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L'évaluation de l'offre et de l'accès aux soins buccodentaires fournis aux personnes âgées du Québec et du Canada qui résident dans les établissements de soins de longue durée publics : étude descriptive transversale

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Texte intégral

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L’évaluation de l’offre et de l’accès aux soins

buccodentaires fournis aux personnes âgées du

Québec et du Canada qui résident dans les

établissements de soins de longue durée publics

Étude descriptive transversale

Mémoire

Mélanie Gagnon

Maîtrise en sciences dentaires

Maître ès sciences (M. Sc.)

Québec, Canada

© Mélanie Gagnon, 2018

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L’évaluation de l’offre et de l’accès aux soins

buccodentaires fournis aux personnes âgées du

Québec et du Canada qui résident dans les

établissements de soins de longue durée publics

Étude descriptive transversale

Mémoire

Mélanie Gagnon

Sous la direction de :

Christian Caron, directeur de recherche

Aimée Brennan Dawson, codirectrice de recherche

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Résumé

La santé buccodentaire des résidents en centre d'hébergement de longue durée au Québec est très préoccupante actuellement. Ce projet de recherche a pour but de dresser un portrait de l'accès aux soins buccodentaires pour les résidents des centres d'hébergement publics québécois et de le comparer avec ceux des autres provinces canadiennes. Un court questionnaire de 9 questions sur les services dentaires offerts a été soumis aux directeurs de 201 centres d'hébergement échantillonnés. La cueillette des données s'est tenue entre le 26 mai 2016 et le 23 juin 2016. Cette étude a démontré que moins de 50 % des centres d’hébergement publics canadiens offrent des soins buccodentaires à ses résidents et qu’aucune différence significative n’existe entre l’offre de soins buccodentaires au Québec et dans le reste du Canada. Le modèle d’accès aux soins pour les résidents en centre d’hébergement public au Canada doit être revu et adapté aux

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Abstract

The oral health of people living in public long term care centers in Québec is very worrying actually. The goal of this research project is to draw the portrait of oral care access for the elderly people living in the public long term care centers in Québec and to compare it with the other provinces. A short 9 questions survey about oral care services offer has been sent to the directors of care of 201 sampled long term care centers. Data collection has been done between May 26th 2016 and June 23rd 2016. This study has demonstrated that less than 50 % of the Canadian public long term care centers offer oral care to their residents and that no significant difference exists between oral care offer in Québec and in the rest of Canada. The actual model of access to oral care for the residents in public long term care centers in Canada must be revised and adapted to the needs of this fragile and growing population.

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Table des matières

RÉSUMÉ ... III ABSTRACT ... IV TABLE DES MATIÈRES ... V LISTE DES TABLEAUX ... IX LISTE DES ABRÉVIATIONS, SIGLES ET SYMBOLES ... X REMERCIEMENTS ... XI INTRODUCTION ... 1

ÉTAT DES CONNAISSANCES ACTUELLES ... 2

1. CONCEPTS GÉNÉRAUX ... 2 1.1 CENTRE D’HÉBERGEMENT ET DE SOINS DE LONGUE DURÉE ... 2 1.1.1 PUBLIC ... 2 1.1.2 PRIVÉ ... 2 1.1.3 PRIVÉ CONVENTIONNÉ ... 3 1.2 ACCÈS AUX SOINS ... 3 1.3 DIRECTEUR DES SOINS ... 3 2. PROBLÉMATIQUE ... 4 2.1 BARRIÈRES AUX SOINS BUCCODENTAIRES DANS LES CENTRES D’HÉBERGEMENT ... 4 2.1.1 PERSONNEL SOIGNANT ... 4 2.1.2. PERSONNEL MÉDICAL ... 5 2.1.3. DENTISTES ... 5

2.1.3.1 OBSTACLES À LA PRATIQUE EN CENTRE D’HÉBERGEMENT ... 5

2.1.3.2 ÂGISME ... 6

2.1.3.3 DISTRIBUTION ... 7

2.2 VIEILLISSEMENT ... 8

2.2.1 VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION ... 8

2.2.2 VIEILLISSEMENT ET MILIEU DE VIE ... 9

2.3 PROCESSUS DE PERTE D’AUTONOMIE ET SON EFFET SUR L’HYGIÈNE BUCCODENTAIRE ... 9

2.4 PROBLÈMES BUCCODENTAIRES FRÉQUENTS CHEZ L’AÎNÉ ... 11 2.4.1 FORMATION DE LA PLAQUE DENTAIRE ... 11 2.4.1.1 CONSÉQUENCES DE L’ACCUMULATION DE PLAQUE DENTAIRE ... 11 2.4.2 XÉROSTOMIE ... 12 2.4.3 ÉTAT BUCCODENTAIRE DES AÎNÉS EN CENTRE D’HÉBERGEMENT ... 13 2.5 BESOINS DES AÎNÉS EN CENTRE D’HÉBERGEMENT ... 14 2.5.1 MODIFICATION DES BESOINS BUCCODENTAIRES DES AÎNÉS DANS LE TEMPS ... 14 2.6 RELATION ENTRE LA SANTÉ BUCCODENTAIRE ET LA SANTÉ GLOBALE ... 15 2.6.1 PNEUMONIE D’ASPIRATION ... 15 2.6.2 ACCUMULATION DE PLAQUE DENTAIRE ... 16 2.6.3 XÉROSTOMIE ... 17 2.6.4 CANCER BUCCAL ... 17 2.6.5 ÉDENTATION ... 17

2.7 COUVERTURE DES SOINS BUCCODENTAIRES AU QUÉBEC ET AU CANADA ... 18

(6)

2.8.1 CLINIQUE DENTAIRE PRIVÉE ... 19 2.8.2 CLINIQUE DENTAIRE EN CENTRE D’HÉBERGEMENT ... 19 2.8.3 CLINIQUE DENTAIRE MOBILE ... 20 2.9 POINT DE VUE DES ADMINISTRATEURS DE CENTRE D’HÉBERGEMENT SUR LES SOINS BUCCODENTAIRES ... 21 2.9.1 PROTOCOLE D’HYGIÈNE BUCCODENTAIRE QUOTIDIEN ... 21 2.9.2 BESOINS DES RÉSIDENTS ... 22 2.9.3 FORMATION DU PERSONNEL SOIGNANT ... 22 2.9.4 BARRIÈRES AUX SOINS ... 23 2.10 LOIS ET RECOMMANDATIONS EXISTANTES ... 23 2.11 PERTINENCE DU PROJET ... 24 2.12 OBJECTIFS DE RECHERCHE ... 25 2.13 HYPOTHÈSES DE RECHERCHE ... 26 MATÉRIEL ET MÉTHODOLOGIE ... 27 1. CONTEXTE DE LA RECHERCHE ... 27 2. APPROBATION ÉTHIQUE ... 27 3. ANALYSE STATISTIQUE ... 28 4. DEVIS DE RECHERCHE ... 29 5. POPULATION ... 29 6. TAILLE DE L'ÉCHANTILLON ... 29 6.1 CALCUL DE LA TAILLE D’ÉCHANTILLON ... 29 7. ÉCHANTILLONNAGE ET STRATÉGIE DE RECRUTEMENT ... 30 8. STRATIFICATION ... 31 9. PROCÉDURE EXPÉRIMENTALE ET INSTRUMENTS DE CUEILLETTE DES DONNÉES ... 32 9.1 RECENSEMENT ... 32 9.1.2 QUÉBEC ... 33 9.1.3 NOUVEAU-BRUNSWICK ... 34 9.1.4 SASKATCHEWAN ... 34

9.1.5 TERRE-NEUVE-ET-LABRADOR ... 34

9.1.6 NOUVELLE-ÉCOSSE ... 34

9.1.7 ÎLE-DU-PRINCE-ÉDOUARD ... 35

9.1.8 ALBERTA ... 35

9.1.9 ONTARIO ... 35

9.1.10 MANITOBA ET COLOMBIE-BRITANNIQUE ... 35

9.2 QUESTIONNAIRE ... 36

9.3 CUEILLETTE DES DONNÉES ... 36

10. VARIABLES À L’ÉTUDE ... 39

RÉSULTATS ... 41

2. ANALYSE DESCRIPTIVE ... 41

2.1 PORTRAIT DE L’OFFRE DE SOINS BUCCODENTAIRES AU QUÉBEC ... 41

2.1.1 OFFRE DE SOINS BUCCODENTAIRES ... 41

2.1.2 INFRASTRUCTURES ET ÉQUIPEMENTS ... 42

2.1.3 TYPE DE TRAITEMENTS ... 42

2.1.4 TYPE DE PROFESSIONNELS ... 42

2.2 PORTRAIT DE L’OFFRE DE SOINS BUCCODENTAIRES DANS LES AUTRES PROVINCES CANADIENNES (HORS QUÉBEC) ... 43

2.2.1 TAUX DE PARTICIPATION ... 43

2.2.2 ÉCHANTILLON ... 44

(7)

2.2.4 INFRASTRUCTURES ET ÉQUIPEMENTS ... 46 2.2.5 TYPE DE TRAITEMENTS ... 47 2.2.6 TYPE DE PROFESSIONNELS OFFRANT DES SOINS ... 47 2.2.7 PROFIL DES CENTRES D’HÉBERGEMENT NON RÉPONDANTS ... 48 3. ANALYSE COMPARATIVE ... 49 3.1 CLINIQUE DENTAIRE ... 50 3.2 SOINS PORTATIFS ... 50 3.3 OFFRE DE SOINS BUCCODENTAIRES ... 52 DISCUSSION ... 55 1. RAPPEL DES HYPOTHÈSES DE RECHERCHE ... 56 2. QUESTIONNAIRE ... 57 3. ÉCHANTILLONNAGE ET STRATIFICATION ... 58 4. TAUX DE RÉPONSE ... 59 5. ANALYSE DESCRIPTIVE ... 61 5.1 PROVINCE DE QUÉBEC ... 61 5.1.1 OFFRE DE SOINS BUCCODENTAIRES ... 61 5.1.2 INSTALLATIONS ET TRAITEMENTS ... 62 5.1.3 PROFESSIONNELS ... 63 5.2 PROVINCES HORS QUÉBEC ... 64 5.2.1 ÉCHANTILLON ... 64 5.2.2 OFFRE DE SOINS BUCCODENTAIRES ... 66 5.2.3 PROFESSIONNELS ... 68 5.2.4 INSTALLATIONS ET TRAITEMENTS ... 70 5.2.5 PROFIL DES NON-RÉPONDANTS ... 71 6. ANALYSE COMPARATIVE ... 74 6.1 CLINIQUE DENTAIRE FIXE ... 74 6.2 SOINS PORTATIFS ... 74 6.3 OFFRE DE SOINS ... 75 7. PROCÉDURE EXPÉRIMENTALE ... 78 8. LIMITATIONS DU DESIGN EXPÉRIMENTAL ... 80 9. VALIDITÉ INTERNE ... 80 10. VALIDITÉ EXTERNE ... 81 CONCLUSION ... 83 BIBLIOGRAPHIE ... 87 ANNEXE II : LETTRE DE PRÉSENTATION DU PROJET DE RECHERCHE 2007 ... 95 ANNEXE III : LETTRE DE PRÉSENTATION MODIFIÉE 2015 ... 97 ANNEXE IV : LETTRE DE PRÉSENTATION FRANÇAIS ... 99 ANNEXE V : QUESTIONNAIRE ANGLAIS ... 101 ANNEXE VI : QUESTIONNAIRE FRANÇAIS ... 105 ANNEXE VII : APPROBATION ÉTHIQUE DU MANITOBA ... 109

(8)

(9)

Liste des tableaux

TABLEAU I: TAUX DE RÉPONSE PAR PROVINCE ... 44

TABLEAU II: PROPORTION DE CENTRES D'HÉBERGEMENT RÉPONDANTS PAR MILIEU ... 45

TABLEAU III: PROPORTION DE CENTRES D'HÉBERGEMENT RÉPONDANTS SELON LA TAILLE (NOMBRE DE LITS) ... 45

TABLEAU IV: POURCENTAGE DE CENTRES D'HÉBERGEMENT PUBLICS OFFRANT DES SOINS BUCCODENTAIRES PAR PROVINCE ... 47

TABLEAU V: POURCENTAGE DE CENTRES D'HÉBERGEMENT RECEVANT LES PROFESSIONNELS DE LA SANTÉ BUCCODENTAIRE AU BESOIN, SUR UNE BASE RÉGULIÈRE OU JAMAIS PARMI LES CENTRES D'HÉBERGEMENT RECEVANT AU MOINS UN PROFESSIONNEL DE LA SANTÉ BUCCODENTAIRE ... 48

TABLEAU VI: PROPORTION DE CENTRES D'HÉBERGEMENT NON RÉPONDANTS PAR MILIEU ... 49

TABLEAU VII: PROPORTION DE CENTRES D'HÉBERGEMENT NON RÉPONDANTS SELON LA TAILLE (NOMBRE DE LITS) ... 50

TABLEAU VIII: COMPARAISON ENTRE LE QUÉBEC ET LE RESTE DU CANADA DES POURCENTAGES DE CENTRES D'HÉBERGEMENT AYANT UNE CLINIQUE DENTAIRE DANS L'ÉTABLISSEMENT ... 50

TABLEAU IX: COMPARAISON ENTRE LE QUÉBEC ET LE RESTE DU CANADA DES POURCENTAGES DE CENTRES D'HÉBERGEMENT OFFRANT DES SOINS BUCCODENTAIRES PORTATIFS ... 51

TABLEAU X: POURCENTAGES DES TRAITEMENTS OFFERTS À L'AIDE DE MATÉRIEL PORTATIF PAR PROVINCE ... 51

TABLEAU XI: COMPARAISON DU QUÉBEC AVEC LE RESTE DU CANADA DU POURCENTAGE D'OFFRE DE SOINS BUCCODENTAIRES DANS LES CENTRES D'HÉBERGEMENT PUBLICS ... 52

TABLEAU XII: COMPARAISON ENTRE LE QUÉBEC ET LES AUTRES PROVINCES CANADIENNES DU POURCENTAGE DE CENTRES D'HÉBERGEMENT DEVANT TRANSFÉRER LEURS RÉSIDENTS EN CLINIQUE DENTAIRE PRIVÉE OU EN MILIEU HOSPITALIER POUR Y RECEVOIR DES SOINS BUCCODENTAIRES ... 52

TABLEAU XIII: COMPARAISON ENTRE LE QUÉBEC ET CHACUNE DES PROVINCES CANADIENNES DU POURCENTAGE D'OFFRE DE SOINS BUCCODENTAIRES DANS LES CENTRES D'HÉBERGEMENT PUBLICS ... 53

TABLEAU XIV: POURCENTAGE DE CENTRES D'HÉBERGEMENT RÉPONDANTS ET NON RÉPONDANTS PAR STRATE ... 65

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Liste des abréviations, sigles et symboles

AB Alberta

ADC Association dentaire canadienne

AR Agglomération de recensement

CB Colombie-Britannique

CERUL Comité d'éthique de la recherche en

sciences de la santé de l'Université Laval

CESBV Centre d’excellence pour la santé

buccodentaire et le vieillissement

CEVQ Centre d’excellence sur le vieillissement

de Québec

CHSLD Centre d’hébergement de soins de longue

durée

CISSS Centre intégré de santé et de services

sociaux

CIUSSS Centre intégré universitaire de santé et de

services sociaux

DSI Directeur (trice) des soins infirmiers

IPE Île-du-Prince-Édouard

MB Manitoba

MSSS Ministère de la Santé et des Services

sociaux

NB Nouveau-Brunswick

NE Nouvelle-Écosse

ONT Ontario

PDF Portable Document Format

pH Potentiel hydrogène

QC Québec

RMR Région métropolitaine de recensement

RRPV Région rurale et petite ville

s Écart-type

SASK Saskatchewan

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Remerciements

À l’approche de la fin de ce grand projet que fut la rédaction de ce mémoire, je repense à plusieurs personnes m’ayant épaulé et sans qui l’aboutissement de ce projet n’aurait pas été possible.

Je tiens tout d’abord à remercier mon directeur de recherche, le Dr Christian Caron, pour son précieux temps, sa patience et ses conseils. Merci de m’avoir partagé ce projet de recherche stimulant ainsi que votre grande expérience. C’est une chance et un honneur d’avoir pu apprendre aux côtés d’un chercheur et d’un dentiste aussi passionné et expérimenté que vous. Merci également aux membres de mon comité d’encadrement, la Dre Aimee Brennan Dawson et Nadia Gargouri pour vos judicieux conseils et votre temps, ainsi qu’aux membres du CESBV pour les données québécoises qui m’ont été fournies. Merci au statisticien ayant travaillé sur les données de ce projet de recherche, Pierre-Hugues Carmichael ; tes nombreuses heures de travail et tes conseils ont été très appréciés.

Merci à tous les centres d’hébergement ayant pris le temps de répondre au questionnaire de cette étude sans qui ce projet de recherche ne se serait pas concrétisé.

Merci à mes parents, Johanne et Rodier. Votre écoute et votre support ont toujours été, et sont, encore, une motivation et un réconfort incroyables.

Finalement, merci à toi Jérémie. Ta présence dans les moments de découragement, tes précieux conseils, ton support ainsi que tes encouragements constants m’ont donné la motivation nécessaire afin d’accomplir ce projet qui n’aurait peut-être pas vu la fin sans toi.

(12)
(13)

INTRODUCTION

Au Québec, l'accès aux soins buccodentaires pour les aînés en centre d'hébergement est difficile et préoccupant. De plus, les programmes de conscientisation sur l’importance d’une bonne santé buccodentaire associés à l’augmentation de l’espérance de vie amènent plus d'aînés à conserver leurs dents plus longtemps, ce qui ne fera qu'exacerber le problème d’accès aux soins. [1] En effet, on observera dans cette population une demande de soins dentaires et parodontaux de plus en plus grande. [2] Cette étude permettra de comprendre mieux cette difficulté d’accès aux soins buccodentaires en dressant un portrait de l'offre de soins buccodentaires dans les centres d’hébergement publics québécois et canadiens. Ainsi, afin de mieux saisir le fondement de cette étude, les principaux concepts du vieillissement et de l'accès aux soins seront décrits. Un portrait du phénomène de vieillissement de la population permettra ensuite de mieux concevoir l’amplitude du problème d’accès aux soins buccodentaires pour cette population. Le processus de perte d'autonomie et son lien avec le déclin de l’état de santé buccodentaire, de même que son effet sur la santé générale seront décrits selon l’état des connaissances actuelles sur le sujet, ce qui permettra de mieux comprendre l'importance de répondre aux besoins en soins buccodentaires des aînés en perte d'autonomie. Un portrait de la santé buccodentaire des aînés en centre d'hébergement sera dressé selon l’état de la littérature actuelle qui démontrera les conséquences considérables du manque de soins buccodentaires professionnels et quotidiens qu’on retrouve dans cette population. Par la suite, les diverses possibilités d'offre de soins buccodentaires pour les aînés en perte d'autonomie seront explorées ainsi que les difficultés rencontrées par les directeurs des soins et les dentistes afin de bien comprendre l'amplitude du problème d'accès aux soins buccodentaires en centre d'hébergement public. Finalement, quelques recommandations déjà publiées seront passées en revue afin de démontrer l’importance du problème et surtout, les pistes de solution qui ont déjà été élaborées. Cette étude permettra de mieux comprendre l’importance de se doter d'un portrait pancanadien de services buccodentaires offerts en centre d'hébergement afin d'améliorer l’accès à des soins buccodentaires professionnels pour réduire les inégalités et améliorer la santé buccodentaire de cette population.

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ÉTAT DES CONNAISSANCES ACTUELLES

1. CONCEPTS GÉNÉRAUX

1.1 Centre d’hébergement et de soins de longue durée

Un CHSLD est une installation résidentielle ayant pour but de substituer aux incapacités psychosociales ou physiques d’adultes dont le maintien à domicile est jugé dangereux ou ne répondant plus à ses besoins. On y offre des « services d’hébergement, d’assistance, de soutien, de réadaptation et de surveillance ainsi que des services psychosociaux, infirmiers, pharmaceutiques et médicaux. » [3]

Au Québec, les CHSLD sont également appelés centre hospitalier de soins de longue durée. [3] Le réseau québécois possède des centres d’hébergement publics, privés et privés conventionnés.

1.1.1 Public

Au Québec, les CHSLD publics sont dirigés et financés par le Ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec (MSSS) [4]. Ailleurs au Canada, les centres d’hébergement peuvent être privés ou publics et ils prennent différents noms comme centres de soins infirmiers, établissements de soins de longue durée ou foyer de soins personnels. [5]

1.1.2 Privé

Les CHSLD privés sont des établissements gérés et financés par un particulier. Ils ont leurs propres conditions d’admission et fonctionnent de façon autonome. Ils sont donc entièrement indépendants du gouvernement à l’exception des normes à respecter établies par le MSSS au Québec. De plus, ils doivent obtenir un permis du MSSS afin d’héberger des aînés en perte d’autonomie en toute légalité. [4,6]

(15)

1.1.3 Privé conventionné

Le seul facteur différenciant les CHSLD privés conventionnés des CHSLD publics est qu'ils sont « dirigés par des particuliers propriétaires de leur immeuble et détiennent un permis octroyé par le MSSS les autorisant à gérer un nombre de places prédéterminées. » [4]

1.2 Accès aux soins

Selon l'Institute of Medicine, l'accès aux soins se définit comme « L'utilisation à un moment opportun de services de santé personnels afin d'atteindre les meilleurs résultats de santé possibles. » [7] L'accès aux soins est déterminé par plusieurs facteurs contribuants ou limitants. [8] Les facteurs limitant l'accès aux soins peuvent être de nature culturelle, linguistique, financière, structurelle (difficulté à se rendre au rendez-vous ou très longue attente avant le rendez-vous) ou physique. Un des facteurs facilitant le plus l'accès aux soins est l'existence d'une source régulière de soins, c'est-à-dire un professionnel de la santé ou un endroit où sont prodigués les soins. [9] Il est donc évident que l'absence d'un professionnel de la santé pour prodiguer des soins dans un environnement défini rend l'accès aux soins professionnels particulièrement difficile.

1.3 Directeur des soins

Le directeur des soins ou directeur des soins infirmiers (DSI) est nommé par le conseil d’administration du centre d’hébergement ou du centre hospitalier. La nomination d’un DSI est obligatoire dans toute « instance locale (CISSS/CIUSSS) et tout établissement qui exploite un centre hospitalier » québécois. Il exerce ses fonctions sous l’autorité du directeur général. En plus de « planifier, coordonner et évaluer les soins infirmiers », le DSI doit s’assurer de la qualité des soins infirmiers qui sont prodigués et donc, organiser les ressources « humaines, matérielles et financières » nécessaires afin que les soins offerts répondent aux exigences qu’il a établies. Il collabore aussi à l’élaboration des règles de soins médicaux et pharmaceutiques en lien avec la pratique des infirmières et il peut être la personne responsable d’organiser les activités cliniques dans l’établissement où il a été nommé. [10] Les tâches et les rôles du DSI sont les mêmes dans chacune des provinces canadiennes, cependant, l’information concernant l’obligation de la nomination dans chaque établissement de santé n’a pas pu être confirmée. [11] Considérant les

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responsabilités essentielles du DSI, il est toutefois raisonnable de supposer qu’un DSI soit présent dans chacun des centres d’hébergement afin de s’assurer de son bon fonctionnement et de la coordination des soins qui y sont prodigués.

2. PROBLÉMATIQUE

2.1 Barrières aux soins buccodentaires dans les centres d’hébergement

2.1.1 Personnel soignant

En plus des facteurs qui influencent positivement ou négativement l’accès aux soins généraux, l'accès aux soins buccodentaires en centre d'hébergement peut être régi par des facteurs additionnels. Une barrière aux soins buccodentaires fréquemment rapportée est l'attitude du personnel soignant envers les soins buccaux quotidiens. [12] En effet, le personnel soignant, principalement les préposés aux bénéficiaires, doit fréquemment assister les résidents en perte d'autonomie dans leurs soins buccodentaires quotidiens, cependant, une surcharge de travail, un manque de formation [13] ou un inconfort à prodiguer ces types de soins mène trop souvent à négliger ou à éviter ces soins. Il faut de plus comprendre que les aînés qui feront leur entrée dans les centres d’hébergement dans les prochaines années seront plus nombreux à avoir reçu des traitements dentaires exhaustifs comme des ponts fixes ou des prothèses sur implants, ce qui augmentera la complexité des soins d’hygiène buccodentaire quotidiens à prodiguer par le personnel soignant. [14] Selon Ritoli et coll., [15] bien que les infirmières auxiliaires considèrent les soins buccodentaires quotidiens comme importants, elles les classent aussi parmi les soins qu’elles préfèrent le moins prodiguer en les plaçant au même niveau que les lavements. [15] Ce manque d’intérêt s’explique entre autres par un manque important de formation qui a été démontré dans l’étude de Chung et coll. [16] Dans cette étude en centre d’hébergement, plus de la moitié des infirmières, infirmières auxiliaires et préposées aux bénéficiaires rapportaient n’avoir jamais reçu de formation sur les soins buccodentaires quotidiens à prodiguer aux résidents. Les principales difficultés rapportées par le personnel soignant lors des soins buccodentaires quotidiens sont la coopération difficile du résident et le manque de connaissances et de formation sur la façon de dispenser ces soins. Un manque d'intérêt ou de connaissances du personnel

(17)

soignant envers les soins buccodentaires quotidiens et la difficulté à trouver un professionnel en santé buccodentaire pour les assister en cas de besoins dépistés mènent forcément à une demande moindre en soins buccodentaires professionnels de leur part, ce qui diminue une fois de plus l'accès aux soins buccodentaires pour les aînés en perte d'autonomie.

2.1.2. Personnel médical

Une autre barrière aux soins buccodentaires qui est moins connue, mais tout aussi préoccupante est l’attitude des médecins et des autres professionnels de la santé par rapport aux soins buccodentaires professionnels. Bien que de plus en plus de médecins apprécient travailler avec une équipe multidisciplinaire comprenant un dentiste, plusieurs d’entre eux ne considèrent toujours pas les soins buccodentaires comme étant nécessaires dans le plan de soins en gériatrie. En ce sens, l’étude de Chung et coll. [16] a sondé les médecins sur leur opinion à l’égard de la cavité buccale et son importance dans la santé générale. Seulement 17 % des médecins ont affirmé que la cavité buccale faisait partie intégrante du corps humain. Une minorité (33 %) d’entre eux disait inclure un examen buccal dans leur examen physique général à l’entrée des résidents dans le centre d’hébergement. Sachant qu’une minorité de centres d’hébergement reçoit la visite d’un dentiste et que le médecin est la plupart du temps la personne-ressource en cas de douleur ou de problème buccodentaire, il est juste de se questionner, lorsque cette situation se présente, sur la qualité de la prise de décision, de la prise en charge et du suivi de la santé buccodentaire des aînés vivant en centre d’hébergement.

2.1.3. Dentistes

2.1.3.1 Obstacles à la pratique en centre d’hébergement

Les dentistes qui offrent des soins à domicile ou en centre d'hébergement au Québec sont très rares. Les raisons rapportées par les dentistes pour expliquer leur manque d'intérêt à prodiguer des soins en centre d'hébergement sont l'absence d'une unité dentaire, le manque de temps, le manque de formation, les mauvaises conditions de pratique [8], le pauvre contrôle de la stérilité de l’instrumentation et de l’environnement [18], le manque de confiance à traiter des patients médicalement compromis [12] et qu’ils réussissent à convaincre le patient de se déplacer pour

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recevoir ses soins à la clinique. Les dentistes rapportent aussi que les patients plus âgés ont des problèmes buccodentaires difficiles à traiter et que les options de traitements sont limitées. [19,20] De plus, selon MacEntee et coll. [19,20], 40 % des dentistes qui offrent leurs services en centre d’hébergement diminuent leurs honoraires de 10 à 20 % par rapport aux frais recommandés, ce qui laisse présager qu’ils ne le font pas dans le but d’augmenter leurs revenus, mais plus dans une optique de bonne volonté. Ainsi, en plus de traiter des problèmes buccodentaires plus complexes sur des patients demandant plus de temps et d’attention, les dentistes en retirent généralement des honoraires moindres. Une étude australienne s’est penchée sur l’opinion des dentistes face à la pratique en centre d’hébergement et en a conclu que plus de la moitié des dentistes ne présentait aucun ou très peu d’intérêt à offrir des services en centre d’hébergement. Bien que les dentistes ne désirent pas prendre en charge leurs patients qui font leur entrée dans les centres d’hébergement ou qui développent une perte d’autonomie telle qu’ils ne peuvent plus se déplacer chez eux, les dentistes sont conscients du problème d’accès aux soins buccodentaires professionnels pour ces patients. En effet, cette étude australienne a aussi souligné le commentaire de plusieurs dentistes qui mentionnaient que le « nombre croissant de résidents en centre d’hébergement qui ont de plus en plus de dents est une bombe à retardement potentielle si le problème n’est pas abordé dans des délais raisonnables. » Autrement dit, les dentistes sont sensibilisés à la problématique d’accès aux soins, mais demandent une organisation plus centralisée et coordonnée au niveau des centres d’hébergement ainsi qu’une aide financière des gouvernements afin de répondre adéquatement aux besoins des aînés vivant en centre d’hébergement. [21]

2.1.3.2 Âgisme

L’âgisme est un phénomène méconnu, mais bien présent qui influence directement l’intérêt que portent les dentistes à travailler avec les aînés en perte d’autonomie. Selon la définition du Larousse, [22] l’âgisme se définit comme une « Attitude de discrimination ou de ségrégation à l’encontre des personnes âgées. » Des fausses croyances, des préjugés ou l’ignorance mènent trop souvent à l’exclusion des aînés dans plusieurs situations y compris la pratique des soins buccodentaires. Ce comportement a été démontré chez les dentistes de Vancouver : 80 % des dentistes sondés qui ont manifesté des comportements d’âgisme n’ont jamais traité de patients dans un centre d’hébergement et 67 % d’entre eux ont affirmé que les patients de 65 ans et plus

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comptaient pour moins de 10 % de leur pratique [19]. Cette attitude chez ce groupe de dentistes ne porte pas ces derniers à offrir des soins à la population en perte d’autonomie ce qui finalement, diminue l’accès aux soins buccodentaires de cette population. Une plus grande ouverture et une meilleure connaissance des besoins des aînés contribueraient indéniablement à une plus grande inclusion des aînés parmi la clientèle des dentistes et diminueraient par le fait même les inégalités qui perdurent au niveau de l’accès aux soins pour les aînés en centre d’hébergement et ceux à domicile en grande perte d’autonomie. [19]

2.1.3.3 Distribution

On comptait en 2013, au Canada, 21 109 dentistes distribués dans les 10 provinces et les territoires, [23] et des ratios population/dentiste qui varient grandement d’une province à l’autre; allant de 2750 personnes/dentiste à Terre-Neuve-et-Labrador à 1 500 personnes/dentiste en Colombie-Britannique. Cette variation peut être expliquée par la nette préférence des dentistes à travailler en milieu urbain; seulement 10 % des dentistes pratiquent en milieu rural, là où le tiers des aînés réside. [24] En 2003, 57 % des aînés ontariens avaient consulté un dentiste contre seulement 18 % des aînés terre-neuviens. De plus, à cause du manque de disponibilité des services de santé généraux en milieu rural, les aînés sont souvent contraints à entrer en centre d’hébergement avant que ce ne soit réellement nécessaire. Ainsi, les aînés demeurant en centre d’hébergement en milieu rural doivent faire face à deux barrières aux soins importantes : le manque de dentiste en région rurale et le manque de dentiste en centre d’hébergement; leur accès aux soins buccodentaires professionnels en est donc grandement affecté. [25] Par ailleurs, il est difficile d’évaluer le nombre de dentistes ayant une formation avancée en dentisterie gériatrique au Canada puisqu’il ne s’agit toujours pas d’une spécialité officiellement reconnue, mais il a été estimé que 600 dentistes gériatriques seraient nécessaires en 2020 pour combler adéquatement les besoins buccodentaires des aînés au pays. [26] Considérant que le nombre d’aînés en perte d’autonomie est en forte croissance et que leur piètre état de santé buccodentaire ne s’améliore pas avec l’entrée en centre d’hébergement, cette estimation pourrait être sous-évaluée et le nombre de dentistes gériatriques nécessaires pour combler les besoins des aînés canadiens serait plus important.

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Face à un manque de professionnels de la santé buccodentaire et de structures pour faciliter leurs soins, les aînés en centre d'hébergement présentant des inconforts ou de la douleur dans la bouche sont examinés par des infirmières ou des médecins, ce qui peut mener à un mauvais diagnostic et des décisions de traitements questionnables. [8] Dans ce cas, plutôt que de traiter la cause des symptômes et signes cliniques, des médicaments contre la douleur et des antibiotiques sont ajoutés à la longue liste déjà existante. [27] Le problème d’accès aux soins buccodentaires dans les centres d’hébergement est donc bien présent et il est expliqué par plusieurs facteurs, dont le manque de dentistes prêts à offrir des services à cette population. Ce problème est présent plus que jamais et c’est pourquoi les responsables du système de santé devront se pencher davantage sur le sujet afin d’établir et de mettre en œuvre des plans d’action et des solutions efficientes.

2.2 Vieillissement

Le vieillissement est un ensemble de modifications observées au cours de l'avancée en âge, tant d'un point de vue physique que psychologique. C'est un phénomène caractérisé par une défaillance de la capacité à préserver l'homéostasie sous des conditions de stress physiologique, ce qui se traduit par des lésions cellulaires et moléculaires et ultimement, un vieillissement tissulaire. [28,29] Le corps maintient normalement un équilibre entre les phénomènes de réparation et de dégradation. Le vieillissement se produit lorsque le corps perd sa capacité d'adaptation et que l'efficacité des mécanismes de réparation diminue au profit des processus de dégradation qui augmentent. [28,29] Ainsi, bien que le vieillissement ne soit pas une pathologie, sa manifestation se fait souvent par l'apparition de plusieurs comorbidités qui rendent l'exécution des activités quotidiennes difficile et mènent ultimement à une perte d'autonomie. Au Canada, aucun consensus n’a encore été établi sur la définition universelle du vieillissement, mais à ce jour, une personne de plus de 65 ans est considérée comme un aîné selon Statistiques Canada. [30]

2.2.1 Vieillissement de la population

Le vieillissement de la population est un phénomène démographique connu et de plus en plus préoccupant qui s'explique par une chute du taux de natalité, une baisse de la mortalité et une augmentation de l'espérance de vie, [29] laquelle est maintenant estimée à 79 ans pour les hommes

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et 84 ans pour les femmes. [31] Au Canada, le vieillissement de la population touche particulièrement le Québec qui présente une population légèrement plus vieille que celle de l'ensemble du pays. En effet, en 2015, alors que le Québec comptait 17,6 % de personnes de plus de 65 ans parmi sa population totale, la proportion au Canada était de 16,1 %. Ce vieillissement de la population est entre autres expliqué par le phénomène des baby-boomers (nés entre 1946 et 1964). [32] Cette part de la population est en forte croissance et devrait atteindre 25 % de la population totale québécoise en 2031 selon l’Institut de la statistique du Québec. [33] Ce phénomène est observable partout au pays et Statistiques Canada prévoit qu’au cours des 20 prochaines années, « le vieillissement démographique devrait croître à un rythme accéléré. » [34]

2.2.2 Vieillissement et milieu de vie

Il est à noter que la majorité des aînés vivent à domicile, mais la proportion d'aînés en institution augmente avec l'âge. En 2001 au Québec, 8,6 % des 65 ans et plus et 37,0 % des 85 ans et plus vivaient en centre d'hébergement. [35] Au Canada, en 2011, c’était un peu plus de 350 000 personnes qui vivaient en centre d’hébergement. [36] Presque le trois quarts (71,7 %) des aînés vivant en CHSLD sont des femmes et la majorité des résidents sont hébergés en CHSLD depuis moins de 5 ans. Cependant, avec l’augmentation de l’espérance de vie et l’avancement dans le traitement des maladies, la cohorte des aînés deviendra de plus en plus hétérogène. En effet, l’accumulation des maladies chroniques et des incapacités fonctionnelles et financières sur le long terme aura pour conséquence de créer des aînés très malades et dépendants tandis que d’autres auront su conserver un bon état de santé et une certaine autonomie. [32] Au final, actuellement, c'est plus du trois quarts des personnes de plus de 65 ans qui présentent des incapacités et donc qui nécessitent des mesures particulières afin d'avoir un accès juste aux soins buccodentaires. [29]

2.3 Processus de perte d’autonomie et son effet sur l’hygiène buccodentaire

Selon Hébert et Tessier [29], la perte d'autonomie est un processus dynamique qui englobe des déficiences physiques, psychologiques et sociales qui ont des répercussions fonctionnelles sur l'aîné. Ainsi, l'autonomie se définit comme « un juste équilibre entre l'incapacité fonctionnelle du

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malade âgé et les ressources matérielles et sociales disponibles pour pallier cette incapacité. » Lorsque cet équilibre est brisé, l'entrée en centre d'hébergement devient une nécessité pour combler tous les besoins de l'aîné. Toujours selon Hébert et Tessier [29], « L'entrée en institution d'hébergement résulte d'une disproportion entre les incapacités du sujet et les ressources, surtout sociales, dont il dispose et qui ne compensent plus les incapacités, conférant ainsi à l'individu un handicap que l'institution viendra combler. » Une des grandes causes de perte d'autonomie chez les aînés est le déclin cognitif. En effet, bien que les troubles cognitifs ne touchent que 8 % de la population québécoise, c'est plus de 50 % des aînés en centre d'hébergement qui en souffrent. [37] Il a été aussi démontré que la présence d'un déficit cognitif est associée à un plus haut taux d'admission en centre d'hébergement. [38] Le déficit cognitif s'accompagne souvent d'une incapacité fonctionnelle, ce qui peut rendre plusieurs activités quotidiennes difficiles, y compris l'hygiène buccodentaire. On note alors une dégradation rapide de l'état de santé buccodentaire [38], car les aînés qui ont de la difficulté à effectuer seuls leurs soins d'hygiène dentaire n'en font pas part au personnel soignant. [2] Il a été démontré que les aînés en centre d'hébergement déments et ayant une dépendance fonctionnelle reçoivent plus d'aide pour l'hygiène, ont une hygiène buccale pauvre et plus d'inflammation gingivale que les aînés non déments et autonomes. De plus, le niveau d'hygiène buccale diminue avec l'augmentation de l'incapacité fonctionnelle comme l'apraxie [39] ou simplement une diminution de la dextérité manuelle associée à l'âge. [40–42] L'apraxie se définit comme une difficulté d'exécution de gestes ou de séries de gestes simples comme l'habillage, les tâches domestiques et les soins d'hygiène comprenant l'hygiène buccodentaire. [29] C'est un « trouble indépendant de toute atteinte des fonctions motrices et sensitives ou de tout trouble de la compréhension » qui est donc le résultat d'une atteinte d'une partie du cerveau: le cortex cérébral. [43] Une diminution de l’acuité visuelle fréquemment rencontrée avec l’avancée en âge ainsi qu’une diminution de la mobilité peut aussi rendre l’élimination de la plaque dentaire plus difficile et moins efficace. [32,44] Par ailleurs, il a été démontré que les aînés ont souvent une opinion trop positive de leur hygiène buccodentaire et de leurs capacités. En effet, Gaszynska et coll. [44] ont démontré que 26 % des aînés qui se disaient totalement aptes à effectuer eux-mêmes leur hygiène buccodentaire quotidienne présentaient un niveau d’hygiène buccodentaire déficient. De plus, 45,8 % des aînés qui recevaient de l’aide pour leur hygiène buccodentaire quotidienne présentaient aussi un niveau d’hygiène buccodentaire insuffisant. Ainsi, il n'est pas surprenant d'apprendre que le niveau

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d'hygiène buccodentaire en centre d'hébergement est globalement pauvre [41] et il est important de considérer qu'une diminution ou même un arrêt des soins d'hygiène buccodentaire quotidiens amène inévitablement une accumulation de plaque dentaire et les conséquences qui en découlent.

2.4 Problèmes buccodentaires fréquents chez l’aîné

2.4.1 Formation de la plaque dentaire

La formation de plaque dentaire est un processus complexe qui débute quelques heures après un nettoyage professionnel par la formation de la pellicule acquise sur la surface de la dent. [45] Cette dernière est composée de glycoprotéines (mucines) provenant de la salive [46] et contient des récepteurs capables de se lier aux bactéries de la cavité buccale. [45] La formation de plaque dentaire se caractérise par la colonisation de la pellicule acquise par des bactéries de la flore buccale, plus particulièrement Streptococcus oralis, Streptococcus mitis et Streptococcus gordonii [45–47] et débute quelques heures après le nettoyage professionnel, mais son accumulation commence à être significative après 24 heures. D'autres bactéries peuvent ensuite coloniser à leur tour la plaque dentaire par co-agrégation avec les colonisateurs précoces et ainsi former un micro-environnement favorisant la prolifération bactérienne. [46] Ainsi, après 24 heures sans brossage dentaire, la plaque dentaire commence à s'organiser et à nuire à l'environnement buccal.

2.4.1.1 Conséquences de l’accumulation de plaque dentaire

Si la plaque dentaire n'est pas délogée, elle peut se minéraliser et former du tartre, beaucoup plus dur et difficile à déloger. Lors de l'ingestion de sucres fermentescibles (carbohydrates), les bactéries de la plaque dentaire métabolisent le glucose disponible et forment de l'acide lactique qui aura pour conséquence de diminuer le pH de la plaque dentaire, entraînant ainsi une déminéralisation de la surface de la dent et ultimement la formation d'une carie. [46,48] Après 2 à 3 jours d'accumulation de plaque dentaire sur la surface dentaire, le tissu conjonctif de la gencive répond à l'agression par une réaction inflammatoire aiguë. Après 10 à 21 jours d'accumulation de plaque dentaire, une destruction du collagène et un infiltrat inflammatoire chronique sont observables; c'est l'apparition de la gingivite chronique. [48] La parodontite chronique résulte

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d'une multitude de facteurs locaux ou systémiques, mais sa sévérité est toujours proportionnelle à la quantité d'accumulation de plaque dentaire, donc du manque d'hygiène buccodentaire. Sa manifestation se fait par la présence d'inflammation de laquelle découlent des poches parodontales, une perte de l'os de support et une perte d'attache clinique. Les conséquences de ces changements pathologiques sont l'apparition de récessions gingivales qui exposent la racine des dents et en augmentent ainsi les risques de caries de racine, [49] une migration dentaire et une mobilité dentaire importante qui peut même mener à la perte de la dent. [50] Une mauvaise hygiène buccodentaire menant à l'accumulation de plaque dentaire a donc des conséquences importantes au niveau de la cavité buccale telles que l'halitose, l'apparition de gingivite et sa progression possible vers la maladie parodontale et la formation de carie qui, si elle n'est pas traitée, peut s'approfondir, causer l'affaiblissement de la structure de la dent et sa fracture, ou même entraîner la formation d'un abcès périapical lorsque la carie atteint la pulpe dentaire.

2.4.2 Xérostomie

Même si elle ne fait pas partie du processus normal de vieillissement, la xérostomie est un problème très fréquent chez les aînés; 40 % des plus de 80 ans s’en plaignent contre 6-10 % dans la population. La xérostomie est définie comme une sensation subjective de bouche sèche, c’est-à-dire qu’elle ne se manifeste pas toujours par une diminution objective de la quantité de salive produite par les glandes salivaires. [51] Le flot salivaire demeure normalement stable chez un aîné en santé, mais la sécheresse buccale peut être le résultat du diabète, d’un traitement de radiothérapie ou de la prise concomitante de plusieurs médicaments. [52] En effet, la prise d’un seul médicament peut assécher la bouche, mais on note une augmentation considérable dans la prévalence de la xérostomie lorsque le nombre de médicaments différents pris chaque jour est supérieur à 4. [32] Certaines classes de médicaments comme les antidépresseurs, les anticholinergiques et les antihistaminiques sont reconnues pour causer plus fréquemment la xérostomie. En plus de l’inconfort qu’engendre la xérostomie, elle entraîne de nombreuses conséquences comme une mauvaise haleine (halitose), une modification du goût des aliments (dysgueusie), une difficulté à avaler et à parler, une augmentation importante de l’incidence de caries et d’infections orales, une diminution de la rétention des prothèses dentaires et elle contribue à la progression des maladies parodontales. [32]

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Au final, l’hygiène buccodentaire déficiente menant à l’accumulation de plaque dentaire et ses nombreuses conséquences, compliquées par le phénomène de xérostomie, résultent en un environnement buccal inconfortable, inadéquat et non sécuritaire pour les aînés en perte d’autonomie.

2.4.3 État buccodentaire des aînés en centre d’hébergement

L'état buccodentaire des aînés en centre d'hébergement est inquiétant. Bien que de plus en plus d'aînés conservent leurs dents plus longtemps, [2] la proportion d'aînés complètement édentés s'élève toujours à 63,4 % en centre d'hébergement et leurs dernières prothèses dentaires supérieures datent en moyenne de 12,53 années. Plus du tiers des porteurs de prothèses dentaires en centre d'hébergement présentent une altération de la muqueuse et environ 11,5 % des aînés partiellement ou complètement édentés nécessitent le remplacement ou la réparation de leur prothèse dentaire. Ainsi, un aîné sur cinq en CHSLD éprouve des ennuis ou des douleurs avec ses prothèses dentaires, 15,4 % avec ses dents. De plus, on note que 20,3 % des édentés et 39,5 % des aînés ayant au moins une dent en bouche désirent être vus par un dentiste ou un denturologiste. [37] Même si l’on note une amélioration dans la prévalence de la carie depuis 1980, c'est toujours près de la moitié des aînés ayant au moins une dent qui présente de la carie ou une condition parodontale nécessitant un détartrage ou un traitement chirurgical (gingivite, tarte, poche parodontale). De plus, connaissant les conséquences d'un nombre insuffisant de dents restantes, il est préoccupant de savoir que 57,3 % des aînés ont moins des 4 paires de dents antagonistes permettant le contrôle de la mastication. [53] Même si la perte des dents avec l’âge est un phénomène couramment rencontré et accepté, elle ne fait pas partie d’un processus normal de vieillissement. Elle est l’aboutissement d’une cascade d’évènements pathologiques au niveau de la sphère buccale. [32] De plus, la lourde médication ou un déficit cognitif diminue souvent la capacité des aînés en centre d'hébergement à manifester la douleur ou le besoin de soins buccodentaires. Il devient donc de la responsabilité du personnel soignant ou des membres de la famille de détecter les signes de possibles pathologies buccales et d’être attentif à des indices d’expression de la douleur. [2,54] La sensibilisation des professionnels de la santé buccodentaire à la cause des aînés en centre d'hébergement et la formation du personnel soignant prodiguant les

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soins quotidiens sont donc très importantes afin que ces derniers puissent dépister précocement des signes d'inconfort ou de douleur buccodentaire, les anomalies des tissus buccaux et les pathologies dentaires comme la carie et les mobilités dentaires et ainsi référer le patient le plus rapidement possible au professionnel de la santé buccodentaire approprié.

2.5 Besoins des aînés en centre d’hébergement

Selon le Conseil canadien d’agrément des hôpitaux [19], les centres d’hébergement accrédités doivent offrir des soins dentaires, lorsque nécessaires, à leurs résidents et les soins dentaires professionnels doivent être supervisés par un dentiste qualifié. Malheureusement, la littérature semble indiquer que cette directive n’est pas appliquée uniformément puisque 42,0 % des aînés en centre d'hébergement rapportent leur dernière consultation avec un dentiste à plus de 5 ans [55]. Il est donc juste de se questionner sur la prise en charge des besoins de ces patients. Les conséquences d'un état buccodentaire si pauvre sont multiples : « importantes douleurs, infections telles que des abcès dentaires, problèmes de mastication, de nutrition, d'élocution, d'esthétique et d'estime de soi, mauvaise haleine, confusion et agitation dues à la douleur, sans oublier le fardeau financier important, tant pour le patient que pour l'État. » De plus, il est important de considérer que des dents en mauvais état peuvent causer de la douleur ou des problèmes à manger, sourire et parler, ce qui diminue considérablement la qualité de vie et contribue à l’isolement social. [56,57] Selon l'étude de Cohen et coll. [53], plus du trois quarts des aînés en centre d'hébergement ont des besoins buccodentaires qui ne sont pas comblés, particulièrement dans les sphères de la prévention et de l'accès aux soins. De plus, selon MacEntee et coll. [19,44], les soins immédiats reliés à des urgences (extractions d'urgence et ajustements de prothèses) sont les soins buccodentaires professionnels les plus fréquemment prodigués en centre d'hébergement par les dentistes ce qui laisse entrevoir la faible priorité qu’occupent les mesures de prévention et le dépistage des pathologies buccodentaires en centre d’hébergement.

2.5.1 Modification des besoins buccodentaires des aînés dans le temps

En se basant sur les projections démographiques, il est important de considérer que lors des prochaines années, les aînés qui seront admis en CHSLD seront des personnes qui auront

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accordé de plus en plus d'importance à leur santé buccodentaire. Puisque les aînés de plus de 85 ans ont été majoritairement élevés pendant la dépression, ils perçoivent souvent les soins buccodentaires professionnels comme un luxe et considèrent qu’ils n’en ont besoin que pour des soins d’urgence, donc en cas de douleur intense. Par contre, parmi les baby-boomers, plusieurs auront profité des bénéfices d’une eau fluorée (moins de 10%), de mesures de prévention et d’un niveau d’éducation supérieure et auront un salaire plus élevé et une couverture d’assurances plus large. Le résultat sera une rétention des dents naturelles en bouche et un investissement plus grand dans les traitements dentaires exhaustifs, une meilleure connaissance de leur santé buccodentaire et des changements reliés à l’âge et donc une disparition progressive des mythes à propos de la santé buccodentaire chez cette population. [32,58] Ils seront donc moins enclins à accepter des solutions simples à leurs problèmes de santé buccodentaire comme des extractions et exigeront plus d’options de traitements qui seront adaptés à leurs besoins. [26] Le rapport de 2009 du National Adult Dental Health Survey [1] rapporte que le nombre d’aînés de plus de 75 ans ayant toujours au moins une dent naturelle a augmenté de 23 % depuis 1998. Ainsi, même si la plupart des résidents en centre d’hébergement n'auront plus la capacité de le manifester, leurs proches et eux auront des attentes plus élevées en ce qui a trait à la qualité et la fréquence des soins buccodentaires qui leur seront prodigués. [2,37] En plus des nombreuses conséquences au niveau de la bouche, il ne faut pas négliger qu'une mauvaise hygiène buccodentaire peut avoir des répercussions notables sur la santé globale.

2.6 Relation entre la santé buccodentaire et la santé globale

2.6.1 Pneumonie d’aspiration

Plusieurs études ont démontré la relation entre la santé buccodentaire et la santé générale. [2,8,27,42,59,60] L'association entre l'hygiène buccodentaire et la pneumonie est la plus préoccupante actuellement. En effet, la pneumonie est la première cause de décès en centre d'hébergement et elle entraîne de lourdes comorbidités allant même jusqu'à doubler le séjour des patients hospitalisés. [60] Cette association s'explique par le fait que les bactéries présentes dans le biofilm dentaire et la salive sont aspirées dans les voies respiratoires inférieures et dans les poumons, entraînant une infection appelée pneumonie d'aspiration. Chez une personne en santé, l'organisme est suffisamment outillé pour se défendre et combattre l'infection. Ce n'est cependant

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pas le cas chez les aînés résidant en centre d'hébergement ayant pour la majorité de multiples problèmes de santé et une diminution de l’efficacité du système immunitaire relié à l’âge. [60] Parmi eux, plusieurs présentent en plus une dysphagie ou une diminution du réflexe de toux, ce qui augmente les risques d'aspiration. Également, une hygiène buccale insuffisante entraîne une augmentation de la concentration de micro-organismes dans la plaque dentaire et la salive, augmentant les risques d'infection par pneumonie d'aspiration. Il est démontré que les aînés résidant en centre d'hébergement retirent des bénéfices d'une meilleure hygiène buccodentaire. En effet, un nettoyage professionnel par une hygiéniste dentaire une fois par semaine a montré une diminution du taux de bactéries dans la salive et moins d'épisodes de fièvre et de pneumonies d'aspiration. Le nombre de décès par pneumonie d’aspiration chez les aînés en perte d’autonomie est également diminué de 10 % lorsqu’un protocole d’hygiène buccodentaire hebdomadaire est instauré. [61,62] De plus, il a été démontré que les bactéries causant les pneumonies acquises en communauté sont principalement des colonisateurs de l'oropharynx (Streptococcus pneumoniae, Haemophilius influenzae, Mycoplasma pneumoniae) alors que les bactéries causant les pneumonies acquises en milieu hospitalier sont principalement retrouvées dans la flore buccale (Pseudomonas aeruginosa, Staphylococcus aureus et bactéries Gram-négatives entériques) [47], ce qui démontre bien l'association entre la santé buccodentaire et ce type d'infection. Aux États-Unis, le Healthcare Infection Control Practices Advisory Committee et le Centre for Disease Control and Prevention in the United States of America ont publié des recommandations pour la prévention des pneumonies d’aspiration qui met l’emphase sur l’importance d’instaurer un plan de soins d’hygiène buccodentaire quotidiens. [62]

2.6.2 Accumulation de plaque dentaire

L'accumulation de bactéries dans la plaque dentaire et leur possible dissémination dans la circulation sanguine peut être la cause de maladies cardio-vasculaires, de bactériémies et d'endocardites bactériennes. [2,27] L’accumulation de plaque dentaire peut également entraîner l’apparition de gingivite et ultimement, contribuer à la maladie parodontale. Il a été démontré qu'une maladie parodontale non traitée peut contribuer à compliquer le contrôle du diabète et qu'un diabète mal contrôlé a un effet aggravant sur les maladies parodontales. [27] En effet, la maladie parodontale, de par sa nature, augmente les taux de marqueurs inflammatoires sanguins circulants, ce qui prédispose le diabétique à une résistance à l’insuline plus marquée et donc, un

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contrôle plus difficile de sa maladie. De plus, il est connu que le diabète diminue la réponse immuno-inflammatoire de l’hôte, ce qui diminue les défenses contre les bactéries parodontopathogènes, augmente le niveau d’inflammation dans la poche parodontale et contribue à la destruction du parodonte. Les changements microvasculaires sont aussi un phénomène connu du diabète. L’angiopathie diabétique diminue les processus de métabolismes osseux et de guérison, contribuant de ce fait même à la destruction du parodonte. [50]

2.6.3 Xérostomie

Bien que la xérostomie ait de nombreux impacts négatifs au niveau de la cavité buccale, ses conséquences ont une portée beaucoup plus grande. En effet, la diminution de l’effet protecteur de la salive entraîne une augmentation de la charge bactérienne buccale. Les troubles de la déglutition qui peuvent accompagner la xérostomie, conjointement avec l’augmentation de la charge bactérienne buccale, prédisposent l’aîné qui souffre de xérostomie à des pneumonies d’aspiration qui peuvent être lourdes de conséquences. [63]

2.6.4 Cancer buccal

Le cancer buccal a une forte prévalence chez les aînés, particulièrement ceux qui ont abusé de l'alcool ou du tabac. [27] En effet, 95 % des cancers buccaux sont diagnostiqués chez les personnes de plus de 40 ans et l'âge moyen du diagnostic est de 60 ans. Le nombre de décès suite à un cancer buccal est trois fois plus élevé que le cancer du col de l’utérus et le double du cancer du foie. [64] Il est donc préoccupant de savoir qu'une grande proportion d'aînés ne reçoit pas d'examen dentaire de routine ni de traitement préventif comme le dépistage de cancer buccal. [40] À cet effet, le US Public Health Service et l'American Cancer Society cités par Dolan et coll. [8] recommandent un examen buccal complet annuellement comprenant un dépistage du cancer buccal chez tous les adultes de plus de 40 ans.

2.6.5 Édentation

Des conditions de mastication non optimales comme plusieurs dents manquantes ou des prothèses dentaires mal ajustées peuvent modifier le choix et la qualité des aliments et ainsi mener à de la malnutrition, une perte de masse musculaire et un affaiblissement du système

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immunitaire, ce qui rend l'aîné plus à risque d'infections, de chutes, de fractures et donc de morbidité et de mortalité. [2,59]

Il est donc primordial d'inclure les soins buccodentaires professionnels dans une optique de bonne santé globale chez les aînés en hébergement. [32] Les recommandations du rapport général de l'étude de Corbeil et coll. [37] de 2006 vont également en ce sens. On y recommande entre autres un examen buccodentaire effectué par un dentiste pour chaque résident lors de son admission suivi des traitements nécessaires, d'un plan de soins préventifs, un suivi annuel et des soins de base offerts par un professionnel de la santé buccodentaire.

2.7 Couverture des soins buccodentaires au Québec et au Canada

Au Canada, le système de santé couvre l’entièreté des soins de santé nécessaires, à l’exception des soins dentaires. [65] Au Québec, seuls les soins buccodentaires chirurgicaux prodigués à l'hôpital, les soins pour les enfants de moins de 10 ans et pour les prestataires de l'aide sociale sont défrayés par le système de santé. [2,55,66] Les membres des Forces armées canadiennes ont quant à eux une couverture complète de leurs soins buccodentaires. [67] Les frais buccodentaires des adultes doivent donc être totalement payés par le patient, sauf s'il bénéficie d'une assurance privée. Au Québec, c'est 70,0 % de la population qui possède une assurance privée couvrant les frais buccodentaires, alors que seulement 29,0 % des aînés et 2,9 % des aînés en centre d'hébergement ont cet avantage. [27,37] À noter que la plupart des résidents en centre d'hébergement ignorent qu'une aide financière basée sur les revenus des pensions et couvrant les besoins spéciaux existe dans les établissements. Malgré tout, c'est 87,1 % des aînés en centre d'hébergement qui ne bénéficie d'aucune aide financière couvrant les soins buccodentaires. [37] Au Canada, l'Alberta, le Yukon et les Territoires-du-Nord-Ouest couvrent des soins buccodentaires prodigués à certains de leurs aînés. À l'Île-du-Prince-Édouard, les résidents de centres d'hébergement de soins de longue durée ont droit à des soins d'hygiène buccale et de dépistage couvert par leur gouvernement. [68] Comme mentionné précédemment, plusieurs facteurs limitants contribuent au manque d'accès aux soins buccodentaires pour les aînés en centre d'hébergement. La question financière en est un, mais n'est pas le principal obstacle à l'accès aux soins; le manque d'offre de soins professionnels pour les aînés en hébergement étant le plus préoccupant.

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2.8 Options de services buccodentaires pour les aînés en centre d’hébergement

Puisqu’ils ont des besoins particuliers et souvent plusieurs limitations, les aînés en centre d’hébergement qui ont besoin de soins buccodentaires professionnels doivent avoir accès à des services différents de la pratique dentaire conventionnelle en clinique dentaire privée qui, de par son organisation, sert presque uniquement les besoins d’une population majoritairement en santé et ambulante. Ce nouveau modèle de soins doit être sensible aux contraintes physiques, psychologiques et financières de cette population [20] et avoir la capacité de s’adapter facilement aux demandes et aux besoins des patients. Quelques options de services de soins buccodentaires s'offrent aux personnes âgées en perte d'autonomie.

2.8.1 Clinique dentaire privée

Tout d'abord, si l'aîné peut toujours supporter un déplacement et que la clinique dentaire possède un accès pour les fauteuils roulants, plusieurs centres d'hébergement offrent le transport spécialisé vers une clinique privée. [2,69] Dans cette option, il faut considérer que le transport chez une personne trop fragile peut causer de la fatigue et de la confusion et ainsi nuire à la coopération du patient lors des traitements dentaires. De plus, les aînés hébergés en CHSLD ont souvent plusieurs comorbidités complexes, une longue liste de médicaments et peuvent parfois être plus agités, ce qui requière plus de temps par le dentiste et son équipe pour en prendre connaissance et adapter adéquatement les traitements dentaires à leur condition. Finalement, l'heure du rendez-vous et l'arrivée du patient en transport adapté doivent être gérées adéquatement afin d'éviter de longs moments dans la salle d'attente, surtout si l'aîné est plus agité. Selon l'Association des dentistes de santé publique du Québec, [2] « le cabinet dentaire n'est pas l'endroit adéquat pour soigner des personnes requérant des attentions particulières. »

2.8.2 Clinique dentaire en centre d’hébergement

Heureusement, d'autres options s'offrent aux patients en perte d'autonomie. Quelques centres d'hébergement transfèrent leurs résidents dans une clinique dentaire en milieu hospitalier. Encore une fois, les problèmes qui accompagnent le transport ne sont pas éliminés malgré un milieu plus propice aux traitements chez un aîné médicalement compromis. Heureusement, quelques centres

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d'hébergement de grande envergure ont un espace réservé pour une clinique dentaire dans leur établissement. Ainsi, ils y reçoivent la visite d'un dentiste de façon régulière sans que ce dernier n'ait à transporter son équipement comme c'est le cas des cliniques dentaires mobiles. Un des grands avantages de cette façon de faire est un horaire plus flexible s'accommodant à chaque patient. Puisque la clinique se situe dans le centre d'hébergement, le dentiste peut accorder le temps nécessaire à chaque patient sans contraintes de temps dues au rendez-vous. Il est donc plus facile de raccourcir ou d’allonger le temps du rendez-vous selon la tolérance et les besoins du patient. De plus, les coûts, le temps et les conséquences du transport y sont ainsi éliminés. [70] Ces services peuvent être rendus par un dentiste travaillant pour son propre compte ou par des CISSS/CIUSSS qui emploient des dentistes nommés par le comité des médecins, dentistes et pharmaciens local désirant offrir leurs services dans les centres d'hébergement. De plus, un centre d'hébergement possédant les installations d'une clinique dentaire peut recevoir des patients provenant de centres avoisinants. [71]

2.8.3 Clinique dentaire mobile

Une troisième option est le dentiste offrant des services à l'aide d'une clinique dentaire mobile. Ainsi, le dentiste transporte avec lui l'unité dentaire, la chaise dentaire (optionnel) et les instruments nécessaires dans les centres d'hébergement ou au domicile de son patient. Le dentiste transporte habituellement lui-même son propre matériel. Cependant, aux États-Unis, un projet à but non lucratif appelé le Apple Tree Dental utilise des camions transportant plusieurs unités dentaires mobiles. [70] Le chauffeur livre les unités dans différents centres d'hébergement en fin de journée et l'équipe dentaire peut ainsi débuter son travail rapidement dès le lendemain matin. Cette façon de procéder nécessite cependant un espace suffisant pour installer la totalité de l'équipement. Selon les besoins des résidents, l'équipe dentaire travaille une ou plusieurs journées dans un seul centre d'hébergement et le même camion vient récupérer les unités et le matériel une fois le travail complété. Un avantage de la dentisterie portative est que le patient demeure dans son environnement, ce qui diminue grandement le risque de changement de comportement et de blessures chez des aînés vulnérables. [70] De plus, selon Corrêa da Fonseca, [69] les patients en perte d'autonomie apprécient les services de dentisterie mobile, car le temps d'attente est diminué, le transport est éliminé et ils ressentent un plus grand sentiment d'indépendance en n'ayant pas besoin de demander l'aide d'un proche pour le transport jusqu'à la

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clinique dentaire. Malheureusement, au Québec, le nombre de dentistes offrant des soins de dentisterie portative est beaucoup trop faible pour combler adéquatement tous les besoins actuels. [2]

2.9 Point de vue des administrateurs de centre d’hébergement sur les soins

buccodentaires

Quelques études se sont penchées sur l’opinion des directeurs de centre d’hébergement ou des directeurs des soins quant aux soins buccodentaires prodigués dans les murs de leur établissement. Bien que les soins buccodentaires soient rarement leur priorité, 66 % des directeurs de centre d’hébergement ont tout de même manifesté un intérêt à offrir des soins buccodentaires dans leur établissement. [16] Pyle et coll., [58] ont quant à eux démontré une discordance dans le niveau de satisfaction des directeurs de centres d’hébergement par rapport aux soins buccodentaires prodigués à leurs résidents et l'état d'hygiène buccodentaire de ces derniers. En effet, bien que 53 % des directeurs évaluaient la santé buccodentaire de leurs résidents comme étant pauvre ou moyenne, la majorité d'entre eux se disait satisfaite des soins buccodentaires offerts dans leur centre d'hébergement.

2.9.1 Protocole d’hygiène buccodentaire quotidien

Selon une étude réalisée auprès des directeurs de centre d'hébergement par Cohen et coll., [53] les besoins en santé buccodentaire des résidents ne sont pas adéquatement comblés. Les résultats de l'étude dévoilent qu'il n'existe aucun protocole écrit d'hygiène buccodentaire dans 75,7 % des établissements et que les professionnels de la santé buccodentaire n’ont participé dans l’élaboration du protocole d’hygiène buccodentaire que dans seulement 16 % des cas. [54] Les personnes chargées du protocole étaient majoritairement des travailleurs sociaux, des infirmières [54] ou le directeur des soins. [72] Bien que ces professionnels aient plusieurs connaissances en ce qui a trait au bien-être des résidents, ils n’en possèdent que très peu leur permettant de diagnostiquer les problèmes de santé buccodentaire qu’ils présentent et les méthodes les plus efficaces pour les prévenir et les guérir. Cependant, on observe, au cours des dernières années, un surcroît d’intérêt de la part des infirmières pour mieux s’outiller afin de faire face aux problèmes de soins buccodentaires en centre d’hébergement. De plus, même si le

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directeur des soins est la personne la mieux placée pour organiser et coordonner les soins aux résidents, il ne peut pas bien mesurer l’amplitude du problème et l’impact réel que l’hygiène buccodentaire quotidienne a sur les aînés en centre d’hébergement puisqu’il ne prodigue pas lui-même les soins aux patients. [58,73] Sa vision des soins requis par les patients est plus théorique et donc moins adaptée aux besoins individuels de chaque patient.

2.9.2 Besoins des résidents

Toujours selon Cohen et coll., 35,5, % des directeurs de centre d'hébergement avouent avoir eu des difficultés à répondre aux besoins en soins buccodentaires de leurs résidents dans l'année précédant l'étude et 61,0 % d'entre eux estiment que les soins buccodentaires réalisés par leur personnel soignant sont insuffisants. [53] Selon une étude américaine réalisée par Smith et coll., [54] les directeurs de centre d’hébergement ont affirmé que 75 % de leurs résidents qui nécessitaient des soins buccodentaires professionnels les recevaient. Bien que ce soit la majorité des résidents qui reçoivent les soins requis, le quart d’entre eux demeure avec des besoins non comblés qui peuvent entraîner des conséquences importantes. [54] Par ailleurs, l'étude de Chung et coll. [16] a démontré une faille dans l'accès aux soins dentaires en Suisse. En effet, 70 % des directeurs de centre d’hébergement ont rapporté que les traitements dentaires à leurs résidents étaient effectués en clinique dentaire privée, alors que seulement 26 % des centres d’hébergement avaient un système établi pour le transport des résidents ; 59 % des centres d’hébergement effectuaient le transport en taxi ou en ambulance et 15 % se fiaient sur la famille des résidents pour le transport des résidents jusqu'à la clinique dentaire. Ceci est préoccupant, puisque selon Smith et coll., [54] 68 % des directeurs de centre d'hébergement considèrent comme une barrière aux soins le fait de devoir traiter ces patients en clinique privée.

2.9.3 Formation du personnel soignant

Plus du trois quarts des dirigeants de centre d’hébergement jugent que leur personnel est insuffisamment formé dans le domaine des soins buccodentaires. [53] Presque tous les directeurs d'établissement (95 %) aimeraient que leur personnel reçoive plus de formation sur les soins d'hygiène buccale aux aînés résidant dans leur centre d'hébergement. [12]Autrement dit, il semble que les directeurs de centre d’hébergement sont au fait que les soins buccodentaires ne sont pas

Figure

Tableau I: Taux de réponse par province
Tableau III: Proportion de centres d'hébergement répondants selon la taille (nombre de lits)
Tableau IV: Pourcentage de centres d'hébergement publics offrant des soins buccodentaires par  province  Province   Offre de soins  buccodentaires  par province (%)  AB  40,21  CB  20,82  IPE  36,11  MB  27,38  NB  18,10  NE  37,46  ONT  63,61  SASK  23,31
Tableau  V:  Pourcentage  de  centres  d'hébergement  recevant  les  professionnels  de  la  santé  buccodentaire  au  besoin,  sur  une  base  régulière  ou  jamais  parmi  les  centres  d'hébergement  recevant au moins un professionnel de la santé buccod
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