d’une constitution en l’état actuel des choses

4

mais aussi que le traité établissant une Constitution pour l’Europe était une constitution

5

, l’était dans une certaine mesure

6

ou ne l’était pas du tout

7

voire transcendait toutes les catégories existantes

8

. Au-delà d’éventuelles préférences politiques, ces oppositions s’expliquent par la présence d’une série de problèmes sur lesquels la doctrine est très divisée.

Ainsi, la teneur du lien unissant la constitution et l’État est controversée. Faut-il être un État pour pouvoir se doter d’une constitution ? Inversement, l’adoption d’une constitution implique-telle la qualité étatique de l’entité régie par cet acte ? Les liens supposés entre peuple, pouvoir constituant et constitution, influencent-ils cette relation ? De même, la possibilité pour un traité international d’être ou de devenir une constitution est très discutée.

Enfin, l’existence actuelle ou potentielle de normes internationales ou supra-nationales bénéficiant d’un statut hiérarchique supérieur à celui des constitutions nationales est elle aussi contestée. Tous ces problèmes sont déterminants pour savoir si l’on peut adapter la notion de

1 En ce sens, voir WEILER J.H.H., « In Defence of Statu Quo : Europe’s Constitutional Sonderweg », in WEILER J.H.H. et WIND Marlene (dir.), European Constitutionalism beyond the State, Cambridge, CUP, 2003, p. 7 et 21.

2 JACQUÉ Jean-Paul, « Cours général de droit communautaire », RCADE vol. 1, book 1, p. 317.

3 WEILER J.H.H., « The transformation of Europe », The Yale Law Journal 1991, p. 2419.

4 DEBARD Thierry, « Textes interinstitutionnels, constitutionnalisation et révision des traités », in CEDECE, Les procédures de révision des traités communautaires : du droit international au droit constitutionnel, Bruxelles, Bruylant, 2001, p. 289.

5 FRANCK Claude, « Le traité établissant une Constitution pour l’Europe a appelé une modification de la Constitution française », JCP 2005, p. 634.

6 ELEFTHERIADIS Pavlos, « Constitution or Treaty ? », Federal Trust Online Paper n°12/04, p. 3.

7 DORD Olivier, « Le Conseil constitutionnel face à la Constitution européenne : contrôle des apparences ou apparence de contrôle ? », AJDA 2005, p. 212.

8 MERCADIER Marie-Françoise, « Pouvoir constituant et transferts de souveraineté. Les expériences d’intégration régionale : de la CEE à l’Union européenne », Intervention au colloque Le pouvoir constituant aujourd’hui, Tunis, 16-17 novembre 2006, p. 6.

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constitution aux mutations contemporaines du droit. Or, ils partagent tous une caractéristique commune : ils paraissent insolubles

1

car il semble possible de soutenir arbitrairement à chaque fois l’une ou l’autre des réponses envisageables. Les auteurs s’opposent sur ces sujets par des affirmations peu ou pas justifiées. En fait, nous ne sommes pas confrontés à une absence de solution claire mais plutôt à une difficulté pour comprendre les termes du dilemme, c’est-à- dire déterminer quel type d’argument serait susceptible de le trancher. Dès lors, savoir si l’Union européenne possède une constitution entre dans la catégorie des questions « qu’il est plus facile de résoudre que de comprendre »

2

.

Ces problèmes apparemment indécidables conduisent la doctrine à se partager entre des écoles opposées et hermétiques. Pour essayer de sortir de ce blocage, se ranger dans l’une d’entre elles ne sert à rien. Il nous paraît au contraire nécessaire de chercher à « penser » l’adaptation, c’est-à-dire de construire les outils permettant de savoir si la notion de constitution a changé ou s’il est nécessaire de la changer. Nous n’entendons donc pas trancher directement les problèmes insolubles précités mais plutôt établir les instruments intellectuels permettant de les comprendre. Pour atteindre ce but, nous devrons revenir sur le concept de constitution afin de permettre l’évaluation de son adaptation. Il est en effet impossible de se prononcer sur l’adaptation de la constitution sans maîtriser d’abord le concept de constitution.

Autrement dit, pour penser l’adaptation de la constitution, il faut d’abord être capable de penser la constitutionnalité. Nous adoptons ici une démarche analytique consistant à saisir les problèmes en cause dans toute leur complexité plutôt qu’à chercher absolument à les solutionner immédiatement

3

. L’analyse de la notion de constitution est indispensable pour penser l’adaptation de la constitution au regard des obstacles qui se dressent face à cet objectif. La division de la doctrine justifie cette approche car elle n’est sûrement pas le fruit du hasard : il faut en comprendre et en expliciter les causes pour tenter de la dépasser. Cela revient finalement à vouloir préciser les questions plutôt que leur donner une réponse arbitraire. La clarification des enjeux et des causes du blocage est presque plus importante que la solution proposée, forcément teintée d’une part de subjectivité.

1 Les discussions sur le lien entre constitution et État ont ainsi été qualifiées de « débat impossible » (HALPÉRIN Jean- Louis, « La Constitution européenne : un événement juridique ? », ERA-Forum scripta juris europaei 2004, t. 3, p. 331).

2 BARBER N.W., « The Constitution, the State and the European Union », The Cambridge Yearbook of European Legal Studies 2005-2006, p. 37. Les débats à ce sujet sont « stériles et interminables car [leur] objet […] n’est pas clair et le type d’argument susceptible de les trancher non plus » (KUMM Mathias, « Beyond Golf Clubs and the Judicialization of Politics », American Journal of Comparative Law 2006, p. 505). Notons ici que, sauf précision inverse, toutes les traductions de citations issues de publications en langue étrangère sont réalisées par nos soins.

3 Pour une vision comparable de la démarche analytique, voir STYLIANIDIS Nikos, Les fondements épistémologiques du positivisme analytique : vers une théorie du droit pré-institutionnelle, Thèse, Paris X, 1994, p. 6.

(24)

En nous limitant à penser l’adaptation de la notion de constitution, nous restreignons intentionnellement notre champ d’étude. Il ne s’agit pas de rendre compte de l’ensemble des évolutions du droit constitutionnel liées à l’internationalisation du droit, mais bien de celles qui concernent le concept même de constitution. La nécessité de cette recherche conceptuelle est démontrée par l’incertitude qui pèse sur cette notion : la constitution « ne connaît pas de définition uniforme dans la doctrine juridique »

1

et fait donc « partie des notions faussement claires de la science juridique »

2

car elle a « un contenu incertain »

3

et « plusieurs sens »

4

. C’est pourquoi, « la notion de constitution pose de véritables problèmes de définition »

5

. Cette faiblesse n’est pas spécifiquement française mais concerne aussi la doctrine étrangère

6

. Cette caractéristique du terme « constitution » est particulièrement notable si nous l’opposons à la relative clarté dont bénéficient a priori des termes voisins comme « traité international » ou

« loi ». Cette incertitude complique la communication dans la doctrine et empêche de penser l’adaptation de la constitution pour au moins deux raisons. En premier lieu, elle contribue largement au caractère apparemment insoluble des problèmes que nous avons énumérés.

L’indétermination du sens d’un terme présente toujours le risque de faire passer des problèmes verbaux pour des problèmes de fond

7

. Mieux, faute de saisir l’aspect sémantique du désaccord, le problème semble insoluble, tout simplement parce que l’on parle alors de choses différentes sans même s’en rendre compte

8

. Dans ce cas, la dissipation de l’ambiguïté constitue déjà une bonne partie de la solution

9

. En second lieu, penser la constitutionnalité impose de pouvoir répondre de manière fondée à la question « la norme X est-elle une constitution ? » car l’utilisation d’un énoncé utilisant le concept de constitution repose sur cette capacité. Dès lors, penser l’adaptation de la constitution impose de pouvoir répondre à cette question dans un contexte nouveau ou à propos de normes qualitativement distinctes de celles auxquelles la qualité constitutionnelle est habituellement reconnue. Or, en l’absence d’une catégorie claire de constitution, il est impossible de mener à bien cette tâche. Pour y

1 BEAUD Olivier, « Constitutions et droit constitutionnel », in RIALS Stéphane et ALLAND Denis (dir.), Dictionnaire de la culture juridique, Paris, PUF, 2003, p. 258.

2 GREWE Constance et RUIZ FABRI Hélène, Droits constitutionnels européens, Paris, PUF, 1995, p. 33.

3 LAVROFF Dmitri Georges, « À propos de la constitution », in L’esprit des institutions, l’équilibre des pouvoirs. Mélanges en l’honneur de Pierre Pactet, Paris, Dalloz, 2003, p. 284.

4 PINI Joseph, article précité, p. 655.

5 MICHEL Valérie et BOUVERESSE Aude, article précité, p. 31.

6 Voir par exemple, DOUGLAS-SCOTT Sionaidh, « A Constitution for Europe, in Defence of Public Reason », Working Papers da Faculdade de Direito da Universidade Nova de Lisbao n°11/2001, p. 2.

7 En ce sens, voir ROBINSON Richard, Definition, Oxford, Clarendon, 1950, p. 67 et LAVROFF Dmitri Georges,

« L’instrumentalisation de la Constitution », in AFHIP, La constitution dans la pensée politique, Aix-en-Provence, PUAM, 2001, p. 67.

8 AGO Roberto, « Droit positif et droit international », AFDI 1957, p. 14 et GUASTINI Riccardo, « La théorie du droit comme analyse du langage des juristes », in GRZEGORCZYK Christophe, MICHAUT Françoise et TROPER Michel (dir.), Le positivisme juridique, Paris, LGDJ, 1992, p. 101.

9 RAZ Joseph, « The identity of legal systems », in The authority of law, Oxford, Clarendon, 1979, p. 78.

(25)

parvenir, un travail d’ordre conceptuel est indispensable. Plus précisément, l’ampleur des désaccords sur la notion même de constitution impose un travail centré sur la définition de la constitution. Cette définition n’est pas une fin en soi mais bien une étape inévitable pour pouvoir penser l’adaptation de la constitution. Les deux démarches peuvent même se confondre car adapter le concept, c’est avant tout adapter sa définition. L’adaptation concerne aussi bien l’évolution des réponses à la question « la norme X est-elle une constitution ? » que celle des méthodes et des références utilisées pour y répondre.

La définition que nous cherchons ne pourra pas être dotée d’une portée illimitée car la notion de constitution est utilisée dans des cadres variés. Même en demeurant dans le domaine de l’internationalisation du droit, force est de constater qu’elle a largement été utilisée dans une perspective politique pour fixer l’orientation de la construction européenne. Nous n’avons bien entendu aucune intention de contribuer à ce débat. Le discours politique répond à des impératifs spécifiques, distincts de ceux qui pèsent sur les discours juridiques. Qui plus est, il passe par des méthodes et des techniques argumentatives qui lui sont propres. Certes, les discours juridiques et politiques se croisent parfois, comme cela a été le cas lors de la campagne référendaire sur la ratification du traité établissant une Constitution pour l’Europe

1

. Cependant, nous voulons ici nous prononcer exclusivement sur le concept juridique de constitution, ou, pour employer un terme consacré, sur la catégorie juridique de constitution

2

. Notre recherche portera sur l’adaptation de la catégorie juridique de constitution en se concentrant prioritairement sur sa définition dans une perspective analytique. Il s’agira donc de déterminer quelle(s) définition(s) de la catégorie juridique de constitution doi(ven)t être retenue(s) pour comprendre et résoudre les difficultés posées par les mutations du droit contemporain en dépassant les contradictions apparentes. Notre approche conceptuelle impose de ne pas délaisser une perspective générale sur le concept de constitution et implique un rapport particulier à l’adaptation. Cette dernière nous intéressera en tant que telle, mais aussi pour les carences de l’analyse actuelle de la constitution qu’elle met en lumière. Elle joue le rôle d’un élément déclencheur qui ne porte en aucun cas la condamnation des conceptions

1 Dans ce débat, les implications supposées du terme « constitution » ont joué un rôle particulièrement marquant (voir VIALA Alexandre, « Aux sources de la controverse juridique : la force des mots », in SUEUR Jean-Jacques (dir.), Interpréter & traduire, Bruxelles, Bruylant, 2007, p. 202). Cet exemple peut inciter à une certaine prudence lors de l’usage des termes juridiques dans les débats politiques mais cela ne veut pas dire que les idées répandues sur leur sens et les conséquences qui s’attachent à leur emploi aient vocation à jouer un rôle déterminant dans la fixation de définitions destinées à des spécialistes avertis.

2 De ce fait, nous n’étudierons pas les diverses prises de positions politiques sur le thème de la constitution européenne et plus largement le débat politique au long cours rythmé par les interventions du Parlement européen, de la Commission et d’importants responsables des États membres. Son étude justifierait un travail autonome qui relèverait d’ailleurs de la science politique plutôt que du droit. Pour une approche du même ordre insistant sur la nécessité de préserver l’analyse juridique malgré la dimension politique de l’usage du terme « constitution », voir MATHIEU Bertrand, « Propos liminaires », RAE 2001-2002/6, p. 654.

(26)

ayant cours mais permet l’explicitation de leurs limites. Celles-ci sont tout à fait légitimes, car un outil intellectuel n’est construit que pour faire face à certaines tâches et a besoin d’être révisé quand les éléments qu’il permet de décrire se transforment. Les incertitudes longtemps évitées par intuition ou grâce à l’absence de cas douteux resurgissent dans un contexte d’internationalisation du droit qui montre des carences négligées jusque-là

1

. La précision des

« frontières » du concept devient alors essentielle pour éviter toute confusion. Notre travail vise donc autant à penser l’adaptation qu’à penser la constitutionnalité malgré les difficultés révélées par l’adaptation. Il vise autant à éclairer les mutations du droit grâce au concept de constitution qu’à éclairer le concept de constitution grâce aux dites mutations. Sur ce point, il s’écarte des options généralement retenues par la doctrine française à propos de l’adaptation du concept de constitution qui partent plutôt des caractéristiques du droit européen pour démontrer l’apparition d’une constitution européenne

2

.

Le choix d’une démarche définitoire donne une direction à notre recherche mais nous ne devons pas occulter les difficultés qu’il entraîne. La doctrine actuelle n’est pas caractérisée par l’absence de définition de la constitution, mais par une véritable surabondance. Ajouter une nouvelle définition, fixée arbitrairement, contribuerait plus au problème qu’à sa solution.

En conséquence, nous préférons opter pour un réexamen général. Or, faute de méthodologie juridique assurée sur ce point, nous ne disposons pas de critères nous permettant aisément de juger du bien-fondé d’une définition afin d’éviter d’opérer une sélection purement subjective.

Dès lors, notre objectif d’analyse conceptuelle de la constitution impose un travail préalable permettant de déterminer la méthodologie que nous devons suivre. Nous retrouvons ici la dimension analytique de notre approche. Plutôt que de choisir arbitrairement entre les définitions de la constitution, il faut chercher à comprendre comment il est possible de choisir et donc changer les questions plutôt que les réponses. Un approfondissement des conditions de définition des catégories juridiques doit donc être mené avant de pouvoir travailler sur la constitution et déterminer l’organisation même de cette réflexion. Il fera l’objet d’un chapitre préliminaire.

1 Chaïm Perelman notait ainsi : « une notion paraît suffisamment claire aussi longtemps que l'on ne voit pas de situations où elle se prêterait à des interprétations divergentes » (Traité de l’argumentation. La nouvelle rhétorique, Bruxelles, Éditions de l’Université de Bruxelles, 1983, p. 181). Cette formule correspond tout à fait à l’idée que nous nous faisons du rapport entre les mutations du droit contemporain et l’explicitation des imprécisions de la notion de constitution.

2 Pour des exemples citons trois thèses importantes soutenues dans les quinze dernières années : DAUPS Thierry, L’idée de constitution européenne, Thèse, Paris X, 1992, 519 p. ; GERKRATH Jörg, L’émergence d’un droit constitutionnel pour l’Europe : modes de formation et sources d’inspiration de la constitution des Communautés et de l’Union européenne, Bruxelles, Éditions de l’Université de Bruxelles, 1997, 425 p. et BLANCHARD David, La constitutionnalisation de l’Union européenne, Rennes, Apogée, 2001, 476 p.

(27)
(28)

Chapitre préliminaire : Éléments de méthodologie de la catégorisation et de la définition en droit

L’étude du concept juridique de constitution impose, comme nous l’avons vu, un travail de définition et de catégorisation. Or, dans la recherche de la définition la plus appropriée de la catégorie juridique de constitution, il faut isoler les arguments susceptibles de fonder un choix rationnel. Le dépassement des hésitations actuelles exige une méthodologie

1

permettant un regard neuf sur une question déjà souvent posée. Les principes retenus doivent être présentés de manière argumentée car ils forment la base du renouvellement souhaité de l’analyse du concept de constitution. C’est pourquoi, il est nécessaire de justifier de manière détaillée les choix méthodologiques opérés.

Cette démarche préliminaire est indispensable car la méthodologie de la recherche juridique est un domaine « relativement peu exploré »

2

. Les juristes pratiquent quotidiennement la définition et la catégorisation mais le plus souvent sans développer leurs présupposés méthodologiques. La catégorisation fait tout de même l’objet d’études très variées, car elle intéresse aussi bien les juristes que les philosophes, les linguistes ou les psychologues. Cela nous oblige à effectuer un travail de synthèse, portant aussi bien sur les aspects implicites qu’explicites, et d’innovation, sous peine de voir s’effondrer les constructions bâties sur des fondations trop instables. Cet effort se placera dans un cadre général pour éviter la tentation de se servir d’arguments ad hoc, orientés vers la justification d’une définition du terme « constitution », mais qui ne seraient pas tenables au-delà de ce cas précis. Pour autant, notre ambition doit être clairement circonscrite : l’étude de la catégorie juridique de constitution est le principal dont les développements méthodologiques ne constituent que l’accessoire. Nous exclurons donc tout aspect historique et n’inclurons des éléments de philosophie ou de théorie du langage que dans la mesure nécessaire à la résolution des problèmes concrets qui se posent à nous. Les idées exposées ne visent qu’à disposer des outils utiles pour définir la catégorie juridique de constitution.

La méthodologie de la définition et de la catégorisation, comme toute méthodologie, peut être soit descriptive soit prescriptive

3

. Plutôt que de choisir entre ces deux approches, il nous

1 Définie comme une « technologie dont la tâche principale serait de formuler une série de règles destinées à guider […] les spécialistes dans leur activité de recherche », VILLA Vittorio, La science du droit, Paris, LGDJ, 1991, p. 27.

2 JOUANJAN Olivier, « Présentation », in MÜLLER Friedrich, Discours de la méthode juridique, Paris, PUF, 1996, p. 6.

3 En ce sens, voir VILLA Vittorio, op. cit., p. 27-35. Norberto Bobbio soutient la même position à propos de ce qu’il appelle la « méta-science » (voir BOBBIO Norberto, « Être et devoir-être dans la science du droit », in Essais de théorie du droit, Paris, LGDJ, 1998, p. 190). La méta-science descriptive se contente de présenter les principes méthodologiques et les présupposés épistémologiques effectivement utilisées par les spécialistes d’une discipline donnée quand la méta-science prescriptive entend poser des principes qu’ils devront respecter.

(29)

semble opportun de les combiner. Négliger l’aspect descriptif ferait courir le risque de se couper des spécificités de l’étude du droit pour appliquer un modèle a priori issu d’autres disciplines

1

. À l’inverse, renoncer à l’aspect prescriptif empêcherait de dissiper les incertitudes

2

qui sont la cause de l’interrogation méthodologique. Nous proposerons donc une analyse et une reconstruction des pratiques doctrinales (Section 1) avant de formuler des propositions méthodologiques fondées sur l’adhésion à une vision positiviste de l’étude du droit (Section 2).

S

ECTION

1 : A

PPROCHE DESCRIPTIVE DE LA METHODOLOGIE

L’approche descriptive de la méthodologie de la catégorisation et de la définition juridique consiste à exposer ces opérations telles qu’elles sont effectivement pratiquées par les acteurs de l’étude du droit, sans prendre parti sur l’opportunité de leurs méthodes. Il s’agit donc d’un constat valable indépendamment de l’adhésion à une quelconque théorie générale du droit.

Néanmoins, choisir de rapporter le comportement des acteurs plutôt que de le prescrire n’implique pas d’adhérer à leur pré-compréhension de leurs propres pratiques. La partie descriptive dépend inévitablement d’une vision du langage et de la signification permettant d’appréhender les usages des acteurs. Cette idée ne remet pas en cause sa différence avec la partie prescriptive car il s’agit toujours uniquement de présenter le comportement effectif des acteurs dans le cadre d’une grille d’analyse choisie et non de tenter de le modifier. Nous n’entendons donc pas critiquer les pratiques des acteurs mais les exposer d’une façon qui ne correspond pas forcément à la perception qu’ils en ont. Cette description devra s’inspirer, s’enrichir mais aussi se confronter aux analyses existantes.

En étudiant le discours des acteurs de l’étude du droit, nous devons d’abord souligner le rôle qu’y jouent les catégories et les définitions qui le structurent (I). Il convient ensuite de démontrer qu’en raison de la variété des contextes d’énonciation nous sommes face à une pluralité de discours et de catégories juridiques devant être distingués (II).

1 VILLA Vittorio, op. cit., p. 40.

2 BOBBIO Norberto, article précité, p. 205. C’est pourquoi, dans un cadre plus spécifique, le professeur Troper estime que tout auteur construisant une théorie du droit formule forcément implicitement une méta-théorie prescriptive. L’aspect descriptif ne vaut que pour ceux qui étudient les théories du droit existantes. Voir TROPER Michel, « Les juges pris au sérieux. La théorie du droit selon Dworkin », in La théorie du droit, le droit, l’État, Paris, PUF, 2001, p. 37.

(30)

I. L

E ROLE DES CATEGORIES ET DES DEFINITIONS EN DROIT

Le discours juridique sous toutes ses formes fonctionne sur la base de catégories qui méritent une attention particulière quant à leur rôle et leur structure (A). Leur construction passe nécessairement par une opération de définition (B).

A. La catégorisation, base ambiguë de la technique juridique et de son étude Le concept de constitution nous intéresse uniquement en tant qu’il vise une catégorie juridique. L’étude de ce concept exige donc de comprendre ce que l’on entend par ce terme (1) mais aussi la fonction des catégories dans le discours juridique (2).

1. L

E CONCEPT DE CATEGORIE

Tout discours, et plus largement toute « activité cognitive », passe nécessairement par une série de concepts

1

, c’est-à-dire d’idées générales

2

exprimées par des mots

3

. Les concepts juridiques sont classiquement rangés en différents groupes dont les catégories juridiques. Les théoriciens du droit civil se sont largement intéressés à la question. Pourtant, il ne paraît pas utile de détailler ici les diverses typologies qu’ils ont construites

4

car elles n’ont pas été créées et surtout ne sont pas utilisées à des fins méthodologiques : le classement d’un concept dans l’un de ces types n’implique pas un mode de définition précis. De plus, elles sont construites sur des bases métaphysiques

5

critiquables. La particularité des catégories civilistes est de servir ainsi à ranger l’ensemble du droit dans un nombre restreint de classes définies a priori.

L’origine de cette habitude réside dans l’utilisation de la logique aristotélicienne par le droit romain pour distinguer les personnes, les choses et les actions

6

. Ce mode de pensée a été fort justement décrit par François Gény comme un vestige du réalisme pré-moderne

7

reposant sur des « entités métaphysiques » et menant à de graves erreurs

8

. Son intérêt est essentiellement historique. Le terme de « catégorie juridique » est aujourd’hui généralement utilisé dans un

1 STOCKINGER Peter, « Concept », in ARNAUD André-Jean (dir.), Dictionnaire encyclopédique de théorie et de sociologie du droit, Paris, LGDJ, 1993, p. 87.

2 LALANDE André, Vocabulaire technique et critique de la philosophie, 16e éd., Paris, PUF, 1988, p. 160.

3 RICKERT Heinrich, Théorie de la définition, Paris, Gallimard, 1997, p. 216 et 221.

4 Pour des exemples divers, on peut consulter par exemple ROUBIER Paul, Théorie générale du droit, 2e éd., Paris, Sirey, 1951, p. 15-24 ; BERGEL Jean-Louis, Théorie générale du droit, 4e éd., Paris, Dalloz, 2003, p. 191-224 ou encore DABIN Jean, La technique de l’élaboration du droit positif, spécialement du droit privé, Paris, Sirey, 1935, p. 110-205.

5 Pour un exemple, voir DABIN Jean, op. cit., p. 111.

6 VILLEY Michel, « Logique d’Aristote et droit romain », RHDFE 1951, p. 325.

7 GÉNY François, Méthodes d’interprétation des sources en droit privé, essai critique, Paris, Sirey, 1923, T. I, p. 129-132.

8 Ibid., p. 130.

(31)

sens beaucoup plus large, rejoignant donc l’évolution de la philosophie

1

. Il ne doit plus être compris comme renvoyant à une série de constructions a priori. Il convient donc de rompre avec les typologies civilistes comme pré-compréhensions des concepts juridiques.

Une fois écartées ces conceptions discutables, la différence entre concepts et catégories devient pour le moins trouble. Ces deux termes, ainsi que celui de « notion »

2

, sont souvent utilisés indifféremment l’un pour l’autre

3

voire même explicitement assimilés

4

. Certains ont tenté d’établir des distinctions entre eux sur la base de différents critères tel que la généralité

5

ou le rapport à « l’essence » d’une institution

6

sans qu’aucune ne puisse s’imposer ni jouer un rôle dans la méthodologie de la définition. Faute d’usage clair et utile, nous entendrons ici par

« catégorie » une idée générale susceptible d’individualisation en ce qu’elle crée une collection d’objets possédant des propriétés communes. Ce choix présente deux avantages.

D’une part, il permet, nous le verrons, de distinguer les définitions se rapportant aux catégories de celles visant d’autres concepts. D’autre part, il fait le lien entre la notion de catégorie connue en droit et celle classiquement utilisée dans d’autres disciplines telles que la psychologie

7

ou la biologie

8

. Il permet ainsi de renvoyer clairement à la détermination d’une classe d’objets. Les notions de classes et de catégories sont donc synonymes

9

. À ce propos, il semble opportun d’opérer une précision quant aux objets ou aux faits

10

que regroupent les catégories juridiques. Ces termes ne doivent pas être compris dans un sens restrictif car il en est fait un usage étendu dans la pratique et la théorie juridique. La catégorisation peut ainsi porter sur des normes ou sur des modes d’acquisition de la propriété, c’est-à-dire sur des phénomènes dépassant largement ceux issus du « monde naturel »

11

. La qualification porte ainsi souvent sur des « faits sociaux ou institutionnels »

12

tels que des contrats, des transactions financières ou des services publics. Certes, les éléments catégorisés sont

1 NADEAU Robert, Vocabulaire technique et analytique de l’épistémologie, Paris, PUF, 1999, p. 48.

2 SOURIOUX Jean-Louis, Introduction au droit, Paris, PUF, 1987, p. 42.

3 CORNU Gérard, Vocabulaire juridique, 4e éd., Paris, PUF, 2003, p. 132 (troisième sens) ou DU PASQUIER Claude, Introduction à la théorie générale et à la philosophie du droit, 2e éd., Neuchâtel, Delachaux & Niestlé, 1942, p. 179

4 FORTSAKIS Théodore, Conceptualisme et empirisme en droit administratif français, Paris, LGDJ, 1987, p. 285 ou STOCKINGER Peter, article précité, p. 87.

5 La catégorie regrouperait ainsi plusieurs concepts. Voir par exemple BERGEL Jean-Louis, Méthodologie du droit, Paris, PUF, 2001, p. 106 ; SANDEVOIR Pierre, Introduction au droit, Paris, Dunod, 1991, p. 134 ou LARROUMET Pierre, Introduction à l’étude du droit privé, 4e éd., Paris, Economica, 2004, p. 84.

6 BÉNOIT Francis-Paul, « Notions et concepts, instruments de la connaissance juridique. Les leçons de la Philosophie du droit de Hegel », in Mélanges en l’honneur du professeur Gustave Peiser, Grenoble, PUG, 1995, p. 23-38.

7 DORON Roland et PAROT Françoise, Dictionnaire de psychologie, 2e éd., Paris, PUF, 1998, p. 107.

8 HUSSON Léon, Les transformations de la responsabilité. Étude sur la pensée juridique, Thèse, Paris, 1947, p. 182 ou GHESTIN Jacques (dir.), Traité de droit civil. Introduction générale, 4e éd., Paris, LGDJ, 1994, p. 35.

9 DORON Roland et PAROT Françoise, op. cit., p. 107 et 122.

10 JANVILLE Thomas, La qualification juridique des faits, Thèse, Paris, 2002, p. 10 ou 59.

11 STOCKINGER Peter, article précité, p. 87.

12 SÈVE René, « L’institution juridique, imposition et interprétation », RMM 1990, p. 324. Les conclusions du professeur Sève paraissent toutefois abusives car il nie la possibilité de catégoriser des faits bruts en se détachant largement de la réalité du droit et en confondant deux aspects de la signification (voir infra, p. 122 et s.).

(32)

généralement réductibles en dernière analyse à une certaine réalité matérielle puisque le droit vise à modeler cette réalité. Mais les catégories sont utilisées et conçues en dehors d’une telle réduction. Nous ne voyons donc aucune raison de limiter la notion de catégorie juridique aux rares classes ne comprenant que des faits bruts a fortiori dans une optique descriptive.

Dans la typologie que nous avons retenue, la catégorie juridique s’oppose aux autres types de concepts en ce qu’elle vise à étiqueter des faits, au sens large, réunis dans une classe, légale ou théorique. La catégorisation prépare donc l’usage d’un mot en précisant à quels faits il se rapporte permettant ensuite d’utiliser ce mot à des fins descriptives ou prescriptives. Le terme signifiant une catégorie

1

permet un acte de référence, c’est-à-dire son utilisation pour renvoyer à un objet particulier. Cette précision est utile car quelques théoriciens ont affirmé que les termes juridiques ne dénotent rien

2

. Cette idée paraît excessive quand on l’applique à tous les termes juridiques

3

. En revanche, il semble possible de soutenir que certains termes juridiques ne dénotent rien. Dans ce cas, les concepts signifiés par ces termes ne seraient pas des catégories au regard du critère de distinction établi. Nous pouvons donner comme exemple les « concepts conséquents » de Dabin qui correspondent à un ensemble de règles dont l’application est déclenchée par le classement d’un fait dans une catégorie

4

. De même, les « concepts techniques » ne dénotent aucune réalité

5

: ils ont une utilité purement instrumentale dans le fonctionnement du langage du droit en reliant entre elles diverses catégories. La distinction parmi les concepts serait susceptible de transformer leur mode de définition : tenter de définir la créance ou le patrimoine en fonction de leur dénotation semble être une entreprise périlleuse impliquant un engagement ontologique particulièrement fort sur lequel nous n’avons pas à nous prononcer.

Quoi qu’il en soit, il ne nous revient pas d’étudier plus en détails les concepts apparemment privés de dénotation, car le terme « constitution » signifie manifestement une catégorie juridique en tant qu’il renvoie à certains objets spécifiques et individualisés. En revanche, maintenant que nous avons cerné le concept de catégorie, il semble utile de s’intéresser aux fonctions que les catégories jouent dans le discours juridique (2).

1 Une précision s’impose ici : la catégorie n’est pas le terme mais sa signification. « Le mot [...] désigne ainsi une catégorie […] et s'interroger sur les membres pour lesquels il peut être employé revient à s'interroger sur les membres qui font partie de la catégorie qu'il représente » (KLEIBER Georges, La sémantique du prototype, Paris, PUF, 1990, p. 17).

2 Voir MOORE Michael, « A Natural Law Theory of Interpretation », Southern California Law Review 1985, p. 303.

3 Voir infra, p. 41.

4 DABIN Jean, op. cit., p. 106.

5 MAHDAVY Hussein, L’analyse logico-philosophique du langage juridique, Thèse, Paris, 1957, p. 199.

(33)

2. L

A FONCTION DE LA CATEGORISATION JURIDIQUE

Les catégories structurent le discours juridique : « l’univers du droit est organisé autour de la notion de catégorie ou de classe »

1

. Cette caractéristique doit être mise en relation avec le processus de catégorisation dont la catégorie constitue le produit. C’est une « opération mentale » de classement de perceptions autonomes subsumées sous un terme général qui peut ensuite les désigner en passant par « certains critères »

2

. Les entités individuelles concernées sont alors considérées comme faisant partie d’un ensemble abstrait

3

. Cela permet à la fois de dépasser les réalités individuelles en « évitant la vision du monde comme chaos »

4

et de passer « du continu au discret »

5

en structurant nos perceptions dans un ordonnancement découpé en catégories. Pour mettre en relation ces éléments généraux avec le discours juridique, il paraît opportun de reprendre la distinction classique entre discours du droit et discours sur le droit

6

. Dans ces deux discours, les catégories sont absolument nécessaires mais elles ont des fonctions différentes. Dans le discours du droit, elles permettent de saisir les réalités individuelles en les assignant à une catégorie donnée, dont le nom les désignera dans ce discours. Le fonctionnement du droit dépend alors de ces catégories à travers l’opération de qualification qui conditionne l’application des règles juridiques

7

. Dans le discours sur le droit, elles permettent la compréhension du système juridique. Ses règles et institutions sont ordonnées au-delà d’une simple juxtaposition. Seule la catégorisation permet de dépasser leur individualité pour rendre compte du fonctionnement du système juridique. Dans les deux situations, la fonction dénotative est centrale : ces discours doivent se référer à certaines réalités que ce soit pour les transformer ou pour les décrire. L’éclaircissement des discours juridiques ne peut donc faire abstraction de la catégorisation qui constitue la base des énoncés et des raisonnements juridiques. Précisons ici que la catégorisation n’implique pas forcément la mise en relation des différentes catégories de manière hiérarchisée. Un tel procédé est sans doute opportun

8

. Toutefois, dans cette partie descriptive, nous ne pouvons que constater qu’il s’agit d’une option rarement suivie dans le discours du droit et le discours sur le droit. Il n’y a

1 BOURCIER Danièle, « Argumentation et définition en droit », Langages n°42, p. 115 ou dans le même sens BOURCIER Danièle, « La novlangue ou comment rendre actifs les textes juridiques », in GUILLOREL Hervé et KOUBI Geneviève (dir.), Langues et droits, Bruxelles, Bruylant, 1999, p. 372.

2 DORON Roland et PAROT Françoise, op. cit., p. 107.

3 CROFT William et CRUSE Alan, Cognitive Linguistics, Cambridge, CUP, 2004, p. 74.

4 KLEIBER Georges, op. cit., p. 13. Voir aussi CRUSE Alan, Meaning in Language, 2e éd., Oxford, OUP, 2004, p. 125.

Cette fonction est fondamentale : « sans l’aptitude à catégoriser, nous ne pourrions agir ni dans le monde physique, ni dans notre vie intellectuelle » (LAKOFF Georges, Women, Fire and Dangerous Things. What Categories Reveal about the Mind, Chicago, The University of Chicago Press, 1997, p. 6).

5 HOUDÉ Olivier (dir.), Vocabulaire de science cognitive, Paris, PUF, 2003, p. 72.

6 Pour un exemple voir PINTORE Ana, « Définition en droit », in ARNAUD André-Jean (dir.), op. cit., p. 171.

7 Voir infra, p. 51.

8 EISENMANN Charles, « Quelques problèmes de méthodologie des définitions et des classifications en science juridique », APD 1966, p. 30.

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