A NNALES DE L ’I. H. P., SECTION B
J. B ASS
Fonctions de corrélation des fonctions pseudo-aléatoires
Annales de l’I. H. P., section B, tome 25, n
o4 (1989), p. 503-515
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Fonctions de corrélation des fonctions
pseudo-aléatoires
J. BASS
Université Pierre-et-Marie-Curie (Paris-VI)
Vol. 25, n° 4, 1989, p. 503-515. Probabilités et Statistiques
RÉSUMÉ. -
y (I)
étantdonné,
il existe unprocédé théorique (Wiener, Bertrandias)
pour construire l’une des nombreuses solutionsf
del’équation :
Mais ce
procédé
tientcompte trop
exclusivement ducomportement
asymp-totique de . f ’ quand
Dans lapratique,
il est bon de trouver dessolutions
f qui
soient aussi localement définies. On en donne divers moyens,qui
ne constituentcependant
pas tout à fait une doctrine cohé-rente.
Mots clés : Fonctions de corrélation, fonctions pseudo-aléatoires.
ABSTRACT. - For a
given
y(ï)
atheory permit
us(Wiener, Bertrandias)
to find
solutions f
of theequation
But this
theory
is toouniquely
related to the behaviourof f
at t = + oo .For the
applications,
it is useful to findsolutions f
which aretogether locally
andasymptotically
defined. In this paper, some methods are indica-ted,
which are theapproach
of a coherent doctrine.Annales de l’Institut Henri Poincaré - Probabilités et Statistiques - 0246-0203
1.
Soit , f ’ (t)
une fonction définie pour tout t, nulle pourt o, bornée,
àvaleurs réelles ou
complexes.
Onappelle
fonction de corrélation def
lafonction :
Je m’intéresserai aux cas où cette limite existe et est une fonction continue de i. C’est une moyenne. Si l’on
représente
d’unefaçon générale
par Ml’opérateur
de moyenne,on a
Il arrive que,
f
étant définie pour toutréel,
onappelle opérateur
de- F
moyenne
l’opérateur
M( )
= lim 2014( )
dt. Dans cequi suit,
nousT -~ oo
2iB
_~adopterons
la définition(1) .
On sait
[3]
que y{i)
est une fonction detype positif.
Il existe une mesurespectrale positive 03A6
telle que/- M
Si 03A6 est absolument
continue,
il existe une densitéspectrale
cp,positive
etintégrable
sur telle que :En
particulier
De
(2),
on déduit facilement que y( - i)
=Y (r),
y(i) ~ ç y (0).
Enfin,
s’il y a une densitéspectrale,
limy (i) = o.
T "~ 00
Une fonction
f
ayant une densitéspectrale
estappelée
une fonctionpseudo-aléatoire (dénomination
introduite par J. Bass en1959).
on se posela
question
suivante :étant donnée une
fonction
y(i) qui
a lespropriétés d’une fonction
decorrélation,
peut-on trouver unefonction f
dont elleprovienne ?
Ce
problème
nepeut
pas avoir une solutionunique.
La formule(1)
nedéfinit f
que par soncomportement asymptotique.
Sif
est unesolution,
toute fonction obtenue en modifiant
f
sur un intervalle borné est encore une solution.Lorsque
y(ï)
est une série de Fourier-Bohr à convergence suffisammentrapide,
il est facile de construire des fonctionsf.
Si en effettoute fonction de la forme
répond
à laquestion,
avec desphases Àk
arbitrairement choisies.f (t)
estpresque
périodique.
On dit aussique f a
unspectre
de raies.Dans ce
qui suit,
nous allons nous intéresser au cas oùf
estpseudo-
aléatoire. N. Wiener
[8], puis
J. P. Bertrandias[4],
ont donné une méthodepermettant
de construireexplicitement
une fonctionf
admettant y pour fonction de corrélation. Elle consiste à construire une suited’approxima-
tions
périodiques
de la densitéspectrale
cp, et à leur associer une suite de fonctionspériodiques
gl, g2, ... Onpartage
l’intervalle[0, +oo[ en
uneréunion d’intervalle
Ik
deplus
enplus grands, qu’on peut
choisir de telle sorte que lafonction f égale à gk
surIk
admette cp comme densitéspectrale.
Cette méthode est bien
adaptée
auproblème posé.
Mais elle ne s’intéresse pas aucomportement
localde f, qui
n’a pas d’influence sur les moyennes.Or ce
comportement peut
avoir del’importance.
Onpeut
parexemple
demander que
f
soit solution d’uneéquation différentielle,
et soit enoutre
pseudo-aléatoire.
Lespropriétés asymptotiques
def
sont alors laconséquence
despropriétés
locales. Il est donc utile de chercher d’autres solutions auproblème posé.
On
pourrait
se proposer de trouverf
comme limite d’une suite de fonctionsfn,
associées à desapproximations
de y. PosonsLorsque n -
oo, avec peu de restrictions sur cp, ~~(i) tend,
pourchaque
i,vers
Or yn
M
est la fonction de corrélation deSupposons
cette série absolumentconvergente.
Est-ilpossible
de choisirles
Àk (n)
de telle sorte que :tende vers une
limite f,
au sens de la convergencesimple;
2° f
ait pour fonction de corrélation lim Yn(i) ?
n - o0
On sait par des
exemples
que cela estpossible [3],
mais on sait aussi que, si une suite de fonctionsfn
tend vers unelimite f, M fn
ne tend pas nécessairement versM f exemple :
. Ceprocédé
sembledonc
dépourvu
deportée générale.
Je vais
indiquer
un certain nombre deprocédés qui,
dans biens des cas,permettent
derépondre
à laquestion posée
ci-dessus.2. RAPPEL DE
QUELQUES RÉSULTATS [3]
On sait construire des fonctions admettant comme fonction de corréla- tion
où 1
(i) =
1si i ( 1,
1(i) = o si i i >
1 et comme densitéspectrale
~
B
2’ 2
p
(x) =
03C0x2 sin2 2.
Rappelons
comment onpeut procéder [2].
On donne une fonction h
intégrable
au sens de Riemann telle queOn donne une suite de nombres réels un doublement
équirépartie
sur[0,1].
Cela
signifie
que,quel
que soit l’entierk > 0,
la estéquirépartie
dans le carré[~,1 ] 2 .
La fonction en
escalier,
nulle pourt 0, égale
àh (un)
pour0 ç n t n + 1,
admet pour fonction de corrélation la fonction(6), qui joue jusqu’à
un certainpoint
pour les fonctionspseudo-aléatoires
le rôlede la fonction pour les fonctions presque
périodiques.
Ce résultat se
prête
à diverses extensions. Voici laplus remarquable.
Soit
toujours
h une fonction satisfaisant à(7).
Soit d’autrepart
r unefonction réelle définie sur
[0,1],
nonnégative, bornée,
telle queOn
donne une suite znéquirépartie
sur[0,1] et
une suite Un doublementéquirépartie.
Ondésigne par tn
une suite telle queOn démontre
[3]
que lafonction/(~) égale
à si estpseudo-aléatoire.
Sa fonction de corrélation y estégale
à/
Exemples. - (a) r (z) =1.
On retrouve y(r)
= 1 - T pour 0 T 1.(b) r (z) = 2 z.
On trouve1
On trouve
Dans ce cas,
Y(1:)
est uneligne
brisée continue formée de deuxsegments.
Pour ï
=, y(r)= .
Pour ’t
3
’Y( ) 3 3 . (d) r (z) = 3 z2.
On trouveVoici une nouvelle extension du résultat
précédent [3].
Conservons la formule
(9)
mais sansl’hypothèse
que r est bornée.Supposons
seulement quel’intégrale généralisée Îo Y (z)
dz existe. Alors la
formule
définit
toujours
une fonction decorrélation, qui
n’est autrequ’une
fonctionde
Polya (paire, continue, décroissante,
convexe, tendant vers 0 àl’infini).
Si en effet on pose
on a
y a donc presque
partout
une dérivéenégative
et décroissante.Mais rien ne prouve que, pour une fonction r
choisie,
il existe effective- ment unefonction f ayant
y pour fonction de corrélation : il revient au même de dire que, si r est une fonction non bornée telle queY (z) dz
existe,
et zn une suiteéquirépartie,
le théorème de H.Weyl
n’est pas nécessairement satisfait.L’égalité
n’est pas vraie en
général.
La fonction r étantdonnée,
elledépend
essen-tiellement du
comportement
de la suite z~. On connaîtcependant
des casoù il est
possible
d’associer des fonctionsf
à une fonction r. Leplus simple
est celui où
On démontre
[3]
que le théorème deWeyl
est vérifié par les suites zn = n 9(modulo 1),
où 0 est un irrationnelalgébrique.
Dans ce cas, on construitla fonction
f
par leprocédé indiqué plus
haut. Elle a pour fonction de corrélatione-|03C4|,
pour densitéspectrale 1 03C0(1+x2).
On remarquera que’y
(i)
est une fonction àsupport
non borné(1).
(~)
On peut généraliser ce cas particulier. Voir par exemple [7].3. TRANSFORMATION PAR CONVOLUTION
On sait
[3]
que, sifo
estpseudo-aléatoire
et siK E L 1,
la convolutionf =
K* fo
estpseudo-aléatoire.
Si tpo est la densitéspectrale
defo,
celle defest
où
K
est la transformée de Fourier deK,
définie parJw
tj 2014 ooK(s)
ds.Ce
résultat,
associé auparagraphe précédent, permet
de construire de nombreuses fonctionspseudo-aléatoires.
Exemple :
Fonction ayant pourfonction de
corrélationpour densité
spectrale
Soit f0
une fonctionayant
pour densitéspectrale 1
. Nous avons vu1+~
comment on
pouvait
en construire. PosonsAlors
2014 */ 2014 uu
est une fonction
intégrable,
nonélémentaire,
mais bien déterminée. Une solution duproblème posé
estMais le résultat énoncé ci-dessus
peut
être étendu au cas où K est unedistribution,
un cas intermédiaire étant celui oùl’intégrale
K (x) fo (t - x) dx
existe en tantqu’intégrale semi-convergente.
Rappelons
d’abordquelques propriétés
des distributionspseudo-aléatoi-
res,
d’après
Vo Khac[5].
On dit que la
distribution
u estpseudo-aléatoire
si saconvolution
par une fonction arbitraire de
l’espace
S(espace
des fonctions indéfiniment dérivables à décroissancerapide)
est une fonctionpseudo-aléatoire.
La distribution de corrélation y de u est définie par
On vérifie que, si u est une
fonction,
y est bien sa fonction de corrélationau sens usuel.
Supposons
maintenant que u soit de la forme K *fo,
oùfo
est unefonction et K une distribution. Le calcul donne
l’expression
de la distribu- tion de corrélation :(sous
réserve de l’existence deK * K).
Lorsque
K est une fonction deLI,
on retrouve naturellement la formule(12).
Voiciquelques exemples
de circonstances différentes.Supposons
d’abord que K soit de la formeoù a est un nombre
complexe
donné et oùK I E L 1.
On a alorsLa densité
spectrale
def
estégale
àExemple :
Fonction ayant pour densitéspectrale
On choisit
pour ~
une fonctionayant
pour densitéspectrale 201420142014.
On1+ ~
pose donc
On a donc
D’où la formule
explicite
4. FONCTIONS AYANT UNE
DENSITÉ
SPECTRALE A SUPPORTBORNÉ
Il
s’agit
de construire unefonction f
ayant pour densitéspectrale
lafonction
la (x), égale
à 1 si - a x a, à 0 en dehors.S . l’ d (:’ .. , 1 2 . ;c Soit
f o
une des fonctionsayant
p our densités p ectrale 2 sin2 x .
Prenons a tel que 0 a 2 ~. Cherchons K telle que l’on ait
K est
paire,
continue et deux fois dérivablesur ] - a, a[.
Elle est donctransformée de la fonction K telle que
Une seconde
intégration
parparties
montre que le dernier terme est dansL 1.
Onpeut
écrireDonc
Par
suite,
l’existence def
découle de celle de la fonctionTHÉORÈME. - Soit
fo (t)
unefonction égale
àoù 8 est un irrationnel
quadratique.
S ...
if,
l 1. sin 4 neet"
dé ",o.fi
.S’i c est un entier
positif,
la convolution sin 4 03C003B8ct * fa dé, finit
unefonction
t
f
(D’après
cequi précède,
cette fonction estpseudo-alèatoire.)
Démonstration :
Il faut montrer que cette série converge pour
chaque t
fixé.Soit m la
partie
entière de t. Dans la série(22),
il y a un nombre fini deoo
termes pour
lesquels ~ ~ ~.
Il suffit donc d’étudier la sérieavec £ .
Tous les dénominateurs ~+jc2014~ sont alors
positifs.
Onsépare
la sérieen deux :
et la série déduite de
(23)
parchangement
de cen -
c,qui
se traite de la mêmefaçon.
Onpeut
écrire(23)
sous la formeOr on sait
[6]
que, avec leshypothèses
faites sur 0 et c,Par
conséquent
La série
(24)
estéquivalente
à la série de termegénéral
Ce terme est
majoré
parterme
général
d’une sérieconvergente.
La série
22 )
est donc conver g ente,et g=sin
403C003B8ct* .fo
existe. g a pourdensité , s ectrale
203C0 x2sin2
x .1x .
5.
SÉRIES
DE FONCTIONSINDÉPENDANTES
Supposons
que les fonctionsfl, f2,
... , ,fn,
... soient deux à deuxindépendantes,
c’est-à-dire que, pour h, on aitquelque
soit i :Pour p = n,
on aC’est la fonction de corrélation
de fn, qui
n’est pasnulle,
du moins auvoisinage
de 0.Supposons
en outre que lesfonctions
soient bornées dans leur ensemble. une suite de nombrescomplexes
tels quePosons
On a,
grâce
à la convergenceabsolue,
Par
suite,
la fonction de corrélationde f
a pourexpression
Cette formule est bien connue
lorsque h (t)
=eirokt.
Elle se démontre avecdes
hypothèses
un peu moins restrictives. Mais elle est valable dans des conditionsbeaucoup plus générales.
Elles’applique
aux sous-espaces del’espace
de Marcinkiewiczengendrés
par des familles de fonctionsindépen-
dantes.
Lorsque
ces fonctions sontpseudo-aléatoires,
leurs combinaisons linéaires(29)
le sont aussi. Il faut montrerqu’on peut
construire des familles de fonctionsindépendantes.
En voici desexemples.
Soit
P (t)
unpolynôme
dedegré
v _> 2 dont le terme en t03BD a un coefficient e irrationnel. On sait que la fonction définie parest
pseudo-aléatoire.
Soit alors
Q
un secondpolynôme,
v’ sondegré,
8’ sonplus
hautcoefficient.
Appelons
demême g
la fonction associée à cepolynôme.
f et g
sontindépendantes
dans les deux cas suivants :si
v ~ v’;
si v = v’ et si 8 et 0’ sont
arithmétiquement indépendants.
En
effet,
sit représente
lapartie
entière de t, on aOr
D’où
Si
v ~ v’,
on a enexposant
unpolynôme
dedegré
sup(v, v’).
Si
v = v’,
on a unpolynôme
dedegré
v dont le terme deplus
hautdegré
a pour coefficient le nombre irrationnel 8’ - 8. Dans les deux cas, le théorème de
Weyl s’applique.
La limite est nullequelque
soit i. Jerappelle
que, si
P = Q,
la limite est nulle sauf pourT=0,
0 _ i 1. Elle fournit alors la fonction de corrélation def.
On a donc des séries de la forme
où les
Pk
sont bien une suite depolynômes
dedegré croissant,
ou bien despolynômes
de mêmedegré
dont les termes deplus
hautdegré
ontpour
exposants
les termes d’une suitearithmétiquement indépendante (exemple 8k,
0transcendant).
Bien d’autres modèles de suite de fonctions
indépendantes peuvent
êtreimaginés.
Il n’est pas utile de les donner ici.RÉFÉRENCES
[1] J. BASS, Les fonctions pseudo-aléatoires, Mémorial des sciences mathématiques, Gauthier- Villars, 1962.
[2] J. BASS, Fonctions stationnaires, fonctions de corrélation, application à la représentation spatio-temporelle de la turbulence, Ann. Inst. H. Poincaré, vol. V, 1969.
[3] J. BASS, Fonctions de corrélation, fonctions pseudo-aléatoires et applications, Masson, 1984.
[4] J. P. BERTRANDIAS, Opérateurs subordinatifs sur des espaces de fonctions bornées en
moyenne quadratique, J. Math. Pures Appl., t 52, 1974.
[5] J. P. BERTRANDIAS, J. COUOT, J. DHOMBRES, M. MENDÈS-FRANCE, PHAM PHU HIEN et VO KHAC KHOAN, Espaces de Marcinkiewicz, corrélations, mesures, systèmes dynami-
ques, Masson, 1987.
[6] G. H. HARDY et J. E. LITTLEWOOD, Some Problems of Diophantine Approximation.
Acta mathematica, vol. 37, 1917.
[7] G. H. HARDY et J. E. LITTLEWOOD, Notes on the Theory of Series: a Curious Power Series, Proc. of the Cambridge Phil. Soc., vol. 42, 1946.
[8] N. WIENER et A. WINTNER, On Singular Distributions, J. Math. Physics, vol. 17, 1939.
(Manuscrit reçu le 23 juin 1988) (révisé le 16 mai 1989.)