A NÉE 1 902- 1 ©03 i\:° 64
0RTKO8ËOPIE OCULAIRE
ORTHOSKIASCOPIE
THESE POUR LE DOCTORAT EN MEDECINE
présentée et soutenue publiquement le 24 Décembre 1902
par
Eugène-Edmond-Antoinc-Joscpli-Maiie LE IOIGNIC
Elève du Service de Santé de la Marine Né àToulon(Var), le 2 mai 1875.
MM. BADAL, professeur... Président MASSE, professeur...
CABANNES, agrégé }Juges.
MOURE, ch. decours.
Le Candidat répondraaux questions qui lui seront faites sur les diverses parties de l'Enseignement médical.
BORDEAUX
IMPRIMERIE Y. CADORET
17, rue poquelin-molière, 17 1902
FACULTE DE MEDECINE ET DE PHAItMACIE DE BORDEAUX
M. de NABIAS Doyen. | M. PITRES.... Doyen honoraire.
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DUPUY [ Professeurs honoraires.
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LAGRANGE.
CARLES.
Le Secrétairedela Faculté : LEMAIRE.
Pardélibérationdu 5 août1879, la Facultéaarrêtéqueles opinions émises danslesThese^
sont présentéesdoivent êtreconsidéréescomme propres àleursauteurs,et qu'elle nenteiu
donner ni approbation ni improbation.
et de ceux qui m etaient chers
A MA MÈRE
Commebien faible remerciement pour tous ses sacrifices, pour son intelli¬
gente direction et son dévouement
sans bornes.
A mon Cousin Lucien REYNAUD Enseigne de vaisseau.
Entémoignage dema fraternelle affection.
MEIS ET AMICIS
A Madame de SALES de PANIÈRES
A Monsieur de SALES de RANIÈRES
Capitainede vaisseauenretraite, Commandeur de la Légion d'honneur.
Hommage respectueux demaprofonde reconnaissance.
Directeur du Service de Santé de lu Marine, Officier de la Légion d'honneur.
En respectueux hommage, et pour le remercier de sa haute bienveillance àmonégard.
A Monsieur le Docteur GIRARD
Médecinprincipal de la Marine,
Sous-Directeurde l'Ecoleprincipale du Service de Santéde la Marine,
Chevalier de laLégiond'honneur.
Aumeilleur desmaîtres, entémoignage demavivereconnaissance.
Directeur du Service de Santé de laMarine,
Directeur de l'Ecoleprincipale du Service de Santé de la Marine, Commandeur de la Légion d'honneur,
Officierde l'Instructionpublique.
A Monsieur le Docteur BERTRAND
Médecinenchefde ir* classe de la Marine, Membre correspondant de l'Académie de Médecine,
Officier de la Légion d'honneur.
A Monsieur le Docteur Honoré CASTELLAN
Médecin de la Marine en retraite, Chevalier delaLéyiond'honneur.
Engagede mabiensincèregratitude.
A MESMAITRES DE LA FACULTÉ ET DE LA MARINE
A MES CAMARADES
des corps de santéde l armée coloniale et dela marine
Etparticulièrementàmonexcellent
amile DocteurFrontgous.
Correspondant de l'Académie de médecine, Chevalier de laLégion d'honneur,
Médecin à Vichy.
Ausavantclinicien, en souvenir ému des soins qu'il m'a pro¬
digués.
A Monsieur le Docteur G. FERRÉ
Professeur de Médecine expérimentale à la Faculté, directeur de l'Institut Pasteur de la Ville de Bordeaux,
Officier de l'Instructionpublique.
Monsieur le Docteur BADAL
ProfesseurdeClinique ophtalmologiqueàla Facultéde Médecine de Bordeaux, Chevalier de la Légion d'honneur,
Officier de l'Instructionpublique.
Nousespérons remercier plus efficacement dans l'avenir, en
nous efforçant de faire un peu de bien au cours de notre car¬
rière médicale, tous ceux qui nous en auront donné les moyens
en nous aidantetendirigeantnosétudes; maisnous ne saurions
laisserpasser l'occasion qui nous est offerte aujourd'hui de leur
dire combien vive est notre gratitude.
MmeBertulus, Mme et M. de Banièresnous ont témoigné cons¬
tamment une affection bien précieuse et nous voudrions autre¬
ment que pardes mots leur prouver notre reconnaissance pour tant de marques d'intérêt.
M. l'abbé Eynaud, aumônier du Lycée de Toulon, a été pour
nous un ami dans le malheur, nousne saurions l'oublier.
M. le commandant Vignot nous a honoré de sa très haute
amitié et a mis libéralement au service de causes qui nous étaient chères tout le dévouement qu'il sait si bien employer à
ladéfense de l'infortune et de lajustice. Nous en garderons un souvenir ému.
Parmiles maîtres qui nous ont prodigué les principes de la
science médicaleetdecelle, non moins utile, qui console, M. le professeuragrégéRondot, M. le médecin principal de la marine hirard,etM.le médecin-majorde l'armée Rouget, trois modestes savants, ont droit plus particulièrement à notre reconnaissance.
M' le professeur Ferré nous a guidé dans les travaux
que nous avons entrepris dans son laboratoire de micro¬
biologie
par sa critique aussi rigoureuse qu'éclairée; il veut bienencorenous choisir comme préparateur de 1Institut Pas-
— 16 —
teur dont il a la direction, c'est une marque d'intérêt
qui
noustouche et dont nousnous efforcerons d'être digne.
Notre maître, réminent professeur
Badal,
nous ainitié à des
études que nous aimons entre
toutes et
ne nous ajamais mé¬
nagé ses conseils. Nous
lui présentons l'expression d'une res¬
pectueuse gratitude que
rend
encoreplus grand l'honneur qu'il
nous faitaujourd'hui en acceptant
la présidence de notre thèse.
Qu'il nous soit aussi permis de
remercier notre ami, le D1 Au-
baret, ledistinguéchef decliniquedu
professeur Badal, dont les
intéressants travauxnous ontinspiré le sujet de notre
thèse inau¬
gurale.
Nous adressons enfin l'assurance de notre sincère
et inaltéra¬
ble attachement aux excellents camarades
d'Ecole, qu'une
estimeréciproque et les mêmes
aspirations ont rendus nos amis;
nous les quittons à regret en
gardant la ferme conviction que
tous, nous continuerons,
quoique séparés, à lutter pour les
idées qui nous sont chères comme nous
l'avons fait jusqu'à ce
ORTHOSCOPIE OCULAIRE
ORTHOSKIÀSCOPIE
CHAPITRE PREMIER
HISTORIQUE
L'éclairage
du fond de l'œil peut se pratiquer de deux ma¬nières: soit avec la lumière directe, soitavec la lumière réflé¬
chie. L'emploi de la lumière directe a permis à Rrùcke d ob¬
serverla lueur oculaire et cette découverte a précédé de quel¬
ques années
l'endoscopie
oculaire à la lumière réfléchie par laméthode
ophtalmoscopique.
Nous allons, danscechapitre,suivre1évolution
historique
de l'examen de l'œil et voir comment la lumièredirecte, longtemps délaisséeaprèsavoir été la première utilisée, nous parait devoir reprendre aujourd'hui une impor¬tance considérable, grâce aux progrès réalisés par l'éclairage
électrique.
Depuis la plus haute antiquité, lalueur oculaire a été obser¬
vée sur les yeux de chiens, de chats et d'autres animaux qui
possèdent au fond de l'œil un lapetum ou tapis, surface réflé¬
chissante à reflet métallique formée par la choroïde. Cette pro-
Le Moignie 2
— 18 —
priété,
qui avait vivement frappé les anciens, n'a pu être expli¬
quée qu'assez
récemment.
D'après une
opinion
assezrépandue, ces yeux passaient pour
développer de la
lumière et cela surtout lorsqu'on irritait les
aniinaux. On attribuait par
suite cette prétendue formation de
lumière au système nerveux.
Ce n'est qu'en 1810.que
Prévost démontre les premier que ni
l'irritation, ni la volonté, ne
peuvent donner lieu à ce phéno¬
mène lumineux, qui, dû à la
réflexion d'une lumière incidente,
ne se produit
jamais dans
unecomplète obscurité.
Gruithuisen confirme ce résultat et
ajoute
quecette lueur
oculaire est due non seulement au
tapetum de
cesanimaux,
mais encore à une réfraction
extraordinaire du cristallin.
Par analogie, on a cru un peu
plus tard que les yeux des
albinos et des lapinsblancs
possédaient
unelumière propre par
suite de l'absence de pigment au
niveau du fond de l'œil. Ce
n'est nullement pour cette
raison
quela pupille de l'albinos
parait rouge,
mais bien,
commeon l'a démontré de nos jours,
parce que
le pigment fait défaut à la partie antérieure de l'œil
que les rayons
lumineux
ypénètrent non seulement par la
pupille,
mais
encoreà travers l'iris, la sclérotique et la cho¬
roïde. De cette façon, le fond de
l'œil est éclairé de toutes parts
et non point seulement au
niveau des images produites par ses
différents dioptres. Les rayons
qui partent de ce fond égale¬
ment éclairé ne vont donc plus se
concentrer à la sortie de l'œil
en un foyer unique,
mais
sedispersent dans toutes les direc¬
tions. Le fond très vasculaire de
l'œil étant d'un rouge assez
intense chez l'albinos, les rayons
qui
enparlent sont de la même
couleur, c'est pourquoi la
pupille apparaît rouge comme chez
les lapins blancs
qui,
euxaussi, sont privés de pigment.
Quant à la pupille
humaine,
onsait depuis longtemps qu'elle
peut, dans
des
castrès
rares,paraître lumineuse à la suite du
développement
d'une tumeur intérieure de l'œil (œil de chat
amaurotique).
Behr, en 1839, a observé
aussi la lueur oculaire dans des cas
d'aniridie et a constaté que les yeux
de l'observateur doivent,
pour se rendre compte de ce phénomène,
regarder 1 œil du
malade presqueparallèlementaux rayons
incidents. Dans
ces cas d'aniridie, la lueur estplus remarquable encore, la réline étant plus fortement éclairée et la propriétéd'accommodationpouvantfaire défaut.
Enfin, Cumming et Briicke, à peu près vers la môme époque,
en 1847, etindépendamment l'un de l'autre, trouvèrent le pro¬
cédé pour rendre lumineux l'œil humain bien constitué lorsque
l'observateur regarde presque parallèlement aux rayons inci¬
dents. Ce fait signalé parBriicke et Cumming
lorsqu'ils virent
la rétine s'illuminer, en interposant une lumière disposée au- devant d'un écran entre leur œil et l'œil observateur ne frappa guère leurs contemporains. Il estcependant cl une importance capitale et c'est lui quia dûinspirer Helmollz.
Warlon Jones dit que Babbage lui avait montré, vers la
même époque, un miroir élamé dont line petite portion de tain
était enlevée de manière à pouvoir envoyer la lumière dans l'œil, tout en regardant par l'ouverture. Celte
description
rap¬pelle déjà un peu l'ophtalmoscope de Coccius; mais comme
Babbage paraitne pas avoir ajouté de lentilles à son miroir, il
lia du pouvoir distinguer qu'exceptionnellement certaines par¬
ties de la rétine et c'est sans doute pour cette raison qu il n a pas publié sa découverte.
Quant à la raison pour laquelle les diverses parties de la
rétine ne peuvent pas ctre nettement distinguées lors même
quelles sont éclairées, comme par exemple dans les yeux d'ani¬
maux pourvus de tapelum et àfortiori dans les yeux normaux quiensont dépourvus,elleadonné lieuàbien descommentaires.
Dès le commencement du xvmc siècle, Méry avait observé
quil pouvait distinguer les vaisseaux de la rétine d un chat plongédans l'eau et dont les yeux paraissaient fortement lumi¬
neux.
La Ilire donna de ce fait une explication exacte. Il comprit
quil fallait un changement de réfraction du rayon pour faire
paraître 1 œil lumineux, mais il ne sut pas donner
d'explication
Plus précise (1709).
— 20 —
11 en fut de même de Kussmaul. Ce dernier montre, en 1845,
que la rétine
devient claire et reconnaissable si
onenlève
enavantde l'œil la cornée et le cristallin ou si on sort une
portion
du corps vitré de manière à
raccourcir l'axe de l'œil.
La grande difficulté
qu'avaient rencontrée les anciens auteurs
dont nous venons d'énumérerles découverteset qui furent vrai¬
ment les précurseurs
d'Helmoltz résidait dans l'impossibilité
avec les anciens modes d'éclairage, avec les sources
lumineuses
mises à leur disposition, de faire
coïncider les lignes de visée de
l'observateur avecles rayons incidents de la source.
Lorsque
Helmoltz découvrit leprincipe de la
construction des oplitalmos-
copes il formula la
loi suivante
:« Pour que la pupille de
l'œil observé paraisse lumineuse, il
faut que sur la rétine de cet
œil l'image de la
sourcelumi¬
neuse coïncide au moins en partie avec celle
de la pupille de
l'observateur ».
C'est là le principe qui doit
dominer toute l'endoscopie ocu¬
laire; ses conséquences vont, du reste, nous
permettre d'envisa¬
ger lesconditions dans lesquelles, non pas
l'image de la source,
mais la source lumineuse elle-même permettral'examen
du fond
de l'œil. Sinousnous bornons àindiquerl'historique
de l'endos¬
copieoculaire proprement
dite, c'est-à-dire de celle
quel'on pra¬
tiqueenemployantunfaisceau
lumineux direct,
nousvoyons que
c'estauFrançaisMéryqu'il fautrapporter
l'origine de la méthode.
La Hire, trois ans plus tard, en donne, comme nous
l'avons vu,
la véritable explication
scientifique.
Beaucoup plus tard encore, en
1834, Czermack construisit un
appareil qu'il
appela orthoscope, constitué
parunecuve à parois
de verre que l'on
remplissait d'eau
pourreproduire d'une façon
plus aisée les
expériences de Méry.
Coccius imagina aussi un orthoscope en
forme d'œillère à
surfaceantérieureplanequel'on
appliquait, après l'avoir rempli
d'eau, sur les paupières fermées; on
les ouvrait ensuite pour
mettre l'eau en contact avec la cornée.
On désignait ainsi cesinstruments sous
le terme d'orthoscopes
parce qu'ils
permettaient,
avec unesourcelumineuse quelconque,
d'examiner directement le fond de l'œil.
Comme l'ont fait remarquerSnellenet Landolt,cavecl'arsenal d'ophtalmoscopesque nous possédons, nousrecouronsrarement
à l'orthoscope pour l'examen du fond de l'œil ». On appelait, à
cette époque, ortlioscopie cette méthode qui consistaità provo¬
querla lueur pupillairesans l'aide del'ophtalmoscopeendispo¬
santla lumière d'une manière favorable à l'observateur. C'est ainsi quel'on explorait les décollements de larétine, lestumeurs
intra-oculaires etque l'on pouvait voir la lueuroculaire chez des aphaques etchez des hypermétropes d'un degré élevé. On pou¬
vait même produire les mêmes conditions favorables à ce mode
d'examen par l'emploi d'uneforte lentille concave. C'estStilling qui, à cette époque, fut un des seuls à préconiser ce moyen
d'exploration, « d'ailleurs beaucoup moins pratique que l'oph- talmoscopie », ajoutent Snellen et Landolt.
L'éclairage direct à cette époque servait uniquement à prati¬
quer Xexamen de l'œil à l'éclairage oblique ou encore à l'éclai¬
rage focal lorsqu'on dirigeait plus ou moins obliquement sur lœil, à l'aide d'une lentille convexe d'environ 15 dioptries, un faisceau lumineux convergent. De celte manière, on pouvait
éclairer très vivement la cornée, l'iris, le cristallin, les parties
antérieures du corps vitré et même, dans certaines conditions,
une partie du corps ciliaire. On pratiquait ainsi aisément ce qu avec le D1 Aubarct nous appellerons Xendoscopie dusegment antérieur. 11 restait en somme à pratiquer suivant la même méthode, Yendoscopie du segment postérieur.
Lemploi de la source lumineuse électrique pour pratiquer
1éclairage
ophtalmoscopique
a depuis déjà longtemps été pré¬conisé par bonnombre d'auteurs et les divers appareils quils
ont fait construire ne modifient pas le dispositif classique de
1
ophtalmoscope
en ce sens. Aussipeut-on grouper cesappareilssous 'e terme d'ophtalmoscopes auto-éclairants. Birnbacher
(1884),
Dennet (1885), Albertotti (1886), Juler (1886), Reid (1886) ontsuccessivement imaginé des appareils sur lesquels lasource lumineuse électrique envoyait un faisceau lumineux sur
unmiroir incliné ou sur un prismeà réflexion totale de
manière
àprovoquer l'éclairage du fond de l'œil. On trouve également
en Amérique des instruments ainsi fabriqués dans le corpmerce;
nous citerons le « Dezeng's luminous Retinoscope » (1) et le
« Self luminous ophtalmoscope » (2). Tout récemment encore
Wolfa présenté au Congrès de 1900 un ophtalmoscope électri¬
que avec prisme à réflexion totale.
Dans tous ces appareils, l'éclairage se fait d'une façon indi¬
recte comme avec l'ophtalmoscope;il restait à utiliser la source lumineuse électrique d'une façon analogue à Torthoscopie de Stilling etson emploi a été, en 1900, utilisé dans ce but parle
docteur Aubaret, qui n'a pas tardé à obtenir l'éclairage orthos- copique non seulement du segment antérieur de l'œil, mais
encore du segment postérieur et de la rétine. Le docteur Auba¬
ret décrivit sonappareil (3) sousle nom d'orthoscope,pourmon¬
trer qu'il voulait désigner par là un instrument destiné à
prati¬
quer l'éclairage et l'examen des diverses parties du globe ocu¬
laire depuis le dioptre cornéen jusqu'à la rétine. En effet, l'orthoscopie, d'après Stilling, permettait déjà d'explorer les
milieuxtransparents du segment antérieur; le docteur Aubaret
a montré qu'elle permettait avecautant de facilitéd'explorer
les
milieux transparents du segment postérieur et même la
rétine.
L'endoscopie oculaire se fait donc désormais de la manière
la
plus complète et sans le secours du miroirophtalmoscopique.
Au sujet du terme orthoscopie, on pourra faire la remarque,
et notre maître le professeur Radal a attiré noire attentionsur
ce point, qu'il passe sous silence deux choses importantes :
l'œil
et l'éclairage électrique; « du reste, le mot ophtalmoscope,
comme le dit le professeur Badal,n'a pas été mieux choisi,puis¬
qu'il n'indique pas la présence du miroir réflecteur,
partie
essentielle de l'instrument. L'expression allemande
Augenspiegel
est plusjuste » (4).
(1) Self luminous ophtalmoscope—Chambers—Inskeef and C°manufacturer,88,
90, Wabash avenue,Chicago III.
(2) Dezeng's luminous retinoscope,Dezeng oplical Go; Germantown Pa.
(3) Aubaret, Emploidela lumière électriqueenophtalmologie, Sociétéd'anatonue
etdephysiologie de Bordeaux, séancedu 10 décembre 1900.
(4) Cliniqueophtalmologique deBordeaux, juillet 1902.
En outre, le terme orthoscopie a
servi
àdésigner d'autres
méthodes d'exploration
endoscopique des cavités naturelles, il
existe ainsi une orthoscopie laryngienne et un
ortlioscope des¬
tinéà éclairer directement le larynx en redressant
l'image
ren¬verséeproduite par le miroir
de l'appareil.
11est évident que le terme n'est pasà
l'abri de critique, néan¬
moins il a acquis droit de cité en
ophtalmologie, il désigne
uneméthode d'exploration oculaire
bien définie,
uneméthode qui
remonte à Méry, à LaHire, que
Czermack, Coccius et Stilling
utilisaient et tant que l'on n'aurapas trouvé un terme
qui puisse
exprimer lacaractéristique de l'instrument
ainsi proposé, c'est-
à-dire la propriété de faire, à
l'aide d'une
sourcelumineuse,
directè l'endoscopie oculaire totale, nous pouvons
admettre la
convention provisoire nouspermettant
de désigner
cesappareils
éclairants sous le nom d1orthoscopes.
Grâce à l'orthoscope, non seulement le
D1' Aubaret est arrivé
à pratiquer l'examen des divers milieux transparents
et de la
rétine àl'image droite et à l'image renversée,
mais
encoreil
apu utiliser cet instrument pour l'exécution de
la mensuration
des amétropies par le procédé de
Guignet.
Au cours des recherches que nous avons faites au
sujet des
appareils du Dr Aubaret et en essayant, suivant les
conseils du
D'Badal, d'utiliser l'orthoscope pourpratiquer l'examen
binocu¬
laire du fond de l'œil, nous avons trouvé que
Giraud Teulon
avait utilisé la sourcelumineuseélectrique pourson oplitalmos-
copebinoculaire. Ledispositif de cet auteurnous
parait réaliser
en quelque sorte l'orthoscopie telle quenous
la pratiquons
avecle D1 Aubaret, nous verrons cependant en quoi leurs
dispositifs
diffèrent.
L'endoscopie
oculaire à l'aide de la lumièredirecte est réali¬
sable et donne les mêmes résultats pratiques que
l'ophtalmos-
copie; c'estce que nous allons nous efforcer
de démontrer dans
leschapitres qui vont suivre en nous
inspirant des intéressants
travaux qui ont été publiés par le Dr
Aubaret à
cesujet, à la clinique
ophtalmologique du D'Badal,
et en nousaidant des
précieuxconseils que ce maitre éminent nous a
donnés.
CHAPITRE II
ORTHOSCOPIE. CHAMP D'ÉCLAIREMENT. CHAMP D'EXAMEN
La source lumineusedestinée à provoquerl'éclairage du
fond
de l'œil doit remplir certaines conditions
expérimentales déter¬
minées depuis qu'Helmollz a
définitivement démontré la
ma¬nière dont se comportent les rayons lumineux qui permettent
l'examen de l'œil. On sait à quelles conditions on pourra, à
l'aide d'un faisceau lumineux direct, provoquer une zone
de
rétine éclairée, susceptible de fournir une image visible pouf
un œil observateur. Néanmoins, pour bien saisir par une dé¬
monstration simple de quelle façon un faisceau lumineux
direct
arrive à pénétrer suffisamment
profondément dans l'intérieur
du globe oculaire pour permettre
d'y voir
nettement, nousallons supposer que la source
orlhoscopique S
estplacée de
telle façon qu'elle éclaire non seulement la réline,
mais toutes
les diverses parties du globe oculaire situées en avant
d'elle,
jusqu'à la surface externe
de la
cornée; oncomprendra alors
comment l'exploration endoscopique de l'œil se fait
de plus
en plus profondément à mesure que la sourcelumineuse
se rap¬proche des lignes de visée de
l'œil observateur. Les
sourceslumineuses utilisées pour faire l'éclairage latéral,
lorsqu'elles
sont disposées convenablement, c'est-à-dire lorsqu'on
les
rap¬proche peu à peu de l'œil observateur, permettent
de la même
façon d'éclairer des plans de plus en plus profonds du
globe
oculaire. En résumé, comme nous allons le démontrer et
l'uti¬
liser pratiquement, ce procédé permet de voir
jusqu'à la rétine
elle-même. Pourexpliquer d'une façon rigoureuse cette
donnée,
nous devons d'abord définir ce que l'on entend par
champ
men.
Champd'éclatement. — Soit une source (fig. 1) quenoussup¬
posons réduiteà un point S, disposée à une certaine distance de
l'axeoptique de l'œil observé, etsoit 0, la situation du centreopti-
quede l'œil observateur. Cette source lumineuse envoie un cône
lumineux SPP' qui, diaphragmé par la pupille de l'œil observé, vient, après s'être réfracté au niveau des dioptres oculaires,
former une image nette ou diffuse en ss' sur la rétine de l'œil
observé. Le faisceau lumineux SPP' constitue ce que le D1' Au-
baretappelle le faisceau utile, parce qu'il est le seul destiné à déterminer au niveau de la réline de l'œil observé un point ou
unezone d'éclairement, suivant que ss' formera un pointunique conjugué de S, ou, au contraire, un cercle de diffusion, si ce
point se trouve en avant ou en arrière de la rétine. Dans tous
Fig. 1.
0=œil
observateur (centre optique).
0'=œilobservé(centreoptique).
0P 0P'=limitesduebampd'examenpupillaire.
PcP'c'=limitesduebampd'examen rétinien, ce'=
champd'examen.
S=premièrepositiondelasource-«'champ
d'W*,
empièle,orle champ=deuxièmeposition delasource—
sis1 enamp d'examendanslaposition II dela réline.
, , nlnsétendue.
R'=
positionde la rétine, dontlapartie n-,commune auxdenx champsestpins
— 26 —
les cas, le champ d'éclaircmcnt
réduit
à unpoint
oubien à
uncercle de diffusion, n'est pas autre chose que
l'image nette
oudiffuse de la source lumineuse.
Champ d'examen. — Le point
0 étant le centre optique de
l'œil observateur, les lignes OP, OP', limiteront
le champ
d'examen pupillaire de cet œil.
C'est de cette manière,
eneffet,
que nous devons limiter
le champ d'examen rétinien,
car,dit
Helmoltz, « pour choisirune limite
déterminée,
onpeut prendre
» les lignes de visée de l'observateur menées
selon le bord de
» la pupille de l'œil observé et
dont le point d'intersection
se» trouveau centre de la pupille de l'observateur.
Si l'on traite
» ces lignes de visée comme des rayons
lumineux émis
parle
» centrede la pupille de l'observateur, on trouve que
le champ
» visuel de l'observateur sur la rétine de l'œil observé corres-
» pond à l'image de
diffusion
quedonnerait
surcette rétine le
» centre de la pupille de l'observateur.
Si
cecentre
ouplutôt
» son image vue à travers la lentille concave se
trouve
aupre-
» mier foyer de l'œil observé (foyer
antérieur de l'œil), le cercle
» de diffusion.... possède précisémentla même
grandeur
quela
» pupille de l'œil observé.
Mais le plus souvent l'œil de l'obser-
» vateur ne peut pas se
rapprocher
autantde l'œil observé et
» alors le cercle de diffusion qui donne la mesure
du champ
» visuel devient plus petit que la
pupille de l'œil observé et
» diminued'autant plusque l'observateur
s'éloigne davantage ».
Il est donc difficile de comprendre de quelle
manière la
pupille de l'observateur
limiterait
enquoi
que cesoit le champ
d'examenrétinien, et nous saisissons mal la définition
différente
qu'en ontdonnée Leroy et
Monoyer, qui prétendent
quele champ
d'examen n'est pas autre chose que
l'image de la pupille de
l'observateur surla rétine de l'œil observé.
Aussi préférons-nous, avec
M. Aubaret, donner la définition
suivante duchamp cl'excimen : c'est
la partie de la rétine-objet
correspondant exactement à
la partie de la rétine-image vue
dans lechamppupillaire. Cette
portion d'image géométrique est
variable avec la situation de l'observateur et avec le
diamètre
pupillaire de l'œil observé.
Il s'ensuit donc que le champ
d'examen
se trouveconstitué
sur la rétine de l'œil observé, tout autourdu point 0, où aboutit
laligne de visée Oo de
l'œil observateur. Nous
pouvonsle
cons¬truire en employant la
construction d'Helmoltz et
ensupposant
qu'il peut se représenter parl'image du centre de la pupille de
l'œil observateur sur la rétine de l'œil observé. Le centre opti¬
que de l'œil observateur
viendra donc également former
une image nette ou diffuse sur la rélinede l'œil observé, suivant
qu'il sera situé au niveau du remotum ou au
deçà
ou audelà.
Sinous considérons maintenantles rapportsqu'affectententre
euxchamp d'examenetchamp
d'éclairement,
nous verronsqu'ils
peuventcoïncider plus ou moins et se
rapprocher
ous'éloigner
l'un de l'autre.
Il suffit pour celade donner aux deux champs
la même forme
géométrique et de les représenter pardes ligneslimites
commes'il s'agissait de rayons lumineux,les unes
destinées
àformer le
champ d'éclairement émanant de la source lumineuse,les
au¬treslimitant lechamp d'examenémanantdu centre
de la pupille
de l'observateur. Les lignes SPP' représentent le cône
d'éclai¬
rement incident, ss' PP' la partie réfractée
correspondante;
leslignes OPP' représentent le côned'examen, que nous suppo¬
sons dans une position constante et cc'PP , la
partie réfractée
correspondante. La ligne Oo constitue l'axe du cône
d'examen
(%• t).Nousemployons de préférencel'expression de cône
d'examen,
car nous réservons celle de champ d'examen à la rencontre
de
la rétine observée par ce cône et parce que le
champ d'examen
nest pas autre chose qu'une section du cône d'examen perpen¬
diculaire à son axe, faite par la rétineobservée.
Dans la figure 1, on voit également que lorsque la source lumineuse S se trouveéloignée du centreoptique de
l'œil obser¬
vateur, le sommet du cône d'éclairement sur la rétine observée
se trouve éloigné du sommet du cône d'examen, et ces deux
cônes coïncidentpar leur basecommune quiestle champpu
pi 1-
laire. C'est en effet autour du champ pupillaire comme centre
fiue lesdeux systèmes decônes se meuvent et on se rend compte
que si la source
lumineuse
sedéplace de S
enS
,le cône lumi¬
neux SPP' devient S PP'; il en résulte qu'il empiète davantage
sur le cône d'examen et que si S se confond avec 0, centre optique de l'œil observateur,
il
y acoïncidence des deux cônes
d'examen et d'éclairement.
Dans ce dernier cas l'image rétinienne de l'œil observé paraît
nette à l'œilobservateur,sicedernier estconvenablementaccom¬
modé pour la distance à laquelle elle se trouve.
Dans certains cas, alors que la source S est encore éloignée
de l'œil observateur 0, il peut se faire que la coïncidence
des
cônes d'examen et d'éclairement soit suffisantepour qu'unecer¬
taine étendue des champs d'examen et des champs
d'éclaire¬
ment empiète l'un sur l'autre. C'est ainsi que
(voir la fig. 1), si
nous supposons la rétine déplacée en avant,
R', (le fait peut
seprésenter, soit dans le cas d'une
hypermétropie forte, soit dans
le cas d'un décollementde la rétineou d'une tumeur intra-ocu- laire), celle-ci sectionne le cône d'examen sur une
étendue plus
ou moins commune à celle où le côned'éclairementla sectionne lui-même, de telle sorte qu'il y a empiétement des deux por¬
tions de réline occupées par le champ d'examen et
le champ
d'éclairement.
C'est sur ce principe qu'est basé l'éclairage
orlhoscopique et
c'est pour cela qu'autrefois Slilling, dans l'examen
des
cas pathologiques que nousvenonsdesignaler, pouvait le pratiquer.
Casd'une sourcelum'neuse. Construction duchampd'éclairement.
Ces considérations préliminaires nous permettent
de vérifier
la donnée suivante, c'est qu'à mesure que la source
lumineuse
se rapproche de la ligne
de visée, le champ d'éclaircissement
envahit le champ d'examen. On donne encore à ce
dernier le
nom de champ d'observation.
Nous allons considérer le cas d'une source lumineuse
ayant
une certaine étendue etdont nousfigureronsune
représentation
linéaire (fig. 2).
Il nous suffira, pour avoirla zone
d'éclairement
ou encorele
considérer seulement les points extrêmes S et S'. Les rayons SP, SP', et S'P, S'P' constituent les rayons émanés des points
S et S' qui pénètrent dans l'œil observé; SP et SP'
limitent
l'ensemble de tous ces rayons lumineux et représentent ce que
nous avons appelé le faisceau utile.
Dans un premier cas, nous supposerons l'œil hypermétrope.
Le lieu où viennent converger les rayons réfractés par les
milieux réfringents de l'œil observé, se trouve en
S1 S'4. Il
s'ensuit que sur la rétine on a une série de cercles de diffusion
dont nous considérons les deux extrêmes, ob, ab\
Le cône lumineux incident PSP' vient former le cône lumi¬
neux réfracté
PS1P' qui rencontre la rétine
enci'b', le cône
lumineuxincident PS'P', vient former le cône lumineux réfracté
PS'jP',
qui rencontre la rétine en ab : a// sera donc le diamètrede la surface éclairée, le diamètre de l'image diffuse de la
source SS' c'est-à-dire du champ d'éclairement.
Dans undeuxième cas, nous supposerons l'œil myope (fig. 3).
L'image de la source SS' vient se former en
S1S'1, et
nousavons encore une série de cercles de diffusion, dont les deux
extrêmessont ab, ab', l'un formé par le faisceau réfracté ayant
son sommet en S', et l'autre en
S^, ab' représente la
zone d'éclairement.Dans lecas où l'œil a son remolum au point où se trouve la
source
lumineuse, l'image nette de la sourcevientse formersur la réline et le champ d'éclairement n'est pas autre chose que
limage même de la source. Dans ce cas les deux points limites
ab' du cercled'éclairementsontsituésdu côté opposé à lasource par rapport à l'axe. Dans tous les autres cas, la zone d'éclaire¬
mentempiète sur l'axe et dépasse ce dernier plus ou moins,
suivant que les cercles limites de diffusion ont un diamètreplus
ou moinsconsidérable.
Nous n'insistons pas surcecas, cependant nous ferons remar¬
quer qu'en vertu de la loi de réciprocité, l'image réelle et
renversée de la zonerétinienne vient, dans ce troisième cas, se
former au lieu et place de la source lumineuse, et affecte exac¬
tement engrandeur et en dimension la forme de cette source.
Fig. 2. Cas del'œilhypermétrope : Formation du champ d'éc'airement oudel'imagediffusede lasource
lumineuse SS' et des cerc'es limites
dediffusion.—SS'. Sourcelumineuse.— SjS',. Lieu géométriquedel'image delasource.—
ab
eta'b'. Cercles limites de diffusion.
—ab':Champd'éclairement. — aP etP7/. Sesrayons limites.
Flg. 3. — Cas de l'œil myope : Formation du champ d'éclairement ou de l image diffuse de lasourcelumineuseSS'et des cercles limites de
diffusion. (Même légendeque pour la (ig. 2 saufal1' et7/Pcomme rayonslimites du champ d'éclairemenlt.
(D'après 12. Aubari.t).