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Performance et durabilité de traitements de puits de stockage de gaz à base de coulis de géopolymères

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Academic year: 2021

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(1)

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https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-02507520

Submitted on 13 Mar 2020

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stockage de gaz à base de coulis de géopolymères

Baptiste Marchand

To cite this version:

Baptiste Marchand. Performance et durabilité de traitements de puits de stockage de gaz à base de coulis de géopolymères. Génie civil. Ecole Centrale de Lille, 2019. Français. �NNT : 2019ECLI0021�. �tel-02507520�

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THESE

Présentée en vue

d’obtenir le grade de

DOCTEUR

En

Spécialité : Génie Civil

Par

Baptiste MARCHAND

DOCTORAT DELIVRE PAR CENTRALE LILLE

Titre de la thèse :

Performance et durabilité de traitements de puits de

stockage de gaz à base de coulis de géopolymères

Soutenue le mercredi 4 décembre 2019 devant le jury d’examen :

Président : Frédéric SKOCZYLAS, Professeur, Centrale Lille

Rapporteur : Sylvie ROSSIGNOL, Professeur, Université de Limoges

Rapporteur : Martin CYR, Professeur, INSA Toulouse

Membre : Laurent JEANNIN, ingénieur R&D, STORENGY

Membre : Cyrille ALBERT-MERCIER, maître de conférences, LMCPA et UPHF

Membre : David LAMBERTIN, ingénieur R&D, CEA DEN

Invité : Eric Portier, ingénieur R&D, Neptune Energy

Co-directeur : Franck AGOSTINI, maître de conférences HDR, Centrale Lille

Directrice de thèse : Catherine DAVY, Professeur, Centrale Lille

Thèse préparée au laboratoire UCCS, UMR CNRS 8181 École

doctorale SPI 072

(3)

1

Table des matières

Nomenclature ... 3

Introduction ... 5

Chapitre 1 : État de l’art ... 1

1-

Contexte et problématique du stockage géologique de gaz ... 1

2-

Écoulements dans les milieux poreux ... 9

3-

Solutions existantes pour éviter les venues de solides... 31

4-

Les géopolymères ... 45

5-

Orientations et organisation du travail ... 64

Chapitre 2 : Etude d’un liant alcali-activé à base de verre sodo-calcique

... 1

Are calcium silicate hydrates (C-S-H) present in alkali-activated glass

cullet cement? ... 2

1-

Introduction ... 3

2- Material and methods ... 4

3- Results and discussion ... 6

4- Conclusions ... 10

Chapitre 3 : Matériaux et méthodes ... 12

1-

Matériaux ... 14

2-

Mise en œuvre de milieux granulaires modèles ... 16

3-

Caractérisation des réseaux poreux avant et après traitement ... 18

4-

Formulation des coulis ... 21

5-

Expérimentations à l’échelle centimétrique ... 27

6-

Echelle pluri-centimétrique ... 31

Chapitre 4 Études préliminaires à la formulation de coulis ... 1

1-

Choix d’un milieu poreux modèle ... 2

2-

Affinement de la poudre de métakaolin ... 9

3-

Viscosité des coulis ... 15

Chapitre 5 : Résultats d’optimisation de coulis à l’échelle

centimétrique ... 1

1-

Effet des paramètres de composition du coulis ... 2

(4)

2

3-

Effet de la cure ... 20

4-

Résistance à l’eau ... 28

5-

Conclusion sur la mise au point de coulis de géopolymères à

l’échelle centimétrique ... 34

6-

Compréhension de la prise ... 34

Chapitre 6 : Résultats d’optimisation de coulis de géopolymère à

l’échelle pluri-centimétrique... 1

1-

Performances du sable compacté : perméabilité et résistance au

cisaillement ... 2

2-

Traitement au coulis de géopolymère ... 4

3-

Conclusion ... 17

Conclusion et perspectives ... 1

Références bibliographiques ... 3

Annexes ... 11

Annexe 1 : Méthodes de caractérisation expérimentale, notions de

rhéologie des fluides et centrifugation ... 12

1-

Méthodes de caractérisation du réseau poreux ... 12

2-

Rhéologie des fluides... 19

3-

Affinement de la taille des particules en suspension : calcul des

tailles de particules après centrifugation ... 23

Annexe 2 : Performances mécaniques de mortiers de géopolymères ... 25

Annexe 3 : Récapitulatif des échantillon de grès in situ fournis par

Storengy ... 28

Annexe 4 : résultats complémentaires de formulation de coulis de

géopolymères ... 32

1-

Bilan des coulis mis en œuvre à l’échelle centimétrique ... 32

2-

Résultats complémentaires de formulation de coulis de

géopolymères ... 40

(5)

3

Nomenclature

Φ (-) Porosité

Vp (m3) Volume de pores

V0 (m3) Volume apparent de l’échantillon

Τ (-) Tortuosité

lp (m) Longueur des pores

l (m) Longueur

P (Pa) Pression

Ps (Pa) Pression saturante

n (g) Quantité de gaz adsorbée

nm (g) Quantité de gaz adsorbée par une monocouche

C (-) Constante BET

SBET (m²) Surface BET

Na (mol-1) Nombre d’Avogadro

S (m²) Surface

M (Kg.mol-1) Masse molaire

m (kg) masse

dp (m) Diamètre de pore

𝜎 (N.m-1) Tension de surface

𝜃 (rad) Angle de contact

Pi (Pa) Pression d’injection

T (K) Température

R (J.K-1.mol-1) Constante des gaz parfaits

𝜌 (Kg.m-3) Masse volumique

HR (-) Humidité relative

N (-) Nombre de photons transmis

N0 (-) Nombre de photons incidents

k (m-1) Coefficient d’absorption

Q (m3.s-1) Débit volumique

Ka (m²) Perméabilité apparente

µ (Pa.s) Viscosité dynamique

Re (-) Nombre de Reynolds

v (m.s-1) vitesse

Dh (m) Diamètre hydraulique

𝑑̅𝑝𝑜𝑟𝑒 (m) Diamètre de pore moyen

𝑑̅𝑝𝑎𝑟𝑡𝑖𝑐𝑢𝑙𝑒 (m) Diamètre de particule moyen

K (m²) Perméabilité intrinsèque

P1 (Pa) Pression aval

P2 (Pa) Pression amont

β (m-1) Coefficient de Forchheimer

βK (Pa) Coefficient de Klinkenberg

𝜏 (Pa) Contrainte de cisaillement

F (N) Force

𝛾 (-) Cisaillement

(6)

4

x (m) Coordonnées du fluide suivant l’axe 𝑥⃗

𝛾̇ (s-1) Taux de cisaillement

t (s) Temps

ω (s-1) Fréquence d’oscillation

G’ (Pa) Module élastique

G’’ (Pa) Module visqueux

G* (Pa) Module complexe

δ (-) Déphasage

tan δ (-) Facteur d’amortissement

r (m) rayon

z (m) Coordonnées du fluide suivant l’axe 𝑧⃗

H (m) Hauteur de l’entrefer (essai rhéologique)

C (N.m) Couple

α (rad) Angle entre le disque et le cône (rhéomètre)

j (-) Jamming ratio

msat (kg) Masse du matériau saturé

msec (kg) Masse du matériau sec

mimm (kg) Masse du matériau immergé

vs (m.s-1) Vitesse de sédimentation

g (m.s-2) Accélération

ft (Pa) Résistance en flexion

b (m) Demi hauteur

I (m4) Moment d’inertie

fc (Pa) Résistance en compression

Qc (l/min) Débit volumique de coulis

Qg (ln/min) Débit volumique de gaz

Pi (Pa) Pression d’injection du gaz

P0 (Pa) Pression atmosphérique

c (Pa) Cohésion du sable

𝜑 (rad)

Angle de frottement dans le plan de Mohr-Coulomb

(7)

5

Introduction

Le gaz naturel représente 14 % de la consommation d’énergie primaire en France. Acheminé principalement de Norvège, des Pays-Bas, de l’Algérie et de la Russie, le gaz est stocké en attente de son utilisation, soit en surface, soit sous terre.

En stockage souterrain, le gaz naturel est présent dans différentes structures géologiques servant de réservoir. Ces structures géologiques (ou massifs) sont des cavités salines, des gisements épuisés ou d’anciens aquifères. Le stockage souterrain présente différents atouts tel que la sécurité, le volume de stockage et la réactivité lors de pointes de consommation. En exploitation, des variations saisonnières de la pression du gaz sont observées. Elles sont marquées par une diminution moyenne en hiver due à une plus forte consommation, et une augmentation moyenne en été lors du renouvellement des réserves. Ces variations de pression peuvent conduire à un phénomène indésirable de venue (ou production) de solides, ou de sable pour les solides de taille sub-millimétrique. Ce phénomène correspond à un endommagement de la roche hôte du site de stockage, en lien avec les variations saisonnières de pression de gaz. Les venues de sable surviennent dans des réservoirs constitués de roches peu consolidées, telles que les grès ou les roches carbonatées. Potentiellement, s’il s’étend de façon significative dans le massif, cet endommagement diminue la capacité de production du puits. Les circuits d’écoulement du gaz peuvent se boucher partiellement, et entraîner une dégradation prématurée des installations.

De façon complémentaire, les réservoirs de stockage voient la localisation des nappes d’eau souterraines varier périodiquement. Ce phénomène peut entrainer des flux et des reflux de liquides généralement salins (saumures) ou d’eau douce (issus d’aquifères ou de nappes phréatiques) dans le massif. Il est également à l’origine d’un endommagement de la roche réservoir.

En pratique, la notion de venue de sable recouvre deux types de solides : les sables formés de particules de « grande taille » (plusieurs microns à plusieurs dizaines de microns de diamètre), et les particules fines de taille colloïdale (i.e. sub-micronique) [Aji et al. 2012; Song et al. 2016]. On parle alors réellement, soit de venue de sable (dans le premier cas), soit de venue de fines (dans le second). Tandis que les sables sont issus de la dé-structuration et de l’endommagement progressif du massif dus aux différences de pression de gaz saisonnières, les fines sont issues du décollement de particules sub-microniques du massif, favorisé par les mouvements de l’eau souterraine.

A l’heure actuelle, plusieurs solutions existent pour réduire les venues de solides. Il s’agit principalement de méthodes de consolidation mécanique (filtres) et de méthodes de consolidation chimique. Les méthodes de consolidation mécanique sont plutôt réputées efficaces pour les venues de sable, tandis que les méthodes de consolidation chimique peuvent être efficaces à la fois pour les venues de sable et les venues de fines.

La consolidation chimique consiste en une étape d’injection d’un coulis dans le massif, suivie d’une étape d’injection de gaz (étape de « flushing ») qui vise à ré-ouvrir les pores du massif, afin qu’ils ne restent pas remplis de coulis et n’empêchent pas la production de gaz. Le coulis ainsi injecté dans le massif doit (1) être suffisamment dispersé pour ne pas modifier la perméabilité au gaz de façon significative (de moins de 10%), et conserver ainsi un bon soutirage au milieu, mais aussi (2) permettre de renforcer le massif mécaniquement de façon efficace, tout en résistant à une venue d’eau douce ou de saumure.

(8)

6

A l’heure actuelle, à l’échelle industrielle, la principale méthode de consolidation chimique est basée sur des solutions à base de polymères [Gravelle 2011]. Malheureusement, ceux-ci présentent des limitations, notamment vis-à-vis de leur durée d’efficacité (entre 4 et 5 ans au maximum). Leur efficacité limitée sous l’effet d’une température et sous pression, ainsi que leur sensibilité à la salinité des eaux souterraines sont d’autres limitations significatives.

L’industrie gazière recherche donc de nouveaux traitements de puits de stockage présentant une meilleure tenue dans le temps et répondant mieux aux conditions de température et de pression présentes in situ.

Parmi les solutions de coulis existantes, celles à base de liants minéraux, tels que le ciment Portland (le plus utilisé au monde à ce jour), ont été investiguées, mais seulement pour la consolidation de massifs rocheux, c’est-à-dire sans permettre de conserver les capacités de transport de gaz (perméabilité) [Maalej 2007]. Par ailleurs, la fabrication du ciment Portland nécessite une production importante de CO2 (au moins 620 kg pour 1 tonne de ciment

produite [StatsDev 2019]), ce qui rend son emploi peu adapté aux contraintes environnementales actuelles. Depuis les années 1930, des liants alternatifs au ciment Portland, présentant une empreinte carbone bien moins élevée, ont été développés à partir de l’analyse des matériaux utilisés dans l’Egypte Ancienne [Barsoum et al. 2006]. Il s’agit des géopolymères, nom donné par le chimiste français Joseph Davidovits en 1979, au produit de la réaction entre des aluminosilicates réactifs et une solution activatrice alcaline. Les géopolymères sont des matériaux dits « verts » dans le sens où leur production génère moins de CO2 dans l’atmosphère que le ciment Portland. Ils sont également réputés pour leur

résistance mécanique aussi élevée que les bétons à hautes performances au ciment Portland, pour leur résistance à la corrosion, au feu et à l’eau. De ce fait, les géopolymères sont des candidats potentiels intéressants pour le traitement des venues de solides dans les réservoirs de gaz, et ce domaine d’application n’a pas encore été investigué à notre connaissance.

L’objectif principal de cette thèse est donc de proposer des solutions concrètes de renforcement des puits de stockage au moyen de coulis à base de géopolymères. Il s’agit d’une méthode de consolidation chimique, à base de liant inorganique. Les formulations proposées devront s’éloigner des formulations usuelles pour répondre aux critères 1) de mise en œuvre imposés par le contexte de la production de gaz (renforcement mécanique et maintien des propriétés de transport de gaz), et 2) de durabilité dans le temps, sous l’effet de la température, et en présence d’eau (douce ou saline). L’un des principaux challenges à résoudre à l’état frais sera la présence de particules de matière alumino-silicatée solide dans la solution activatrice (fluide à suspension), qui peut être à l’origine de bouchages (clogging) du réseau poreux de la roche réservoir.

Pour répondre à ces questions, ce manuscrit s’articule en six parties distinctes, qui permettent d’évoluer depuis la problématique esquissée ci-dessus, jusqu’à la validation expérimentale de coulis à l’échelle pluri-centimétrique.

Le premier chapitre présente un état de l’art qui détaille le contexte industriel et scientifique du travail, les notions d’écoulements dans les milieux poreux nécessaires à l’étude, et les solutions existantes pour limiter les venues de sable. Les limitations de ces solutions nous guideront pour présenter les géopolymères et leur intérêt dans le contexte étudié. Des solutions analogues intéressantes (par consolidation à base de liants inorganiques) seront également présentées.

(9)

7

Le chapitre 2 est consacré à une étude préliminaire, concernant un liant de silicates alcali-activés à base de verre de recyclage. Ce travail a été mené en marge de cette thèse, mais il montre bien l’intérêt et les limitations de ce type de ciment pour la gestion des venues de sable.

Le chapitre 3 décrit les méthodes utilisées, visant à caractériser le milieu poreux avant et après injection et flushing du coulis, et à valider ses performances. L’ensemble combine la chimie des fluides liquides avec suspension de solides, la mécanique des fluides (avec notamment des notions de perméabilité sous charge, de régimes d’écoulement et de viscosité), et la mécanique des sols (et notamment les essais triaxiaux à l’échelle pluri-centimétrique pour valider les coulis mis au point). Deux essais originaux ont été mis au point dans le cadre de ce travail, l’un pour l’injection-flushing, et l’autre, de fluidisation, pour la mesure des performances. Ils sont présentés dans cette partie.

Le chapitre 4 est consacré à la mise au point d’un milieu poreux modèle, permettant de mettre au point la formulation de coulis de manière paramétrique (en grand nombre), plutôt que de recourir à des échantillons de roche in situ, dont les quantités sont très limitées. Ce chapitre aborde également la mise au point d’un coulis injectable. Il propose des procédés adaptés pour raffiner les grains de la suspension liquide, et étudie les paramètres de formulation du coulis permettant de contrôler sa viscosité.

Les chapitres 5 et 6 présentent les principaux résultats de mise au point de formulations de coulis par injection-flushing, d’une part à l’échelle centimétrique, et d’autre part à l’échelle pluri-centimétrique. L’étude paramétrique est menée à l’échelle centimétrique, et conduit à l’optimisation d’une formulation par rapport à la capacité d’injection et à la performance (résistance mécanique et résistance à l’eau). Le temps et la température de cure sont deux paramètres de premier ordre, qui permettent d’appréhender le comportement du coulis à moyen et plus long terme. En première approche, les essais les plus longs menés en température (40°C) visent à reproduire le vieillissement du coulis via une activation thermique modérée. Le chapitre 5 est organisé en deux parties, la première se focalisant sur la mise au point d’une formulation, et la seconde sur la compréhension des performances des coulis au moyen d’observations microstructurales (microscopie électronique à balayage et micro-tomographie de rayons X). Le chapitre 6 est consacré à l’évaluation de la résistance des coulis à l’échelle pluri-centimétrique.

Le manuscrit se conclut par un bilan des travaux, et un ensemble de perspectives à plus grande échelle, au laboratoire et au niveau industriel. Les annexes fournissent un exemplaire des deux brevets qui accompagnent ce travail.

(10)

1

(11)

1

1- Contexte et problématique du stockage

géologique de gaz

Cette section présente les motivations du travail du point de vue général, industriel et sociétal, et justifie l’étude scientifique des écoulements de fluides dans les milieux poreux, qui forme la deuxième partie de ce chapitre.

1.1- Economie et typologie du stockage de gaz

En 2016, dans le monde, le gaz naturel est la troisième énergie primaire la plus produite après le pétrole et le charbon, selon l’IEA (International Energy Agency) 1, avec une production

de près de 3 milliards de tonnes équivalent pétrole (Mtep). De plus, toujours selon l’IEA, la consommation de gaz naturel a été multipliée par 2,5 entre 1971 et 2016.

Dans ce contexte, le stockage de gaz permet aux pays ne possédant pas, ou peu, de gisements de pétrole ou de charbon, de disposer de cette ressource en continu. En effet, avec une production régulière au cours de l’année, le stockage du gaz permet de réagir aux fluctuations de consommation. Comme le montre la Figure 1, la demande en gaz est plus importante durant les mois d’hiver, notamment pour le chauffage des bâtiments. Pendant les mois de plus faible consommation, principalement en été, le gaz est stocké, pour être disponible et remis sur le réseau lorsque la demande augmente (lors de l’hiver suivant).

(12)

2

Figure 1 : Consommation de gaz naturel par les pays de l'OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Économiques, dont les pays membres ont – pour la plupart –un système démocratique et une économie de marché) de mai 2016 à mai 2019. Source IEA 2

Produit principalement par les États-Unis, la Russie, puis par l’Iran, le Canada et le Qatar, le gaz naturel est stocké en grande partie dans l’hémisphère Nord, comme le montrent les données récoltées par l’Union Internationale du Gaz (International Gas Union ou IGU3), voir

Figure 2. En 2012, le volume total de gaz stocké était d’environ 360 milliards de m3. A cette

date, les principaux pays stockant du gaz naturel étaient les États-Unis (avec 121 milliards de m3), la Russie (avec 66 milliards de m3) et l’Ukraine (33 milliards de m3). Cela représente plus

de 60 % du volume total stocké. La France, avec 13 milliards de m3, était en 7ème position.

2 Source https://www.iea.org/statistics/monthly/

(13)

3

Figure 2 : Stockage de gaz naturel à travers le monde en 2012. Source IGU 4

En pratique, le stockage du gaz peut prendre plusieurs formes, dont les principales sont le stockage aérien et le stockage souterrain. Le stockage aérien ne présente pas de contraintes géologiques, mais des contraintes techniques et des risques d’accidents ou d’incidents graves. De ce fait, le stockage souterrain est généralement privilégié. Il se fait sous pression (de l’ordre de 40 à 270 bars), afin de faciliter le soutirage (i.e. la production ou utilisation du gaz stocké). Les trois principales formations rocheuses pour le stockage souterrain sont 5 :

1) Les cavités salines (6 % du volume total des stockages souterrains). Il s’agit de cavernes creusées dans un gisement de sel gemme par lessivage, voir Figure 3. Pour créer la cavité artificielle d’un volume de grande taille (entre 100 000 et 1 million de m3), le sel est dissous

par injection d’eau douce. Celle-ci est ensuite extraite par pompage, laissant de la place pour stocker du gaz. Le sel gemme étant naturellement très peu perméable, il permet de conserver le gaz sous pression jusqu’à son utilisation. Ce type de stockage en poche souterraine a une capacité de soutirage très importante (avec des débits 5 à 6 fois supérieurs aux autres modes de stockage), et permet d’assurer les fortes hausses saisonnières de consommation. Cependant, le volume utilisable des cavités salines est moins important que celui des autres types de stockage (voir ci-dessous). Par ailleurs, le sel cristallin est un milieu qui se déforme dans le temps, de façon différée, par un phénomène dit de fluage. Celui-ci conduit, sans précaution, à la diminution progressive de volume de la poche créée initialement (phénoène de convergence), jusqu’à sa fermeture [Cornet et al. 2018].

2) Les gisements déplétés (81 % du volume total), c’est-à-dire les gisements d’hydrocarbures épuisés.

4 Source (présentation faite lors de la WGC (World Gas Conference) 2015 à Paris) :

https://www.igu.org/sites/default/files/node-page-field_file/FactsFiguresSept2014_UGS.pdf

(14)

4

3) Les aquifères (13% du volume total). Ce sont des roches poreuses, capables de stocker de grandes quantités d'eau, et suffisamment perméables pour la laisser circuler librement. Pour utiliser ces milieux comportant des quantités significatives d’eau, le gaz est injecté sous pression dans le volume poreux de la roche non occupé par l’eau, ce qui impose à cette dernière de se déplacer vers la périphérie du réservoir. Environ la moitié du gaz stocké reste à demeure dans la roche, et on parle alors de « gaz coussin ».

Figure 3 : Schéma de la formation d’une cavité saline. Source : The Green Optimistic 6

Les gisements déplétés et les aquifères sont des réservoirs naturels, qui n’ont pas été créés par l’homme. Ils sont constitués d’une formation rocheuse poreuse et perméable, généralement des grès ou des carbonates, recouverte d’une couche imperméable appelée anticlinal, faite d’argile, et qui empêche la migration des fluides stockés vers la surface. La Figure 4 présente le schéma d’un aquifère typique. A la différence de l’aquifère, les gisements déplétés ont déjà toute l’infrastructure nécessaire au stockage de gaz, limitant ainsi les coûts d’exploitation.

(15)

5

Figure 4 : Schéma d'un aquifère. Source : Economie d’Energie 7

En France, le stockage de gaz est principalement géré par l’entreprise ENGIE 8, ex- Gaz

de France, à l’exception des sites de Lussagnet et Izaute (qui sont gérés par TEREGA, ancienne filiale de l’entreprise TOTAL 9), voir Figure 5. Le stockage se fait principalement en aquifères,

qui sont au nombre de 11. Ils sont constitués de roches gréseuses. Les cavités salines et les gisements déplétés ne représentent que 5 des 16 sites de stockage français.

7 http://www.economiedenergie.fr/Gaz-naturel.html 8 https://www.engie.com/

(16)

6

Figure 5 : Les infrastructures gazières en France. Source : Association Française du Gaz (AFGaz)10, rapport d’activités 2017.

1.2- Problématique : les venues de solides et d’eau

Les venues de solides décrivent le phénomène de remontée de particules dans le gaz lors du soutirage. Comme expliqué dans l’introduction de ce manuscrit, les venues de solides se présentent sous deux formes : les venues de fines qui correspondent aux particules de taille sub-micrométrique, dites colloïdales [Aji et al. 2012 ; Song et al ; 2016], et les venues de sable, qui sont des particules de taille plus importante, de l’ordre de plusieurs microns à plusieurs dizaines de microns de diamètre. Lorsqu’elles ont lieu, les venues de solides peuvent endommager les installations en surface, et boucher les pores de la formation rocheuse, limitant le débit de soutirage du gaz.

Le problème des venues de sable a été observé depuis le début de l’extraction de pétrole et de gaz dans les réservoirs massifs peu ou pas consolidés [Nouri et al. 2006]. Des

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7

millions de dollars sont dépensés tous les ans par l’industrie pétrolière afin de les prévenir [Ranjith et al. 2013 ; Ranjith et al. 2014]. Étant composés des mêmes roches et soumises à des variations de pression de gaz similaires, les sites de stockage de gaz souterrains dans des aquifères ou des gisements déplétés subissent les mêmes phénomènes.

Par exemple, les venues de sable dans les réservoirs gréseux de Germiny et de Cerville (Meurthe et Moselle, France) ont été mesurées directement sur site au moyen de capteurs placés sur les conduites en surface, qui enregistrent les chocs de particules sur leurs parois [Zaitoun et al. 2009]. Les résultats sont représentés en fonction du temps, respectivement, sur les Figure 6 et Figure 7. Dans la Figure 6, la production de sable est représentée en bleu foncé, et le débit de soutirage de gaz est en rose. Après traitement du puits pour les venues de sable (graphique de gauche), la production de sable est réduite et le débit de gaz maîtrisé. A contrario, sans traitement (graphes du milieu et de droite), la production de sable est significative et augmente avec le débit de gaz. La Figure 7 montre que la production de sable est plus importante lorsque le débit de gaz augmente, mais surtout lorsque le stock de gaz est plus réduit : c’est à 68% du stock maximal présent que la production de sable est la plus élevée ; elle est négligeable à 76% quel que soit le débit utilisé, et relativement réduite à 88% du stock dès que le débit est élevé.

En complément, les variations du stock de gaz naturel dans la roche aquifère induisent des variations de l’eau présente en souterrain : ce sont les venues d’eau. Dans ce cas, l’eau lessive la roche et peut emporter avec elle des particules, les déposer ailleurs dans le massif, et conduire à la création de bouchons nuisibles à la production de gaz après le reflux de l’eau.

Figure 6 : Venue de solide mesurée sur le site de Germiny, Meurthe-et-Moselle, France [Zaitoun et al. 2009]

(18)

8

Figure 7 : Venue de solide mesurée sur le site de Cerville Meurthe-et-Moselle, France [Zaitoun et al. 2009]

Plusieurs caractéristiques des réservoirs souterrains sont connues pour favoriser l’apparition de ces venues de solides :

- La consolidation initiale de la roche, c’est-à-dire sa cohésion : moins la roche sera consolidée, plus les venues de solides seront probables. Les venues de solides sont ainsi maximales en l’absence de consolidation, c’est-à-dire pour les milieux granulaires.

- La fréquence des remontées d’eau, qui déconsolident la roche et transportent des particules solides,

- La salinité de l’eau qui remonte dans le massif poreux [Chequer et al. 2018]

- La présence de sédiments carbonatés comme les oolites, dont la cohésion est limitée [Ranjith et al. 2009 ; Onaisi et al. 1998].

Les phénomènes liés aux venues de solides ont lieu à l’échelle du milieu poreux qui sert de réservoir de stockage. Avant d’analyser les solutions existantes permettant d’y remédier, il est indispensable de bien comprendre les caractéristiques principales des milieux poreux et des écoulements de fluides au travers de ces milieux [Dullien 1992]. Du fait de l’emploi prévisible de liquides comportant des particules solides (coulis de géopolymères), le cas de fluides sans puis avec suspension (particules solides) sera abordé. Ces aspects plus fondamentaux permettront également de définir plus précisément les orientations de la thèse.

(19)

9

2- Écoulements dans les milieux poreux

2.1- Caractérisation de la structure poreuse

Les milieux poreux sont définis comme l’assemblage d’une matrice solide comportant des vides internes [Dullien 1992]. Ces vides sont appelés pores. La morphologie du volume poreux peut être variée, selon le matériau considéré.

Notion de porosité

Une première quantification de ces pores est leur volume relatif, ou porosité 𝜙, sans unité (mais souvent exprimée en %), définie comme suit :

𝜙 = 𝑉𝑜𝑙𝑢𝑚𝑒 𝑑𝑒𝑠 𝑝𝑜𝑟𝑒𝑠

𝑉𝑜𝑙𝑢𝑚𝑒 𝑎𝑝𝑝𝑎𝑟𝑒𝑛𝑡 𝑑𝑢 𝑚𝑖𝑙𝑖𝑒𝑢 = 𝑉𝑝

𝑉0 (1.1.1)

Il existe différents types de porosité, tels que représentés à la Figure 8.

La porosité ouverte ou percolante est constituée des pores connectés (ou percolants) d’une face à l’autre de l’échantillon de matériau considéré. La porosité percolante est celle qui est utile lors du stockage de fluides dans un milieu poreux : elle permet de l’y mettre sous pression et de l’en soutirer.

La porosité occluse est constituée de pores isolés, ne communiquant pas avec le milieu extérieur.

Enfin, certains pores peuvent être percolants, mais d’une géométrie ne permettant pas la récupération aisée des fluides les remplissant. On parle dans ce cas de porosité piégée (cf. référence b dans la Figure 1).

Figure 8 : Schéma de représentation de différents types de porosité, a) ouverte, b) piégée, c) occluse

(20)

10 Notion de distribution de taille de pores

Selon l’IUPAC (International Union of Pure and Applied Chemistry) qui fait référence dans le domaine, les pores d’un matériau (i.e. milieu solide) sont classifiés en trois catégories selon leur taille, c’est-à-dire leur diamètre (s’ils sont assimilés à des cylindres) ou plus généralement leur largeur (width en anglais) [Thommes et al. 2015] :

1. Les micropores, de taille inférieure à 2 nm

2. Les mésopores, de taille comprise entre 2 et 50 nm

3. Les macropores, de taille au moins égale à 50 nm. Ces derniers sont également qualifiés de pores capillaires [A. M. Neville 1996].

Dans tout matériau poreux, il existe des proportions variables de ces trois catégories. Selon l’IUPAC, la notion de nanopores recouvre ces trois catégories, mais avec une taille maximale de l’ordre de 100nm.

La courbe dite de distribution de taille des pores (Pore Size Distribution ou PSD en anglais) permet de caractériser la proportion relative de ces trois familles de pores.

La distribution de taille réelle de tous les pores d’un matériau est difficile à obtenir expérimentalement, du fait d’une grande complexité de formes, et de tailles qui peuvent varier sur plusieurs ordres de grandeur.

C’est donc plus souvent la distribution de la taille d’entrée de pore qui est mesurée, notamment avec la porosimétrie par injection de mercure (PIM en français ou MIP pour

Mercury Intrusion Porosimetry en anglais). En pratique, du mercure liquide est injecté dans les

pores du milieu poreux sous pression croissante. Au préalable, il est séché avant d’être placé dans le porosimètre où un vide poussé est effectué. Le mercure est utilisé car c’est un liquide non mouillant, dont l’angle de contact θ avec la plupart des solides est supérieur à 90°C, typiquement entre 130° et 150°. Une pression supérieure à l’ambiante est nécessaire pour le faire pénétrer dans les pores. L’équation dite de Washburn-Laplace est utilisée pour décrire la relation entre la pression d’injection de mercure Pi (en Pa) et le diamètre d’entrée de pores dp

(en m), donnée par la formule suivante :

𝑑𝑝= −4𝜎 cos(𝜃)

𝑃𝑖 (1.1.2)

où σ est la tension superficielle du mercure. Elle est souvent prise égale à 0,48 N.m-1 à 20°C.

Cette relation suppose que les pores sont cylindriques, débouchants et indépendants les uns des autres (voir figure ci-dessous, à droite). Avec les gammes de pression de mercure généralement applicables avec les appareils standard, les tailles de pores concernées par cette mesure sont comprises entre 3 à 6 nm et plusieurs millimètres.

Dans le cas de matériaux dont les pores ne sont pas cylindriques (dans la plupart des cas, donc), le diamètre de pore calculé est le diamètre d’accès du mercure au pores (ou diamètre d’entrée). Cette méthode présente l’inconvénient de sous-estimer les pores dont les diamètres d’entrée sont significativement plus petits que leur diamètre réel (effet dit bouteille d’encre [S. Diamond 2000] voir Figure 9.

(21)

11

Figure 9 : Schéma de l'erreur introduite par l'interprétation des données de porosimétrie par intrusion de mercure. a) vrai pore, b) fausse interprétation. [Dullien 1991]

D’autres méthodes indirectes permettent de mesurer une distribution de taille de pores, comme la sorption-désorption de gaz (azote, CO2, etc.), voir Figure 10. Il s’agit de mesurer la

quantité de gaz adsorbé à l’intérieur du réseau poreux, et en premier lieu à leur surface, lorsque l’on fait varier la pression relative du gaz, à température constante (77K dans le cas de l’azote).

Figure 10 : Principe de l’adsorption progressive de gaz à la surface d’un milieu poreux, extrait de [Bertier et al. 2016]

Les tailles de pores concernées vont les micropores, jusqu’à des tailles de macropores de l’ordre de plusieurs centaines de nm. Comme la PIM, elle suppose que les pores sont représentés par des cylindres de section circulaire, débouchants et indépendants les uns des autres (voir Figure 9 b). Cette technique, en particulier lorsqu’elle utilise l’azote, permet également d’accéder à la surface spécifique du réseau poreux du matériau, à partir de la courbe donnant la quantité de gaz adsorbé à la surface des pores en fonction de la pression relative appliquée (P/P0). Pour cela, le modèle de Brunauer-Emmet et Teller (BET) est utilisé

(22)

12

dans la gamme de pression relative (P/P0) allant généralement de 0.1 à 0.3 [Thommes et al.

2015] et s’écrit : 𝑃 𝑃0 𝑛 (1 −𝑃𝑃 0) = 1 𝑛𝑚𝐶+ 𝐶 − 1 𝑛𝑚𝐶 𝑃 𝑃0 (1.1.3)

Où nm est une constante (en mol), interprétée comme la capacité spécifique d’adsorption de

la monocouche (i.e. de la première couche de gaz adsorbée à la surface des pores). C’est la seconde constante du modèle (sans unité) : elle est reliée à l’énergie d’adsorption de la monocouche, n est la quantité de gaz adsorbée (en mol) et (P/P0) est la pression relative. Les

paramètres nm et C sont identifiés par interpolation linéaire sur la portion (P/P0) comprise

entre 0.1 et 0.3. En deçà (pour (P/P0)<0.1), se produit le remplissage des micropores, et

au-delà (pour (P/P0)>0.3), c’est le domaine de l’adsorption multi-moléculaire (plusieurs couches

de gaz s’adsorbent les unes sur les autres à partir de la surface des pores). La surface spécifique SBET (en m2/g) est déduite via la relation :

𝑆𝐵𝐸𝑇 = 𝑛𝑚𝑁

𝜎𝑚

𝑚 (1.1.4)

Où 𝜎𝑚 correspond à l’aire de la section droite de la molécule considérée (elle vaut 0.162 nm2

pour l’azote), N est le nombre d’Avogadro, et la m est la masse de l’adsorbant (matériau poreux considéré).

D’autres méthodes indirectes existent, qui ne seront pas détaillées ici, comme la résonance magnétique nucléaire appliquée à la mesure du temps de relaxation transversale T2 du proton

(utilisable in situ [Robinet et al. 2012]).

Caractérisation de la morphologie du réseau poreux

Hormis le volume relatif et la distribution de taille de pores obtenue par méthodes indirectes, il est possible de caractériser plus finement le réseau poreux avec différentes méthodes d’imagerie, selon la taille de pores considérée. En effet, la taille d’un échantillon obtenu par imagerie est directement reliée à la taille du pixel (ou du voxel en 3D) qui est la brique élémentaire qui compose chaque image. En général, une taille d’image de l’ordre du millier de pixels peut être obtenue. Ainsi pour observer les micropores (<2 nm), la taille d’échantillon que l’on est susceptible d’observer est de l’ordre de quelques microns (voir Figure 11). En général, cet échantillon à lui seul n’est pas représentatif, au sens statistique, du réseau poreux complet du matériau considéré, que l’on appelle l’échelle macroscopique. Il est alors nécessaire de multiplier les échantillons, et de disposer d’un ensemble d’observations pour avoir une représentativité satisfaisante, au sens statistique, à l’échelle du matériau [Y. Song et al. 2016].

(23)

13

Figure 11 : Taille de voxel observable en fonction de la taille de la zone observée

Ainsi, pour observer les caractéristiques d’un réseau poreux qui s’étend sur plusieurs échelles, il est généralement nécessaire de recourir à plusieurs méthodes d’imagerie, chacune étant adaptée à une gamme de pores (et à une échelle) particulière.

Avec les appareils courants de micro-tomographie aux rayons X, ou de microscopie confocale [Yio et al. 2014] (voir Figure 12), la taille de voxel peut descendre jusqu’à quelques centaines de nm (et jusqu’à la dizaine de nm pour des appareils encore peu répandus [Bossa et al. 2015]). Ce type d’appareil permet d’observer un réseau poreux macroporeux.

(24)

14

Figure 12 : Principe de la microscopie confocale 3D, extrait de [ Collins et al. 2014]

Afin de visualiser des pores jusqu’à la dizaine de nm, ces appareils peuvent être utilement complétés par de la microscopie par rayons X à transmission et à balayage (STXM pour Scanning Transmission X-ray Microscopy, voir Figure 13 ou de la ptychographie à rayons X de type XANES (X Ray Absorption Near Edge Structure) [Bae et al. 2015].

Figure 13 : Schéma de STXM. [Bae et al. 2016]

Aux mêmes échelles, la microscopie électronique à balayage couplée à un faisceau d’ions focalisé ou non (FIB/SEM ou BIB/SEM pour Focused Ion Beam/Scanning Electron Microscopy et Broad Ion Beam/Scanning Electron Microscopy) donne des résultats qu’il est possible de

(25)

15

traiter numériquement, pour obtenir une structure tridimensionnelle du réseau poreux ([Y. Song et al. 2016], voir Figure 14.

Figure 14 : Illustration 3D du réseaux poreux d'échantillons d'argilite obtenu par FIB/SEM. [Y. Song et al. 2016]

À notre connaissance, afin d’observer des pores de la taille du nm, l’un des rares outils disponibles est la Microscopie Electronique à Transmission, éventuellement par Balayage, en 2D ou en 3D (aussi appelée TEM pour Transmission Electron Microscopy ou STEM pour

Scanning Transmission Electron Microscopy) voir [L. M. Keller et al. 2013]. La Figure 15

présente une image en STEM tomographique (3D), à une taille de voxel de 2.3 nm3, du réseau

poreux de l’argile à Opalinus.

Figure 15 : Illustration 3D du réseau poreux d'argile d'Opalinus obtenu par STEM. (a) données brutes (b) Reconstruction 3D. [L. M. Keller et al. 2013]

De ces réseaux poreux obtenus par imagerie, et de façon plus directe que la mesure de coefficients de diffusion [Scherer et al. 2007], on peut déduire un ensemble de paramètres caractéristiques, dont le volume percolant, les longueurs de chemins de percolation, la tortuosité, l’orientation, les distributions de taille de gorges et d’évasements le long d’un chemin de percolation, etc. [Y. Song, et al. 2015].

(26)

16

Différents modèles existent dans la littérature, qui relient les propriétés du réseau poreux à ses propriétés de transport, telle que la relation de Kozeny-Karman ou celle de Katz-Thompson [Scherer et al. 2007].

Il est également possible de combiner les méthodes d’imagerie sur plusieurs échelles, pour en déduire les propriétés de transport de fluide (perméabilité au sens de Darcy notamment) au moyen des outils de calcul numérique 3D actuels (méthode de type Lattice Boltzmann par exemple) [Davy et Adler 2017].

Analysons maintenant de façon plus précise comment les écoulements dans les milieux poreux peuvent être caractérisés, notamment du point de vue expérimental.

2.2- Écoulements de fluides

La perméabilité d’un milieu poreux caractérise la facilité qu’a ce milieu à être traversé par un fluide, qu’il soit liquide ou gazeux, ou les deux. Avec la diffusion de fluide, c’est l’un des principaux paramètres permettant d’évaluer les écoulements de fluides dans les milieux poreux.

Approche de Darcy pour les écoulements laminaires

A la même époque que J. Weisbach, A. Chézy, G. C. F. M. Riche de Prony et J. L. Poiseuille 11,

Henry Darcy a démontré de façon empirique que le débit volumique d’injection 𝑄 d’un fluide liquide incompressible dans un milieu poreux pouvait être relié à la chute de pression ∆𝑃 par la formule suivante [Dullien 1992; Coussot et al. 2012] :

𝑄 = −𝐾𝑎𝑆 𝜇

Δ𝑃

𝑙 (1.2.1)

où S est la section du milieu poreux mesurée transversalement à l’écoulement (en m²), 𝑙 est la longueur du milieu poreux traversé par le fluide et mesurée suivant la direction de l’écoulement (m), 𝐾𝑎 est la perméabilité apparente du milieu poreux (m²) et 𝜇 est la viscosité

dynamique du fluide (Pa.s). Cette équation, appelée aussi loi de Darcy, fait l’approximation d’un milieu homogène, isotrope, traversé par un flux suivant une seule direction donnée (i.e. uniaxial), d’un fluide supposé incompressible. Les effets de gravité sont négligés lors de la mesure, car très faibles devant l’effet de la pression d’injection du fluide. Ils ne seront donc pas détaillés dans ce manuscrit.

Lorsque le fluide est compressible (c’est le cas des gaz), dans le cas d’un écoulement uniaxial suivant x, l’équation (1.2.1) s’écrit plutôt de la façon suivante :

𝑄 = −𝐾𝑎𝑆

𝜇 ∇𝑃 (1.2.2)

où ∇𝑃 est le gradient de pression de gaz (il est égal à 𝜕𝑃

𝜕𝑥 suivant x), et x est l’abscisse suivant

l’axe d’écoulement.

Quel que soit le régime d’écoulement, la résolution de l’équation de diffusivité des fluides [Bear 1988; Dullien 1992; Davy 2010] donne par ailleurs :

(27)

17

(1.2.3) pour un gaz dont on mesure le débit de gaz (ou le gradient de pression) en amont (en x=0), avec P1 = P(x=L) et P0=P(x=0), et L longueur de l’échantillon de matériau suivant l’axe

d’écoulement.

Par ailleurs, à gradient de pression de gaz imposé entre les deux extrémités de l’échantillon (P1 = P(x=L) et P0=P(x=0)), et avec une hypothèse de gaz parfait et d’écoulement stationnaire

au travers d’un réservoir tampon (de volume V1) situé en amont de l’échantillon, le débit

volumique est déduit comme :

𝑄𝑣𝑚𝑜𝑦 = 𝑉1∆𝑃1

𝑃𝑚𝑜𝑦∆𝑡 (1.2.4)

et la perméabilité au gaz est finalement donnée par : 𝐾 =𝜇𝑄𝑣 𝑚𝑜𝑦 𝐴 2𝐿𝑃𝑚𝑜𝑦 (𝑃𝑚𝑜𝑦2 −𝑃 02) =2𝜇𝐿𝑉1 𝐴 ∆𝑃1 ∆𝑡(𝑃𝑚𝑜𝑦2 −𝑃 02) (1.2.5) où la pression diminue de P1 pendant t, et P1 << P1.

Pour un liquide, quelle que soit l’abscisse x considérée le long de l’axe d’écoulement : (𝑑𝑝(𝑥)

𝑑𝑥 )𝑙𝑖𝑞𝑢𝑖𝑑𝑒 = −

(𝑃1− 𝑃0)

𝐿 (1.2.6)

Dans ce cas, le débit Q est généralement mesuré directement et la perméabilité est déduite de l’équation (1.2.2).

Notion de régimes d’écoulement

L’équation (1.2.2), comme la loi de Darcy (1.2.1), ne sont valides que pour les régimes d’écoulements de type laminaire.

La nature du régime d’écoulement (laminaire, turbulent ou autre) est déterminée de façon empirique par un nombre adimensionnel, appelé le nombre de Reynolds. Celui-ci représente le rapport entre les forces inertielles et les forces visqueuses agissant sur le fluide. Dans le cas d’une conduite droite de diamètre hydraulique Dh, dont un schéma est représenté sur la

Figure 16, il est défini comme :

𝑅𝑒 = 𝜌𝑣𝐷ℎ

µ =

𝜌𝑄𝐷

𝑆µ (1.2.7)

Où 𝜌 est la masse volumique du fluide (en kg.m-3), 𝑣 la vitesse moyenne du fluide (en m.s-1),

Dh le diamètre hydraulique de la conduite (en m), µ la viscosité dynamique (en Pa.s), Q le débit

volumique (en m3.s-1) et S la section perpendiculaire à l’écoulement (en m2) avec 𝑆 = 𝜋𝐷 ℎ2/4.

(28)

18

Figure 16 : Schéma d’une conduite droite de diamètre hydraulique Dh

Lorsque la vitesse du fluide augmente, le nombre de Reynolds augmente et une transition entre le régime laminaire et le régime turbulent apparaît pour un Re d’environ 2100 [Bear

1988]. Pour un Re inférieur, les forces visqueuses sont prédominantes et le régime est

laminaire. Pour un Re supérieur, les forces inertielles sont prédominantes et le régime est

turbulent.

Dans le cas d’un matériau poreux, la longueur caractéristique du matériau n’est plus le diamètre hydraulique mais le diamètre de pore moyen 𝑑̅𝑝𝑜𝑟𝑒.

𝑅𝑒 =𝜌𝑄𝐷ℎ 𝑆µ =

𝜌𝑄𝑑̅𝑝𝑜𝑟𝑒

𝑆µ (1.2.8)

Pour des empilements granulaires, [Chilton et al. 1931] ont redéfini le diamètre hydraulique comme étant le diamètre moyen des particules 𝑑̅𝑝𝑎𝑟𝑡𝑖𝑐𝑢𝑙𝑒𝑠 :

𝑅𝑒 =𝜌𝑄𝑑̅𝑝𝑎𝑟𝑡𝑖𝑐𝑢𝑙𝑒𝑠

𝑆µ (1.2.9)

Avec un nombre de Reynolds ainsi redéfini pour les empilements granulaires, il a été observé que la loi de Darcy est valide pour des valeurs de Re ne dépassant pas une valeur comprise

entre 1 et 10 [Bear 1988]. Au-delà de cette valeur, des effets inertiels apparaissent et la relation entre le gradient de pression et le débit n’est plus linéaire. Dans ce manuscrit, le nombre de Reynolds sera évalué pour déterminer la nature du régime d’écoulement (laminaire ou turbulent).

Écoulements non laminaires

Lorsque la relation entre le débit et le gradient de pression n’est plus linéaire, mais que la porosité du milieu reste inférieure à 80%, Ph. Forchheimer [Ward 1964] a proposé une modification de l’équation (1.2.2) avec un terme supplémentaire, qui est fonction du carré du débit, et qui prend en compte les effets inertiels :

∇𝑃 =𝑑𝑃 𝑑𝑥 = − 𝜇 𝐾𝑖𝑆 𝑄 −𝛽𝜌 𝑆2 𝑄2 (1.2.10)

où Ki est la perméabilité intrinsèque, et 𝛽 est le coefficient dit de Forchheimer en (m-1). La

perméabilité mesurée avec cette équation (1.2.6) est dite intrinsèque car elle prend en compte des effets qui ne sont pas liés au réseau poreux du matériau. Il s’agit ici des effets inertiels, liés à un débit de fluide élevé.

(29)

19

Si la porosité devient de l’ordre de 80% ou plus, les équations de Brinkman et Darcy-Brinkman-Forchheimer permettent de prendre en compte les effets inertiels et de turbulence [Bear 1988 ; Dullien 1992].

En pratique, dans le cas d’un gaz, prenons en compte les effets inertiels. La mesure de perméabilité 𝐾𝑎est faite en augmentant le débit de gaz Q et en mesurant la pression P(x=0)

présente en amont de l’échantillon, avec une pression en aval P(x=L) égale à la pression atmosphérique. Une régression polynômiale d’ordre deux 𝑦 = 𝑎 𝑄 + 𝑏 𝑄2 est réalisée sur la courbe représentant y=(𝑃2(𝑥=𝐿)−𝑃𝑃(𝑥=𝐿)2(𝑥=0)) en fonction de Q.

En effet, en combinant les équations (1.2.3) et (1.2.10), on obtient : 𝑑𝑃 𝑑𝑥 = − 𝜇 𝐾𝑖𝑆𝑄 − 𝛽𝜌 𝑆2𝑄2 = 𝑃2(𝑥 = 𝐿) − 𝑃2(𝑥 = 0) 2 𝐿 𝑃(𝑥 = 𝐿) (1.2.11)

Soit pour la relation entre

(

𝑃

2(𝑥=𝐿)−𝑃2(𝑥=0) 𝑃(𝑥=𝐿)

)

et Q : 𝑃2(𝑥 = 𝐿) − 𝑃2(𝑥 = 0) 𝑃(𝑥 = 𝐿) = 2 𝐿 (− 𝜇 𝐾𝑖𝑆𝑄 − 𝛽𝜌 𝑆2 𝑄 2) (1.2.12)

La perméabilité apparente est alors calculée à partir du coefficient a de premier degré de l’interpolation polynômiale comme :

𝐾

𝑎

= −

2𝐿 𝜇

𝑎𝑆

(1.2.13)

Effet de glissement des gaz

Dans le cas des gaz, un autre effet doit être pris en compte. Il s’agit du glissement des particules du gaz sur les parois du milieu, couramment appelé « effet Klinkenberg » dans la littérature [Civan 2015]. L’écoulement mesuré du gaz est alors la somme de l’écoulement visqueux et de l’écoulement par glissement (voir Figure 17).

Figure 17 : Profil des vitesses d'un gaz dans un tube capillaire. [Lion 2004]

Cet écoulement par glissement correspond au choc des particules sur les parois. Il induit une distribution de vitesse du gaz non nulle aux parois.

Les chocs des particules de gaz sont d’autant plus importants que le libre parcours moyen du gaz est grand [Lion 2004]. La taille des pores a un effet sur l’effet Klinkenberg : plus les pores sont petits, plus les particules subiront des chocs sur les parois. Un moyen expérimental pour

(30)

20

limiter cet effet est d’augmenter la pression du gaz de façon à diminuer le libre parcours moyen des particules.

L. J. Klinkenberg a formulé une relation entre la perméabilité apparente (mesurée à gradient de pression donné, donc à glissement des particules de gaz donné) et la perméabilité intrinsèque (indépendante du phénomène de glissement du gaz sur les parois) et permettant de tenir compte de cet effet [Civan 2015] :

𝐾𝑎 = 𝐾𝑖(1 +𝛽𝑘

𝑃𝑚) (1.2.14)

où βk est le coefficient de Klinkenberg en Pa et Pm est la moyenne entre pression amont et

pression aval :

𝑃

𝑚

=

𝑃

𝑖

+ 𝑃

0

2

(

1.2.15

)

A température constante, ce coefficient est considéré comme inversement proportionnel à un rayon de pores moyen [Lion 2004].

Expérimentalement, l’effet Klinkenberg est quantifié en mesurant la perméabilité apparente pour différentes pressions d’injection de gaz, et en traçant la relation (( 1

𝑃𝑚), 𝐾𝑎), voir Figure 18.

Figure 18 : Schématisation du principe de Klinkenberg. [Lion 2004]

L’ordonnée à l’origine de l’interpolation linéaire des points expérimentaux donne directement la perméabilité intrinsèque 𝐾𝑖 (la pente donne βk).

2.3- Écoulement de fluides à suspension

Les fluides à suspensions sont composés d’un liquide et d’une suspension solide, sous forme de particules plus ou moins fines.

Dans la littérature sur l’écoulement de ce type de fluides, la problématique principale concerne la séparation du liquide et des particules solides, que l’on appelle communément la filtration. Il s’agit de permettre aux particules de s’accumuler soit à la surface du milieu poreux

(31)

21

(en formant un « cake » ou bouchon, voir Figure 19 ci-dessous), soit par rétention dans le volume du réseau poreux.

Figure 19 : Trois modes de filtration : (1) du bouchage en surface (formation d’un « cake » ou bouchon, à gauche), (2) du passage en force (ou déformation), et (3) de la filtration

physico-chimique. [McDowell-Boyer et al. 1986]

Mécanismes de filtration

Les phénomènes de transport des suspensions dans les milieux poreux sont complexes, car pilotés par des processus très variés. Toutefois, [Herzig et al. 1970] proposent de définir trois modes de filtration principaux (voir Tableau 1 ci-dessous) :

1) La filtration mécanique prédomine pour les particules de taille au moins égale à 30 microns. Elle est liée à l’existence de sites de rétention de diverses morphologies, voir Figure 20. En particulier, une constriction se produit quand la particule est bloquée par la pression du fluide dans une ouverture de pore trop petite.

Figure 20 : Types de sites propices à la rétention de particules, et donc au bouchage du réseau poreux, extrait de [Herzig et al 1970]

En réalité, la rétention mécanique de particules est liée à des processus de sédimentation, d’inertie (i.e. du poids) des particules, d’effets hydrodynamiques (qui provoquent des mouvements de migration latérale des particules, surtout si elles ne sont pas sphériques et s’il y a du cisaillement ou du frottement aux parois), à l’interception directe (taille de particule plus importante que celle des pores), ou à de la diffusion due au mouvement brownien [Herzig et al. 1970].

2) La filtration physico-chimique concerne les particules colloïdales, dont la taille est inférieure au micron (voir Introduction et Section 1.2)., et les particules de taille comprise entre 1 et 3 microns.

(32)

22

Les forces de surfaces de type Van der Waals (VdW) ou électrostatiques, et les forces chimiques, sont susceptibles d’influencer cette filtration (voir Tableau 1 ci-dessous).

3) Les particules de taille intermédiaire, comprise entre 3 et 30 microns, sont filtrées par un mécanisme mixte, impliquant à la fois la filtration mécanique et la filtration physico-chimique.

Le Tableau 1 ci-dessous résume ces principaux mécanismes en fonction de la taille des particules. d > 30 µm 30 > d > 3 µm 3 > d > 0,1 µm d > 0,1 µm Constriction Frottement VdW et électrostatique Chimiques

Tableau 1 : Mécanismes de filtration prédominants (en vert) en fonction de la taille des particules, d’après [Herzig et al. 1970]

L’identification des modes exacts de filtration requiert donc la connaissance des caractéristiques des particules (taille, forme, composition chimique, etc.).

Caractérisation des particules

De façon analogue aux pores du milieu à traverser, les particules d’une suspension peuvent être caractérisées par une distribution de taille, appelée distribution granulométrique. Les techniques usuelles emploient le tamisage, la diffraction laser ou la diffusion de lumière. On en trouvera une description plus concrète dans [Allen 1996 ; Andreotti et al. 2011].

En complément, la Microscopie Électronique à Balayage permet d’évaluer la forme et l’état de surface des particules [GNMEBA 2008].

L’analyse par diffraction de rayons X ou par fluorescence X permet d’évaluer la composition chimique des poudres solides [Scrivener et al. 2017].

Cas particulier de la filtration mécanique : notion de jamming ratio et efficacité du filtrage En première approche, le mécanisme de filtration mécanique par interception directe explique la rétention des particules de plus de 30 microns, et est considéré comme prépondérant pour les particules de taille inférieure [Herzig et al. 1970 ; McDowell-Boyer et al. 1986 ; Aji et al. 2012].

En effet, quelle que soit la taille des particules, lorsque celle-ci est plus grande que celle des pores, l’injection est impossible : il y a bouchage (ou jamming, en anglais) [Herzig et al. 1970 ; McDowell-Boyer et al. 1986 ; Aji et al. 2012].

Dans ce cadre, le jamming ratio j permet d’estimer l’amplitude avec laquelle le milieu poreux filtre le fluide à suspension, i.e. dans quelle mesure il laisse (ou pas) passer les particules via son réseau poreux sans qu’il y ait de bouchage.

Par définition [21], le jamming ratio j s’écrit : j = ( dpore

dparticules) (1.2.16)

où dpore et dparticules sont les diamètres caractéristiques du réseau poreux ou des particules,

(33)

23

A l’inverse, [Aji et al. 2012] définissent le jamming ratio comme le rapport entre la taille de particule solide 𝑟𝑠 et la taille de pore 𝑟𝑝 : 𝑗′ =

𝑟𝑠

𝑟𝑝. Dans cette publication, la taille de pore (ou de particule) est une moyenne en volume : elle correspond au diamètre d50 pris à 50% (la

moitié) en volume de la distribution de taille de pores (ou de particules, respectivement). Le diamètre d50 correspond à la taille maximale pour laquelle les pores (ou, respectivement, les

particules) représentent 50 % du volume total de pores (ou, respectivement) de particules. Dans cette publication [Aji et al. 2012], un modèle de flux de particules est mis en équation, qui prend en compte la rétention de particules par interception directe. Il s’agit d’une équation de forme exponentielle, qui décrit le rapport entre la concentration en particules en sortie du milieu poreux 𝐶𝐿(𝑟𝑠)par rapport à leur concentration en entrée 𝐶0(𝑟𝑠) par :

𝐶𝐿(𝑟𝑠)

𝐶0(𝑟

𝑠)= {1 − 𝑓𝑛𝑠(𝑟𝑠)}𝑒𝑥𝑝 (−𝑓𝑛𝑠(𝑟𝑠)

𝐿

𝑙) (1.2.17)

ù fns est la proportion inaccessible au flux de particules dans le milieu poreux, et L est la

longueur du milieu suivant la direction d’écoulement.

Ce modèle permet de prédire de façon fiable la proportion de particules colloïdales (<1 micron) filtrées au travers de lits de billes de polymère de même taille (prise à des valeurs comprises entre 0.89 et 4.5 microns), et de porosité de l’ordre de 40%, voir Figure 21. Pour ce type de milieu poreux modèle, près de 100% des particules colloïdales traversent le milieu pour un jamming ratio j d’au moins 2,5 (j’ de 0,4 ou moins).

Figure 21 : Courbes de percée normalisée C^L (r_s)/C^0 (r_s) en fonction du jamming ratio (modèle de la littérature et modèle proposé par les auteurs), et points expérimentaux

associés. [Aji et al. 2012]

Dans [Mc Dowell-Boyer et al. 1986], l’interception directe est qualifiée de « straining mechanism » (voir Figure 24). C’est le principal mécanisme de rétention, si l’on néglige les réactions chimiques de la suspension avec le milieu poreux. Les auteurs se basent sur une étude expérimentale décrite dans [Sakhthivadivel 1969]. Avec une expérience permettant de limiter les interactions particule-particule et milieu poreux-particules, les auteurs montrent

(34)

24

que pour j<10, il y a bouchage complet en surface du milieu poreux. Pour 10<j<20, la perméabilité du milieu est réduite d’un facteur 7 à 15 et plus de 30% des particules sont retenues par le milieu. Dès que j>20, il n’y a plus de filtration significative : seuls 2 à 5% des pores sont occupés par des particules et la perméabilité n’est réduite que de 10 à 50% par rapport à sa valeur avant filtration.

De façon complémentaire, [Herzig et al. 1970] ont décrit l’interception directe comme un mécanisme purement géométrique (blocage de particules sphériques dans des fissures (« crevices » de forme et taille données). Avec cette hypothèse, ils indiquent que la filtration est négligeable pour un jamming ratio j minimal de 12. Leur analyse prédit que 0.53% du milieu est occupé par des particules pour j=20, et seulement 0.053% pour j=50, voir Tableau 2 (où  est le volume relatif du milieu, qui est rempli de particules, dg est le diamètre des grains

du milieu de filtration et d est le diamètre des particules de la suspension).

Tableau 2 : Volume de pore occupé par des particules () en fonction du rapport diamètre des grains du milieu/diamètre des particules (d/dg). [Herzig et al. 1970]

D’autres auteurs utilisent un critère proche du jamming ratio qui utilise la taille à 50% de la distribution cumulée. Par exemple, [Sherard et al. 1984] montrent qu’un sable fin en suspension dans l’eau ne peut pas pénétrer au travers d’un sable plus grossier si :

𝑗′′ = 𝑑𝑠 15

𝑑𝑝 85 < 9

Où 15% en masse des particules du milieu à traverser (ici, un sable grossier) ont un diamètre inférieur ou égal à 𝑑𝑠 15 et 85% des particules de la suspension (ici le sable fin dans l’eau) ont

un diamètre inférieur ou égal à 𝑑𝑝 85.

Plus récemment, des mesures expérimentales de micro-fluidique [Auset et al. 2006] et présentées par [Dersoir 2015] ont analysé l’interception directe de particules micrométriques par un milieu poreux, représenté par des canaux de taille de quelques dizaines de microns, et d’une perméabilité de 60 mDarcy (c’est-à-dire 6x10-14 m2). Le phénomène observé correspond

à une accumulation progressive des particules sur la paroi des pores, généralement là où se présente une constriction, voir Figure 22. Dans ces travaux, le jamming ratio est nommé « degré de confinement » W/D (où W est la largeur de pore et D la taille de particule). Un cake de filtration, qui correspond au bouchage à la surface, ou proche de la surface du milieu poreux, par les particules, est observé pour des rapports (W/D) de l’ordre de 1 (Figure 22 D). Un dépôt des particules à l’intérieur du milieu poreux (et pas à sa surface) se produit pour des rapports W/D compris entre 1,8 et 2,5 (Figure 22 B et C). Dès que W/D>2,5, les particules sont seulement et fixées progressivement interceptées sur les parois des pores (Figure 22 A).

(35)

25

Figure 22 : Flux d'une suspension colloïdale à travers un milieux poreux à vitesse identique en fonction du diamètre des colloïdes. (A) 3µm, (B) 4µm, (C) 5µm et (D) 7µm. [Auset et al. 2006]

Le jamming ratio est un bon indicateur de la capacité de filtration (ou de transfert) d’un fluide à suspension au travers d’un milieu poreux, cependant d’autres paramètres peuvent jouer un rôle majeur.

Ainsi [Dersoir 2015] rappelle que la fraction volumique de particules joue un rôle conjoint avec le jamming ratio (ou degré de confinement W/D), voir Figure 23. Un bouchage complet (cake de filtration) est obtenu dès que W/D<1, c’est-à-dire lorsque les particules sont plus grandes que les pores (Figure 23 A). Par contre, pour des particules plus petites que les pores (D<W), deux cas distincts sont liés à la fraction volumique de particules. Si la fraction volumique est élevée, les particules forment des arches à l’entrée des pores (phénomène de « bridging »), les rendant inaccessibles pour les particules venant par la suite (Figure 23 B). Si la fraction volumique est plus faible, le bouchage se fait en volume, par accumulation progressive des particules dans les pores (Figure 23 C).

Figure 23 : Mécanismes de bouchage en fonction du degré de confinement W/D et de la fraction volumique de particules . (A) bouchage complet, (B) bridging, (C) standard. [Dersoir

2015]

De façon complémentaire, [Roussel et al 2007] ont montré par simulation numérique que le

jamming ratio est fonction de la fraction massique de solide en suspension. Concrètement, ils

supposent qu’une suspension (composée de billes de verre de diamètre d en suspension dans un gel) passe à travers un tamis à trous carrés de côté a. Ils évaluent le résidu R (rapport entre la masse initiale de particules dans la suspension et la masse de particules restantes dans le

(36)

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tamis) en fonction du rapport D = (a/d), équivalent à un jamming ratio, pour différentes fractions massiques. Les résultats obtenus (voir Figure 24) montrent que le jamming ratio D nécessaire pour ne pas avoir de filtration augmente avec la fraction massique de solide contenue dans la suspension.

Figure 24 : Résidu (R) en fonction du jamming ratio (D) pour différentes fractions massiques de particules. Résultats issus de simulations numériques [Roussel et al. 2007].

[Dersoir 2015] quantifie les paramètres du bouchage, en les reliant non seulement au jamming ratio et à la fraction volumique de particules, mais aussi au débit d’injection de la suspension et à la force ionique de la suspension (ici représentée par la concentration en KCl), voir figure ci-dessous, sur l’exemple de l’injection de suspensions de particules de latex de 5 microns au travers de micro-canaux, pendant 90 minutes. Ainsi, aucun bouchage n’est possible, quel que soit le débit de fluide, pour une fraction volumique de particules de 0.1% (10-3) et moins

(Figure 25 A), alors que le bouchage est possible au-delà de 0.1% de particules si la vitesse du fluide varie entre 1 et 10mm/s. La force ionique joue également sur la morphologie de l’accroche des particules sur les parois, avec une formation de dendrites, qui se produit pour des fractions volumiques inférieures à celles nécessaires en l’absence d’ions en solution, mais cela n’induit pas un bouchage prématuré (Figure 25 B).

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