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Entretiens thérapeutiques de patientes sous hormonothérapie à la suite d’un cancer du sein : retour d’expérience, évaluation, bilan
RICHARD Mathilde
2019-2020
Sous la direction de Mme YVON Héloïse
Membres du jury FAURE Sébastien | Président CLERE Nicolas | Co-directeur DUVAL Olivier | Membre YVON Héloïse | Directrice LE DU Sophie | Membre
Soutenu publiquement le : 08 Janvier 2020
Thèse pour le
Diplôme d’Etat de Docteur en Pharmacie
2 L’auteur du présent document vous
autorise à le partager, reproduire, distribuer et communiquer selon les conditions suivantes :
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ENGAGEMENT DE NON PLAGIAT
Je, soussignée Mathilde RICHARD déclare être pleinement conscient(e) que le plagiat de documents ou d’une partie d’un document publiée sur toutes formes de support, y compris l’internet, constitue une violation des droits d’auteur ainsi qu’une fraude caractérisée.
En conséquence, je m’engage à citer toutes les sources que j’ai utilisées pour écrire ce rapport ou mémoire.
signé par l'étudiante le 10 / 11 / 2019
Cet engagement de non plagiat doit être signé et joint à tous les rapports, dossiers, mémoires.
Présidence de l'université 40 rue de rennes – BP 73532 49035 Angers cedex Tél. 02 41 96 23 23 | Fax 02 41 96 23 00
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REME RC IEM ENTS
A Monsieur Sébastien Faure, pour avoir accepté de présider mon jury.
A Madame Héloïse Yvon,
pour m’avoir fait l’honneur de participer à ce projet et pour avoir accepté de diriger cette thèse. Merci pour le soutien, la gentillesse et les encouragements utiles à la rédaction de cette thèse. Merci pour ton implication lors de la mise en place des entretiens, sans toi rien n’aurait pu prendre forme.
A Monsieur Nicolas Clere,
pour avoir accepté de co-diriger cette thèse et de participer à mon jury de thèse. Mes sincères remerciements pour votre analyse constructive de mon travail et vos précieux conseils.
A Monsieur Olivier Duval, pour avoir accepté de faire partie de mon jury.
A Madame Sophie Le Dû,
pour avoir eu la gentillesse de participer à mon jury. Merci pour la confiance, les précieux conseils, le soutien et les encouragements apportés tout au long de la rédaction. Sois assurée de ma sincère reconnaissance.
A ma mère, ma belle-mère et ma grand-mère,
pour leur soutien infaillible depuis mon plus jeune âge. Merci de toujours croire en moi, de toujours me soutenir et m’encourager dans tout ce que j’entreprends. Merci pour votre amour et votre bienveillance. J’espère vous rendre fières.
A mon frère, Thibault,
qui me rend fière et que je soutiendrai toujours même si on ne se le dit pas.
Au reste de ma famille,
pour m’avoir donné des conseils et encouragée pendant mes études et l’écriture de cette thèse.
A ma grand-mère paternelle et mon grand-père maternel, qui j’en suis sûre seraient fiers de moi aujourd’hui.
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REME RC IEM ENTS
A mes amis de la faculté de pharmacie,
pour avoir fait de ces années d’études les meilleures années de ma vie, merci pour nos voyages et nos soirées mémorables. Merci à Lu, la sœur que je n’ai jamais eue, pour toutes nos heures passées à discuter (au téléphone et face à face), pour son soutien, son écoute, merci pour tout. Merci à Sara pour sa folie, sa bonne humeur communicative, son soutien lors des séances BU « rédaction de la thèse ». Merci à Clo pour sa facilité à dédramatiser chaque situation, et en particulier les partiels. Merci à Hérisson pour son humour bien à lui. Merci à Cyril pour les vacances au paradis. Merci à Paul-Louis pour les conversations perchées mais fort intéressantes.
A Manon et Maëva,
pour prendre régulièrement des nouvelles et pour m’encourager à chaque fois.
A Antoine,
le frère que la vie m’a apporté. Merci pour ton écoute et ton soutien sans faille depuis bientôt huit ans. Merci aussi pour l’aide en anglais.
A mes collègues des différentes pharmacies,
pour m’avoir tant appris et vous être intéressés à ce projet. Merci à l’équipe de la pharmacie Isaure : Sophie, Emilie, Caroline, Séverine et Florian ; à l’équipe de la pharmacie Cousin : Sandy, Sophie, Julie, Carole, Noémie, Aurélie, Hélène, Ophélie, Emilie ; à l’équipe de la pharmacie Rive Sud, qui me manque. Merci également aux différents titulaires : Madame Le Dû, Monsieur Cousin, Monsieur et Madame Tritsch pour votre confiance.
A Théau,
mon meilleur allié de ces deux dernières années et de cette rédaction de thèse, merci d’avoir fait en sorte que je prenne confiance en moi, même si la vie nous a séparés.
Aux pharmaciens ayant réalisé les entretiens,
pour votre investissement dans ce projet, pour votre disponibilité et votre temps.
A toutes les patientes,
pour votre implication, votre confiance, vos conseils, vos encouragements. Sans vous, ce projet n’aurait pas pu exister.
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LISTE DES ENSEIGNANTS DE LA FACULTÉ DE SANTÉ D’ANGERS
Doyen de la Faculté : Pr Nicolas Lerolle
Vice-Doyen de la Faculté et directeur du département de pharmacie : Pr Frédéric Lagarce Directeur du département de médecine : Pr Cédric Annweiler
PROFESSEURS DES UNIVERSITÉS
ABRAHAM Pierre Physiologie Médecine
ANNWEILER Cédric Gériatrie et biologie du vieillissement Médecine
ASFAR Pierre Réanimation Médecine
AUBE Christophe Radiologie et imagerie médicale Médecine
AUGUSTO Jean-François Néphrologie Médecine
AZZOUZI Abdel Rahmène Urologie Médecine
BAUFRETON Christophe Chirurgie thoracique et cardiovasculaire Médecine
BENOIT Jean-Pierre Pharmacotechnie Pharmacie
BEYDON Laurent Anesthésiologie-réanimation Médecine
BIGOT Pierre Urologie Médecine
BONNEAU Dominique Génétique Médecine
BOUCHARA Jean-Philippe Parasitologie et mycologie Médecine
BOUVARD Béatrice Rhumatologie Médecine
BOURSIER Jérôme Gastroentérologie ; hépatologie Médecine
BRIET Marie Pharmacologie Médecine
CAILLIEZ Eric Médecine générale Médecine
CALES Paul Gastroentérologe ; hépatologie Médecine
CAMPONE Mario Cancérologie ; radiothérapie Médecine
CAROLI-BOSC François-xavier Gastroentérologie ; hépatologie Médecine CHAPPARD Daniel Cytologie, embryologie et cytogénétique Médecine
CONNAN Laurent Médecine générale Médecine
COUTANT Régis Pédiatrie Médecine
COUTURIER Olivier Biophysique et médecine nucléaire Médecine
CUSTAUD Marc-Antoine Physiologie Médecine
DE BRUX Jean-Louis DE CASABIANCA Catherine
Chirurgie thoracique et cardiovasculaire Médecine Générale
Médecine Médecine
DESCAMPS Philippe Gynécologie-obstétrique Médecine
DINOMAIS Mickaël Médecine physique et de réadaptation Médecine
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DIQUET Bertrand Pharmacologie Médecine
DUBEE Vincent Maladies Infectieuses et Tropicales Médecine DUCANCELLE Alexandra Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière Médecine
DUVAL Olivier Chimie thérapeutique Pharmacie
DUVERGER Philippe Pédopsychiatrie Médecine
EVEILLARD Mathieu Bactériologie-virologie Pharmacie
FANELLO Serge Épidémiologie ; économie de la santé et prévention
Médecine
FAURE Sébastien Pharmacologie physiologie Pharmacie
FOURNIER Henri-Dominique Anatomie Médecine
FURBER Alain Cardiologie Médecine
GAGNADOUX Frédéric Pneumologie Médecine
GARNIER François Médecine générale Médecine
GASCOIN Géraldine Pédiatrie Médecine
GOHIER Bénédicte Psychiatrie d'adultes Médecine
GUARDIOLA Philippe Hématologie ; transfusion Médecine
GUILET David Chimie analytique Pharmacie
HAMY Antoine Chirurgie générale Médecine
HUNAULT-BERGER Mathilde Hématologie ; transfusion Médecine
IFRAH Norbert Hématologie ; transfusion Médecine
JEANNIN Pascale Immunologie Médecine
KEMPF Marie Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière Médecine
LACCOURREYE Laurent Oto-rhino-laryngologie Médecine
LAGARCE Frédéric Biopharmacie Pharmacie
LARCHER Gérald Biochimie et biologie moléculaires Pharmacie LASOCKI Sigismond
LEGENDRE Guillaume
Anesthésiologie-réanimation Gynécologie-obstétrique
Médecine Médecine
LEGRAND Erick Rhumatologie Médecine
LERMITE Emilie Chirurgie générale Médecine
LEROLLE Nicolas Réanimation Médecine
LUNEL-FABIANI Françoise Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière Médecine
MARCHAIS Véronique Bactériologie-virologie Pharmacie
MARTIN Ludovic Dermato-vénéréologie Médecine
MENEI Philippe Neurochirurgie Médecine
MERCAT Alain Réanimation Médecine
MERCIER Philippe Anatomie Médecine
8 PAPON Nicolas Parasitologie et mycologie médicale Pharmacie
PASSIRANI Catherine Chimie générale Pharmacie
PELLIER Isabelle Pédiatrie Médecine
PETIT Audrey Médecine et Santé au Travail Médecine
PICQUET Jean Chirurgie vasculaire ; médecine vasculaire Médecine
PODEVIN Guillaume Chirurgie infantile Médecine
PROCACCIO Vincent Génétique Médecine
PRUNIER Delphine Biochimie et Biologie Moléculaire Médecine
PRUNIER Fabrice Cardiologie Médecine
REYNIER Pascal Biochimie et biologie moléculaire Médecine RICHARD Isabelle Médecine physique et de réadaptation Médecine
RICHOMME Pascal Pharmacognosie Pharmacie
RODIEN Patrice Endocrinologie, diabète et maladies métaboliques
Médecine
ROQUELAURE Yves Médecine et santé au travail Médecine
ROUGE-MAILLART Clotilde Médecine légale et droit de la santé Médecine ROUSSEAU Audrey Anatomie et cytologie pathologiques Médecine ROUSSEAU Pascal Chirurgie plastique, reconstructrice et
esthétique
Médecine
ROUSSELET Marie-Christine Anatomie et cytologie pathologiques Médecine
ROY Pierre-Marie Thérapeutique Médecine
SAULNIER Patrick Biophysique et biostatistique Pharmacie
SERAPHIN Denis Chimie organique Pharmacie
SUBRA Jean-François Néphrologie Médecine
UGO Valérie Hématologie ; transfusion Médecine
URBAN Thierry Pneumologie Médecine
VAN BOGAERT Patrick Pédiatrie Médecine
VENIER-JULIENNE Marie-Claire Pharmacotechnie Pharmacie
VERNY Christophe Neurologie Médecine
WILLOTEAUX Serge Radiologie et imagerie médicale Médecine
MAÎTRES DE CONFÉRENCES
ANGOULVANT Cécile Médecine Générale Médecine
ANNAIX Véronique Biochimie et biologie moléculaires Pharmacie
BAGLIN Isabelle Chimie thérapeutique Pharmacie
9 BASTIAT Guillaume Biophysique et biostatistique Pharmacie
BEAUVILLAIN Céline Immunologie Médecine
BELIZNA Cristina Médecine interne Médecine
BELLANGER William Médecine générale Médecine
BELONCLE François Réanimation Médecine
BENOIT Jacqueline Pharmacologie Pharmacie
BIERE Loïc Cardiologie Médecine
BLANCHET Odile Hématologie ; transfusion Médecine
BOISARD Séverine Chimie analytique Pharmacie
CAPITAIN Olivier Cancérologie ; radiothérapie Médecine
CASSEREAU Julien Neurologie Médecine
CHEVAILLER Alain Immunologie Médecine
CHEVALIER Sylvie Biologie cellulaire Médecine
CLERE Nicolas Pharmacologie / physiologie Pharmacie
COLIN Estelle Génétique Médecine
DERBRE Séverine Pharmacognosie Pharmacie
DESHAYES Caroline Bactériologie virologie Pharmacie
FERRE Marc Biologie moléculaire Médecine
FLEURY Maxime Immunologie Pharmacie
FORTRAT Jacques-Olivier Physiologie Médecine
HAMEL Jean-François Biostatistiques, informatique médicale Médicale
HELESBEUX Jean-Jacques Chimie organique Pharmacie
HINDRE François Biophysique Médecine
JOUSSET-THULLIER Nathalie Médecine légale et droit de la santé Médecine LACOEUILLE Franck Biophysique et médecine nucléaire Médecine
LANDREAU Anne Botanique/ Mycologie Pharmacie
LEBDAI Souhil Urologie Médecine
LEGEAY Samuel Pharmacocinétique Pharmacie
LE RAY-RICHOMME Anne-Marie Pharmacognosie Pharmacie
LEPELTIER Elise Chimie générale Pharmacie
LETOURNEL Franck Biologie cellulaire Médecine
LIBOUBAN Hélène Histologie Médecine
MABILLEAU Guillaume Histologie, embryologie et cytogénétique Médecine
MALLET Sabine Chimie Analytique Pharmacie
MAROT Agnès Parasitologie et mycologie médicale Pharmacie
10 MAY-PANLOUP Pascale Biologie et médecine du développement et
de la reproduction
Médecine
MESLIER Nicole Physiologie Médecine
MOUILLIE Jean-Marc Philosophie Médecine
NAIL BILLAUD Sandrine Immunologie Pharmacie
PAILHORIES Hélène Bactériologie-virologie Médecine
PAPON Xavier Anatomie Médecine
PASCO-PAPON Anne Radiologie et imagerie médicale Médecine
PECH Brigitte Pharmacotechnie Pharmacie
PENCHAUD Anne-Laurence Sociologie Médecine
PIHET Marc Parasitologie et mycologie Médecine
PY Thibaut Médecine Générale Médecine
RINEAU Emmanuel Anesthésiologie réanimation Médecine
RIOU Jérémie Biostatistiques Pharmacie
ROGER Emilie Pharmacotechnie Pharmacie
SAVARY Camille Pharmacologie-Toxicologie Pharmacie
SCHMITT Françoise Chirurgie infantile Médecine
SCHINKOWITZ Andréas Pharmacognosie Pharmacie
SPIESSER-ROBELET Laurence Pharmacie Clinique et Education Thérapeutique
Pharmacie
TANGUY-SCHMIDT Aline TESSIER-CAZENEUVE Christine
Hématologie ; transfusion Médecine Générale
Médecine Médecine
TRZEPIZUR Wojciech Pneumologie Médecine
AUTRES ENSEIGNANTS
AUTRET Erwan Anglais Médecine
BARBEROUSSE Michel Informatique Médecine
BRUNOIS-DEBU Isabelle Anglais Pharmacie
CHIKH Yamina Économie-Gestion Médecine
FISBACH Martine Anglais Médecine
O’SULLIVAN Kayleigh Anglais Médecine
PAST
CAVAILLON Pascal Pharmacie Industrielle Pharmacie
LAFFILHE Jean-Louis Officine Pharmacie
11
MOAL Frédéric Pharmacie clinique Pharmacie
ATER
FOUDI Nabil Physiologie Pharmacie
KILANI Jaafar Biotechnologie Pharmacie
WAKIM Jamal Biochimie et chimie biomoléculaire Médecine
AHU
BRIS Céline Biochimie et biologie moléculaire Pharmacie
CHAPPE Marion Pharmacotechnie Pharmacie
LEBRETON Vincent Pharmacotechnie Pharmacie
CONTRACTUEL
VIAULT Guillaume Chimie organique Pharmacie
mise à jour 04/02/2019
12
Sommaire
Table des matières
TABLE DES ILLUSTRATIONS ... 13
TABLE DES TABLEAUX ... 14
TABLE DES ANNEXES ... 15
LISTE DES ABREVIATIONS ... 16
INTRODUCTION - ANATOMIE DU SEIN ET CANCER ... 17
I- LE CANCER DU SEIN ... 19
1. Epidémiologie ... 19
2. Les différents types de cancer du sein ... 20
2.1. Classification tissulaire ... 20
2.2. Classification moléculaire ... 22
2.3. Cancer hormonodépendant ... 23
3. Les facteurs de risque... 24
3.1. Les facteurs ne donnant pas lieu à un dépistage spécifique ... 25
3.2. Les facteurs de risque donnant lieu à un dépistage spécifique ... 25
4. Les facteurs pronostiques ... 26
5. Le dépistage organisé ... 26
6. Prise en charge en France ... 28
6.1. Diagnostic ... 28
6.2. Stratégie thérapeutique ... 29
II- L’HORMONOTHERAPIE ... 30
1. Les différents traitements sur le marché ... 30
1.1. La suppression ovarienne ... 31
1.2. Les anti-œstrogènes : le tamoxifène ... 32
1.3. Les anti-aromatases ... 34
2. Rôle du pharmacien concernant ces effets indésirables ... 40
3. Quelle hormonothérapie et pour combien de temps ? ... 45
II- L’EDUCATION THERAPEUTIQUE DES PATIENTES (ETP) ... 48
1. Qu’est-ce que l’ETP ? ... 48
2. Structuration de l’ETP ... 49
3. Pourquoi ce projet d’ETP en hormonothérapie ? ... 50
4. Les séances mises en place ... 51
5. Résultats ... 52
5.1. Séances de diagnostic éducatif ... 52
5.2. Séances d’évaluation... 56
6. Discussion ... 60
CONCLUSION ... 61
BIBLIOGRAPHIE ... 62
ANNEXES ... 66
13
Table des illustrations
FIGURE 1 :ANATOMIE DU SEIN ... 17
FIGURE 2 :LES GANGLIONS LYMPHATIQUES ... 18
FIGURE 3 :EVOLUTION DE L’INCIDENCE ET DE LA MORTALITE PAR CANCER DU SEIN DE 1980 A 2018 EN FRANCE METROPOLITAINE ... 19
FIGURE 4 :CANCER CANALAIRE IN SITU ET INFILTRANT ... 21
FIGURE 5 :SCHEMA D’ORGANISATION DU PROGRAMME DE DEPISTAGE ORGANISE DU CANCER DU SEIN ... 26
FIGURE 6 :EVOLUTION DU TAUX BRUT DE PARTICIPATION NATIONALE AU PROGRAMME DE DEPISTAGE ORGANISE DU CANCER DU SEIN DEPUIS 2003 ... 27
FIGURE 7 :LOGO OCTOBRE ROSE ... 28
FIGURE 8 :COMPARAISON EFFICACITE TAMOXIFENE SEUL ET ANTI-AROMATASES SEULS ... 45
FIGURE 9 :COMPARAISON EFFICACITE ANTI-AROMATASE SEUL ET TAMOXIFENE PUIS ANTI-AROMATASES ... 46
FIGURE 10 :COMPARAISON EFFICACITE TAMOXIFENE SEUL ET TAMOXIFENE PUIS ANTI-AROMATASE ... 47
FIGURE 11 :REPARTITION DES PATIENTES EN FONCTION DES MOLECULES UTILISEES ... 53
FIGURE 12 :POURCENTAGE DE PATIENTES AYANT REÇU UN TRAITEMENT PRECEDENT ... 53
FIGURE 13 :REPARTITION DES PATIENTES CONCERNANT L’OBSERVANCE ... 54
FIGURE 14 :PRINCIPAUX EFFETS INDESIRABLES DECRITS PAR LES PATIENTES ... 55
FIGURE 15 :REPARTITION DES PATIENTES EN FONCTION DE LA FREQUENCE DE PRATIQUE D’UNE ACTIVITE PHYSIQUE ... 55
FIGURE 16 :REPARTITION DES PATIENTES EN FONCTION DU TABAGISME ... 56
FIGURE 17 :REPONSE DES PATIENTES A LA QUESTION :« VOUS ETES-VOUS SENTIE ECOUTEE ? » ... 58
FIGURE 18 :REPONSES DES PATIENTES A LA QUESTION :« AVEZ-VOUS PU POSER TOUTES LES QUESTIONS QUE VOUS SOUHAITIEZ ? » ... 58
FIGURE 19 :REPONSES DES PATIENTES A LA QUESTION :« CET ENTRETIEN VOUS A-T-IL ETE UTILE ? » ... 59
FIGURE 20 :REPONSES DES PATIENTES A LA QUESTION :« LA DUREE DES ENTRETIENS VOUS A-T-ELLE SEMBLE ADAPTEE ? » ... 59
14
Table des tableaux
TABLEAU 1 :CLASSIFICATION DES FACTEURS DE RISQUES SELON LA HAS ... 25
TABLEAU 2 :QUELQUES EFFETS INDESIRABLES DU TAMOXIFENE ... 33
TABLEAU 3 :QUELQUES EFFETS INDESIRABLES DU LETROZOLE ... 36
TABLEAU 4 :QUELQUES EFFETS INDESIRABLES DE L’ANASTROZOLE ... 38
TABLEAU 5 :QUELQUES EFFETS INDESIRABLES DE L’EXEMESTANE ... 39
TABLEAU 6 :INTERACTIONS ENTRE PHYTOTHERAPIE ET HORMONOTHERAPIE ... 43
TABLEAU 7 :CONDUITE A TENIR FACE AUX EFFETS INDESIRABLES DE L’HORMONOTHERAPIE ... 44
15
Table des annexes
ANNEXE 1 :TRAME DES ENTRETIENS DE DIAGNOSTIC EDUCATIF... 66
ANNEXE 2 :SILHOUETTE PERMETTANT AUX PATIENTES DE SITUER LEURS GENES ... 69
ANNEXE 3 :PLAQUETTE POUR LE RECRUTEMENT DES PATIENTES AU COMPTOIR ... 70
ANNEXE 4 :TRAME DE L’ENTRETIEN D’EVALUATION ... 71
ANNEXE 5 :QUESTIONNAIRE D’AUTO-EVALUATION DES ENTRETIENS ... 72
16
Liste des abréviations
EBCTCG Early Breast Cancer Trialists' Collaborative Group
ETP Education thérapeutique du patient
HAS Haute autorité de santé
HPST Hôpital, Patients, Santé, Territoires
ICO Institut de cancérologie de l’ouest
OMS Organisation mondiale de la santé
RCP Réunion de concertation pluridisciplinaire
RE Récepteurs aux œstrogènes
RH Récepteurs hormonaux
RP Récepteurs à la progestérone
17
Introduction - Anatomie du sein et cancer
Le sein est constitué de différents tissus : des glandes mammaires, formées de lobules et de canaux, et du tissu de soutien, lui-même constitué de tissu graisseux, de fibres et de vaisseaux. Les lobules des glandes mammaires permettent la production de lait en période d’allaitement. Les canaux quant à eux, sont chargés du transport du lait vers le mamelon. (Figure 1). Le développement de la glande mammaire est intimement lié aux hormones sexuelles synthétisées au niveau des ovaires. Ces hormones sont les œstrogènes et la progestérone. (1)
Figure 1 : Anatomie du sein (2)
Les seins contiennent également des vaisseaux sanguins et lymphatiques. Le système lymphatique est composé des vaisseaux lymphatiques et des ganglions, situés principalement au niveau axillaire, au- dessus et en dessous de la clavicule et autour du sternum (ganglions mammaires internes). (Figure 2) Les cellules cancéreuses sont capables de synthétiser des facteurs de croissance stimulant la formation de néo-réseaux lymphatiques mais aussi vasculaires. Ces néo-vaisseaux permettent alors d’accroitre les échanges nutritionnels et respiratoires avec les cellules tumorales, ce qui aboutit à leur développement et à leur prolifération. Cette adaptation des tissus avoisinant la tumeur est responsable de la propagation métastatique. (3)
18 Figure 2 : Les ganglions lymphatiques (1)
Un cancer du sein est défini par le développement d’une tumeur maligne au niveau du sein. Il en existe différents types : in situ lorsque les cellules cancéreuses se situent uniquement au niveau mammaire, et infiltrant lorsque les cellules cancéreuses se sont étendues aux tissus voisins. Les cancers du sein les plus fréquents sont les adénocarcinomes, qui se sont développés à partir des cellules épithéliales de la glande mammaire. Généralement, ces cancers sont issus des cellules des canaux, plus rarement des cellules lobulaires.(2)
Une fois le diagnostic de cancer du sein posé, les patientes enchainent les soins dont la chirurgie, la chimiothérapie et la radiothérapie. Ces prises en charge sont lourdes et s’étendent sur une période généralement longue. Pendant cette période de traitement, les patientes ont un suivi très régulier avec l’oncologue et le reste du corps médical : généraliste, infirmiers, autres médecins, etc.
Lorsque qu’elles sont en rémission, un traitement par hormonothérapie est instauré, afin de limiter le risque de récidive. Les consultations de suivi sont alors beaucoup plus espacées ; de nombreuses patientes ont rapporté « un sentiment d’abandon » au comptoir. Beaucoup se sont senties
« délaissées », « perdues avec leur traitement » et ne savaient pas comment gérer les effets indésirables engendrés par l’hormonothérapie. Ces femmes ne savaient pas « vers qui se tourner en cas de questionnement ». Le projet d’éducation thérapeutique des patientes sous hormonothérapie est né de ce constat, avec pour objectifs : « aider les patientes à mieux gérer leur traitement » et les accompagner dans « l’après cancer » ; le tout en impliquant véritablement le pharmacien dans ce parcours.
19
I- Le cancer du sein 1. Epidémiologie
En France, le cancer du sein est le cancer le plus fréquent chez la femme, il se place devant le cancer colorectal et le cancer du poumon. Il représente 31,8% de la totalité des cancers incidents chez la femme et 14,8% des cancers incidents tous sexes confondus. 58 459 nouveaux cas ont été recensés en France métropolitaine en 2018. C’est également le cancer associé à la plus forte mortalité, même si son incidence et sa mortalité ne cessent de diminuer depuis quelques années. En 2018, 12 146 décès sont estimés imputables au cancer du sein ; ce qui représente 14% des décès féminins dus au cancer et près de 8% des décès par cancer tous sexes confondus. L’âge médian au moment du décès est de 74 ans.(4) (5)
L’incidence du cancer du sein a connu une nette augmentation entre 1980 et 2000 mais cette dernière diminue depuis 2005 pour les femmes de 55 à 69 ans. Cette diminution est décrite dans de nombreux pays occidentaux. L’incidence des cancers du sein chez les femmes jeunes, soit avant 40 ans, mais également chez les femmes de plus de 80 ans, ne cessent quant à elles d’augmenter. Plusieurs hypothèses permettant l’explication de cette évolution ont été émises ; celle du dépistage renforcé et celle de la nette diminution de prescription des traitements substitutifs de la ménopause sont les plus probables.
La mortalité quant à elle a diminué de manière significative entre 1990 et 2012. Entre 2005 et 2012, elle diminue de -1,5% en moyenne. Cela s’explique par les avancées majeures des thérapeutiques mais également par les diagnostics à des stades précoces (sensibilisation des femmes et des professionnels augmentées et meilleures techniques d’imagerie). (Figure 3)
Figure 3 : Evolution de l’incidence et de la mortalité par cancer du sein de 1980 à 2018 en France métropolitaine (3)
20 La France se situe parmi les taux de survie les plus élevés en Europe ; elle est proche de celles estimées au Canada (87 % à 5 ans) (6) et aux Etats-Unis (90,2 % à 5 ans) (7). Son taux d’incidence : 89,7, est supérieur au taux d’incidence moyen européen : 69,9. Le taux de survie nette est le taux de survie
« hypothétique » correspondant au taux de survie observé en admettant que la seule cause possible de décès de la personne est sa maladie cancéreuse. Elle dépend de l’âge des patientes. A cinq ans après le diagnostic, il est de 92 % chez les femmes de 45 à 74 ans, de 91 % chez les femmes de 15 à 44 ans et de 75 % chez les personnes de plus de 75 ans.
50% des cancers du sein sont diagnostiqués entre 50 et 69 ans, 28% le sont après 69 ans.
Les femmes ciblées par le dépistage actuellement organisé en France ont entre 50 et 74 ans. Ce sont celles qui présentent le plus fort taux de cancer localisé. Les cancers diagnostiqués à un stade plus avancé sont plus fréquemment diagnostiqués chez les femmes plus âgées. (8)
Au niveau international, le taux d’incidence standardisé sur la population mondiale le plus élevé est retrouvé en Afrique centrale. Le taux de mortalité standardisé sur la population mondiale le plus faible est retrouvé en Asie de l’Est, et le plus élevé en Afrique de l’Ouest.
Le cancer du sein est particulièrement fréquent et meurtrier dans les pays en voie de développement où, dans la grande majorité des cas, il est diagnostiqué assez tardivement.
Chez l’homme, le cancer du sein ne représente approximativement qu’1% des cancers ; cependant, il est très souvent de mauvais pronostic. D’après une étude menée en 2014 sur les facteurs de risque environnementaux, le risque de cancer du sein chez l’homme est plus élevé chez les mécaniciens de véhicules à moteur, exposés à des produits pétroliers, mais aussi chez les peintres en bâtiment, exposés aux solvants (benzène, white-spirit, solvants chlorés) ou aux additifs de peintures. (7)
2. Les différents types de cancer du sein 2.1. Classification tissulaire
Il faut distinguer les cancers in situ des cancers infiltrants. (1)
21 2.1.1. Cancer in situ
Les cancers ou carcinomes in situ sont des cancers dont les cellules cancéreuses sont uniquement retrouvées à l’intérieur des canaux ou des lobules. La tumeur ne franchit pas la membrane basale, elle n’infiltre pas les tissus avoisinants. Le plus fréquent de ces carcinomes est le cancer canalaire in situ, également appelé carcinome canalaire in situ ; il représente 90 à 95% des cancers du sein non invasifs.
La maladie de Paget du mamelon est un adénocarcinome du sein. Il s’agit d’un cancer canalaire, non invasif, touchant les canaux galactophores les plus proches du mamelon. Ce carcinome est caractérisé par des lésions mamelonnaires évoquant un eczéma : rougeur du mamelon et de l’aréole, suintement, croûte, allant jusqu’à la desquamation. Ces symptômes ne disparaîtront qu’après une chirurgie.
Le cancer lobulaire in situ est quant à lui beaucoup plus rare, il ne représente qu’environ 10% des cancers in situ. Il n’est pas considéré comme précurseur direct de cancer mais comme un facteur de risque de développer un cancer du sein.
2.1.2. Cancer infiltrant
Le cancer est caractérisé comme infiltrant lorsque les cellules cancéreuses ne sont plus confinées à un seul tissu, lorsqu’elles ont infiltré les tissus voisins. Dans la majorité des cas, les cancers infiltrants sont initialement canalaires. (Figure 4)
Ces cancers peuvent ensuite se propager via les ganglions et le système lymphatique. Les ganglions les plus souvent atteints sont les ganglions axillaires.
Le pronostic de ces cancers sera alors moins bon.
Figure 4 : Cancer canalaire in situ et infiltrant (1)
22 2.1.3. Les formes rares de carcinomes
Ces formes de cancers invasifs ne représentent qu’1 à 2% des cas.
Le carcinome médullaire est majoritairement diagnostiqué chez les femmes jeunes, de moins de 50 ans. Il est de meilleur pronostic que le carcinome canalaire infiltrant. Son diagnostic entraîne la suspicion d’une origine génétique. Il représente 1% des carcinomes infiltrants.
Le carcinome mucineux ou carcinome colloïde est rare (2% des cancers infiltrants). Il est souvent diagnostiqué chez les femmes entre 60 et 70 ans. Les cellules cancéreuses sécrètent du mucus. Le pronostic de ce cancer est meilleur que celui d’autres cancers infiltrants.
Le carcinome tubuleux est majoritairement retrouvé chez des femmes de plus de 55 ans. Il doit son nom à la forme des cellules cancéreuses. Généralement, il est de petite taille et il ne se propage que rarement au système lymphatique, malgré sa nature invasive.
Le carcinome papillaire peut ne pas être infiltrant. Il est plutôt retrouvé chez les femmes âgées. Le pronostic est plus favorable que celui du carcinome canalaire infiltrant.(2)
2.2. Classification moléculaire
Le cancer du sein est le premier cancer à avoir bénéficié d’un ciblage thérapeutique via les récepteurs hormonaux (RH) : aux œstrogènes (RE) ou à la progestérone (RP), et le récepteur à activité tyrosine kinase HER2. Ces derniers sont des facteurs pronostics mais également prédictifs de l’efficacité d’une thérapie ciblée. Les cancers peuvent être œstrogènes-dépendants, ils expriment alors des récepteurs aux œstrogènes et seront traités par des molécules ciblant la voie de ces hormones, comme l’hormonothérapie. Ils peuvent également sur-exprimer l’oncogène HER2 et seront dans ce cas traités par des anticorps monoclonaux comme le trastuzumab. Ce gène code pour un récepteur à activité tyrosine kinase HER2/neu, favorisant la croissance cellulaire. (9) Certains cancers sont dits « triple négatifs », c’est-à-dire qu’ils n’expriment aucun des récepteurs nommés ci-dessus. (10) (11)
Le statut de HER2 doit être impérativement déterminé au moment du diagnostic, par immunohistochimie la plupart du temps. Ce statut détermine la prise en charge par une thérapie ciblée en traitement adjuvant lorsque le gène est amplifié. Le statut de HER2 peut différer entre la tumeur principale et les métastases, il sera donc intéressant de réaliser une biopsie de la lésion métastatique en plus de la tumeur primaire. (12)
23
2.3. Cancer hormonodépendant
Un cancer est considéré comme hormonodépendant ou hormonosensible lorsque les hormones jouent un rôle dans la prolifération des cellules tumorales. Dans le cas du cancer du sein, les hormones qui entrent en jeu sont les œstrogènes. Le caractère hormono-dépendant de la tumeur sera déterminé grâce à une biopsie de la lésion cancéreuse. (13) (14)
Les œstrogènes naturels sont des hormones stéroïdes ; on distingue l’estradiol, l’estrone et l’estriol.
Avant la ménopause, les œstrogènes sont synthétisés au niveau des ovaires ou du placenta à partir des androgènes, eux-mêmes issus de la transformation du cholestérol.
Après la ménopause, les androgènes circulants sont convertis en œstrogènes au niveau du foie, des muscles, des surrénales, du tissu adipeux et du tissu mammaire.
Cette biotransformation dépend d’un complexe enzymatique : celui de l’aromatase.
Les œstrogènes présentent un rôle sexuel mais jouent un rôle prépondérant dans d’autres mécanismes tels que le métabolisme et le remodelage osseux. Leur déficit à la ménopause peut conduire à des pathologies telles que l’ostéoporose ou à un risque cardiovasculaire majoré. L’ostéoporose est beaucoup plus fréquente chez les femmes. En effet, le déficit en œstrogènes entraîne une accélération de la perte de tissu osseux, conduisant à un risque de fracture plus élevé.
Aux alentours de 50 ans, le fonctionnement ovarien se met au repos, c’est ce qui caractérise la ménopause. Cette dernière s’accompagne le plus souvent de troubles du climatère : bouffées de chaleur, suées nocturnes, maux de tête, sensation de fatigue, troubles du sommeil, douleurs majoritairement articulaires, sécheresse vaginale, troubles urinaires, irritabilité. Certains sont transitoires, d’autres beaucoup plus durables dans le temps. Ces troubles correspondent aux effets indésirables les plus observés en cas de prise d’hormonothérapie. (15) (13)
24
3. Les facteurs de risque
Les principaux facteurs de risque connus de ce cancer sont l’âge, la prédisposition génétique, un antécédent personnel de pathologie mammaire et/ou d’irradiation thoracique médicale à forte dose.
D’autres facteurs de risque sont suspectés comme les expositions hormonales endogènes (puberté précoce (avant 12 ans), ménopause tardive (après 55 ans), nombre d’enfants, âge à la première grossesse, allaitement, surpoids/obésité…) et exogènes (traitement hormonal de la ménopause, travail de nuit, perturbateurs endocriniens comme les pesticides et les parabènes (15), exposition aux radiations notamment médicales comme traitement d’un cancer dans l’enfance). (16) Sans oublier les mutations génétiques héréditaires, responsables de 5 à 10% des cancers du sein.
Le traitement de l’infertilité actuel n’augmenterait pas le risque de cancer du sein.
Certains facteurs personnels comme le diabète, la consommation d’alcool ou de tabac, le surpoids ou l’obésité et la grande taille sont également considérés comme facteurs de risque de cancer du sein.
Selon le rapport du CIRC, 37% des cancers du sein seraient imputables à ces facteurs de risque modifiables. La poursuite des efforts de prévention face à ces facteurs de risque, communs à de nombreuses pathologies cancéreuses, dont l’obésité, la sédentarité, le tabagisme et l’alcoolisme, apparaît donc essentielle.
Deux situations sont alors à distinguer : d’une part, les femmes présentant certains facteurs de risque, qui bénéficieront d’un suivi plus approfondi, avec un dépistage spécifique et d’autre part, les femmes ne présentant aucun de ces facteurs, pour lesquelles le dépistage classique suffira. Ce dernier consiste en une mammographie tous les deux ans.
25
3.1. Les facteurs ne donnant pas lieu à un dépistage spécifique
La HAS a conclu qu’il n’était pas nécessaire de mettre en place un dépistage pour les seuls facteurs de risque suivants :
Tableau 1 : Classification des facteurs de risques selon la HAS (17)
Cas n° 1 : Après étude, le facteur de risque pressenti n’est pas associé à la survenue du cancer du sein.
Consommation d’aliments et de boissons (café, thé, tomate, pamplemousse) - Tabagisme - Prothèses en silicone
Cas n° 2 : Après étude, il n’existe pas de preuve robuste du lien entre le facteur de risque analysé et la survenue du cancer du sein.
Taille des seins - Densité mammaire élevée après la ménopause (seule une échographie mammaire complémentaire peut être réalisée par le radiologue devant des difficultés d’interprétation de la mammographie en raison de l’effet masquant de la densité sur la détection des lésions). - Port de soutien-gorge - Déodorant - Travail de nuit
Cas n° 3 : Après étude, le facteur de risque est associé à une augmentation modeste ou modérée du risque de survenue du cancer du sein.
Lésions mammaires prolifératives non atypiques et lésions non prolifératives - Consommation d'alcool - Consommation de viandes grasses - Ne pas avoir mené de grossesse à terme - Grossesse tardive - Traitement hormonal substitutif - Prise de contraception hormonale - Diabète de type 2 - Obésité
3.2. Les facteurs de risque donnant lieu à un dépistage spécifique
Après étude des facteurs de risque, la HAS a décidé de mettre en place un dépistage spécifique en cas de (17) :
• Antécédent personnel de cancer du sein ou de carcinome canalaire in situ
• Antécédent d’irradiation thoracique (antécédent d’irradiation thoracique médicale à haute dose pour maladie de Hodgkin)
• Antécédent familial de cancer du sein avec score d’Eisinger d’indication de la consultation d’oncogénétique ≥ 3 ET recherche initiale de mutation des gènes BRCA1 et BRCA2 non informative dans la famille (c’est-à-dire en l’absence d’identification d’une mutation BRCA1 ou 2) OU recherche initiale non réalisée
• Antécédent personnel d’hyperplasie canalaire atypique, d’hyperplasie lobulaire atypique ou de carcinome lobulaire in situ.
26
4. Les facteurs pronostiques
Ils sont propres à chaque personne, le risque de rechute diffère d’une personne à l’autre, d’un cancer à l’autre. Le traitement sera alors personnalisé en fonction de l’âge, du poids, de la présence d’une mutation génétique ou non, de l’analyse anatomopathologique de la tumeur, du grade de la tumeur, du stade du cancer, du caractère hormonodépendant ou non.
Le cancer du sein bénéficie d’un pronostic à long terme favorable, corrélé avec la précocité du diagnostic et de la prise en charge. Le taux de survie nette à cinq ans est de 88% pour les cancers diagnostiqués entre 2005 et 2010. (18) La détermination des taux de récepteurs à l’estradiol et/ou à la progestérone dans la tumeur ou dans les métastases, avant de débuter le traitement, aurait une valeur pronostic.
5. Le dépistage organisé
Il s’agit d’un programme national initié par les pouvoirs publics en 2004. Il concerne aujourd’hui l’ensemble du territoire français. Toutes les femmes âgées de 50 à 74 ans reçoivent, de manière systématique, une invitation à bénéficier, tous les deux ans, d’un examen clinique mammaire accompagné d’une mammographie. (19) Les femmes concernées sont à risque moyen, elles ne présentent aucun facteur de risque significatif autre que leur âge. (Figure 5).
L’objectif de ce dépistage est de diminuer la mortalité par cancer du sein en diagnostiquant les cancers à un stade plus précoce ; cela permet alors d’utiliser des traitements plus efficaces et surtout moins agressifs. La mammographie est réalisée par un radiologue agréé et fait l’objet d’une double lecture.
La mammographie et l’examen clinique sont pris en charge à 100% par l’Assurance maladie, sans avance de frais. Cependant, dès qu’une anomalie est détectée, des examens complémentaires seront réalisés. Or, ces derniers ne sont pas pris en charge, ce qui crée des inégalités.
Figure 5 : Schéma d’organisation du programme de dépistage organisé du cancer du sein (22)
27 Les invitations sont envoyées à près de dix millions de femmes. En 2016, le taux de participation s’élevait à 50,3% ; en 2017 il s’élevait à 49,9%, soit plus de 2 540 000 femmes. Ce taux connaît d’importantes disparités selon les régions ainsi que les départements, ainsi il varie de 30 et 60%. De manière générale, une baisse du taux de participation est observable depuis 2014, et ce, pour toutes les tranches d’âge exceptée celle des 70-74 ans. (20) (Figure 6). Afin d’expliquer ce fait, plusieurs hypothèses ont été émises : augmentation des « dépistages individuels » ? impact des polémiques nationale et internationale concernant l’efficacité du dépistage du cancer du sein ? baisse de l’offre locale en sénologie ? (21) L’objectif européen, initialement de 70%, reste loin d’être atteint.
Il faut cependant noter qu’en plus de ce dépistage organisé, 10% des femmes françaises ciblées auraient recours à un dépistage individuel.
Figure 6 : Evolution du taux brut de participation nationale au programme de dépistage organisé du cancer du sein depuis 2003 (20)
Les femmes présentant d’autres facteurs de risque et étant par conséquent plus à risque ne seront pas éligibles et nécessiteront un suivi spécifique (suivi gynécologique, examens spécifiques, consultations d’oncogénétique pour les femmes à risque très élevé).
Depuis 1994, une grande campagne de mobilisation nationale portée par la Ligue contre le cancer a lieu en France chaque année du 1er au 31 octobre. Cette dernière, nommée « Octobre rose » a pour but de convaincre les femmes du rôle primordial du dépistage précoce et ainsi faire progresser la recherche. (Figure 7). Elle est organisée par l’association « Le Cancer du Sein, parlons-en ! » et est soutenue par de très nombreux professionnels de santé : pharmaciens, médecins-oncologues, infirmiers, etc. mais aussi des personnalités, des chanteurs, des représentants de marques cosmétiques.
28 Figure 7 : Logo octobre rose
Ces dernières années, le nombre d’actions mises en place a considérablement augmenté. En effet, de nombreuses marques très connues, de prêt-à-porter par exemple, ont créé des collections capsules dont une partie ou la totalité des bénéfices sont reversés à des associations de patients ou de recherche.
D’autre part, dans de nombreuses villes en France, des marches solidaires sont organisées afin de sensibiliser au dépistage. (22)
6. Prise en charge en France
6.1. Diagnostic
Comme présenté plus haut, plus le diagnostic et plus la prise en charge sont précoces, plus le pronostic est favorable. (23)
Le médecin traitant peut jouer un rôle prépondérant dans le diagnostic clinique. Un nodule palpable, un écoulement mamelonnaire unipore ou encore une maladie de Paget du mamelon sont des signes d’alerte. Un cancer du sein est suspecté de manière systématique devant un nodule indolore, régulier, de consistance dure et comme implanté dans le sein. Plus le nodule est irrégulier et potentiellement associé à un écoulement mamelonnaire, une adénopathie axillaire sus ou sous-claviculaire ou une rétraction cutanée, plus ce nodule est suspect. (24)
29 Devant une suspicion de cancer du sein, le médecin doit rechercher spécifiquement :
• des signes indiquant le potentiel évolutif de la tumeur (évolution de la symptomatologie et présence de signes inflammatoires locaux)
• l'éventuelle prise de traitement œstroprogestatif ou progestatif (y compris le stérilet hormonal)
• le statut ménopausique
• les antécédents familiaux de cancer du sein ou de l’ovaire. Les mutations BRCA1 et BRCA2 sont recherchées lors d’une consultation d’oncogénétique. En cas de découverte d’une telle mutation, une information pour la patiente et sa famille est indispensable.
• des signes pouvant être évocateurs de processus métastasiques (aux niveaux osseux, hépatique, pulmonaire, cérébral)
Toute suspicion diagnostique de cancer du sein implique forcément une documentation histologique ainsi qu’un avis spécialisé sans délai.
L’examen anatomopathologique recherche plus précisément l’expression des récepteurs hormonaux (aux œstrogènes et/ou à la progestérone), indicateurs de la sensibilité ou non à l’hormonothérapie ; mais également les récepteurs de l’HER2, indicateurs de la sensibilité à une thérapie ciblant ces derniers.
6.2. Stratégie thérapeutique
La stratégie thérapeutique est décidée en accord avec la patiente, l’oncologue et le médecin généraliste lors d’une réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP). Cette décision collégiale est présentée en consultation d’annonce. (23)
La prise en charge d’un cancer du sein comprend la chirurgie, la radiothérapie, la chimiothérapie à base de thérapie ciblée lorsque le cancer est HER2 positif, et d’hormonothérapie lorsque le cancer est hormonodépendant.
La chirurgie tumorale est une mastectomie de préférence partielle. Elle est totale lorsque la chirurgie partielle n’est pas envisageable. La chirurgie tumorale est associée à une chirurgie ganglionnaire lorsque le cancer est infiltrant. Les pièces opératoires font l’objet d’un examen anatomopathologique, qui confirme la malignité de la tumeur et surtout qui permet de déterminer la réponse aux traitements.
La radiothérapie peut être locale par irradiation mammaire ou de la paroi thoracique, après mastectomie totale, ou ganglionnaire (uniquement pour les cancers infiltrants).
30 Le traitement par chimiothérapie ou thérapie ciblée est débuté dans les trois à six semaines après la chirurgie. Les molécules utilisées en chimiothérapie dans la prise en charge d’un cancer du sein sont des molécules appartenant à la famille des anthracyclines et des taxanes, sauf en cas de contre- indication. La thérapie ciblant le récepteur HER2 n’aura une indication qu’en association avec une chimiothérapie sans anthracycline et lorsque le statut HER2 positif est démontré.
Cette stratégie thérapeutique est présentée en consultation d’annonce. Cette dernière est cadrée par la circulaire n° DHOS/SDO/2005/101 du 22 février 2005 ; il s’agit d’une mesure du Plan Cancer 2003- 2007 organisé par la Ligue contre le Cancer.
L’objectif de ces recommandations concernant l’annonce d’un cancer est d’apporter un accompagnement approprié au patient ainsi qu’à ses proches afin de rendre l’entrée dans la maladie la plus supportable possible. Cette consultation doit permettre au patient de récupérer les informations dont il a besoin de la part du soignant. Elle a pour objectif de définir une perspective pour le patient, elle permet de structurer l’avenir. C’est à la fois un temps médical, un temps d’accompagnement soignant, un temps de soutien et un temps d’articulation avec la médecine de ville. (25)
A ce jour, la consultation d’annonce est uniquement réalisée par des médecins, spécialistes et/ou généralistes ; le pharmacien n’y est pas impliqué. Dans la très grande majorité des cas, c’est le patient ou un aidant qui annonce lui-même sa maladie au pharmacien. Pourtant, le pharmacien d’officine a lui aussi un rôle d’écoute et de soutien très important à adopter au comptoir. En effet, il doit délivrer les ordonnances de traitements et de soins de support, qui peuvent être nombreuses pour les patients atteints de cancer. Il est essentiel que le patient se sente écouté, épaulé et sache que le pharmacien est un véritable professionnel de santé et qu’il a des compétences dans ce domaine.
II- L’hormonothérapie
1. Les différents traitements sur le marché
L’hormonothérapie dans la prise en charge du cancer du sein est historiquement la première thérapie ciblée. Son objectif est de supprimer les effets des hormones physiologiques sur la croissance des tumeurs hormonodépendantes en antagonisant ou en diminuant l’expression du récepteur ERα présent dans 70 à 80 % des cancers du sein.
Cependant, environ 30 % des tumeurs exprimant le récepteur ERα seront hormono-résistantes.
31 Le but de l’hormonothérapie est l’amélioration du pronostic. Elle est aussi importante que la chimiothérapie ou la radiothérapie. La durée optimale est de cinq ans la plupart du temps, elle peut être prolongée à dix ans dans certains cas, lorsque le risque de rechute est très important. A l’arrêt, il existe un effet carry-over, c’est-à-dire que la diminution du risque de récidive perdure dans le temps à la fin de l’hormonothérapie. A ce jour, la durée de la persistance d’efficacité n’est pas connue. En revanche, la supériorité d’efficacité des anti-aromatases, par rapport au tamoxifène est démontrée.
Il existe différentes techniques de blocage hormonal : le blocage de la synthèse des œstrogènes via l’ovariectomie ou l’irradiation ovarienne, via les analogues de LH-RH ou encore avec les inhibiteurs de l’aromatase (uniquement chez les femmes ménopausées) ; ou le blocage de l’action des œstrogènes via des antagonistes comme le tamoxifène. (26)
1.1. La suppression ovarienne
La suppression ovarienne peut être obtenue de plusieurs manières : par ovariectomie, par irradiation ovarienne ou à l’aide d’agonistes de LH-RH. (27)
L’ovariectomie est une chirurgie aboutissant à une suppression ovarienne immédiate. Actuellement, la technique la plus utilisée est la coelioscopie. Elle permet de réduire de manière notable la mortalité, la morbidité et la durée d’hospitalisation. (28)
La radiothérapie est une alternative à la chirurgie. Un repérage échographique préalable à la radiothérapie est nécessaire, afin de connaître précisément la position des ovaires. L’arrêt du fonctionnement ovarien survient dans un délai de trois à six mois suivant l’irradiation. La dose efficace est comprise entre quinze et vingt Grey équivalents ; cette dose est susceptible d’être augmentée chez les femmes de moins de 35 ans. La radiothérapie est généralement bien tolérée puisque les doses délivrées sont faibles. Les femmes peuvent cependant ressentir des troubles digestifs, dus à l’irradiation pelvienne. A long terme, le risque de cancer de l’endomètre est augmenté ; ce risque a surtout été décrit en cas d’association irradiation-tamoxifène. (29)
A ce jour, aucune étude n’a démontré la supériorité d’une des techniques de suppression ovarienne définitive. L’irradiation ovarienne reste peu réalisée en France, contrairement à la Grande-Bretagne (60% des suppressions ovariennes). (30)
32 Les agonistes de LH-RH sont habituellement utilisés en gynécologie, le plus souvent dans des indications non cancérologiques comme l’endométriose, les fibromes utérins, la puberté précoce et encore l’infécondité féminine. Les molécules les plus utilisées sont la goséréline (Zoladex®), la leuproréline (Enantone®) et la triptoréline (Décapeptyl®). La goséréline reste la molécule la plus prescrite en cancérologie sénologique.
Ces agonistes vont saturer les récepteurs de la LH-RH au niveau hypophysaire, à l’origine de l’inhibition de la stimulation ovarienne et stoppant alors sa fonction. La diminution de l’œstradiolémie est alors équivalente à celle obtenue par ovariectomie. Ils présentent un intérêt en situation métastatique, notamment grâce à leur pouvoir oncostatique. Ils entraînent une diminution du risque de récidive, mais également de la mortalité, lorsqu’ils sont utilisés en traitement adjuvant chez la femme non ménopausée présentant un cancer du sein non métastatique hormonodépendant. Cette diminution est majorée lorsque les agonistes de LH-RH sont associés au tamoxifène ou à un inhibiteur de l’aromatase.
(31)
Ces molécules présentent un avantage considérable par rapport aux autres techniques : leur action est transitoire et réversible.
Les effets secondaires possibles sont ceux liés à la castration : bouffées de chaleur, sécheresse vaginale, diminution de la libido, maux de tête, déminéralisation osseuse et troubles cardiovasculaires.
Plus la suppression ovarienne sera longue, plus les effets indésirables seront gênants.
1.2. Les anti-œstrogènes : le tamoxifène
1.2.1. Mécanisme d’action
Le tamoxifène est un modulateur spécifique des récepteurs aux œstrogènes Erα et Erβ. (32) Il présente une action anti-hormonale, majoritairement anti-œstrogène, dépendante du tissu où il intervient. Il présente un effet antagoniste fort des récepteurs aux œstrogènes au niveau mammaire. Ainsi, il bloque la production de facteurs de croissance de la tumeur sous la dépendance de récepteurs aux œstrogènes.
(26)
En revanche, son effet agoniste des récepteurs aux œstrogènes présente un effet stimulant au niveau de la muqueuse utérine, augmentant alors le risque de cancer de l’endomètre. Cet effet stimulant est également retrouvé au niveau osseux ; il protège alors contre l’ostéoporose de la ménopause par diminution de la perte osseuse post-ménopausique. Il stimule également la synthèse des graisses.
La prise de tamoxifène pendant cinq ans diminue le risque de rechute de 40% ; ce risque passe de 30 à 18%, en moyenne puisqu’il existe une très grande variabilité inter-individuelle. Il diminue le risque de cancer controlatéral de 50% (ce dernier passe de 10% à 5%).
33 1.2.2. Interactions médicamenteuses
L’association tamoxifène - antivitamines K fait l’objet d’une précaution d’emploi ; en effet, les affections tumorales, mais également le tamoxifène, augmentent les risques thrombotiques et hémorragiques.
Le tamoxifène est susceptible d’interagir avec différentes molécules, à savoir le bupropion, la duloxétine, la fluoxétine, la paroxétine, la quinidine ou encore la terbinafine. En effet, ces dernières sont de puissants inhibiteurs du cytochrome 2D6, elles risquent d’entraîner une diminution de l’efficacité du tamoxifène, bien qu’ils permettent de réduire les effets indésirables en réduisant la production du métabolite secondaire actif : l’endoxifène. (33)
1.2.3. Effets indésirables
Tableau 2 : Quelques effets indésirables du tamoxifène (34)
Système d’organes Fréquence Effets indésirables Solutions pouvant être apportées à la patiente
Affections vasculaires Fréquent Bouffées de chaleur
Possibilité de traitement par Abufène®, Yméa®, Manahé®, Acthéane®
Eviter tout phyto-œstrogène ! Affections gastro-
intestinales
Très
fréquent Nausées Fractionnement de la dose Affections musculo-
squelettiques et systémiques
Fréquent
Crampes des membres inférieurs,
myalgie
Affections des organes de reproduction et du
sein
Très fréquent
Méno- métrorragies,
leucorrhées, sécheresse vaginale, baisse
de libido
Sécheresse vaginale : utilisation de lubrifiants intimes et de gels hydratants vaginaux de longue durée d’action non hormonaux
Kystes ovariens : consultation si douleur au « bas-ventre »
Baisse de libido : cause multifactorielle, prise en charge avec sexologue
N.B. Très fréquent (≥1/10) ; fréquent (de >1/100 à <1/10) ; peu fréquent (de ≥1/1 000 à <1/100) ; rare (de ≥1/10 000 à <1/1 000) ; très rare (<1/10 000)
34
1.3. Les anti-aromatases
1.3.1. Mécanisme d’action
Entre la puberté et la ménopause, les œstrogènes sont synthétisés par les ovaires. Après la ménopause, cette synthèse cesse ; l’apport en œstrogènes est alors réalisé par la transformation des androgènes en œstrogènes. Les androgènes sont synthétisés par les glandes surrénales. C’est une enzyme, l’aromatase, qui transforme l’androstènedione et la testostérone en estradiol et estrone.
Les anti-aromatases vont bloquer spécifiquement cette enzyme et ainsi inhiber la production d’œstrogènes. Ces derniers ne pourront alors plus se fixer au niveau des récepteurs de la tumeur hormono-sensible ; les anti-aromatases empêchent ainsi la prolifération tumorale. (26)
Deux types de molécules inhibant l’aromatase sont utilisées en France : les inhibiteurs de type I, de structure stéroïdienne et présentant une action irréversible, c’est le cas de l’exémestane ; les inhibiteurs de type II, présentant une structure non stéroïdienne et à action réversible, c’est le cas du létrozole et de l’anastrozole.
Le létrozole a une action hautement spécifique, il va entrer en compétition avec l’aromatase afin de se lier de façon non-covalente à la fraction hème du complexe CYP450-aromatase. Il occupe la place du ligand et empêche alors l’androgène de s’y fixer, tout cela est réversible. Il inhibe alors la synthèse d’œstrogènes au niveau de tous les tissus présentant ce complexe. Les concentrations d’œstrone et d’œstradiol seront alors très faibles. (35)
L’anastrozole est un puissant inhibiteur non stéroïdien de l’aromatase. Il présente le même mécanisme que le létrozole. Il ne possède aucune activité oestrogénique, progestative ni androgénique. (36)
L’exémestane est un puissant inhibiteur stéroïdien de l’aromatase. Cet analogue du substrat va se lier de manière covalente à l’enzyme et l’inhiber de manière irréversible. Il ne présente aucune activité progestative ou oestrogénique mais une faible activité androgénique. Chez les patientes ménopausées souffrant d'un cancer du sein traitées par la dose quotidienne de 25 mg d’exémestane, l'action de l'aromatase dans l'ensemble de l'organisme a été réduite de 98 %.
35 1.3.2. Indications
Ces molécules sont utilisées en traitement adjuvant du cancer du sein hormono-dépendant chez la femme ménopausée.
Le létrozole pourra être prescrit chez la femme ménopausée, avec un carcinome mammaire HER2 négatif, avec des récepteurs hormonaux positifs, en traitement néoadjuvant lorsque la chimiothérapie n’est pas adaptée et que la chirurgie immédiate n’est pas indiquée.
L’exémestane est indiqué dans la prise en charge du cancer du sein invasif, au stade précoce, lorsque la tumeur exprime des récepteurs aux œstrogènes.
L'efficacité de ces molécules n'a pas été démontrée chez les patientes dont les cellules tumorales ne possèdent pas de récepteurs aux estrogènes.
Les anti-aromatases possèdent une efficacité supérieure à celle du tamoxifène chez la femme ménopausée ; le risque de récidive passe de 30 à 13%, le risque de cancer controlatéral passe de 40 à 3%. A ce jour, aucune différence de résultat n’a été démontrée entre les anti-aromatases.
1.3.3. Contre-indications
Des cas de malformations congénitales (coalescence des petites lèvres, ambiguïté des organes génitaux) ont été décrits avec le létrozole.
1.3.4. Autres précautions
Ces trois principes actifs sont susceptibles d'entraîner une diminution de la minéralisation osseuse, causée par la diminution du taux d’œstrogènes circulants ; engendrant alors un risque accru de fracture.
Une évaluation de la densité minérale osseuse sera donc à envisager avant d’initier un traitement par anti-aromatase. Un traitement ou une prophylaxie pour l’ostéoporose sera à surveiller étroitement.
Cependant, les patientes avec un os normal à l’instauration ne développeront pas d’ostéoporose après cinq ans de traitement.
En cas d’oubli d’une dose de létrozole, la patiente doit prendre son comprimé aussitôt qu’elle s’en aperçoit. Toutefois, s’il est presque l’heure de la prise suivante (intervalle de 2 ou 3 heures), la patiente ne doit pas prendre la dose oubliée, et doit poursuivre le schéma posologique habituel. Les doses ne doivent pas être doublées.
36 1.3.5. Effets indésirables
80 % des patientes ayant reçu un traitement adjuvant ou un traitement adjuvant prolongé par létrozole ont présenté des effets indésirables.
Tableau 3 : Quelques effets indésirables du Létrozole (35) Système
d’organes Fréquence Effets indésirables Solutions pouvant être apportées à la patiente
Affections
vasculaires Très fréquent Bouffées de chaleur
Possibilité de traitement par Abufène®, Yméa®, Manahé®, Acthéane®
Eviter tout phyto- œstrogène !
Affections gastro-
intestinales Fréquent
Nausées, dyspepsie*, constipation, douleurs abdominales, diarrhée,
vomissements
Les nausées disparaissent par simple fractionnement de la dose
Affections de la peau et du tissu sous-cutané
Très fréquent Hyperhidrose
Fréquent
Alopécie, rash (incluant éruptions érythémateuse,
maculopapuleuse psoriaforme et vésiculeuse),
peau sèche
Affections musculo- squelettiques et
systémiques
Très fréquent Arthralgies Myalgies durant 3 à 18 mois en moyenne, conseiller une pratique sportive, de la kinésithérapie. Possibilité de changer de molécule
Ostéoporose : prévention via consommation de laitages, sport, vitamine D
Fréquent
Myalgies, douleurs osseuses, ostéoporose, fractures osseuses, arthrite
Indéterminée Doigt à ressaut
37 Affections des
organes de reproduction et du
sein
Fréquent Hémorragie vaginale
Sécheresse vaginale : utilisation de lubrifiants intimes, associés à des gels hydratants vaginaux de longue durée d’action non hormonaux
Baisse de libido : cause multifactorielle, prise en charge avec sexologue
Effets généraux et anomalies au site
d’administration
Très
fréquents Fatigue (asthénie, malaise)
Fatigue transitoire, respecter un temps de repos, conseiller des activités sportives. Possibilité d’associer de la vitamine C.
N.B. Très fréquent (≥1/10) ; fréquent (de >1/100 à <1/10) ; peu fréquent (de ≥1/1 000 à <1/100) ; rare (de ≥1/10 000 à <1/1 000) ; très rare (<1/10 000)
38 Tableau 4 : Quelques effets indésirables de l’Anastrozole (36)
Système
d’organes Fréquence Effets indésirables Solutions pouvant être apportées à la patiente
Affections vasculaires
Très fréquent
Bouffées de chaleur
Possibilité de traitement par Abufène®, Yméa®, Manahé®, Acthéane®
Eviter tout phyto-œstrogène ! Affections
gastro- intestinales
Très
fréquent Nausées
Les nausées disparaissent par simple fractionnement de la dose
Affections musculo- squelettiques et
systémiques
Très fréquent
Arthralgies, raideurs articulaires,
arthrite, ostéoporose
Myalgies durant 3 à 18 mois en moyenne, conseiller une pratique sportive, de la kinésithérapie. Possibilité de changer de molécule
Ostéoporose : prévention via consommation de laitages, sport, vitamine D
Fréquent Myalgies, douleurs osseuses Peu
fréquent Doigt à ressort Affections des
organes de reproduction et
du sein
Fréquent
Sécheresse vaginale, hémorragie
vaginale
Sécheresse vaginale : utilisation de lubrifiants intimes, associés à des gels hydratants vaginaux de longue durée d’action non hormonaux
Baisse de libido : cause multifactorielle, prise en charge avec sexologue
Effets généraux et anomalies au
site d’administration
Très
fréquents Asthénie
Fatigue transitoire, respecter un temps de repos, conseiller des activités sportives.
Possibilité d’associer de la vitamine C.
Très fréquent (≥ 1/10), fréquent (≥ 1/100, < 1/10), peu fréquent (≥ 1/1000, < 1/100), rare (≥1/10 000, <1/1 000), et très rare (<1/10 000).
39 Tableau 5 : Quelques effets indésirables de l’Exémestane(37)
Système d’organes Fréquence Effets indésirables Solutions pouvant être apportées à la patiente Affections du
système nerveux Fréquent Syndrome du canal carpien, paresthésie
Affections
vasculaires Très fréquent Bouffées vasomotrices
Possibilité de traitement par Abufène®, Yméa®, Manahé®, Acthéane®
Eviter tout phyto- œstrogène !
Affections gastro- intestinales
Très fréquent Nausées, douleurs abdominales
Les nausées disparaissent par simple fractionnement de la dose
Fréquent Vomissements, diarrhée, constipation, dyspepsie Affections de la
peau et du tissu sous-cutané
Très fréquent Hyperhidrose
Affections musculo- squelettiques et
systémiques
Très fréquent Douleurs articulaires et musculo-squelettiques
Myalgies durant 3 à 18 mois en moyenne, conseiller une pratique sportive, de la kinésithérapie. Possibilité de changer de molécule Ostéoporose : prévention via consommation de laitages, sport, vitamine D Fréquent Ostéoporose, fractures
Effets généraux et anomalies au site
d’administration
Très fréquents
Fatigue (asthénie, malaise), douleurs
Fatigue transitoire, respecter un temps de repos, conseiller des activités sportives.
Possibilité d’associer de la vitamine C.
Très fréquent (≥1/10), fréquent (≥1/100 à <1/10), peu fréquent (≥1/1000 à <1/100), rare (≥1/10 000 à <1/1,000), très rare (<1/10 000) et fréquence indéterminée (ne peut pas être estimée à partir des données disponibles).