FACULTÉ DE MÉDECINE ET DE PHARMACIE DE BORDEAUX
ANNEE 1901-1902 N° 46
ÉTUDE
EXPÉRIMENTALE
DE
causées par
LE VENIN DES SERPENTS
(Travail du
Laboratoire d'Anatomie pathologique)
THÈSE POUR LE DOCTORAT EN MÉDECINE
présentée et soutenue
publiquement le 8 Janvier 1902
PAR
Louis-Auguste-André-Marie VAILLANT
Né à Paris (Seine), le
26 Novembre 1876
ÉlèveduService de Santé delaMarine
MM. COYNE professeur Prisid
„ . , , m.t 1 PICOT professeur
)
Examinateurs de la Thèse : ( HOBBS agrégé
[
JugesLeDANTEC agrégé
)
Le Candidat répondra aux
questions qui lui seront iaites sur les
diverses parties de
l'Enseignement médical.
BORDEAUX
IMPRIMERIE DU
MIDI
—PAUL CASSIGNOL
*J1 — RUK PORTE-1)1.1liAUX —
9t
1902
Faculté de Médecine et de Pharmacie de Bordeaux
M. DE NABIAS, doyen — M. PITRES, doyen honoraire.
I»BtOtFKSSBCUBlS
MM. M1GÉ \
DUPUY ( Professeurs honoraires.
MOUSSOUS
\
MM.
P1. • • , ) PICOT.
Clinique interne
PITRFS
nI. • . \ DEMONS.
Clinique externe
j
LANEL0NaUE.Pathologie et théra¬
peutique générales. VERGELY.
Thérapeutique ARNOZAN.
Médecine opératoire. MASSE.
Clinique d'accouche¬
ments LEFOUR.
Anatomie pathologi¬
que COYNE.
Anatomie CANNIEU
Anatomie générale et
histologie V1AULT.
Physiologie JOLYET.
Hygiène LAYET.
Médecinelégale MORACHE.
aïB']«acs I<iA SKCTION 1)E MÉDECINE (Patholog
MM. SABRAZÈS. | LE DANTEC.
HOBBS.
Physiquemédicale... Chimie
Histoire naturelle ...
Pharmacie Matière médicale Médecine expérimen¬
tale
Clinique ophtalmolo¬
gique
Clinique des maladies chirurgicalesdes en¬
fants
Clinique gynécologique Cliniquemédicaledes maladiesdesenfants Chimiebiologique...
Physique pharmaceu¬
tique
I;\I:H( I< I: : te interneetMédecine
MM. MONGOUR.
CABAN NES.
MM.
BERGON1É.
BLAREZ.
GUILLAUD.
FIGUIER.
DE NABIAS FERRÉ.
BADAL.
P1ECHAUD.
BOURSIER.
A. MOUSSOUS DENIGÈS.
SIGALAS.
légale.)
SECTIONDE CHIUUaOIE ET ACCOUCHEMENTS
Pathologieexterne
MM.YILLAR.
) CHAVANNAZ.
) BRAQUEHAYE BÉGOUIN.
Accouchements 1MM. FIEUX.
ANDERODIAS.
Anatomie
SECTION DESSCIENCES ANATOMIQUES ETPHYSIOLOGIQUES
IMM. GENTES. | Physiologie MM. PACHON.
'
i CAYALIÉ. I Histoirenaturelle..... BEILLE.
SECTIONDESSCIENCES PHYSIQUES
Chimie MM. BENECH. | Pharmacie M. DUPOUY.
COUIIS « OIBB'B.ÙMBiVB A B IIIIS :
Clinique des maladies cutanéeset syphilitiques MM. DUBREIJILH.
Clinique des maladies desvoies urinaires POUSSON.
Maladies dularynx, des oreilles et dunez.. MOURE.
Maladies mentales
, REGIS.
Pathologie interne RONDOT.
Pathologie externe DENUCni.
Accouchements
FIEUX.
Physiologie PACHON.
Embryologie PRINGETEAU
Ophtalmologie LAGRANGE.
Hydrologie etMinéralogie CARLES.
Pathologie exotique..! LE DANTEC.
Le Secrétaire de la Faculté: LEMAIRE.
Pardélibération du 5 août 1879, la Faculté aarrêté que les opinions émises dans les Thèsesqui luisont présentées doiventêtre considérées commepropres à leursautours, qu'elle n'entend leur donner niapprobation ni improbation.
A la mémoire demon Grand-Père
MONSIEUR AUGUSTE HOVIUS
OFFICIER DE LA LÉGION D'HONNEUR DÉPUTÉ D'ILLE-ET-VILAINE
MAIRE DE SAINT-MALO
A MON
PÈRE
PROFESSEUR AU MUSEUM D'HISTOIRE NATURELLE CHEVALIER DE LA LÉGION D'HONNEUR
A MA
MÈRE
A MON
FRÈRE, MES BEAUX-FRÈRES
ET MES SŒURS
A mon Maître
MONSIEUR
LE DOCTEUR AUCHÉ
PROFESSEUR AGRÉGÉ A LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE BORDEAUX
CHEF DES TRAVAUX AU LABORATOIRE
D'ANATOMIE
PATHOLOGIQUEMÉDECIN DES HOPITAUX OFFICIER D'ACADÉMIE
A mon Président de Thèse
MONSIEUR LE DOCTEUR
COYNE
PROFESSEUR D'ANATOMIE PATHOLOGIQUE A LA FACULTÉ DE MÉDECINE
DE BORDEAUX
MEMBRE CORRESPONDANT DE L'ACADÉMIE DE MÉDECINE
CHEVALIER DE LA LÉGIOND'HONNEUR
OFFICIER DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE
jp
si
,
■»
««■
Avant d'aborder notre sujet,nous
voulons témoigner à
nosmaîtres de la Marine et de la
Faculté qui
nousont dirigé
dansnos études médicales
l'expression de notre profonde
reconnaissance. Dans les hôpitaux
de Rochefort et de Bor¬
deaux,nous n'avons
trouvé parmi
noschefs de service que
des exemples
à suivre. M. le Prof. Picot a daigné s'intéresser
particulièrement à
nousdurant les quelques mois que nous
avons passés
dans
sonservice; nous ne pourrons mieux le
remercier de son enseignement
pratique qu'en
nousmon¬
trant à la hauteur de notre
tâche
auchevet du malade. M. le
Directeur Bourru a toujours eu pour nous une
très grande
bienveillance; qu'il nous
soit permis de lui exprimer ici
notre respectueuse
reconnaissance. M. le Prof. Coyne nous
a admisdans son laboratoireet,
plus d'une fois, il
nousaida
de ses conseils. En acceptant
la présidence de notre thèse il
nous faitun grand honneur, nous
le remercions profondé¬
ment de cette nouvelle marque
de l'intérêt qu'il nous porte.
Depuis deuxans,
M. le Prof, agrégé Auché nous a associé à
un certain nombre de ses travaux.
Il
nous a nonseulement
enseigné les
méthodes qui permettent de mener à bonne fin
une recherche scientifique,
mais il
nous aencore appris à
nous passionner pour
cette recherche. Les journées passées
à travailleravec lui à la
poursuite d'un même but compte¬
ront parmi nos
meilleurs souvenirs. Notre carrière nous
entraine loin de celui qui a
été notre maître, mais malgré
cela nous espérons
compter toujours parmi ses élèves.
Nous
présentons également nos meilleurs remerciements
à MM. Phisalix et Calmette; l'un a
mis à notre disposition
du venin de vipère
de France, qui
nous apermis de faire un
certain nombre
d'expériences; l'autre
nous alibéralement
envoyé du sérum antivenimeux.
— 12 —
Enquittant l'Ecole du Service de Santé de la
Marine,
nous nous séparons avec regret d'excellents amis. Quels que soient notreéloignement
et la durée de notreabsence,
quels quesoient leschangements
survenus dans leur vie et dans la nôtre, nous espérons toujours retrouver chez eux les sen¬timents sincères et dévoués qu'ils nous ont toujours témoi¬
gnés.
Nous nevoulons pas nonplusoublier parmitousces témoi¬
gnages de sympathie la mémoire d'un humble travailleur qui, dès notre plus jeune âge, nous habitua à n'avoir des serpents que la crainte qui nous rend prudent,sans nous rien faire perdre de notre sang-froid. Bien des expériences dece modeste travail ont été menées sans encombre grâce à
cequ'il nous avait appris. M.
Desguez,
commis en chef dela ménagerie des reptiles du Muséum d'histoire naturelle, ne lira pas aujourd'hui ces lignes où sonjeuneami luiexprime tous ses remerciements. Puisse ce souvenir montrer à sesparents que ni notre mémoire ni notre cœur n'ont oublié
ce que nous lui devons.
Notre travail estdivisé en
cinq chapitres.
Dans le premier, nous
indiquons
l'état de nos connais¬sances au moment où nous nous sommes occupé de ces lésions.
Dans le second, nous
indiquons
la méthode que nousavons
employée.
Dans le troisième, nous rapportons nos
expériences.
Dans le quatrième, nous décrivons les lésions macrosco¬
piques.
Dans le
cinquième,
nous retraçons la marche des lésionsmicroscopiques.
I
HISTORIQUE
Les
propriétés physiques et chimiques des venins des
ser¬pents,
leurs effets physiologiques, ont été très étudiés. Les
noms de Weir-Mitchell, de Calmetle, de Phisal;x,
de Ber¬
trand, deMartin, pour ne citer que
les plus importants, sont
attachés à ces recherches. Mais au point de vue
particulier
quinous occupe,nousn'avons
euconnaissance dans la litté¬
rature médicale que de deux ouvrages
traitant des lésions anatomo-pathologiques. L'un, de M. Martin,
parudans les
comptes
rendus de la Société Royale de la Nouvelle-Galles du
Sud, considère seulement les
altérations du
sang.Nous
nele
rappelonsici
que pourmémoire,
ceslésions n'étant pas étu¬
diéesdans ce travail. L'autre, de M. Nowack,
publié dans les
Annales de l'Institut Pasteur, donne les
descriptions
ma¬croscopiques et
histologiques des
organesprincipaux après
envenimation.
La méthode employée par M.
Nowack diffère sensiblement
delà nôtre. Levenin dont il s'est servi
n'appartenait ni à
un même serpent
ni à des animaux de la même espèce,
c'était un mélange de
différents venins de serpents des
pays chauds. Onchauffait celui-ci à 80o pourlui enlever toutes
sespropriétés phlogogènes. On le filtrait sur papier pour en
séparer
les matières albuminoïdes coagulées par la chaleur.
Le
liquide ainsi obtenu servait à inoculer des souris, des
cobayes,
des lapins, des chiens. Les pièces recueillies aux
autopsiesétaient fixées dans le Flemming, le sublimé acé¬
tique,
la formaline.
Fort peu de
lésions macroscopiques furent constatées: le
plus
souvent, congestion plus ou moins intense selon le
— 14 —
degré de l'envenimation. Du côté du poumon, dans les into¬
xications lentes, on trouvait des régions qui ne contenaient plus d'air, necrépitaient plus et ne flottaient pas sur
l'eau;
ellesétaient également un peu surélevées.
Au point de vue
microscopique,
les altérations sont nom¬breuses. Le foie, une demi-heure après
l'injection
du venin, présente déjà de petits globules graisseux à la périphérie des celluleshépatiques;
et si l'intoxication est plus lente, les gouttelettes de graisse envahissent ces éléments. Le proto¬plasma en même
temps
se condense dans certains points, devientgranuleux, vacuolaire. La chromatine nucléaire dis¬paraît petit à petit et le noyau se coloremal. La membrane cellulaire est très rarement
détruite,
on la retrouve presque toujours contenant les débris du protoplasma et du noyau.Les
capillaires,
remplis de globules rouges,distendus,
com¬priment les cellules, brisent les travées
hépatiques,
détrui¬sent toute l'harmonie du lobule et le foie prend un aspect angiomateux. Les voies biliaires ne restent pas
intactes,
de petites cellules mononucléaires à gros noyaux envahissent le tissu conjonctifenvironnant et pénètrentjusque
dans la lumière des canaux.Le rein présente des altérations cellulaires analogues à celles du foie : elles sont surtout localisées dans les tubuli contorti. Les cellules se
tuméfient,
se gonflent, bouchent la lumière du canal ; le protoplasma se raréfie, se vacuolise, le noyau secolore mal. La nécrose va même plusloin, la mem¬brane se détruit, on ne voit plus que des couches uniformes formées par une foule de petites granulations protoplasmi-
ques, tapissant la paroi du canalicule. Dans les branches de Iienle, le plus souvent il n'y a que de la tuméfaction. Les épithéliums des tubes droits et collecteurs sont quelquefois détachés en bloc,mais rarementnécrosés. La
dégénérescence
graisseuse est moins sensible que dans le foie, elle est enpetits foyerset localisée à la partie externe des cellules. Le
bouquet
vasculaire du glomérule deMalpighi
est comprimé, il y a entre lui et la capsule de Bowmann unlarge
espace— 15 —
rempli par un
exsudât où l'on distingue des globules blancs,
des hématies et quelques
cellules épithéliales.
Le cœur ne présente
le plus souvent aucune altération ; quelquefois, dans les intoxications lentes, une légère dégé¬
nérescence graisseuse.
Le poumon,
dans les parties congestionnées, montre les
vaisseaux capillaires
dilatés, remplis de globules rouges,
lesalvéoles contiennent un
exsudât où
semélangent à des
hématies desglobules
blancs et des cellules endothéliales.
Ces lésions
inflammatoires sont
parfoyers.
En résumé, le
foie, le
poumonet le rein sont les organes
les plus
atteints. Le foie est détruit par la nécrose et le pro¬
cessusstéatogène. Le
rein présente des lésions de néphrite
aiguë
parenchymateuse
;le poumon, des altérations inflam¬
matoires; le cœur, un
certain degré de dégénérescence.
La méthode
employée
parM. Nowack permet-elle d'assurer
que ce
sont bien là les lésions causées par la morsure des
serpents
venimeux? Ce mélange de différents venins, ce
chauffage à 80°
n'ont-ils pas pu altérer dans une certaine
mesure les
effets?
Aupoint de
vuethérapeutique, les venins
sont tous
pareils. Le sérum antivenimeux de M. Calmette
agit
aussi bien après la morsure d'un crotale qu'après celle
d'une vipère.
Au point de vue physiologique, l'analogie est
également très grande. Maison ne saurait être aussi affir-
matif si l'on
considère les lésions a'natomo-pathologiques.
Ainsi levenin des
Crotaliens cause des œdèmes très étendus,
mais peu
d'hématuries, peu d'hémorragies. Les morsures des
Vipéridés
aucontraire donnent lieu à des œdèmes moins
intenses et les
hémorragies rénales ou des autres organes
sont toujours
très prononcées. Ces effets particuliers des
venins devipère
peuvent disparaître si l'on chauffe à 70'
pendant
quinze minutes une solution faite dans du sérum
physiologique
:à cette température, la toxicité reste intacte.
Maisau-dessus il y a
de grandes différences entre eux au
point
de
vuede la résistance à la chaleur. Le venin du Cobra
capel,
du Pseudechis d'Australie s'atténue à 80° ; ceux de
Pœlias, de crotale sont encore moins résistants. On peut se demander ensuite si ces effets phlogogènes, ces phénomè¬
nes
hémorragiques,
supprimés par les manipulations que subitcettesubstance toxique, n'ont pas une influence sur ledéveloppement
des lésions des différents organes? La for¬mation d'une eschareau point d'inoculation n'a-t-elleaucune
action sur certaines fonctions, ne citerions-nousquel'héma- topoièse ? Cette tendance auxhémorragies ne peut-ellemodi¬
fier certains processus? Cesconsidérations nous ont conduit à reprendrecesétudes. A voirceque le venin n'ayant aucune de ses propriétés altérées peut
produire.
A constater si eninjection ou par morsure les altérations anatomo-patholo- giques étaient
identiques.
II
MÉTHODES
Dans nos expériences, nous nous sommes
surtout servi du cobaye.
Sonpetit volume le rend très maniable et il est plus
en rapport avec
la taille de la vipère de France (Vipera a.spis)
que nous avons
surtout
eueà notre disposition. Nous ne
possédionségalement
audébut de
nosétudes
surl'envenima-
tionque 1
milligramme de venin desséché, et afin de pouvoir
varier le plus
possible la durée des phénomènes et des lésions
causés par le
venin des serpents,
nous avonsdû
nousadres¬
serà un petit
animal. Nous n'avons utilisé le lapin qu'ù la fin
de nos expériences.
Nous eûmes alors la bonne fortune de
pouvoir
recueillir
sur uncrotale 32 milligrammes de venin.
Tantôt nous faisions mordre les animaux,
tantôt
nousleur
avons
injecté
parla voie sous-cutanée une solution de
venin.
La
première méthode paraît la plus simple, et nous l'avons
d'abordemployée.
Il semble
eneffet
quele cobaye jeté dans
la cage sera
aussitôt mordu. Mais,
encage ou en liberté, le
serpent est
le plus souvent craintif, il se tient sur la défen¬
sive mais n'attaque pas.
Il faut donc l'agacer et maintenir
l'animal à sa
portée,
cequi, quelquefois, est
assezdélicat.
Ensuite le
poil des cobayes est
unexcellent élément de
défense. Quand on
peut
seservir de serpents de grande taille
comme le crotale, le naja,
le trigonocéphale, leur force et la
longueurde
leurs crochets venimeux leur permettent de fran¬
chir facilement cet obstacle;
mais
unevipère d'Algérie
oude
France se jette sur
le cobaye, les dents glissent quelquefois,
l'on croit l'animal
mordu
etil
nel'est
pas ; oule contraire.
V.
- 18 -
Le cobaye ou le
lapin
ne poussent pas toujours un cri carac¬téristiquequi permette de préciser le moment où ils ont été atteints. Un autre inconvénient de la morsure, c'est que l'on
ne sait pas toujours où elle a été faite. La forme des crochets des serpents leur permet de faire une blessure punctiforme
se refermant aussitôt; le plus souvent il n'y a pas de sang, il n'ya pas de lésions delapeau bienapparentes. Ilest encore assez difficile de faire mordredansune
région
précise. L'ani¬mal mordu à l'oreillene recevrapresque pas de venin, tandis que celui mordu à l'abdomen n'en perdra pas une parcelle.
Cependant on peut dans une certaine mesure y parvenir. On attire le serpent contre le
cobaye,
on le laisse ramper à ses côtés et au moment où la tête a un peudépassé
l'abdomen par exemple, on exerce une pression sur son corps, le ser¬pent se retourne aussitôt et mord. Mais le
principal
inconvé¬nient de cette méthode est le manque de précision dans les degrés d'envenimation. On ignore la quantité de venin injec¬
tée, la toxicité de cevenin, puisque chez le mêmeserpent ces deux éléments varient
beaucoup
avec les conditions exté¬rieures de saisons, de température plus ou moins élevée, de jeûne plus ou moins
prolongé.
On est alors obligé de faire mordre une série d'animaux ; et même malgré cela l'on a souvent des expériences qui donnent peu de résultats.Aussi avons-nous ensuite employé la seconde. Le venin desséchéest dissous dons de l'eau
glycérinée
moitié eau, moitié glycérine. Dans 10 centimètres cubes de ce mélange,nous mettions 1 milligrammedevenin. Sous cette forme, l'on s'en sertcommed'une solution ordinaire. Unepremièreinjec¬
tion permet de serendre compte de son degré de toxicité. La seule difficulté est de recueillir le venin. On peut le faire de deux façons différentes.
L'une, extrêmementsimple, consiste à prendreles glandes venimeuses de serpentsmorts ou que l'on sacrifie. C'est la méthode que nous a indiquée M. Phisalix. On saisit par exemple une vipère par le cou, on la
décapite
d'un coup de ciseaux. La tête est laissée dans un cristallisoir plat dont le— 19 —
couvercle appuie légèrementsur
celle-ci jusqu'à
ce queles
réflexes aient disparu, environ une
demi-heure.
Avec desépingles,
l'onfixe alors la tête
sur unliège, de manière
que la commissure des lèvres regarde en haut. Avecdes ciseaux,on coupe la peau
à partir de cette commissure
enarrière.
On
dissèquela
peau.On aperçoit alors
untendon nacré qui part del'anglepostéro-inférieurdelaglandeà veninetqui s'insère à l'articulationquadrato-maxillaire. Onlecoupeà sonextrémité postérieure,
onle saisit
avec unepince. On
passealors la
pointe desciseaux au-dessous du muscle
compresseurde la
glande qui se
recourbe
pourvenir s'insérer
oumaxillaire
;on coupe ce
muscle. Quand la glande est bien remplie de
venin on en distingue les limites,
et il suffit de la libérer
en sectionnantles tendons et aponévrosesqui la retiennent,
On coupe le
canal excréteur tout près du crochet. La glande
se saisitavec une pincepar son
bord postérieur et est main¬
tenue au-dessus d'un verre de montre. Avec une autre
pince
plate on la pressedoucement de haut
enbas à plusieurs
reprises jusqu'à ce
qu'on
enait vidé tout le contenu. L'on
obtient ainsi un liquide
visqueux, ambré,
un peutrouble
;on le dessèche dans le vide ou dans une étuve
à 30°. Une fois
sec, on n'a plus
qu'à le détacher du
verrede montre avec
lapointe d'un
scalpel,
enle recouvrant d'un second verre de
montre pour
empêcher des éclats de venin de sauter et pour
n'en pas perdre. Le
venin ainsi préparé
seconserve indéfi¬
niment. Celui que M.
Phisalix avait
eul'obligeance de nous
donner datait de 1894 et n'avait rien
perdu de
satoxicité.
Mais quand il est
dissous, cette virulence baisse assez vite si
l'on n'a pas
le soin de le maintenir dans une glacière. Cette
manière de recueillirest la plus
simple et la moins dange¬
reuse. La secondeest beaucoup
plus délicate. Il s'agit de
prendre à
l'extrémité des deux crochets venimeux le venin
qui y vient
sourdre. Un auteur anglais se contentait de
saisir les serpents
derrière la tête, de leur ouvrir la gueule
et de recueillir le venin. Cette
manière d'agir,
endehors de
son danger,
réclame de la part de celui qui l'emploie un
très grand sang froid. Nous nous sommes contenté, quand
nous ayons essayé de nous procurer du venin sur des ser¬
pents vivants, de limiter leurs mouvements. Une de nos
mains maintenait une barre de boissur le corps de l'animal à 1 ou 2 centimètres de la tête ; dans l'autre, au moyen d'une pince nous tenions un verre de montre et le présen¬
tions à la
vipère
au moment oùelle ouvrait la bouche pour mordre. On n'obtient ainsi qu'une très petite quantité de venin, et cen'est pas sans danger.Les animaux mis en expérience étaient observés de très près dans les quelquesheures qui suivaientlamorsure, Nous tâchions de suivre l'évolution de l'eschare dès le moment où elle commençait à se dessiner. Nous notions également les phénomènes qui se manifestaient dans l'hahitus général.
Tantôt nouslaissions mourir les
cobayes
des suites de la morsure ou del'injection devenin. Tantôt ils étaient sacri¬fiés afin de pouvoir observer des lésions se succédant de jour enjour.
L'autopsie
était faite leplus
tôt possible aprèsla mort. Des
pièces
dechaque
organe : poumon, cœur, foie, rein, étaient fixées dans l'alcool,leliquide
de Muller, l'acide osmique (1 gramme d'acideosmique
pour 100centimètres cubesd'eau),
le liquide deFlemming.
Les coupes furentcolo¬réesà l'hématéine-éosine.
III
OBSERVATIONS
Nous avons divisé nos expériences en
deux grands
grou¬pes :
l'un comprend les animaux auxquels
nous avons injecté du venindissous, l'autre les animaux mordus. Nous
avons
employé
pourles premiers du venin de Pœlias bœrus,
c'est-à-dire provenant
d'un animal appartenant
au genredes Vipériens, et
du venin de Crotalus durissus qui, ainsi
que son nom
l'indique, appartient
au genredes Crotaliens.
Les animaux que nous avons eus
à notre disposition
pour faire mordre sontlaBitis arietans(vipère hébraïque), Vipera aspis (vipère de France), Cerastes cornutus, Lachesis lanceo-
latus
(trigonocéphale), Crotalus durissus (crotale). Dans cha¬
cune de ces divisions, les expériences sont
placées selon la
rapiditéde la mort
oudu temps de survie que l'on a laissé
aux animaux.
Injections de venin de Pœlias bœrus.
Observation I
Injection de i centimètre
cube d'une solution de venin de Pœlias brerus
(1milligrammepour 10 centimètres
cubes d'eau glycërinèe). Mort 4 h. 30
aprèsl'injection.
G mars, '10 h.50.
Injection de 1 centimètre Cube de solution de venin
de Ptelius bterus. Descris
plaintifs pendant toute la journée. Le cobaye
se tient difficilement sur ses pattes.
11
necherche
pasà s'échapper
quandon veut
le saisir.
3 h. 20. L'animal meurt.
Autopsie. — Au point de l'injection, on trouve le tissu cellulaire sous-cutané trèsinfiltré,avec une légère teinte livide.
Poumons : Congestionnés en certaines régions, la surface est très rouge. Ils crépitent à la pression.
Cœur : De consistancenormale, les vaisseauxsont très marqués.
Foie : Congestionné, la coupe estsanglante.
Reins : Sont gonflés, on y distingue trois régions : l'une, corticale, rouge; une autre, moyenne, rouge foncé; et une correspondantau som¬
met despyramides, claire.
Examen microscopique. Foie : Congestion assez accentuée de la région centro-lobulaire. Les cellules hépatiques sont nettement dispo¬
sées sous forme trabéculaire. Ellessont peu altérées. Uncertain nombre d'entre elles sont légèrementaugmentées de volume, un peu arrondies.
Leurs granulationssont grosses etirrégulières oudisposées en travées, defaçon àdonner au protoplasmaunelégèredisposition vacuolaire. Les noyaux sont presque toujours normaux et bien colorés, quelquefois petits et diminués devolume. On trouve surtout dans larégion centro- lobulaire leséléments cellulaires altérés. La graisse est très peu abon¬
dante, quelques cellules contiennent des grains noirs
(osmium)
plus volumineuxet plus nombreux qu'à l'état normal. Exceptionnellementon trouvedes vésicules graisseuses plus grosses.
Les capillaires sanguins intertrabéculaires contiennent des leuco¬
cytes en excès. Leurs cellules endothélialessontsaines.
Les espaces porto-biliaires sont normaux.
Reins : glomérules : Les capillaires glomérulaires sont dilatés. Dans
quelques capsules deBowmann on rencontre quelques hématies et un trèsléger exsudâtgranuleux. Il n'y a pas
d'hypertrophie
des cellules de revêtement de lacapsule.Tubes contournés : Les lésions sont peu intenses, elles consistent surtout en tuméfactiontrouble dans quelques cellules, et l'étatréticulé et vacuolaire duprotoplasma de quelques autres. Les noyaux sont le plussouventbien colorés, quelquefois pâles et diminués de volume. Un
léger exsudât granuleuxest contenu dans la lumière des tubes.
Branchesmontantes de Henle : Mêmes lésions superficielles.
Branchesgrêlesde Henle et tubes collecteurs : Sontnormaux.
- 23 —
Tissa conjonctifintertabulaire :
Normal, sauf quelques très petits
foyers hémorragiques.Vaisseaux : Dilatés, maisparois
normales.
Cœur : La congestion des vaisseaux est
très prononcée. Entre les
fibres musculairesontrouve des fibres entassées les unes derrière les
autres. Pas de dégénérescence graisseuse.
Sous le péricarde,
on netrouve pas d'hémorragies
sous-péricardiques. Du côté de l'endocarde,
les faisceaux de fibrilles sont parfois
écartés les
unsdes autres
pardes
massesjaunâtres, sans structure,
où l'ondistingue des
noyauxallongés.
Observation II
Injection de i centimètre cube
de la
mêmesolution de venin
quedans
l'Observation I. Mortcinq heures après l'injection.
15 mars, 11 heures. Injection de
1 centimètre cube d'une solution de
veninde Pmliasbœrus. Aucunphénomèneà
signaler; l'animal est dans
un état absolument normal.
1 heure. Le cobaye est dans un
coin de
sa cage,il
setient difficile¬
ment sur ses pattes, son œil est terne, sa
respiration rapide. Ne réagit
pas aux excitations
extérieures.
4 heures. L'animal meurt.
Autopsie. — On constate
les mêmes lésions
quedans l'Observation I.
Examenmicroscopique. Foie : Malgré la
congestion
assezaccentuée
de l'organe, la
disposition lobulaire et trabéculaire est conservée. Un
grand nombre
de cellules hépatiques
nesont
pasaltérées ; c'est surtout
dansla région
centro-lobulaire
quel'on rencontre quelques lésions.
Leprotoplasma est
devenu granuleux, vacuolaire; les noyaux sont en
majorité biencolorés, quelquefois ils sont pâles. Les capillaires contien¬
nent unegrande
quantité de globules
rouges;leur endothélium est sain.
Les espaces
porto-biliaires sont
normaux.Reins : glomérules :
Entre le bouquet glomérulaire et la capsule, l'on
trouve dans quelques points un espace
rempli
par unexsudât
granu¬leux contenant quelques
hématies. Les cellules de revêtement de la
capsule sont saines.
Tubescontournés : L'épithélium est
parfois profondément altéré. Le
protoplasma est granuleux, disposé en
réticulum;
le noyau est plusou moins coloré, quelquefois diminuéde volume. La partie interne de la cellule est abrasée et un exsudât granuleux occupe la lumière du tube.
Les branches montantes de Ilenle présentent les mêmes altérations.
Les branches grêles et lestubes collecteurs sont normaux.
Les vaisseauxsontdilatés, mais ne présentent aucune altération de leurs parois.
Poumons : Acôté des partiesrestées saines ou du moins légèrement congestionnées, on en trouve d'autres où les parois alvéolaires sont
épaissies, infiltrées. Dans la cavité, on ne trouve aucun exsudât, parfois des globules sanguins, et unemassejaunâtre, sans structure, s'étale sur l'une de leursfaces.
Cœur : Ne présente que des altérations congestives, la fibre cardia¬
queest nettementstriée, le noyau bien coloré. Entre les faisceaux, l'on rencontre desglobules sanguins. En quelques points, le tissu conjonctif péri-vasculaireestlégèrementinfiltré par des
leucocytes.
L'on netrouveni sous le péricarde ni sous l'endocarde trace
d'hémorragies.
Observation III
Cobaye. Injection de 1 centimètre cube de la même solution de venin de Pselias bserus quedans l'Observation I. Sacrifiévingt-quatre heures après.
10 mai. Poids, 690 grammes. 5 h. 30. Le cobaye reçoit en injection
1 centimètre cube de la solutionde venin de Ptelias bterus.
11 mai. Poids, 680 grammes. La peau est dure dans la région de l'injection. Une tache brune sur le point de
l'injection.
Autopsie.
—Unlarge
placard infiltré,de couleur sombre, s'étend sur toutl'abdomen;il remonte un peu sur le thorax.Poumons : Sont congestionnés. L'on trouve de petits foyers où la congestionestplus intense; ceux-ci sont légèrement surélevés.
Cœur : Consistance et couleur normales.
Foie : Sedéchire
facilement,
congestionné.Reins : Paraissent normaux.
Examenmicroscopique. Foie : Congestion assez accentuée surtout
— 25 -
danslazone centro-lobulaire où les capillaires sont
parfois très dilatés.
Ladisposition
lobulaire
estnettement conservée.
Dansla moitié périphérique
du lobule les cellules hépatiques sont
engénéral
saines.La région centro-lobulaire, dont les capillaires sont dila¬
tés,présente des
cellules
àprotoplasma réticulé, vacuolaire, à
noyauxtantôt bien colorés, tantôt petits et
pâles, rarement complètement
absents.Lesgranulations
graisseuses
nesont
pastrès abondantes, beau¬
coup de cellules
n'en contiennent
pas;tantôt elles sont très petites,
tantôt cesontdes vésicules adipeuses
volumineuses.
Lenombre des leucocytes contenus
dans l'intérieur des capillaires
n'est pas très
notablement exagéré. Les cellules endothéliales sont
intactes.
Les espaces
porto-biliaires
sontsains
ouà peine infiltrés
parquelques
leucocytes. Les
canalicules biliaires sont
normaux.Reins : Lesglomérules sont
congestionnés
;les capillaires gloméru-
laires sont un peu dilatés,
aussi le bouquet glomérulaire remplit-il
Souvent la capsule de Bowmann.
D'autres fois, entre le bouquet glomérulaire
etla capsule, il existe
unecavité où
setrouve un léger
exsudât granuleux, et
exceptionnellement quelques
rareshématies.
Lesleucocytes
polynucléés sont
asseznombreux dans le bouquet glomé¬
rulaire. Les cellules de revêtement de lacapsule sont légèrement
bour¬
souflées, mais il n'yapas
de desquamation.
Les tubescontournés présentent
des lésions
assezintenses. A côté de
cellulestout à fait intactes,il yen a
d'autres qui sont augmentées de
volume, remplies de
granulations irrégulières et
pourvuesd'un noyau
pâle ouencore biencoloré. Dans d'autres, les granulations protoplas-
miques sont encore
plus irrégulières, inégalement distribuées, et le
noyau estpâle et
petit. Dans
ungrand nombre, la portion centrale de la
cellule est
désagrégée
ettombée dans la lumière du tube. Il
nereste plus
de lacellulequ'un
petit bloc irrégulier contenant quelquefois un petit
noyau pâle ou enétant
dépourvu. Les contours des cellules sont indis¬
tincts. Souvent toutes lescellulesd'un tube ontsubicette
désintégration
; la lumière du tube est ainsi un peu agrandie,mais olle
estremplie de
détritusgranuleux, et
elle
estentourée
par un anneauprotoplasmique à
limite internetrès irrégulière, sans
membrane cellulaire visible et
avec quelques noyauxtrèspâles
ouseulement quelques granulations nucléai-
— 26 -
resdisposées de loin en loin. On ne voit pas d'hématies dans lalumière de cestubes.
Dans la branche montante de Henle on trouve les mêmes lésions.
Les branches grêles de Henle etles tubes contournés sont normaux.
Le tissu conjonctifintertubulaireprésente, en certains points, surtout dans levoisinage de quelques
glomérules,
une légère infiltration leuco- cytique etlymphocytique.
Les vaisseaux sanguins sont sains.
Poumons : Congestion œdémateuse. Les parois alvéolaires sont épais¬
sies par suite de la dilatation des capillaires. Un exsudât séreux se trouve dans un grand nombre de cavités
alvéolaires,
et dans plusieursune certaine quantité de globules rouges, quelques cellules à poussière
etde rarescellules endothélialesdesquamées.
Cœur : L'organe est fortement congestionné entre les faisceaux de fibrilles; on trouve unecertaine quantité de globules rouges entassés les
uns contre les autres etqui se sont moulés sur les parties voisines. Les cellules musculaires présententen certains points quelques altérations.
A côté de fibres parfaitement saines où le noyau et la striationont un
aspect normal, on en trouve dont les limitessont moins bien arrêtées;
elles sontlégèrement ondulées, le noyau y est mal coloré, quelquefois absent; la striation a disparu. Les coupes traitées par l'acide osmique
ne décèlent aucune trace d'infiltration graisseuse : on n'y trouve que de
trèspetites granulations protoplasmiques. En suivant des faisceauxde fibrilles, l'on en voit qui sont sains à l'une de leurs extrémités, tandis qu'à l'autre ils sont
déjà
altérés. En coupetransversale,
l'on aperçoit à côté dechampsde Conheim, absolumentnormaux, d'autres quisontplus pâles et où les vacuoles centrales sont plus grandes qu'à l'état normal.Dans ces régions, les noyaux sont
beaucoup
moins colorés, cependanton lesretrouvetoujours. Le tissu conjonctif ne présente qu'en certains points de petits
foyers
d'infiltrationleucocytaire.
— 27 -
Observation IV
Cobaye. Injection de1 centimètre cube de solution de veninde Pœlias bwrus
Sacrifié troisjours après.
12 mai. On injecte dans le flanc gauche 1
centimètre cube de solu¬
tion de venin de Pœlias bserus.Dans lajournée, de l'œdème de
la région
abdominale estconstaté. On remarque également une tache
brune
au point de l'injecttion dont lasurface équivaut environ à celle d'une pièce
de50 centimes. Pas de phénomènesgénéraux.
13 mai. Unepoche liquide toute
superficielle existe
surl'abdomen.
Elles'étend enlongueur, de l'appendice
xiphoïde
aupubis,
sur unelar¬
geur d'environ 2 centimètres. La
mobilité de
sa masseest extrême.
Si on agite le cobaye onla voit
animée de
mouvementsde flot, si
on change saposition la pochechange de forme; elle présente toujours
sonvolume le plusgrandau point
le plus déclive. Elle évolue ainsi dans les
limites décrites plus haut. Au
point de l'injection,
uneplaque noirâtre,
de consistance œdémateuse.
14 mai. La poche liquide
de l'abdomen
a uneconsistance pâteuse. Sa
mobilité n'estplus aussi
grande
quele jour précédent. On sacrifie le
cobaye.
Autopsie. —Le tissu
cellulaire de l'abdomen est infiltré. Mais,
auflanc gauche seulement, sur
l'étendue de 2 centimètres carrés envi¬
ron, l'ontrouve uneteinte
livide pénétrant jusque dans les'muscles
sous-jacents.
Poumons : Congestion légère.
Cœur : Ne présente aucune
lésion macroscopique.
Foie : Est congestionné, sa
consistance est ferme, il
sedéchire facile¬
ment.
Reins : Les deux substances sedistinguentfacilement, la
capsule n'est
pas adhérente. Congestion.
Examen microscopique. — Foie: Ily a un léger état
de congestion
intra-tabulaire. Ladisposition
lobulaire est conservée.
Les cellules hépatiques sonten
très grande majorité saines. Un
cer¬tain nombre cependant
présentent quelques lésions. Dans les
unes,le
protoplasma est formé de granulations plus volumineuses etplus inéga¬
les qu'à l'étatnormal. Elles occupent surtout lapériphérie de lacellule,
le centre restant plus clair. Dans d'autres, elles sont disposées en un vagueréticulum donnant àla celluleun aspectquelque peu vacuolaire.
Le noyau est biencoloré dans les deux caset ne paraîtpas sensiblement altéré. Dans quelques rares cellules, il est petit et pâle. Ces lésions, d'ailleurs
légères,
occupent surtoutles régionspéri-sus-hépatiques.
Ilneparaîtpas y avoir d'infiltration graisseuse très accentuée.
Les cellules endothéliales des capillaires sanguins intertrabéculaires
sont saines. Dans l'intérieurde ceux-ci on trouve un assezgrand nom¬
bre de
leucocytes
polynucléés.Les espaces porto-biliaires sont en général légèrement infiltrés par des
leucocytes
polynucléés et quelqueslymphocytes.
Les canalicules biliaires sont sains.Sur une coupe, on trouve deuxou trois îlots de nécrose complète du tissu hépatique. Ces îlots sont nettement limités, arrondis ou légère¬
mentirréguliers. Leur volume est quelquefois inférieur à un lobule, le plus souvent il lui est à peu près égal ou supérieur. A leur niveau,les cellules hépatiques ont encore assez bienconservé leur disposition tra-
béculaire mais leurs contours sont très vagues,souventindistincts; leur noyau ne se colore plus; le protoplasmaest plus clair qu'à l'état nor¬
mal et il a presque toujours l'aspect réticulé. Entre les trabécules
hépatiques les capillaires contiennent des hématiesintactes, mais les noyaux de leurs cellules endothélialesne sontpas colorés. Au milieu de
ces foyers de nécrose complète, dans laquelle ne se colorent ni les noyaux des cellules hépatiques ni les noyaux des parois capillaires,
existent seulement quelques très rares
leucocytes
à noyaux parfaite¬ment nets.
Reins : Un grand nombre de glomérules de
Malpighi
sont intacts.Dans d'autres, on trouve les capillaires glomérulaires ectasiés : on rencontre également un léger exsudât granuleux dans la capsule de Bowmann dont les cellules derevêtement sontboursouflées.
Quelques tubes contournés sont restés normaux. La plupart pré¬
sentent des lésions épithéliales à des degrés différents. Parfois, simple
tuméfaction trouble.Ailleurs,
désintégr
ation granulo-graisseuseet chute de laportion la plus interne des cellules. Dans cecas, letube esttapissé— 20 —
par unsimpleanneau protoplasmique, à
granulations irrégulières,
sans tracesdelimites cellulaires,à surface interne déchiquetée par suite de l'abrasion de lapartie centrale des cellules. Dans cetanneau,les noyaux sontrares etpâles. Dansles pièces fixées par le Flemming,les granula¬
tionsgraisseuses sontnombreuses, mais petites. Dans
l'intérieur du tube,
substancegranuleuse provenantde la désintégration
partielle des cellu¬
les épithéliales.
Dans les branches ascendantes deHenle on trouveles mêmes lésions.
Dans les branchesgrêles de Henleet
les
tubescollecteurs il
y a une légère desquamation des cellulesépithéliales.
Le tissu conjonctif
intertrabéculaire
estnormal
; peu ou pasd'infiltra¬
tion.
Les vaisseauxsanguins sontnormaux.
Poumons :Sonten généralsains; on trouve
quelques foyers de bron¬
cho-pneumonie.
Cœur: Lacongestion estassez
prononcée. Certaines fibres ont perdu
toutestructure, la striation a disparu, et l'on n'y trouve
qu'un
noyau pâle. Le tissuconjonctif et les vaisseaux sont sains.
Observation Y
Cobaye. Injection de 1 centimètre
cnbe de solution de venin de Pielias
beerusdatant d'un mois etdemi. Sacrifiéau cinquième jour.
26 avril. Poids700grammes. 9
h. 20. Injection de 1 centimètre cube
de solution de venin do Ptelias bterus. Aucun phénomène pendant
toutel'après-midi. La
respiration est normale, l'œil est vif; l'animal
nemange pas. La
région injectée est œdémateuse,
unepetite tache brune
aupoint
d'inoculation.
27 avril. Poids 645 grammes.
Œdème
moude l'abdomen; l'état
généralsemble bon, la
respiration
estcependant agitée.
28 avril. Poids 610 grammes. Œdème
de l'abdomen d'une consis¬
tance un peu plus
ferme. L'animal
estagité et parait beaucoup plus
sensible.
29 avril. Poids 605grammes.
Mêmes phénomènes.
30avril. Poids620 grammes.
L'œdème est toujours aussi accentué,
sa consistance estla même; on ne voit aucuneeschare.