Théorème de Bernstein.
2013 – 2014
Référence : Claude Zuily, Hervé Queffélec, Analyse pour l’agrégation, Dunod, 2006, p.518.
Théorème.
Soitf : [0,1]→Cune fonction continue. On pose
ω(h) := sup{|f(u)−f(v)|,|u−v| ≤h}
son module de continuité.
On considère
Bn(f, x) =Bn(x) :=
n
X
k=0
n k
xk(1−x)n−kf k
n
lenième polynôme de Bernstein def. Alors
(i) (Bn)converge uniformément versf sur[0,1].
(ii) kf−Bnk∞≤Cω
√1 n
oùC est une constante.
(iii) L’estimation(ii)est optimale : il existeflipschitzienne telle quekf−Bnk∞≥ √δn pour une constante δ >0.
Démonstration. (i) Soit x ∈ [0,1] et (Xi)i≥1 une suite de variables de Ber- noulli i.i.d de paramètrex. On note Sn:=X1+· · ·+Xn.
On a alors E
f
Sn
n
=Bn(x) et E(f(x)) =f(x) par théorème de transfert, d’où
|f(x)−Bn(x)|= E
f(x)−f Sn
n
≤E
f(x)−f Sn
n
.
1
f est continue sur [0,1] compact donc uniformément continue par le théo- rème de Heine, donc ω(δ) est défini pour toutδ > 0 et limδ→0ω(δ) = 0.
Par ailleurs,|f(x)−f Snn
| ≤2kfk∞donc, pourδ >0, E
f(x)−f Sn
n
≤ω(δ)P
x−Sn
n
≤δ
+ 2kfk∞P
x−Sn
n
> δ
.
Par l’inégalité de Tchebychev, on a alors P
x−Sn n
> δ
≤Var Snn δ2
=Var(Sn) n2δ2
=x(1−x) nδ2
≤ 1 4nδ2. On en déduit que, pour toutx∈[0,1],
|f(x)−Bn(x)| ≤ω(δ) +kfk∞
2nδ2, d’où
lim sup
n→+∞
kf−Bnk∞≤ω(δ).
Le résultat vient de limδ→0ω(δ) = 0.
(ii) Affinons le résultat de convergence uniforme prouvé ci-dessus. On a d’abord E
f(x)−f Sn
n
≤Eω
x−Sn
n
.
Montrons queω(λh)≤(λ+ 1)ω(h) :
ωest croissante etω(h+k)≤ω(h)+ω(k) donc, par récurrence,ω(nh)≤nω(h) pourn∈N. On a alors, pourλ∈R, ω(λh)≤ω(dλeh)≤ dλeω(h)≤(λ+ 1)ω(h).
On en déduit
|f(x)−Bn(x)| ≤ω 1
√n
E √
n
x−Sn
n
+ 1
=ω 1
√n 1 +√ n
x−Sn
n 1
≤ω 1
√n 1 +√ n
x−Sn
n 2
2
par l’inégalité de Hölder. Or
x−Sn
n
2
2
=E
x−Sn
n
2!
= Var
x−Sn n
+
E
x−Sn
n 2
= 1
n2nx(1−x) +
x− 1 nnx
2
= x(1−x)
n .
D’où
|f(x)−Bn(x)| ≤ω 1
√n
1 +√ n
rx(1−x) n
!
≤ 3 2ω
1
√n
.
D’oùkf−Bnk∞≤32ω
√1 n
. (iii) On pose f :x7→
x−12
, on aω(h)≤h. Par ailleurs,
kf−Bnk∞≥ f
1 2
−Bn
1 2
=
Bn
1 2
=E
Sn
n −1 2
= 1
2nE|2Sn−n|.
D’où kf −Bnk∞ ≥ 2n1E|ε1+· · ·+εn| avec εj := 2Xj−1 variables de Rademacher i.i.d. D’où
kf−Bnk∞≥ 1
2nkε1+· · ·+εnk1
≥ 1 2n√
ekε1+· · ·+εnk2
par inégalité de Khintchine.
Orkε1+· · ·+εnk22= Var(ε1+· · ·+εn) + (E(ε1+· · ·+εn))2=n. D’où kf−Bnk∞≥ 1
2√
ne ≥ 1 2√
eω 1
√n
.
3
Détails supplémentaires
Proposition (Inégalité de Khintchine).
Soitε1, . . . , εn des variables de Rademacher (i.e. valant ±1 avec probabilité 12) i.i.d. Soitf ∈vectR(ε1, . . . , εn).
Alors kfk2≤√
eE(|f|).
Démonstration. On af =P
jajεj et on peut supposerkfk22= 1 =P
ja2j. Posonsg:=Qn
j=1(1 +iajεj). Alors pour presque toutx,
|g(x)|=
n
Y
j=1
q
1 +a2jε2j(x)
=
n
Y
j=1
q 1 +a2j
≤
n
Y
j=1
q exp(a2j)
= r
expX
a2j
=√ e.
D’oùkgk∞≤√ e.
De plus, sij∈ {1, . . . , n},
E(εjg) =E
εj(1 +iajεj)Y
k6=j
(1 +iakεk)
=E(εj(1 +iajεj))E
Y
k6=j
(1 +iakεk)
par indépendance desεj
E(εjg) =E(εj(1 +iajεj))Y
k6=j
E(1 +iakεk)
=iaj carE(εj) = 0.
OrE(f g) =Pn
j=1ajE(εjg), d’où|E(f g)|= iPn
j=1a2j = 1.
Or
kfk1≥ |E(f g)|
kgk∞ ≥ 1
√e.
4