FACULTÉ
DEMÉDECINE
ET DE PHARMACIE DE BORDEAUXANNEE 1899-1900 M0 39
DE
LA SEDENTARITE
QUELQUES CONSIDÉRATIONS D'HYGIÈNE
THÈSE POUR LE DOCTORAT EN MÉDECINE
présentée et soutenue
publiquement
le 20 Décembre 1899PAR
Eugène-Charles EIQGÉ
Né à Nouzon (Ardennes), le 29 Juillet 1876
Élèvedu Service de Santé de la Marine
MM. LAYET professeur.... Président.
Examinateursde laThèse
:)
' CRACHE professeur....RONDOT agrégé luges.
RÉGIS chargéileeours'
Le Candidat répondra aux questions qui lui seront faites sur les diverses parties de l'Enseignement médical.
BORDEAUX
IMPRIMERIE
DU MIDI — PAUL CASSIGNOL91 — RUE PORTE-DIJKAUX — 91 1899
Faculté de Médecine et de Pharmacie de Bordeaux
M. DE NAB1AS,doyen — M. PITRES,
doyen
honoraire.PROFESSEURS
MM. M1CÉ \
d
furjy
(f>r0^esseurs honoraires.
MOUSSOUS.
Clinique interne Cliniqueexterne Pathologie et théra¬
peutique générales.
Thérapeutique
Médecine opératoire.
Clinique d'accouche¬
ments
Anatomie pathologi-
MM.
\ PICOT.
) PITRES.
DEMONS.
LANELONGUE.
VERGELY.
ARNOZAN.
MASSE.
que
LEFOUR.
COYNE.
Anatomie CANNIEU
Anatomie générale et
histologie VI AU ET.
Physiologie JOLYET.
Hygiène LAYET.
AGRÉGB5S EU
sROTI ONDE MÉDECINE(PatkolOQ
MM. CASSAET.
AUCHÉ.
SABRAZÈS.
MM.
Médecinelégale MORACHE.
Physique
BERG0N1É.
Chimie BLAREZ.
Histoire naturelle ... GUILLAUD.
Pharmacie FIGUIER.
Matièremédicale.... de NABIAS.
Médecine expérimen¬
tale FERRÉ.
Clinique ophtalmolo¬
gique BADAL.
Clinique des maladies chirurgicales des en¬
fants. PIÉCHAUD.
Clinique gynécologique BOURSIER.
Cliniquemédicale des
maladies des enfants A. MOUSSOUS.
Chimiebiologique... DENIGES.
exercice :
ie interneet Médecinelégale.)
MM. Le DANTEC.
HO BBS.
section de chirurgie etaccouchements (MM.DENUCÉ. I
Pathologie externe)
VILLAR BRAQUEHAYE CHAVANNAZ.
Accouchements.(MM.
CHAMBRELENT
FIEUX.
Anatomie..
SliCiïuM"PStp ANATOMIQUES ET
1 M.PRINCETEAU | PhysiologiePHYSIOLOGIQUES mm. PACHON,
I Histoirenaturelle
BE1LLE,
section dessciencesphysiques MM. SIGALAS. I Pharmacie...
Physique
c ur$ C © sa a» césa e m t a a sa Clinique desmaladiescutanées et syphilitiques
Clinique des maladies des voies urinaires
Maladies du larynx, des oreilles etdunez Maladies mentales
Pathologie interne Pathologieexterne Accouchements Chimie
Physiologie Embryologie Ophtalmologie
Hydrologie etMinéralogie
Le Secrétaire de la Faculté:
m. barthe.
10S :
mm. dubreuilh.
pousson.
moure.
régis.
rondot.
denuce.
CHAMBRBLEIsT.
dupouy.
pachon.
N-
lagrange.
carles.
lemaire.
Pardélibération du 5 août 1879, la Faculté aarrêté que les opinions
emls^ te'ur3)et
Thèsesqui luisontprésentées doivent être considérées commepropres aleurst qu'elle n'entend leurdonner ni approbation ni improbation.
A MON PÈRE ET A MA MÈRE
A vous d'abord, mes chersparents, pour l'esprit extrême de sacrifice qui est en vous, pour votre intel¬
ligente et constante sollicitude, je dédiece travail eutémoignage de profond amour et de reconnais¬
sance émue.
A MON FRÈRE GEORGES
A MA BELLE-SŒUR BERTHE
A mon Président de Thèse
MONSIEUR LE DOCTEUR LAYET
MÉDECIN PRINCIPAL DE LA MARINE EN RETRAITE
PROFESSEUR D'HYGIÈNEA LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE BORDEAUX
MEMBRE CORRESPONDANT DE L'ACADÉMIE DE MÉDECINE
OFFICIER DE LA LÉGION D'HONNEUR
OFFICIER DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE
Hommage respectueux.
AVANT-PROPOS
Au momentd'entrer dans la vie, ce nous est un devoir%
bien doux dejeteren arrière un long regard, qui
envelop¬
pera dans unmôme sentiment de profonde gratitude tous
ceuxqui de loinou de prèsont contribué à notre éducation par leurscience, leurs conseils, leurdévouement.
Auxmaîtres
éminents,
auxhommes debon sens, aux sa¬gesconseillers dont la bonne parole a souvent dans des heures tristes réconforténotre espoir, nous offrons aujour¬
d'huile
témoignage
de notrerespectueuse sympathie et forte reconnaissance. Leur souvenir, quelques-uns ne sont plus, restera toujours profondément gravé en notre cœur. Dans lesheuresdedésillusiond'unecarrière nouvelle etnonexempte peut-êtred'amertume,
nous nous rappellerons encorecesmaîtres,ces
amisqui les premiers nousfirententrevoir l'hori¬zon
quelque
peu nuageux de la vie etnoustracèrent par leur exemple les règles de l'honneur ot du devoir. Nous ne pou¬vonsles citer tous, ils sont
trop,
et notre plume ne suffirait pointàla tâche.Dansun
temps
plus rapproché, nous tenons cependant à direànosmaîtres de la Marine àRochefort, sousl'égide des¬quels nous
commençâmes
nos études médicales, à nosmaî¬tresde
Bordeaux,
combien nous sommes heureux d'avoir étéleurélève,
si modeste fût-il ! Citerons-nous parmi tantd'autres
M. le Prof. Moussons dont l'aménité et la bienveil¬lance ont
assuré la meilleure place en nous-méme et M. le Prof, agrégé
Rivière,
dont nous avons toujours admiré la^Pacité d'esprit
et les hautes qualitésd'enseignement.
A M. le Prof.
Layet,
pour sonaffabilité
toute particu¬lière,et son acceptation cle présider notre thèse inaugu¬
rale, nous présentons l'expression de nos hommages bien respectueux.
Décembre 1899. C. R.
INTRODUCTION
« Ondigèreavec sesjambes autantqu'avecson estomac », voiléun aphorisme très vieux dont lesens n'est pas dénué devaleur, mais auquel selon nous on attache trop peu d'im¬
portance.
Leshommes
d'aujourd'hui,
en général,fontpeud'exercice, ilss'amollissentdansdes coutumes tropsédentaires;
d'autre part, ilsse nourrissent trop abondamment, assimilent mal ;aussi,arrivés àun âge où ils devraient encore conserver in¬
tégralement
toute la vitalité de leurs tissus,beaucoup
se sententvieillir. Us sont vieux avant l'âge.Ces idées générales étaient déjà très ancrées dans notre esprit quand M, le Prof. Layet nous fît unjour l'honneur de
nousproposer comme sujet de thèse inaugurale : De la sé- dentarité et de quelques considérations
d'hygiène
qui en dé¬coulent.
Cesujet très vaste, trèscomplexe, eût demandé pour être
digne
du maîtrequi l'ainspiré
et aussi de son importancemême,
enraison desquestions qu'il implique, eût demandé,disons-nous,une
plume plus sûre, plus éduquéequela nôtre, etaussi plus detemps
consacré à son élaboration.C'estdonc avecun sentiment de profonde modestie que nous nouspré¬sentons devant nos
juges,
nevoulant retenir que la convic¬tion bien personnelle aveclaquelle ont étéconçueset écrites
ces
quelques
idées.DIVISION DU SUJET
Nous avons divisé le sujet comme il suit :
Dans le premier
chapitre
nous avons exposéquelques
idéesgénérales sur la vie sédentaire et.rappelé les coutumes
des Anciens à l'égard des exercices.
Nous avons examiné ensuite la physiologie
pathologique
de la sédentarité,en montrant les empreintes
qu'elle laisse
surchaque fonction organique.
Ontétéensuite passées en revue les maladies
provoquées
ou entretenues parla sédentarité et ceaux différents âgesde la
vie : jeunesse, adolescence, âge adulte.
Nous avons passé aussi en revue dans un
sous-chapitre
les effets de la sédentarité combinés aux diversesattitudes professionnelles dans les diverses carrières manuelles.
Nous avonségalement
parlé
de la viesédentaire, d'abord
chez le vieillard, ensuite chez la femme.
Enfin nous avons, dans un dernier chapitre,
exposé quel¬
ques maladies
indépendantes
enelles-mêmes de la vie sé¬
dentaire, mais qui trouvent dans l'exercice, c'est
à dire dons
l'abandon de ce repos corporel, un facteur sérieux
d'amélio¬
ration.
CHAPITRE PREMIER
Parmi les branchesdes sciences médicales qui ont été et sontencore l'objetde nombreuses controverses il n'est pas exagéré de placerla
thérapeutique,
c'est à dire lascience des remèdesà opposer à telle ou telle manifestation morbide.Parmi les substances actuellement employées, il en est en¬
core
beaucoup
dont lemode d'action n'est pas absolumentconnuet, partant, dont l'effet reste douteux. Il est très sûr qu'endehors decertainesmédicationsbiendéterminées, telles que
l'opium,
lemercure, la quinine,le salicylate desoudepar exemple, et nous en passons, il en est d'autres, telles que certainsalcaloïdes,quiréiississentà peuprèschezlesiïns,mal
chez lesautres,
dangereux
entouscas,qu'il fautmanieravecla plusextrême modération etla plus grandedextérité.Nousau¬rons toute confiance dans certains
thérapeutes
rompus auxformules et auxsubtilités de la clinique, mais le médecin
encoreau seuil de la carrière ne
triomphera
peut-être pastoujours
avec ces armes dangereuses, dontl'apprentissage demande
pour le maniement parfaitdelongs travauxet de
laborieux
efforts.L'hygiène
au contraire paraît être une science de méthode etd'effetsbeaucoup
plus certains. L'hygiènepeut êtreconsi¬dérée comme
ayant pour but la détermination et l'obser¬
vance des
lois,
des procédés qui mettent en pleine valeur les torcesvivesde l'homme. Pourquoi ne pas s'efforcer de lais¬ser
épanouir
dans toute leur plénitude ces forces vives de 1homme
et prévenir ainsi leurdéséquilibration
; pourquoilorsque
cettedéséquilibration
existe nepas encore recourir- H —
à ces lois, à ces
principes dont l'application
assuraitcetéqui¬
libre même; pourquoi, avant de recourir -aux médications, d'ordre trop souvent suggestif, ne pas rappeler ces loisavec
force, les observer avec rigueur ? Etqui nousdit alorsquela nature, force éminemment supérieure à tout ce que lecer¬
veau humain peut engendrer, ne nous aidera pas bienveil-
lamment si le premier pas lui est favorisé, si la route luiest aplanie ?
Observonsl'hygiène sous une de ses nombreuses faces,
non la moins importante :
l'hygiène
du mouvement. De¬mandons-nous quels
principes
on peut en tirer, quellesap¬plications pratiquesen découlent et pour cela
opposons-lui
l'état contraire : la sédentarité, la vie sédentaire.
Si nous nous enrapportons à
l'étymologie,
nous voyons que sédentaire vient desedentarius : celui qui resteassis. Il est
inutile de s'étendresur cette définition trop simple,
il serait
aussi
déplacé
de la prendreà
la lettre.Qu'est-ce que la vie d'une personne
sédentaire? Prenons l'emploi
du temps d'unemployé
de bureau,d'un fonction¬
naire: les fonctions administratives sont suffisamment ré¬
pandues en France pour donner quelque valeur
à l'exemple
choisi : II se lève en général à sept heures,
arrive à
sonbu¬
reau à huit heures, à peine marche-t-il pour
faire le chemin
quelques minutes; s'il a quelques
kilomètres à parcourir il
prend le tramway, voulant le plus possible
abréger les longs
trajets à pied considérés comme temps
perdu, il reste au
travail de huit heures à midi. Durant ce laps
de temps, il est
assis. A deuxheures, il rentre au bureau
jusqu'à sept heu¬
res. Après le dîner, il va au café. Quelques-uns, par
acquit
de conscience, se
promènent
un peu; on leur adit vague¬
mentqu'il fallait marcher ; ils rentrent enfin vers
dix ou
onze heures, et ainsi de suite tous les jours. Lecerveau
de
cet homme travaille sans cesseet
chaque
jourl'occasion se
présente pour
lui
defaire
appel auxfacultés intellec¬
tuelles que
l'éducation
apu* développer dans
sajeunesse,
L'éducation de son corps sea. trouve par contre
strictement
— 15 —
limitéeaux exercices plus ou moins vagues de sa vie d'ado¬
lescent.
Cenesont ni les carrières libérales, ni les professions in¬
dustrielles qui peuvent mettreen action les aptitudes corpo¬
rellessupposéesacquises, et la marchede chaquejour pour les besoins de la vie pratique nepeut remplir les conditions suffisantes.
Bien des hommes font bon marché des qualités
physi¬
ques appelées la force musculaire, l'agilité, l'adresse, la résistance à la fatigue. Ils prétendentque cette conforma¬
tion
physique
est de « luxe », mais il se trouve quecette con¬formation estjustement la même qui assure aux organes vi¬
tauxun fonctionnement régulier; elle est donc la condition essentielled'une nécessité
première
: la santé.Eneffet, examinons cet homme à vie sédentaire arrivé à l'âge de quaranteans : ses chairs sont flasques, son teint est
décoloré,
sa musculature est faible, ses digestions se font mal,il est essoufflé à la moindre marche, soncœur batplusquela normaleou moindre effort, il a une tendance à l'obé¬
sité, il craint lefroid, devientapathique, enfinneréagit plus.
Supposons
que ses ascendants aient suivi les mêmes erre¬ments, nousauronsdevant les yeux une exagération sensi¬
blede ces symptômes morbides.
Il estinutile d'insister pour montrer que cet état auquel
arrivel'organisme humain n'est pas l'état ordinaire, mais
un état
d'amoindrissement,
d'infériorité à ce que sont lesautres
hommes,
à ce que doivent être les autres hommes.Les Anciens avaient bien, saisi dans l'ensemble les effets néfastesde la vie inactive; aussi s'adonnaient-ilsardemment
auxexercices du corps.
Nous savonsque les Grecs, les Romains, les Spartiates éle¬
vaient les jeunes gens dans le culte de ces exercices. Les jeux de toutes sortes à Athènes étaient très en honneur,
blutarque
nous apprend que Jules César, decomplexion dé¬licate,
nedutqu'aux exercices duChamp-de-Marsd'être
leguerrier le plus robuste, le héros le plus
intrépide, le
con¬quérant de la Gaule.
— 16 —
Galien, lui-même, nous apprend qu'infirme
jusqu'à
l'âgede trente ans, il ne put rétablir sa santé qu'en consacrant
quelques heures tous les jours à prendre du mouvement.
Au moyen âge, il parutque ce goût pour les exercices du corps diminua. La cause en est peut-être dans les débuts du christianisme qui attachait peu
d'importance
à cette« enve¬loppe périssable» qu'est le corps. L'idée dumouvement cor¬
porel fut ramenée par les réformateurs religieuxCalvinet Luther, etaujourd'hui dans toutes lescontréescivilisées on
pratique les exercices du corps. On ne les réserve trop mal¬
heureusement que pour une certaine catégorie d'individus que l'ensemble des autres hommes regarde avec admi¬
ration. Il y a là excès en plus et en moins. Rappellerons-
nous quelques idées exprimées à ce sujet : Jean-Jacques Rousseau disait: « Les gens de lettres sont detous les hom¬
mes ceux qui vivent le plus assis, pensent le plus, et sont
par là les plus malades des hommes». EtMme deSévigné n'a-t-elle pas dit aussi dans un style un peu libre, que nous
nouspermettrons de citer: «Toutes lesjeunes filles sontma¬
lades qui restent le cul sur la chaise. »
Pourquoi ces habitudes actives desAnciens ? Pourquoices témoignagesde valeur contre la sédentarité?
Pourquoi cet
aspect de l'homme à vie-sédentaire,cette apparencelanguis¬
sante que nous avons montrésprécédemment?
Pourquoi,
au contraire, chez l'homme entraîné cet air de force etde santé?Pourquoi ces mouvementspleins d'aisance, ces formes
svel-
tes et robustes ?
Nous allons essayer de
l'expliquer
enanalysant tout le
mal que fait à l'organisme une vie trop
inactive,
unevie
sédentaire.
CHAPITRE II
Le mouvement, a-t-on dit, est la
caractéristique
de la vie.N'est-il pas naturel d'aider de tout notre pouvoir à cette ma¬
nifestation de lavie, d'éviterla vie sédentairequi immobilise
l'individu,
et de compenser par l'exercice les effets fâcheux de cette immobilité quand celle-ci est dictée par les condi¬tions sociales? C'est là, semble-t-il, le substratum naturel de tous les arguments
invoqués
en cette faveur.D'après
toutes lesdonnées de laphysiologie,
notre corps est soumis aux lois des machinesthermiques,
c'est à dire notremachine humaine transforme cle la chaleur en mou¬vement absolument comme une machine à vapeur. Ilest vraiqu'on pourrait faire quelque restriction et dire, comme leveut M.
Chauveau,
qu'il y a une forme intermédiaire del'énergie,
une formeparticulière à l'êtrevivant, ne se retrou¬vantquechez lui, qui est le travail
physiologique
; dire que la création dece travailphysiologique
est la seule cause de ladépense
del'énergie chimique,
la création du travail mé¬canique,
la chaleur sensible ne provenant que de la trans¬formation
du travailphysiologique,
cela n'infirmera point lathéorie première à savoir que toute production de travail, toutedépense
dechaleur,
toute manifestation, si l'on veut, decetravail
physiologique
supposeune dépense de combustible.(h', cetteconsommation de combustible sera d'autant plus grandeque le travail sera plus considérable. La première conséquencede ce fait sera que l'exercice devra user une
certainequantité de matières qui font partie cle notre corps
- 18 —
et qui représentent la troisième phase de la moléculed'ali¬
ments ingérée d'abord,
digérée
ensuite etenfin assimilée.La
dépense
de chaleur du corpsvivant représente
pour ainsi dire les deuxchapitres d'un
môme budget: celuide la
vieinterne, de la vie organique des muscles disses, celui de
la vie externe, de relation. Donc, deux dépenses
de chaleur,
l'uneproduitepar le travail des grands
appareils de la vie,
l'autre la chaleur nécessaire au travail des muscles. L'une deces dépenses est fixe, involontaire, c'est celle qui est
af¬
fectéeauxfonctions delà vieorganique; l'autre,queprovoque le travail musculaire, est éminemment variable; elle est
de
plus volontaire, par conséquentréglée
suivant noshabitu¬
des etnos goûts.
L'exerciceest donc chez l'homme ensantéle facteuressen¬
tiel de la variation desdépenses parce
qu'il
estle régulateur
des combustions, de la destruction des éléments
organiques
qui jouent dans la machine humainele rôle decombustibles.
Maisces combustibles se renouvellent, sans
quoi le
corps s'userait indéfiniment parsuite des pertesqu'il subit, et les
aliments ont pour but de réparer cespertes.
Ces alimentss'ingèrent, se
digèrent, s'absorbent, s'assi¬
milent, se désassimilentet sontrejetésau
dehors. L'exercice,
dans toutes ces diverses phases de la
nutrition, apporte sa
part importante d'auxiliaire efficace. De
même,
eneffet,
qu'une pierre
détériorée
d'unédifice
estremplacée par une
autre, de même la molécule vieillie, usée,
cédera la place à
la molécule vivante récemment élaborée, ayant en
elle un
potentielindéterminé,
dont l'extériorisationlui
serademan¬
dée ultérieurement.
Ce remplacement, qui
l'activera,
si cen'est le travail des
muscles qui, en augmentant la combustion
et la destruction
destissus, présidera
à
l'élaborationd'éléments nouveaux
puisés
dans le monde extérieur etdestinés à renouveler les
parcelles du corps qui ont fait leur temps.
S'il n'y a pas assez
d'exercice,
les tissusseront lentement
désassimilés, lentement remplacés, ils
vieilliront surplace,
■ \r[.
— 19 —
résisteront moins que les autres plus jeunes aux assauts de
l'extérieur, vaudront moins par
conséquent.
Tous les élé¬ments qui entreront dans la composition du corps de l'homme inactif seront donc plus vieux, de moins bonne na¬
ture, quechez l'homme livré auxexercices du corps.
Bien
plus,
le manque d'exercice apportera par suite des combustionsincomplètes
ou ralenties destroublesgénéraux produitspar l'accumulation dans le sang do certains pro¬duits anormaux,
toxiques
à leurfaçon,
qui engendreront lesdiatlièses.Est-ce là une vue de
l'esprit?
Des faits réels soumis à l'observation dechoque
jour affermissentnotre conviction.LesAnglais ont l'habitude de
désigner
par uneexpressionpittoresque
l'état de la peau de l'homme qui est arrivé par l'exercice au summum de l'entraînement. D'un boxeur bien en condition ils disent qu'il est « blanccomme une femme ».Sa peau est lisse, nette, ferme ou
toucher,
ne tremblotant pas.Or, cequi sevoit du côté de la peau correspond à deschangements analogues
dans les autres parties profondes dont l'œil ne peut aussi bien apprécier la structure.Il en est assez pour montrer combien la vie sédentaire favorise peu la nutrition, fonction cependant des plus im¬
portantes, puisqu'elle
réside dans l'intimité même de nostissus, puisque
chacune de nos cellules contribue à la résis¬tance
générale,
à la force, à la santé de l'individu.On
digère,
a-t-on dit, autant avec ses jambes qu'avecson estomac. Les hommes mangentchaque
jour.Chaque
jour, chez l'hommesédentaire,
les éléments deréparation
sontintroduits
en plus grande quantité que n'en sontchassés leséléments désassimilés.
Au lieu de pénétrer dans les cellules pours'assimiler,
pour devenir partie intégrante del'orga¬
nisme,
ils vont rester dans les voies absorbantes, les obs¬truer. Si ledéfaut d'exercice est trop complet, trop prolongé,
il finitpar donnerlieu à un véritable engorgement des vais-'
—
20
—seaux qui puisent dans le tube digestif les produits de la digestion et les portent aux organes. Ces vaisseauxeux-
mêmes,-gorgésde cesmatériaux qui nepeuvent plus s'assi¬
miler,finissentpar refuser de recevoir les produits digestifs
quel'estomac leurtransmet.
Quand l'obstruction en est arrivée à ce point, les voies digestives nepeuvent plusabsorber les aliments qu'elles ont digérés, et les produits de la digestion restent pourainsi
dire sur le seuil des canaux absorbants sans pouvoir y pénétrer. Ces matières, au lieu de passer dans le sang,
séjournent dans l'estomac, s'y corrompent, fermentent et
occasionnent des troubles variés de la digestion. Delà des pesanteurs et des maladies d'estomac de toutes sortes.
De même le défaut d'exercice favorise la
stagnation des
matières fécales dans le tube digestifparla
diminution de
tonicité que provoque la vie sédentaire dans
l'intimité des
fibres musculaires, par le ralentissement de
toutes les
fonctions sécrétoires, par la mollesseet la
flaccidité des
muscles abdominaux dont la résistance amoindrie n'assu¬
rera plus comme à l'état normal aux organes
internes le
point d'appuinécessaireà leurs mouvements depéristaltisme,
à l'aide desquels le bol fécal sera poussé vers
l'orifice anal
du rectum.
Les fonctions cutanées elles aussi exigent, pour
le bon
maintien de leur état, d'êtreentretenues par
l'exercice.
L'hommesédentaire, si propre qu'il soit,
si nombreux que
soient les bains auxquels il se soumet, n'est
point encore en
règleavec l'hygiène de la peau. Il ne
suffit
pasde nettoyer la
peau, c'est à dire d'enlever les malpropretés
qui obstruent
ces milliers de petits orifices
appelés
pores parlesquels
s'échappent
les substances liquides et gazeusesdont l'orga¬
nismea si grand besoin de se débarrassera tout
instant. La
propreté ne faitque la moitié de la besogne;
il
nesuffit pas
de donnerla ported'issueà cessubstances
qu'on veut élirai"
— 21 —
ner, il faut en provoquerla sortie à l'aide d'un véhicule qui l'entraîne,et ce véhicule c'est la sueur.
L'insuffisance du bain est bien démontrée par ce fait que certaines odeurs caractéristiques dues aux émanations de la peau chez des personnes à vie trop sédentaire persistent malgré les soins lesplus minutieux de la propreté et
dispa¬
raissent sous l'influencedes sudations.
La sueur est donc un moyen de
dépuration
extrêmement efficace, qu'il est utiled'employer.
L'exercice y satisfait, etnonla sédentarité.
La respiration est également une des fonctions qui souf¬
frent
beaucoup
de l'influence d'une vie sédentaire.La
physiologie
nous apprend qu'il y a dans les poumons certaines parties soumises à une ventilation moindre les unesque lesautres. Ces parties,où l'airse renouvellemoins,sont les sommets. Mais la
clinique
nous apprend aussi, trop souvent, hélas! que les tubercules débutent toujours parles sommets et que le bacille de Kocli trouve un terrain toutpréparé pour sondéveloppement
et son œuvre destruc¬tive. A
l'appui
de cette assertion, il est de notoriété scienti¬fique
que la tuberculose sedéveloppe
facilement chez ceux quela nature afrappés
de mutisme, ou ceuxqu'une para¬lysie
empêchedepuis longtemps
de recouvrerl'usage de la parole.Ilparait donc
indiqué
de ne pas favoriser ces tendances funestes del'organisme
humain, et de provoquer dans ces parties sacrifiées des appels d'airfréquents.
L'exercice, àl'inverse
de la viesédentaire,
remplira ces conditions.Après,
unexercice assez violent on est soumis, sans qu'il soit nécessaire d'arriver à l'essoufflement, à une respi¬ration plus
abondante,
plus large, à ceque l'on appelle la(( soifd'air».
bette « soifd'air », en ventilant le poumon de la
façon
laplus heureuse,
présente
encore un autre précieux avantage:l'oxygénationplus abondante des cellules.
L'air est nécessaire pour la combustion du bois et du charbon d'unfoyer parce que ces combustibles secombinent pour être brûlés avec l'oxygèneque contient l'air atmosphé¬
rique.
Or, les mômesactes chimiques, les mêmes oxydationsqui ont lieu dans le fourneau incandescent se produisent aussi dans le corpshumain au cours des exercices. La plupartdes
phénomènes
qui produisent la chaleur vitalesont donc aussi des oxydations.Chaque contraction des muscles étant l'occasion d'une certaine production de chaleur est cause d'une certaine augmentation de combustibles, et parconséquent d'unecer¬
taine dépense de
l'oxygène
employé à produire cescombus¬tions. Mais la dépensede chaleur,nous l'avons dit,nécessitée par l'exercice, est en proportion de la quantité de
travail
exécutée par les muscles: donc l'intensité de respiration
est
en proportion de la quantité de travail effectué.
A l'état physiologique encore le poumon se charge
d'éli¬
miner des gaz tels que l'acide carbonique et autres
produits
gazeux, déchets de nos combustions organiques.
L'inspira¬
tion appelant l'expiration après elle, et égale à elle comme quantitéet amplitude,fournitencore unnouveau facteur
pré¬
cieux d'activité vitale.
Nous savons donc quel'exercice augmentera les
échanges
respiratoires, la vie sédentaire les réduira à leur plussimple
expression.L'homme qui court, parexemple,introduit dans
sonpoumon par rapport à l'homme assis une
quantité d'air
qui estcomme sept est à un.
Nous reviendrons plus tard sur cette
utilité de l'oxygéna¬
tion abondante. Qu'il suffise de dire que
l'insuffisance d'oxygène
prédispose aux ralentissements dela nutrition,
imprime à l'organisme un état de déchéance
vitale et le niet
en état de moindre résistance contre l'agent
microbien, h est
là plus
de titres qu'il n'en faut
oudésir
quel'on doit avoir
de respirer
aussi largement
quepossible.
Si l'on respire avec sespoumons, il faut donc aussi res¬
pirer avecses
muscles.
Lemuscle prend l'oxygène
au sang, quile prend lui-même
aux poumons. Lavie sédentaire
laisse de côté cette respiration musculaire et 11e développe
pas la fonction
pulmonaire
proprement dite.Il
y auradonc
uneinsuffisance destissus,d'oxygénation dusangetilse pro¬
duira des troubles dans les opérations de chimie intérieure.
Aupoint de vue local, le défaut d'exercice entraîne aussi
une défectuosité notable dans le fonctionnement des pièces
osseuses qui composent le thorax. Cette
défectuosité
mêmeréside dans l'immobilité relative que la vie sédentaire im¬
pose aux organes. Deux raisons entrent en jeu : la première
estquel'homme sédentaire a une vie inactive, n'exécute pas certains mouvements des bras qui pourraient solliciter directement l'entrée en jeu des muscles respirateurs; la seconde, qu'ils ne fait pas assez de travail musculaire pour activerindirectement lejeu de la respiration en provoquant
l'augmentation
dubesoin de respirer, la « soif d'air ».Les côtes ne demeurentjamais dans un état
d'immobilité
absolue quiconstitue une absence de respiration incompa¬
tibleavecla vie, mais, chez l'homme inactif, l'ampleur de la respiration tend à se réduire au minimum et, par suite, le
mouvement des côtes à serestreindre a une « course » aussi
•peuétendueque possible. Si cet état est habituel, l'articula¬
tion costales'accommodera peu à peu par un changement
destructure à unjeu plus raccourci, car, on le sait,
la
fonc¬tion
faitPorgane;
unedemi-ankylo.sese produirai
parrétrécis¬sementdes surfaces de frottement et raideur des ligaments, telsera le résultat mécanique delà diminution
des
mouve¬mentsrespiratoires. Il se
produira de plus,
commeeffet de
la
diminution
de travail des muscles respiratoires, unaffai¬
blissement
de ces muscles. Et les puissancesrespiratoires
actives auront ainsi diminué d'énergie en même
temps
que l'état despièces
osseuses du thorax tendra à opposer un obstacle mécanique à leur action.L'immobilisation relative des côtes est ainsi une cause
d'inaptitude aux grands mouvements respiratoires si utiles
pour tous les sujets, qui seraient particulièrement précieux pour les sujets inactit's, dont les humeurs sont chargées de produits de combustion incomplète,
lesquels
auraient besoin de faire arriverbeaucoup d'oxygène
dansle sang pour brû¬ler ces déchetsde la nutrition.
Le médecin a souvent l'occasion de reconnaître la réalité de cette diminution del'aptitude respiratoire sousl'influence de l'immobilité. Certaines maladies, qui ont occasionné l'im¬
mobilisation complète ou relative des côtes, laissentsou¬
vent, après leur
guérison,
des difficultés de la respiration.L'atonieconsécutive des muscles
inspirateurs
rend les con¬valescences depleurésie a'vec épanchement plus
longues et plus
difficiles. L'ankylose des articulations costales consti¬tue quelquefois un obstacle insurmontable à la guérison
de 1'empbysème
pulmonaire en empêchant l'abaissement com¬plet des côtes.
A côté des maléfices suscités par la sédentarité sur
la
.res¬piration, il est naturel do penser que la circulation,
si inti¬
mement liée à cette dernière fonction, subit
également
l'influencenéfaste de la vie sédentaire.
Le cœur est un muscle qui fournit un travail énorme
et
dont la tache même serait au-dessus de ses forces si des
auxiliaires précieux ne venaient lui aider.
La vitesse du sang étant au départ du cœur
de 40 centi¬
mètres par seconde, n'est plus dans les capillaires
sanguins
que de 1 millimètre par seconde. La raison en est
dans les
nombreux frottementsque la masse sanguine est
obligée de
subir dans les tubes de plus en plus nombreux et
étroits. A
ce moment même le liquide n'a fait que la
moitié du trajet,
ildoit,pour
revenir
au cœur,suivre un'chemin inverse et parallèle à celui qu'il
adéjà
parcouru.O.r, si l'on réfléchit
auxfaibles moyens
d'action dont l'appareil veineux dispose
pour
faire cheminer
soncontenu
avecl'impulsion si réduite
.qu'il aconservée, il est impossible de
ne pasconclure
que d'autresagents doivent intervenir pourseconder les
forcespropres
à l'appareil circulatoire.
Quelle est cette force
auxiliaire? Réside-t-elle
dansles
vaisseaux capillaires, dans leurs propriétés
motrices ?
Si l'on examineces vaisseaux au point de vue purement contractile, leur rôle
apparaît négatif.
Cette contraction,loin
de faciliter la circulation veineuse, l'entraverait, puisque la diminution plus grande de leur calibre ferait encore
plus
obstacle au cours du sang.
C'est par le relâchement auquel ils sont soumis que les capillaires exercent une heureuse influence; les célèbres expériences deClaude Bernard, coupant les filets du grand sympathique vaso-constricteur et produisant la dilatation
des capillaires au point que les pulsations
cardiaques
se firentsentirjusque dans les veines etqu'il seproduisit
un pouls veineuxdirect,viennent le démontrer.Or cette dilatation, et ici nous rentrons dans notre sujet
en nousexcusant de cettedigression physiologique,est pro¬
duiteen dehors de la
vasodilatation active proprement dite
deces vaisseaux, encorecontroversée aujourd'hui, est pro¬
duite, disons-nous, par la contraction musculaire.
Ca
conséquence
du surcroît de circulation du à la dilata¬tion des capillaires, elle même due à la contraction des muscles, a une portée considérable. Dans un muscle en travail il passe neuf fois plus de sang que dans le même muscleau repos. L'observation de chaque jour confirme le tait; l'immobilité absolue du corps
s'accompagne
de troubles circulatoirescaractérisés par le ralentissement du cours du sang, pur des stases sanguines d'autant plus prononcées'lue
l'appareil
circulatoire est moins parfait, par conséquent moins capable de se suffire à lui-même. On connaît lespneumonies
hypostatiques
des vieillards. Or, supposonsune masse sanguine avec tendance à la stagnation,letravail des muscles va amener la vaso-dilatation des vaisseaux, augmenter le débit, accélérerle cours; c'est ainsique la«vis
a tergo» sera renforcée.
La circulation veineuse trouvera encoredans
l'exercice,
le mouvement les mêmes auxiliaires. A l'état normal, chez l'homme entraîné, les parois musculaires de l'abdomenexercent une certaine pression sur le contenu des viscères et vaisseaux sanguins. Cette pression, exercée sur ces der¬
niers, a pour but d'accélérer le cours du sang dans les veines caves, dont le trajet,étant données l'actionde lapesan¬
teur et la faiblesse de la vis a tergo, est très pénible. La direction des valvules qu'elle possède réglera le sens indé¬
terminé de cette pression. Mais, nous l'avons vu, dans la vie sédentaire ces musclesse
relâchent,
d'où absence d'effetparsuite d'absencede la cause. •
Il est en outre un fait connu que si l'on fait une vio¬
lenteinspiration, en même temps que l'air atmosphérique
pénétrera
dans les vésicules pulmonaires unecertaine
quantité de liquide sanguin est aspiréedans les cavitésdu
cœur. Cetteaspiration
thoracique,
de si grandeutilité dans
la circulation, sefait assurément sentir à l'état de repos, mais à un degré inférieur, et favorise d'autant moins
le
coursdu sang.
De cet ensemble de faits il résulte que la vie
sédentaire,
enne recourant auxmuscles comme auxiliaires de la circula¬
tion que dans la limite que lui prescrit la vie
ordinaire de
chaque jour, expose l'individu beaucoup plus
facilement a
ces stases sanguines, àcesarrêts de la circulation dans
les
diversesrégions du corps, par conséquent à une
fatigue, a
un surmenage du cœur, avec sa dilatation et ses
lésions
valvulaires.
De même, tous les organes
s'unissant
dans unesorte de
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consensus pour vibrer, si l'on peut ainsi parler, à l'unisson, lecœur de l'homme sédentaire ne profitera point, en tant que
muscle des effets généraux de l'exercice qui
contribue¬rait à lui assurer, comme aux autres partiesde l'organisme,
une résistance, une force
particulière,
sauvegarde précieusecontre les défaillances ultérieures !
Il estencore un système organique profondément atteint
par la sédentarité : lesystème nerveux.
Dans le siècle où nous vivons, que de fois le médecin est-il appelé à donner sesconseils à depauvres êtres impression¬
nables à l'excès ! Tourmentés par les sensations les plus pénibles, quelquefois les plus bizarres, par des douleurs diverses, des troubles fonctionnels, ce sont des malades en
proie aux idées les plus tristes. Ils frisent l'hypocondrie quand ils n'y atteignent pas.
La
caractéristique
de ces malades est le défaut d'équilibre de leurs fonctions nerveuses, cesontdesneurasthéniques.La sédentarité pousse à la neurasthénie de plusieurs
façons.
Le Prof. Bouchard a admis comme pathogénie d'une
certaine forme d'état neurasthénique, appelée par lui neu¬
rasthénie
hyperacide,
l'accumulation d'un excès de produitsacides dans le liquide sanguin. Le Prof. Bouchard pense
quecettemodification de la composition du sang
imprime¬
raitau système nerveux telle ou telle réaction de nature inconnue dont l'aboutissant serait l'état neurasthénique. Or,
il ressortdecequi a été dit précédemment que la vie séden¬
taire, c'est à dire l'insuffisance
d'oxydations, l'insuffisance
de
combustions,
conduit tout droit à la productionde
ces produits acides,facteur ici incriminé.Si l'hérédité vient ajouter son action dans cette voie, on présume
l'importance
des symptômes, puisquesouvent elle
seulesuffit à laisser sur dejeunes êtres ce cachet de
déses¬
pérance, de souffrance.
Mais, si
prédisposés
qu'ils soient, ils seront responsables de leur é.tatmorbide ceux qui vivent dans-le désœuvrement physique, qui laissent dans le repos leurs cellules muscu¬laires et aussi leurs cellules cérébrales. Sensibles à toutes les impressions extérieures ils necherchentpointàproduire
au dehors, à extérioriser cette « force latente» qu'ils ont en eux et qu'ils opposeraient comme une digue aux sensations du dehors. Et pourtant ils en seraient capables! Un événe¬
ment heureux ou malheureux de leur vie rappellera comme un regain d'énergie, de volonté, d'activité, et cet influx ner¬
veux qui paraît captif dans leur cerveau
s'échappera
et se manifestera sous une formequelconque.
S'ils ne peuvent être responsables de ces événements marquants dans lecours de leur existence, ils le sont de cette apathie muscu¬
laire, decette aboulie, de cette sédentaritéen un mot, cause de leurs douleurs. C'est qu'en effet il faut pour
accomplir
un exercice quelconqueque lecerveau le commande et que la volonté soutienne l'effort musculaire. Si cet effort est répété»vaincu aisément, petit à petit le cerveau se rééduquera,
la
volonté reprendra chez ce déséquilibré une place
prépondé¬
rante. La sédentarité, par la torpeur dans laquelle
croupira
son système musculaire, par surexcitation corrélative
de
son système nerveux, l'aura mené à cet état desurexcitation maladive
impropre à
toute résolution ferme etsuivie.D'autres neurasthéniques seront aussi déprimés parce qu'ils auront abusé de leurs cellules cérébrales, parce que leur vie intellectuelle aura outrepassé les limites
permises.
Cesera encore là de la sédentarité, puisque le
travail, la mé¬
ditationexagérés supposent aussi unesédentarité
exclusive.
C'est alors qu'd faudra redoubler de
prévoyance vis à vis de
l'hygiène physique pour lutterd'abord contre l'intensité
d'ac¬
tivité cérébrale, et aussi contre les effets de l'immobilité:
« Mens sana incorpore sano », disaient les Anciens.
Est-ce
que la méditation trop prolongée ne conduit pas
à la mélan¬
colie ? La mélancolie n'est-elle pas une forme de
la neuras¬
thénie?