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L'hygiène de quelques quartiers d'Alger · BabordNum

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Texte intégral

(1)

ENTRt SQUS Lt N°

Q J

rFAGULïÉ

DE

MÉDECINE

ET DE

PHARMACIE

DE

BORDEAUX

■A-lxrnsrÉE 1896-97 No 66

L'HYGIÈNE

QUELQUES QUARTIERS D'ALGER

THÈSE POUR LE DOCTORAT EN MEDECINE

présentée

et soutenne

publiquement le 19 Février

1897

Louis-Joseph-Pierre KOZIELL

àMustapha (Algérie),le 25mai 1871.

Examinateurs de la Tlièse

MM. COYNE, professeur.... Président.

LAYET, professeur....

CASSAÊT, agrégé

j

Juges.

BRAQUEHAYE, agrégé

Le Candidat répondra aux questions qui lui seront faites sur les diverses parties de l'Enseignement médical.

BORDEAUX

IMPRIMERIE Y. CADORET

17 RUE MONTMÉJAN 17

1897

(2)

FACULTÉ DE MEDECINE ET DE PHARMACIE DE BORDEAUX

M. PITRES

D°yen-

PROFESSEURS : MM. MICE.

AZAM

Professeurs

honoraires.

MM.

( PICOT.

Cliniqueinterne

j

pj'pjqprî!

(DEMONS.

Clinique externe

j LaNEL0NGUE.

Pathologie interne....

DU PU Y.

Pathologie etthérapeu¬

tique

générales VERGELY.

Thérapeutique

ARNOZAN.

Médecineopératoire...

MASSE.

Clinique d'accouchements M"USSOUS.

Anatomiepathologique

COYNE.

Anatomie

BOUCHARD.

Anatomie générale et

histologie

VIAULT.

AGRÉGÉS EN

SECTION DE MÉDECINE

(PatholoÇ)

MM. MESNARD.

CASSAET.

AUCHE.

Physiologie

Hygiène

Médecinelégale Physique Chimie

Histoirenaturelle Pharmacie Matièremédicale

Médecine

expérimentale.

. .

Clinique

ophtalmologique..

Clinique des maladies chirurgicales

Clinique

gynécologique

MM.

JOLYET.

LAYET.

MORACHE.

BERGONIE.

BLAREZ.

GUILLAUD.

FIGUIER.

DENABIAS.

FERRÉ.

BADAL.

PIÉCHAUD.

BOURSIER.

EXERCICE :

ie interne etMédecine

légale).

MM.

SABRAZÉS.

LE DANTEC.

Pathologie externe

SECTION DE CHIRURGIE ET ACCOUCHEMENTS Accouchements MM.VILLAR.

BINAUD.

BRAQUEHAYE

MM. RIVIERE.

CHAMBRELLNT.

Anatomie.

SECTION DES SCIENCES ANATOMIQUES ET

PHYSIOLOGIQUES

•j MM.

PRINCETEAU. I Hhysiologie MM. PACIION.

CANNIEU. Histoirenaturelle BEILLE

SECTION DES SCIENCES PHYSIQUES Physique

MM. SIGALAS. I Pharmacie

Chimie etToxicologie..

DEN1GÈS. |

COURS

COMPLÉMENTAIRES

:

Cliniqueinterne

des enfants MM.

Cliniquedes

maladies cutanées et syphilitiques

Cliniquedes

maladies des voies urinaires

Maladiesdularynx,des

oreilles

et

du

nez Maladiesmentales

Pathologie externe Accouchements Chimie

M. BARTHE.

MOUSSOUS.

DUBREUILH.

POUSSON.

MOURE.

RÉGIS. ,

DENLJCE.

RIVIERE.

DENIGES.

LeSecrétaire delaL'acuité:

LEMAIRE.

Pardélibérationdu5 août1S19, la l'acuitéaarrêtéque

les opinions émises dans les Thèses qui

lui sont présentées doivent être

considérées

comme propres

à leurs auteurs, et qu'elle n'entend

leur donnerni approbationni improbation.

(3)

ïts*

A ma Cousine et

Bienfaitrice

i.

Mademoiselle Marie-Louise BARBAROUX

Directrice del'Ecole desfilles àMédéah(Algérie).

je dédie ma thèse inaugurale

^

Faible hommage d'éternelle reconnaissance.

M.

E.

3.

qui end

(4)
(5)

A MES MAITRES

de l'Ecole de Médecine d'Alger

et de la Faculté de Médecine de Bordeaux

(6)
(7)

A mon Président de thèse

Monsieur le Docteur P. COYNE

Professeur d'Anatomiepathologiqueàla Facultéde Médecinede Bordeaux Officier de l'Instructionpublique

(8)
(9)

INTRODUCTION

Après avoir habité Alger depuis 1881 et assisté

à

la

création de certains

quartiers de cette ville,

nous sommesnéanmoins fort étonné de constater

aujourd'hui le

peu

de progrès qui

y

ont été

réalisés au

point de

vue

de

son

hygiène.

Les

poètes ont chanté la blanche capitale, les écrivains

ont très souvent servi l'ancien cliché de la « carrière de marbre »

qui domine la baie toujours bleue de l'Agha, et c'est

à

profusion

que

de

pompeux

éloges ont été décernés

:

il

faut avouer

qu'il

y

a une certaine

part de vrai dans

cet

ensemble

de

descriptions magnifiques et l'on serait mal

venu de

prétendre les contredire;

mais on se voit

obligé de faire bien des

restrictions etde modé¬

rer

passablement cet enthousiasme quand

on

s'occupe de cette

ville au

point de

vue

de l'hygiène.

Déjà

en

1893, M. le Dr Julien, dans

sa thèse

inaugurale

sur

l'hygiène générale d'Alger

soutenue

devant

la Faculté de Bor¬

deaux, démontrait

que

cette hygiène était loin d'être parfaite.

Notre travail aurapour

but l'hygiène de certains quartiers, le danger qu'il

y a

de laisser subsister

dans la ville des établis¬

sements

dangereux

pour

la santé publique et la nécessité de

reconstruire sur des bases

plus sérieuses des quartiers

nou¬

veaux.

Mais avant d'aborder le

sujet

que nous avons

choisi, le devoir

nous incombe d'adresser nos remerciements les

plus sincères à

ceux

qui ont veillé

sur notre

enfance,

et aux maîtres

qui

nous ont

guidé dans l'étude si longue et si pénible de la médecine.

C'est

pourquoi, après avoir évoqué le souvenir si cher de

notre

(10)

12

père,

nous

présentons à notre mère ce travail comme un faible

hommage de piété filiale.

En dédiant notre

thèse à notre cousine, MUe Barbaroux, direc¬

trice del'école

des filles à Médéah (Algérie), nous avons voulu

donner à notre

bienfaitrice la meilleure marque de notre sym¬

pathique reconnaissance pour la grande amitié qu'elle nous a

sans cesse

témoignée, et les secours si puissants qu'elle a mis à

notre

disposition

en vue

de l'achèvement de nos études.

Que

nos

maîtres de l'Ecole de plein exercice de médecine et

de

pharmacie d'Alger reçoivent l'expression sincère des remer¬

ciements de leur élève.

Nous tenons à affirmer particulièrement

àMM. les

professeurs Gros, Moreau, Merz, Planteau, Cochez,

Marini et

Raynaud

quenous

n'oublierons pas les bonnes leçons

que nousavons

reçues d'eux et les conseils si bienveillants qu'ils

nous ont

toujours donnés.

Nous

rappelerons enfin à M. le professeur Rey les services

qu'il

nous a

rendus et nous sommes heureux de lui prouver publiquement notre reconnaissance.

Nos maîtres de la

Faculté de médecine de Bordeaux, eux aussi, ont droit à

nos

remerciements : auprès d'eux, en effet, il

nous a été donné

d'entendre de savantes leçons, précieux com¬

plément des notions que nous avions acquises déjà, et qui nous

ontmontré

parfois

sous un

jour nouveau des points restés plus

oumoins obscurs

dans

notre

esprit.

Que M. le professeur Coyne, auprès de qui nous avons trouvé

un si

sympathique accueil à notre arrivée, qui nous a permis

l'entrée de ses

laboratoires d'anatomie pathologique

avec

tant d'amabilité, et enfin

nous a

fait l'honneur d'accepter la prési¬

dence de notre

thèse, veuille bien recevoir l'expression de

nos remerciements et de notre

plus profond respect.

(11)

L'HYGIÈNE

DE

QUELQUES QUARTIERS D'ALGER

A

Alger,

comme

dans beaucoup de villes algériennes

anté¬

rieures à,la

conquête, il est aisé de distinguer

encore

aujour¬

d'hui deux

parties bien distinctes: l'une, située

au

nord, existait déjà lorsqu'on 1830

nos

troupes tirent leur entrée dans El-Djc-

zaïr;

l'autre, située

au

sud,

est de construction

beaucoup plus

récente et constitue la ville

européenne, la ville aristocratique,

à

l'opposé de la première qui

se

ressent

encore

des habitudes passées et fournira précisément

un vaste

champ

aux

critiques

que nous

désirons formuler.

Nous ne

négligerons

pas pour

cela les quartiers de construc¬

tion récente et croyons que

c'est

un

véritable devoir

que

de signaler certains de leurs

inconvénients.

Et tout

d'abord, dans

cette

partie de la ville

que nous

appel¬

lerons les vieux

quartiers,

nous aurons à

décrire plusieurs ré¬

gions

que nous

appellerons

:

la Marine, le quartier de la Pré¬

fecture, la Casbah.

Nous examinerons ensuite dans les

quartiers

nouveaux

la

situation mauvaise de certains d'entre eux soit par

le voisinage

des

fondouks, soit

par

l'incomplet fonctionnement des égouts.

(12)

[

LE QUARTIER DE LA MARINE

Lorsqu'on arrive à Alger par voie de mer, on aperçoit sur le

port

une

double rangée de voûtes supportant le boulevard dit

dela

République;

ce

boulevard s'étend d'une extrémité à l'autre

de la ville: des rampes

d'accès le relient au port ainsi que des

escaliers.

Lorsque

ces

voûtes furent construites et que le moment fut

venu de les

utiliser,

on

vit qu'elles constitueraient un endroit

excellent pour serrer

les marchandises qui étaient obligées de

séjourner

un

certain temps avant d'être embarquées ou expé¬

diées dans l'intérieur.

C'est pourquoi

un

grand nombre d'entre

elles servent comme

docks, magasins et ateliers.

Mais la

partie des voûtes construite sur le vieux port depuis

le service de 1a.

Santé jusqu'au chemin de l'Amirauté, sert

d'habitations, et c'est là,

croyons-nous, une

destination fâcheuse.

En

effet, qu'on

se

représente s'ouvrant sur une galerie com¬

mune une série de

longs couloirs parallèles, profonds de 7 à

8 mètres, ne

recevant l'air et la lumière

que par

une seule et unique porte. Voilà

ce

qui va constituer des logements.

Chacune deces

pièces est habitée

parune

famille de pêcheurs,

pour

la plupart Napolitains et toutes excessivement nombreuses;

ces

familles, composées généralement du père, de la mère et de cinq

ou

six enfants, sont pauvres; le mobilier dont elles disposent

est réduit au strictnécessaire : une

table, quelques chaises boi¬

teuses,

des grabats

ou

paillasses dans

un

coin de la chambre.

Tel est le mobilier.

Inutile de dire que

tout cela est- d'une saleté repoussante;

(13)

puis, accrochés

aux murs, des

engins de pêche, des fdets, des hameçons, des cordages répandant des odeurs mélangées de peinture et de goudron. Quelquefois des paniers de poissons

laissés dans un coin en attendant le moment de la vente.

La cuisine se

prépare

sur

le devant

de la

porte,

sur un

four¬

neau

primitif, consistant

en une caisse en fer surmontée d'un

grillage et dans laquelle

on

allume du

feu : ce fourneau

portatif

est aussi

transporté d'un bout

à

l'autre

de

l'appartement répan¬

dant non seulement les gaz

résultant

de la combustiondu char¬

bon mais encore les odeurs de la cuisine àl'huile ouà la

graisse plus

ou

moins

rancie. Et c'est dans cette

atmosphère composée

de tout ce

qu'il est possible d'imaginer

en

fait

de

produits nui¬

sibles que,

la journée terminée, chacun

vient demander au

sommeil le repos

dont il

a

besoin.

Il y a

ainsi'

à

la Marine

une centaine de familles où

tous, hommes, femmes

et

enfants, grands

et

petits, vivent

dans la

plus intime promiscuité

sans aucun souci de la décence et des

règles de l'hygiène. Les hommes

trouvent encore de l'air pur

à.

respirer puisqu'ils passent toute leur journée

en

pleine

mer à

la pêche, mais les

femmes et les enfants sont

obligés de subir

les inconvénients de ce confinement dans un milieu

qui

manque

d'aération.

Les cabinets d'aisance

manquent

ou

du

moins sont ennombre insuffisant : ils sont communs et situés à une extrémité de la

galerie générale

;

lorsqu'arrive l'époque de la lessive,

on rem¬

plit

un

baquet d'eau,

et

dans

un coin de la

chambre,

on lave le

linge de toute

la famille:

l'étendage

se

fait soit

dans la

chambre,

soit sur la

galerie.

Du

reste,

on

s'aperçoit bien du

manque

d'air

et

du

besoin

qu'éprouvent

ces gens

de sortir d'un pareil milieu,

car on les rencontre très souvent en masse sur la

partie du boulevard

située au-dessus de leurs voûtes : mais cela encore n'est-il pos¬

sible que

dans les beaux jours; l'hiver, lorsque souffle le

vent dunord-ouest et

qu'il pleut, les galeries

sont

balayées

par

les ondées;

on ne

peut donc

y

séjourner,

et

l'été, pendant la

mati¬

née, le

soleil chauffe durant

cinq à six heures

ces

habitations,

(14)

16 -

qui emmagasinent ainsi de la chaleur ; or, l'on sait si dans nos

pays

la ventilation est nécessaire à ce moment-là de l'année.

En cet

endroit de notre travail, nous devons prévoir une

objection

que

l'on pourrait nous adresser, car l'extrémité des

voûtes,

opposée à celle dont nous venons de parler, et située

au

sud, sert aussi d'habitations; on y loge deux compagnies de

zouaves : nous

répondrons à cela, d'abord qu'ici les conditions

ne sont

plus sensiblement les mêmes, car on a depuis quelques

années,

particulièrement depuis 1892 et 1893, singulièrement

amélioré la

situation des voûtes en question ; les couloirs y ont

été

élargis, les ouvertures également ; la plus grande partie est

réservée aux

magasins d'approvisionnement du corps et les

troupes sont surtout logées dans cette portion dite du bastion XV,

qui ayant des ouvertures sur le nord, sur le sud et sur l'est,

permet d'établir des courants d'air et d'assainir ainsi les cham¬

brées.

Toutefois,

nous

ajouterons que, malgré ces perfectionnements,

il est

regrettable

que

l'autorité militaire ne puisse loger ailleurs

ces deux

compagnies de zouaves, car le bastioç. XV a été à plu¬

sieurs

reprises le foyer d'épidémies de fièvre typhoïde, notam¬

ment enaoût et en

septembre 1889, à une époque où les eaux

d'Alger paraissaient indemnes de germes typhiques.

Voici comment à propos

de

ces

épidémies s'exprimait M. le

Dr Bertherand dans son

rapport du 20 septembre 1889 : « L'épi¬

démie de fièvre

typhoïde signalée dans la garnison par l'auto¬

rité

militaire, sévissait particulièrement dans deux casernes de

la ville situées côte à

côte, la

caserne

dite des voûtes bab-azoun

(bastion XV) et la caserne Charron. La caserne de gendarmerie,

située dans le

voisinage, n'avait présenté qu'un cas, celui d'un

militaire

qui allait prendre ses repas à la caserne des voûtes ».

Par

conséquent, si même pour la santé des zouaves qui habi¬

tent les voûtes

il

y a

des dangers,

que

sera-ce pour les Maltais

et les

Napolitains de la marine. 11 n'est pas rare de rencontrer

chez eux des

enfants

et

des femmes chlorotiques et scrofuleux-

tuberculeux.

Il est à redouter

qu'un

cas

de variole ou de fièvre typhoïde,

(15)

17

par

exemple, venan^à éclater clans

un

cle

ces

logements, le

quar¬

tier ne devienne un véritable milieu de

propagation dans

les

quartiers voisins, du

reste

merveilleusement préparés

pour

la chose, ainsi

qne nous

le

verrons dans les

chapitres suivants.

Certes, il

eût été

intéressant

de

démontrer

au moyen

de

sta¬

tistiques

que ce

quartier jouissait d'une insalubrité réelle,

mais

nous devons dire

qu'il est difficile

de se procurer tous lesren¬

seignements

nécessaires à cette

étude, le quartier des

voûtes de la Marine étant

compris dans le quartier de la

Préfecture.

Nous croyons

cependant qu'une pareille agglomération

et un

semblable confinement sont contraires aux lois de

l'hygiène

et dans un

chapitre spécial de

notre travailnous nous occuperons de

l'amélioration

à

apporter dans l'habitation

de ces

pêcheurs.

Koziell

(16)

11

LE QUARTIER DE LA

PRÉFECTURE

Ainsi nommé à cause

du monument principal qui y est situé,

le

quartier de la préfecture est limité par la place du Gouver¬

nement,

le boulevard de la République, la caserne du Génie, du

Fort-Neuf et la rue

Bab-el-Oued. A part

ces

grandes artères qui

forment les

quatre côtés de ce quadrilatère, il est impossible de

trouver dans le quartier une seule rue, car nous nous refusons

de la

façon la plus absolue à appeler rues des boyaux dont la

largeur

ne

varie

pas

au-delà de 90 centimètres, 1 mètre et

1 m.

50, surtout quand

ces

boyaux séparent des maisons de

quatre et cinq étages. Ce quartier, qui constitue à lui seul le

sixième environ de la

superficie de la ville, va donc manquer

d'une

façon complète d'air et de lumière.

Ici le coup

d'œil change

: on

n'a plus des voûtes comme à la

Marine ce sont des

maisons; mais quelles maisons!!! Il est évi¬

dent que nous

n'aurons

pas en

vue dans ce chapitre les immeu¬

bles

qui bordent les rues Bab-el-Oued et de la Marine, immeu¬

bles de construction récente et

qui à la rigueur échappent à la

critique, mais si le cadre est passable le tableau est bien laid,

etle

quartier de la Préfecture fait tache au milieu de la ville.

Les maisons que

l'on rencontre dans le quartier sont pour la

plupart d'anciennes maisons mauresques bâties avant la con¬

quête

ou peu

de temps après.

C'est dans une maison mauresque que

le Conseil général du département d'Alger donne ses séances, et c'est également une

maison mauresque

qui

a

été attribuée

au

service de la voirie

départementale

pour y

installer ses bureaux : beaucoup d'au-

(17)

19 -

très ont été vendues à des

particuliers qui,

comme nous le ver¬

rons dans un

instant, les

ont

transformées

d'une

façon

telle

qu'elles

sont devenues

inhabitables.

Les constructions

européennes bâties depuis l'occupation fran¬

çaise

ont été élevées sans aucun souci de la salubrité

publique.

En

effet, quelle

que

soit la

maison du

quartier de

la

Préfecture,

dans

laquelle

on

pénètre,

on y

trouve d'abord

un étroit couloir où

règne

une

profonde obscurité

et une odeur de

moisi, d'hu¬

midité,

et

quelquefois d'autre

chose.

Au fond du

couloir,

un escalier étroit et sombre

également, qui conduit

surdes

paliers donnant

accès à deux ou troisappar¬

tements : on arrive ainsi au troisième ou au

quatrième étage et

enfin à la terrasse. C'est seulement là que

l'on peut voir

un peu de clarté et recevoir de l'air.

Les

logements,

à leur

tour,

sont

petits, composés de deux- pièces,

rarement de

trois,

avec une sorte de réduit servant de cuisine et de cabinets

d'aisances, quand il

enexiste;

les plafonds

sont

bas,

presque

tous n'atteignent

pas

2m50,

et enfin les fenê¬

tres, généralement trop étroites, s'ouvrentsur

les ruelles.

Quand

il existe des cabinets d'aisances dans la

maison, ils

sont très souvent destinés à tous les locataires et situés au bas de l'esca¬

lier : ils

manquent d'éclairage et de

ventilation ;

ils

sont donc constamment très

sales,

car

il

est manifeste que,

n'osant

pas y

pénétrer trop avant, les visiteurs

se contentent de

déposer leurs

ordures sur le seuil ouderrièrela

porte. Les cuisines

ont à

peine

une lucarne

qui donne

un peu

d'air,

et les

ménagères

sont tou¬

jours obligées,

à

l'heure

de la

préparation des aliments, d'ou¬

vrir la

porte de l'appartement, de

sorte que

l'escalier

et le couloir sont envahis par

la fumée

et les odeurs de

charbon, d'huile,

etc.

Beaucoup de

ces

maisons manquent d'eau,

et celles

qui ont le

bonheur d'en

posséder ont

une fontaine commune où chacun vient

puiser

ce

qui est nécessaire

àsa consommation

journalière,

et comme souvent les cuisines n'ont pas

d'éviers,

une cuvette située

près de la fontaine reçoit

toutes les eaux du

ménage !

De tous ces

appartements, les

seuls

qui sont habitables

sont

(18)

- 20

ceux du

dernier étage,

au

moins ont-ils un peu plus d'air et

■sont-ils

éclairés.

Les autres sont

absolument dépourvus de lumière et ne pren¬

nent

d'air

que

dans les ruelles du quartier, qui, ainsi que nous

allons le

voir, sont loin de remplir de bonnes conditions hygié¬

niques.

Celles-ci sont, nous

l'avons dit au commencement du chapi¬

tre,

d'une exiguité remarquable; de plus, on aurait à leur

reprocher leurs détours nombreux et les coudes qu'elles décri¬

vent,

créant ainsi

une

multitude de coins et de recoins qui favo¬

risent

admirablement le dépôt des ordures de toutes sortes,

depuis les vulgaires ordures ménagères jusqu'aux matières

fécales !

Il est

impossible de se rendre au Conseil général ou aux

bureaux de la

voirie,

en

passant par la rue des Trois-Couleurs

et lesrues

qui

en

sortent, sans trouver à chaque angle de maison

ici un tas

d'épluchures de légumes, là un tas de chiffons, plus

loin une

vespasienne à l'air libre et enfin plus loin encore un

véritable chalet

de nécessité où des passants peu scrupuleux des

bonnes mœurs

déposent

en se

promenant le résidu de leur

digeslion. On

ne

peut échapper à ces tas d'immondices et, vu

l'exiguité du

passage,

éviter l'un d'eux c'est trouver l'autre, fuir

Charybde c'est tomber dans Scylla, et il n'est pas un de nos

honorables

conseillers généraux à qui pareille mésaventure ne

soit arrivée au

sortir de l'une des séances de jour comme de

nuit.

Or, c'est dans

ces

ruelles mal aérées, infectes, que donnent les

fenêtresdes maisons, et

les plus mal partagés ont encore sous les

yeux

et

sous

le nez les immondices que nous venons d'indiquer.

Et l'on

conçoit

que

le service de nettoiement soit difficilement

exécuté et

surveillé; les

rues ne

pouvant permettre le passage

des voitures à

ordures, le service

se

fait à l'aide de bourricots et

de

paniers

:

mais la quantité d'ordures enlevées chaque fois est

minime

comparativement à celle qui est produite pendant vingt-

quatre heures, non seulement dans les maisons mais encore dans

les ruelles. Il est

vrai de dire

que, pour ce

qui concerne les

(19)

2!

habitations servant debureaux aux

employés de la Voirie

ou de la

Préfecture,

on

s'est

efforcé

d'apporter des

améliorations :

mais

malgré les efforts tentés,

on

n'a

pas

toujours

pu

obtenir

un résultat bien

appréciable

:

l'élargissement

de

fenêtres, la

créa¬

tion de cabinets d'aisances ne sauraient

apporter

une

lumière plus intense

et un volume d'air

plus grand si

les ruelles restent aussi étroites; on

n'a

doncpu, vu

le nombre d'employés toujours croissant, augmenter les

dimensions des bureaux où ils sont

trop souvent

entassés : nous avous vu nous-même à la Préfec¬

ture

d'Alger,

un

de

nos

amis,

un

jeune homme

de 25 ans, tra¬

vailler dans une

petite salle qui n'avait

pas

3 mètres

carrés et dont le

plafond atteignait

à

peine 2m50. Et il n'y travaillait

pas

seul,

un autre

employé restait enfermé

avec lui dans cette

pièce où la lumière

était rare et où l'air ne

parvenait

que par

des couloirs et une courintérieure

plus

ou

moins

mal ventilée.

Or, le jeune homme auquel

nous

faisons

allusion et

qu'un

hasard malheureux avait conduit dans ce bureau étroit était tuberculeux! Il était certain que ses

lésions pulmonaires

l'enlè¬

veraient à la

vie, mais

il est certain aussi

qu'un pareil milieu

n'était pas

fait

pour

retarder

sa mort! Nous serions

plutôt

tenté de croire

qu'un séjour de plusieurs mois

dans ce local a avancé

son dernier

jour.

11 semble

étrange de lire qu'à Alger il existe

encore des mai¬

sons où l'air et la lumière

manquent. Et pourtant les

faits sont là! C'est triste à

constater,

mais la chose est

patente; elle

saute

aux yeux

et,

nous

le répétons, il

ya

des

gens

qui

sont

privés

de cettelumière que

le ciel d'Algérie

nous

jette

à

profusion.

Nous sommes donc convaincu

qu'il

y a

de réels inconvénients

à vivre dans de tels

milieux;

et encore,

quand il s'agit d'un employé qui,

au

maximum, n'a

que

sept à huit heures

par

jour

à passer

dans

son

bureau, le danger

est

incomplet

:

il

y

peut

remédier par une

promenade

à

la

sortie et regagnerun

apparte¬

ment sain sur les coteaux de

Mustapha.

Mais

quand il s'agit d'ouvriers, le danger devient beaucoup plus grand. Or,

ce sont

précisément des ouvriers, qui habitent

le

quartier de la

Préfecture : les uns travaillent au dehors et

(20)

22

n'entrent

chez

eux que

pour souper et se coucher; d'autres

travaillent

chez

eux

et passent ainsi une partie de leur vie dans

cet air

confiné, n'ayant que rarement l'occasion de sortir dans

la semaine.

Beaucoup d'ouvrières en chambre, couturières, giletières,

culottières

prenant à la tâche la confection de vêtements mili¬

taires,

ont

par

conséquent à redouter, avec les inconvénients

signalés plus haut, les dangers de la machine à coudre et de la

couture à

la main.

Beaucoup

d'autres passentleur journée à rouler des cigarettes.

Toutes les

petites industries semblent s'être donné rendez-

vous dans ces parages

: cartonniers, bouchonniers, peaussiers,

magasins de toute espèce occupant femmes et enfants, voilà les

métiers

qu'on

y

rencontre et presque partout, quand arrive le

soir,

onmange

et on couche dans la même chambre qui a servi

de

boutique, d'atelier, etc.

Or, peut-on, quand on a vécu ainsi pendant plusieurs mois,

devenir

rhumatisant, lymphatique, anémique, tuberculeux,

rachitique? Nous le croyons.

En

1893,un sieur G..., employé d'une Compagnie de chemins

defer

algériens et dont la femme remplissait dans la maison

que nous

habitions à Alger les fonctions de concierge, avait, à

la suite d'un

léger héritage et grâce à quelques économies, cru

bien faire en

achetant, dans

une

des ruelles de ce quartier, une

maison pour

la transformer en hôtel meublé. Or, mal lui en prit

et

C...,

que nous

avions toujours connu en bonne santé, n'était

pas

depuis un an dans ce nouveau quartier qu'il était pris d'une

tuberculose

généralisée qui, en quelques mois, l'enlevait à sa

femme et à ses

trois enfants. Nous sommes allé voir plusieurs

foisdurant sa

maladie

ce

brave homme, mais notre visite n'était

certainement pas sans

provoquer chez nous un mouvement

d'horreur et de

répugnance quand nous entrions dans la mai¬

son. Le

père, la mère et les trois enfants, garçonnets de 5 à

13 ans,

vivaient là dans deux petites pièces étroites, noires, sen¬

tant, avec

la cuisine et les lieux d'aisances, une odeur de linge

sale et de

médicaments.

(21)

23

Et la maison était line maison meublée ! Nous n'avons pas eu le courage

d'en visiter

les

chambres, mais

nous nous doutons de l'état lamentable dans

lequel elles devaient

se

trouver,

au

point de

vue

de l'hygiène.

Or, beaucoup de garnis

se

remarquent dans le quartier de

la Préfecture : les uns déclarés comme

tels, les

autres

plus

ou moins

déguisés où le propriétaire loge à l'amiable

un locataire

au

mois, à la quinzaine,

à

la

nuit

même,

comme s'il avait

trop

de

place

pour

lui et les

siens!

Et

pourtant, il

est certaines villes où des

règlements

existent

au

Sujet de l'hygiène des garnis

: ces

règlements existent-ils

à

Alger? Nous

ne le savonspas,

mais

nous en

doutons,

car pour les

appliquer

au

pied de la lettre, il faudrait

commencer par détruire les maisons!

Après les garnis

et

les petites industries

que nous avons

déjà signalées plus haut, il importe de citer

encore deux industries

qui jouent leur

rôle dans le

quartier de la

Préfecture et ne sont pas pour

rien dans

son insalubrité: nous voulons dire les débits de boissons

alcooliques et les maisons

de

prostitution

clandestine.

Beaucoup de petits cafés où

l'on débite de l'absinthe et de l'anisette à deux sous le verre,

quelle

consommation d'alcool! Bien

plus, s'il arrive

au visiteur de ces

quartiers de pénétrer

dans un débit de tabac pour

prendre

un

cigare,

on ne manquera pas

de lui

offrir une marchandise autre que

celle qu'il désire

et

sur

laquelle la régie n'a

pas encore

mis d'impôt; c'est

un

petit

commerce

auquel

se

livrent beaucoup de débits de tabac;

nous nous sommes assuré du fait un

jour

et avons été tout

surpris

de trouver de la

prostitution clandestine

s'exercer d'une

façon

aussi nette.

Or,

à

Alger

comme

ailleurs, qui dit prostitution

clandestine dit

également propagation

considérable demaladies

vénériennes,

et

les labyrinthes,

souvent difficiles à

explorer, du quartier de la Préfecture, favorisent

on ne

peut mieux

ce hon¬

teux commerce!

Mais

enfin, c'est

un

point de

vue

qui

ne

touche

pas

de

très

près le sujet

que nous nous sommes

proposé d'étudier

et nous

n'y insisterons

pas

outre

mesure.

(22)

2i

Le

quartier de la Préfecture est-il réellement insalubre ? En¬

core un

point qu'il serait intéressant de traiter, mais les docu¬

ments

manquent complètement; nous aurions aimé à le prouver

par

des statistiques.

Nous avons pu

toutefois, grâce à l'obligeance de M. le Dr Ray-

naud, médecin de l'hôpital civil de Mustapha, nous procurer à

la mairie

d'Alger le chiffre des décès causés par des maladies

contagieuses

par

arrondissement pour l'année 1895.

Ce

tableau,

que nous

reproduirons à la fin de notre travail,

accuse pour

cette année dans le 1er arrondissement (quartier de

la

Préfecture)

:

Coqueluche

0

Rougeole

5

Variole 0

Croupet diphtérie

2

Fièvre typhoïde

10

Typhus

1

Total 18

Ce

qu'il

y a

de certain, c'est que divers endroits, et en parti¬

culier la rue

des Trois-Couleurs, fournissent un très grand nom¬

bre

d'affections, parmi lesquelles la fièvre typhoïde, et il n'est

pasrare

de voir arriver à l'hôpital civil de Mustapha des gens,

souvent des nouveaux

débarqués, qui ont séjourné depuis leur

arrivée dans

la

rue

des Trois-Couleurs; après deux ou trois

jours d'observation ces malades font une fièvre typhoïde.

On estmême

attiré

par ce

diagnostic, alors même qu'il n'est

encorepas

faisable à l'aide de signes caractéristiques, mais par

cefait seul que

le malade habite depuis quelque temps les rues

ci-dessus

dénommées.

Nous ne pouvons

donc prouver l'insalubrité de ce quartier,

quoiqu'il soit de notoriété publique que cette agglomération de

maisons

anciennes,

que

l'insuffisance des rues, les amas d'ordures,

le confinement

des habitants, leur mauvaise alimentation, consti¬

tuentun

milieu où la mortalité et la morbidité sont très accentuées.

Les gens

qui habitent ce quartier appartiennent à des natio¬

nalités

différentes

: on y

trouve des Français, des Espagnols,

(23)

des

Italiens, des Maltais, des Arabes

;

beaucoup, lorsqu'ils

sont

malades,

ne

font

pas

demander le

médecin et se

soignent à

leur

guise; beaucoup

ne

veulent

pas

aller

à

l'hôpital, de

sorte

qu'encore à

ce

point de

vue

il

ne saurait être établi de statis¬

tique, tant

au

point de

vue

de la

nationalité que

des maladies.

Un denos

professeurs d'Alger, M. le D1' Moreau,

pense comme

nous que

le quartier de la Préfecture

est un des

plus insalubres

de la ville et attribue pour

beaucoup cette insalubrité

à ce

qu'il appelle le retournement

de la maison arabe.

Ecoutons

plutôt

ce

qu'il dit

à ce

sujet

:

« L'Arabe est

convergent,

comme nous

rayonnants

et expan-

»

sifs; il vit

pour

lui,

nous pour

autrui. C'est pourquoi

sa

mai-

» son est faite àson usage

et

à son

image. Il

y

accède

par

des

» ruelles

sombres, tortueuses, discrètes,

secrètes. Il ne s'éclaire

». surces ruelles que par

d'étroites

ouvertures

grillagées, dans

» une

grande muraille

nue.

Souvent, il regrette d'avoir fait

ces

» ouvertures et il les bouche avec des

couffins, des

torchons.

» C'est à l'intérieur de sa maison

qu'il s'éclaire

;

là, il

a son

jar-

»

dinet,

sa

fontaine,

ses

vérandas,

ses

balcons.

»

Nous,

au contraire de

lui,

nous accédons à nos maisons par

» de

larges boulevards, droits,

ouverts à tous.

Là-dessus,

nos

» maisons étalent leurs

façades sculptées, des balcons

ornemen-

»

tés, des

fenêtres bien

larges

et, sur nos cours

étroites,

sem-

» blables à des

puits,

nous mettons nos

escaliers,

nos

cuisines,

» nos lieux d'aisances ».

» Eh bien! dans la maison arabe retournée,

qu'a-t-on fait?

» On a bouché la cour

qu'on

a

couverte d'un

vitrail

qui

en

» fait une serre chaude : on l'a transformée en

atelier,

en maga-

»

sin;

on a cessé

d'y prendre l'air

et

le jour qui

y

venaient lar-

»

gement et

on est allé les demander en

élargissant les

meur-

» trières en manière de fenêtres à ces ruelles

qui

en

manquent.

» Pour

comble,

on a

trop souvent surélevé d'un

ou de deux

»

étages la maison

mauresque

et là où l'Arabe abritait cinq

ou

» six personnes, on

abrite cinq

ou

six ménages, soit

trente à

»

quarante

personnes.

On comprend

sans

peine le résultat, de

» ce contre bon sens

hygiénique

»,

(24)

III

LA CASBAH

On

désigne

sous

le

nom

de casbah, le quartier limité par la

rue

Bab-el-Oued, le Lycée, la

caserne

d'Orléans, la Rampe des

zouaves,

le boulevard Gambetta et la rue Randon. C'est un vaste quadrilatère dont les maisons s'échelonnent depuis les rues Bab¬

el-Oued et Randon

jusqu'à la

caserne

des Zouaves, point culmi¬

nant. Casbah

désignait le fort qu'avaient construit les Turcs

pour se

défendre contre une invasion par la mer : on retrouve

encore

aujourd'hui

comme

vestiges de la conquête le palais

fameux oùle

Dey eut

avec

notre ambassadeur la discussion qui

devait amener le

débarquement de Sidi-Feruch et la prise

d'Alger

des débris de murailles sont encore pieusement con¬

servés comme pour

jeter

une

note discordante dans ce quartier

déjà suffisamment disgracieux.

A côté de ces monuments his¬

toriques beaucoup de constructions anciennes ont subsisté, une grande quantité de maisons mauresques ont été conservées, mais

beaucoup également ont été retournées

pour

employer l'expres¬

sion dont nous nous sommes

servi déjà,

ou

construites

peu

de temps après la conquête.

Nous ne rencontrerons pas

dans la Casbah tous les inconvé¬

nients de la ville basse et des vilains

quartiers qui ont fait le sujet du chapitre précédent.

En

effet,

par

suite de

sa

situation

sur un

flanc de colline, la

Casbah

possède des maisons rangées suivant des plans

super¬

posés

par

étages

:

air et lumière pourront assainir plusieurs

d'entre elles et les dernières

même, celles qui

se

trouvent

occu-

(25)

27

per

le

sommet

de la Casbah, rempliront,

aux

deux points de

vue de l'aération et de

l'éclairage, des conditions parfaites.

Cette restriction

faite, il importe de dire cependant qu'ici

nous retrouvons de nouveau des ruelles

étroites, tortueuses;

mêmes

dépôts d'immondices

que

dans la ville basse,

mêmes mauvaises

odeurs; le service

du nettoiement se fait encore à l'aide de

paniers portés

par

des bourricots; les

ruelles sont mal

pavées, mais,

par

suite de leur pente rapide, dès qu'un

orage

éclate, elles

sonttransforméesenautantde torrents

qui les lavent

et

les

assai¬

nissent; dans le quartier de la Préfecture,

au

contraire, qui est

absolument

plan, les ordures

et

les

eaux

peuvent séjourner

et imbiber

plus sûrement le sol.

Quant

aux

maisons, elles

sont

basses;

on y

accède

souvent par une

petite porte

sous

laquelle

on se

glisse

en se courbant pour

arriver dans

une sorte de

cul-de-sac; beaucoup d'habita¬

tions n'ont ainsi

qu'une

ouverture servant à lafois de «

porte,

de fenêtre et de cheminée »,

d'autres représentent

encore le

type arabe, suivant lequel elles

ont

été

construites avant la con¬

quête

:

corridor étroit,

cour carrée

intérieure, galerie à colon-

nettes de

marbre, mais l'ouverture supérieure, qui laissait arri¬

ver air et

soleil,

a été ferméeentout ou en

partie,

amenant ainsi

humidité, obscurité

et confinement de l'air

atmosphérique; les propriétaires européens de

ces maisonsont bâti àl'intérieur des cloisons nombreuses

augmentant ainsi

le nombre des

apparte¬

ments aux

dépens de la dimension

vaste des

pièces,

et

jadis

une famille était à son

aise,

elle est à l'étroit

aujourd'hui

et souffre de cette transformation

apportée

au

logement. De plus,

très souvent,

malheureusement

les familles

indigènes s'y entas¬

sent au nombre de trois ou

quatre.

Déjà

en

1878, M.

le Dr

Bourlier, dans

unnuméro de Y

Alger Médical, signalait

ce

mal

et disait à ce propos : «

Une

seule

»

pièce

compose

trop souvent la demeure

: ce serait admissible

» si la famille n'excédait pas

deux

ou

trois

personnes,

si

cette

» chambre était vaste ;

mais

les enfants

pleuvent chez l'artisan

» et ces

logements

ont

parfois

une

unique ouverture

servant de

»

porte et de fenêtre, quelquefois de cheminée

».

(26)

LaCasbah est presque

uniquement habitée par des Arabes ;

les

Européens

y

sont assez rares, n'y constituent que peu de

ménages et sont surtout logés dans la partie basse de la Casbali,

dans la rue de

la Casbah

ou

la

rue

Randon.

Dans ce

quartier, comme dans celui de la Préfecture, beau¬

coup

de petites industries occupent des artisans : soieries, cou¬

vertures

arabes, lainages,

armes

de pacotille, objets de cuivre,

vêtements

arabes, brodeurs

sur

soie et argent, etc.; ensuite vien¬

nentles maisons

basses où logent à vil prix les malheureux

indigènes portefaix, travailleurs au port, déchargeurs de char¬

bon,

individus dont nous aurons à nous occuper plus particu¬

lièrement

quand

nous

nous occuperons des fondouks et des

cafés maures.

Enfin la Casbali est

le quartier où sont cantonnées les mai¬

sons

publiques de toutes nationalités; chacune a sa spécialité

derace : ici les

Françaises, là les Espagnoles, plus loin les indi¬

gènes, offrent

aux

passants leurs grâces et leurs corps. Une

quantité considérable de ces endroits sombres, véritables

repaires de chacals, qui ne sauraient mériter le nom de cham¬

bres, cachent les prostituées libres, cartées ou clandestines.

Or,

à

quelque catégorie qu'appartiennent les maisons publi¬

ques,

reconnues ou cachées, l'hygiène en est des plus déplo¬

rables;

ces

maisons sont

presque

toutes d'anciennes maisons

arabes retournées que

le cloisonnement des chambres et la

fermeture

hermétique des fenêtres ont transformées en prisons

et en

cellules, la

cour

intérieure est devenue une salle de café

où s'entassentles

odeurs de mauvaises boissons, de fumée, de

cuisine oude

tabac,

une

fabrique d'air confiné et malsain sur laquelle s'ouvrent chacune des cliambrettes des pensionnaires

dela maison : ces

cliambrettes à leur tour n'ont

pas

de fenêtres, quelquefois

on y

distingue une lucarne, une étroite meurtrière

grillagée d'où l'œil perçoit un coin du ciel ou l'angle du toit

voisin.

Ces maisons

publiques possèdent des cabinets fort heureuse¬

ment et,

grâce

au

système du tout à l'égout dont dispose Alger,

les ordures ne

séjournent

pas

longtemps dans les appartements,

(27)

29

mais combien d'autres locaux n'en ont pas encore

et déversent

leurs eaux

ménagères et leurs

ordures au milieu de la ruelle! Bien que ces

maisons

ne

puissent contenir qu'un nombre

déterminé de

pensionnaires,

nous nous demandons si pour

éta¬

blir ce chiffre les

règlements

ont été basés sur les lois de

l'hygiène et si l'on

a considéré les maisons

publiques

comme des

garnis où le locataire

a droit à un volume d'air suffisant et à un

éclairage direct de

sa

chambre;

nous ne

le

croyons pas, car

ces conditions ne sont

jamais remplies.

Heureusement, la ville indigène possède des égouts qui

se déversent dans

l'égout collecteur

traversant

Alger dans toute

sa

longueur.

M. le D1' Julien en a donné la

description dans

sa

thèse' de

doctorat et nous ne lui

emprunterons

que

le

passage

suivant

:

« Les

égouts de la ville indigène, construits

avant la

conquête,

» ont été

conservés; ils

sontentrès mauvaise

maçonnerie

etd'un

» entretien onéreux, leur section est carrée et varie de 30 centi-

» mètres à60 centimètres de côté ;

grâce à leur pente, 6 à 12

cen-

» timètres par

mètre, les matières

ne

séjournent

pas

et s'écoulent

» très

rapidement

».

Nous avons cité les taudis

qui abritent la nuit

les ouvriers arabes du

port

ou

les portefaix,

nous

n'insisterons

pas sur

les

habitations des artisans de la casbah;

leurs

conditions

hygiéniques

sont aussi

déplorables

que

chez les ouvriers

en chambre du

quartier de la Préfecture.

Nous dirons seulement deux mots des Arabes aisés

qui habitent la

casbah.

Parmiles rares maisons

indigènes qui n'ont

pas

été complète¬

ment transformées à

l'européenne, qui n'ont

pas

été

retournées, il enest

qui appartiennent

à

des

commerçants

dont

les

magasins

se trouvent en ville : mais ils ont élu domicile àla Casbali et c'est dans ces maisons mauresques que

demeurent continuelle¬

mentleurs femmesetleurs enfants. Nous disons

continuellement,

car cesindividus ont conservéles coutumes anciennes

et, suivant

les vieilles

traditions, interdisent

à leurs femmes et à leurs enfants de sortiretdese

montrer,

par

conséquent point de porte

ouverte,

point de fenêtres

;

trois

ou

quatre fois l'an,

une prome-

(28)

30 -

nade en

compagnie du mari est permise à toute la smala, à

l'occasion des

fêtes du Ramadan par exemple. Le vendredi,

deux fois par

mois, une sortie pour aller aux bains sous la con¬

duite devieilles

négresses, sortes de mégères remplissant plu¬

tôt le rôle de

chiens de garde et d'espions que de servantes. Par

conséquent toute la vie des femmes arabes et des jeunes garçons

jusqu'à l'âge de 12 ou 14 ans se passe intra muros, pas d'exer¬

cice, respiration d'un air plus ou moins renouvelé.

Beaucoup d'Arabes sont pâles, anémiques, tuberculeux, ils

succombenten

grand nombre à cette affection ainsi que l'indique

dans sa thèse

M. le Dr Julien. A la Casbah, nous ne trouvons

plus de locaux employés par les administrations, comme dans

le

quartier précédent, mais nous y rencontrons un dispensaire,

encore une

maison

mauresque

qui, nous dit M. Julien « devrait

» contenir 100

malades si le service des

mœurs

se faisait bien

» et

qui, lorsqu'il

y a

seulement 30 femmes, voit ses lits séparés

» par un espace

de 15 centimètres; le résultat fréquent d'un

»

pareil contact est le suivant : une femme entrée pour une affec-

» tion

légère

en

sort syphilitique et les malades disposent à

»

peine de 5 mètres cubes d'air, alors que les règlements exigent

» pour

les

gens

qui habitent un garni 14 mètres cubes ».

Il est

déplorable enfin de constater l'existence d'un dépôt

d'immondices entre

les premières maisons de la Casbah et la

prison civile, création nouvelle remontant à quelques années à

peine, véritable marche en arrière et progrès à rebours de l'hy¬

giène dans

ce

quartier! Ce dépôt d'ordures est situé sur la seule

route

qui permette d'aller de Bab-el-Oued ou de Saint-Eugène

au Sahel en

passant

par

la Casbah : les promeneurs en sont

incommodés et bien

plus qu'eux les gens qui n'habitent pas à plus de vingt mètres.

Il serait donc

important de faire disparaître

ce

tas d'ordures

que

les tombereaux municipaux restent quelquefois plusieurs

heures à

déblayer.

Avant de

terminer

ce

chapitre,

nous avons

quelques mots à ajouter touchant le quartier inférieur de la Casbah; nous voulons

dire la rue de la

Lyre et les petites ruelles qui

y

débouchent.

(29)

31

Vaste

pâté d'immeubles

se rencontrent tous les inconvé¬

nients cités

jusqu'à présent clans

notre

travail,

cette

partie

est

presque exclusivement habitée

par

des juifs qui

y

font le

com¬

merce des

laines, des soies, du tabac; entrepôt d'épicerie, de

peaux, etc.;

magasins d'orfèvrerie, d'ameublements, le

tout exhalant une odeur

mélangée de

musc,

de

peau

de mouton, de tabac, de safran,

etc.

Mêmes réflexions au

sujet de la

rue

Randon, du

moins pour

la partie de la

rue

qui avoisine le

marché de la

Lyre,

car

depuis le

percement

de

la

partie nord l'aération

a transformé à sonavan¬

tage le quartier.

Confinement

des gens,

cuisine

très souvent

malsaine, alimen¬

tation

insuffisante, malpropreté corporelle, tels

sont les facteurs

qui contribuent

à rendre les

juifs de

ces

quartiers anémiques et

scrofuleux. La mortalité est très

grande

chez eux

également.

M. Julien donne comme chiffre « 3i décès pour

1,000 habitants,

» coefficient

supérieur de

11 pour

1,000

à celui de la mortalité

»

française,

et ce n'est que grâce à

leur

excessive

fécondité, qui

» atteint le chiffre de 52 naissances par

1,000 habitants, qu'est

»

sauvegardée la

race en

décadence; leur

forte mortalité tient

» surtout à leur

hygiène déplorable

».

Pour l'année

1895,

nous trouvons comme chiffre de décès par maladies

contagieuses dans

le

quartier de la Casbah

:

Coqueluche Rougeole Variole

Croup et diphtérie Fièvretyphoïde..

Typhus

10 7 1 3 12 1

Total 34

(30)

IV

LES FONDOUKS

Il existe à

Alger des établissements d'un ordre tout particu¬

lier et d'une

importance capitale au point de vue de l'insalu¬

brité

publique : ce sont les fondouks.

Une

description de ces établissements est nécessaire, et,

comme

type,

nous

choisirons celui de la rue d'Isly, une des

plus jolies de la ville.

Qu'on s'imagine

une

vaste cour entourée de quatre murs et au

milieude cet espace une

construction en manière de balle don¬

nant accès sur

la

cour

intérieure par une ou plusieurs ouvertu¬

res. Tout autour

de l'enceinte

se

trouvent situés des hangars. On

pourrait croire que les hangars vont loger des animaux, et le

bâtiment

intérieur des

gens;

c'est là une erreur. Effectivement,

le

fondouk,

que

l'on pourrait à juste titre nommer « hôtel pour

Arabes etbêtes

de

somme »,

voit s'entasser dans ses murs gens,

bêtes et

marchandises.

Les nombreux

Kabyles défroqués, sales, répandant à vingt

pas

à la ronde l'odeur de l'huile qui imprègne leurs hideux

vêtements,

lorsqu'ils arrivent de Tizi-Onzou, de Fort-National,

de

Rovigo, après quatre, six, huit jours de marche, ne trouvent

à

Alger d'autre asile que le fondouk; les charbonniers arabes

descendus des

pentes duDjurjura, les marchands de volaille de

la

plaine de la Mitidja et les chameliers qui, de Boghar et

Boghari viennent échanger à Alger contre du savon, du café,

des

bougies, du

sucre,

des étoffes, leurs figues, leur miel et les

dattes des

régions du Sud algérien, trouvent un gîte qui leur

ouvre ses

portes, le fondouk.

(31)

33

Par

conséquent, Jorsqu'après plusieurs jours de marche,

ces

individus pleins de poussière, de

sueur,

portant

sur leurs

épau¬

les des vêtements

qui le plus

souvent sont transmis sans être

passés

à

la

lessiveà deux ou trois

générations,

arriventà

Alger,

c'estvers le fondouk

qu'ils

se

dirigent

: tous entrent

pêle-mêle;

gens et bêtes se casent dans un

coin, partout

où il y a

de la place; les premiers

arrivés

occupant les premières

et les meil¬

leures

places

;

quelquefois les bêtes

et les marchandises sont mises à

part; les

gens se

logent

un peu

plus loin. Mais

si les caravanes soiit

nombreuses,

et celaa lieu le

plus souvent,

on serre les rangs,

et

comme le vol est considéré par ces

peuples

comme une chose tout à fait

ordinaire, chacun

tient à rester

auprès de

ses mulets et de ses marchandises. C'est

pourquoi, si guidé

par un

sentiment

de

curiosité,

on hasarde un pas

et

un œil dans le

fondouk, voici

le

joli spectacle qui s'offre

au visi¬

teur :

Dans le

fondouk,

se trouve un

épouvantable

fouillis de gens, d'animaux tels que

chameaux, chevaux, mulets, ânes; de

mar¬

chandises telles que

paniers de figues, de dattes, paquets de

volailles ficelées par

les pattes,

outres

remplies d'huile,

sacs de

charbon, caisses, etc., le

tout

répandant les

odeurs les

plus désagréables, parmi lesquelles prédomine

surtout celle de

l'huile;

en

effet, les Kabyles

en sont sursaturés

(l'expression

n'est

point trop forte),

car

leur épiderme

en est recouvert d'une couche

épaisse

et

luisante

et

saupoudrée de la poussière des

routes

qu'ils

ont

piétinées, le

tout formant unmagma

indéfinis¬

sable.

Au milieu de cette confusion de marchandises et d'animaux

qui déposent leurs

ordures au milieu de la cour,

les

gens vont

et

viennent, soulevant

des

poussières pendant

toute la

journée.

Enfin, lorsqu'arrive la nuit,

tout rentre dans le

calme,

mais gens et bêtes couchent les uns

auprès des autres,

par

terre,

au

milieudes détritus de toute

nature,

ramassantdans leur costume

paille, poussière

et excréments

d'animaux!

De

plus, il n'existe

pas,

dans

ces

fondouks, de

cabinets d'ai¬

sance.IvoziellA

quoi cela tient-il?Le propriétaire a-t-il

été assez

négli-

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