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Analyse fonctionnelle

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Academic year: 2021

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Texte intégral

(1)

Laure Saint-Raymond

(2)

L. Saint-Raymond

Universit´e Paris VI and DMA ´Ecole Normale Sup´erieure, 45 rue d’Ulm, 75230 Paris Cedex 05, FRANCE.

(3)

ANALYSE FONCTIONNELLE

(4)
(5)

TABLE DES MATI`

ERES

Partie I. Dualit´e. . . 1

1. Rappels de topologie. . . 3

1.1. Espaces de Baire. . . 3

1.2. Op´erateurs lin´eaires et th´eor`eme de Banach-Steinhaus. . . 4

1.3. Th´eor`emes de l’application ouverte et du graphe ferm´e. . . 6

2. Th´eor`eme de Hahn-Banach. . . 9

2.1. Forme analytique. . . 9

2.2. Forme g´eom´etrique. . . 10

2.3. Un exemple d’application : le th´eor`eme de Krein Milman. . . 13

3. Dualit´e et topologies faibles. . . 15

3.1. Dual topologique. . . 15

3.2. Topologie faible . . . 17

3.3. Topologie faible*. . . 18

3.4. Notion d’espace r´eflexif. . . 19

Partie II. Distributions . . . 23

4. La th´eorie de Schwartz. . . 25

4.1. D´efinition et propri´et´es ´el´ementaires. . . 25

4.2. Quelques exemples. . . 28

(6)

ii TABLE DES MATI `ERES

5. Solutions singuli`eres d’´equations aux d´eriv´ees partielles. . . 37

5.1. M´ethode des caract´eristiques et explosion. . . 37

5.2. Solutions faibles et crit`ere d’unicit´e. . . 40

5.3. Approximation visqueuse. . . 42

Partie III. Analyse de Fourier. . . 51

6. Transformation de Fourier. . . 53

6.1. Transformation de Fourier des fonctions sommables. . . 53

6.2. Transformation de Fourier sur la classe de Schwartz. . . 55

6.3. Transformation de Fourier des distributions temp´er´ees. . . 57

6.4. Equations de convolution. . . 61

7. Espaces de Sobolev . . . 63

7.1. D´efinition et propri´et´es topologiques. . . 63

7.2. Injections de Sobolev. . . 65

7.3. Restriction, prolongement et traces. . . 67

7.4. Compacit´e. . . 71

8. A propos de la transform´ee de Hilbert. . . 75

8.1. D´efinition et continuit´e sur Lp. . . 75

8.2. Espaces de Lebesgue faibles. . . 79

8.3. Transform´ee de Hilbert sur L1(R). . . 80

Partie IV. Analyse spectrale. . . 87

9. Espaces de Hilbert. . . 89

9.1. D´efinition et propri´et´es fondamentales. . . 89

9.2. Th´eor`emes de Stampacchia et de Lax-Milgram. . . 91

9.3. Bases hilbertiennes. . . 93

10. Op´erateurs compacts. . . 97

10.1. D´efinitions et propri´et´es fondamentales. . . 97

10.2. Th´eorie de Riesz-Fredholm. . . 99

10.3. Spectre d’un op´erateur compact. . . 102

(7)

TABLE DES MATI `ERES iii

10.5. L’´equation de la chaleur sur un domaine born´e. . . 106

11. Op´erateurs maximaux monotones. . . 109

11.1. D´efinition et r´egularisation de Yosida. . . 109

11.2. Th´eor`eme de Hille-Yosida. . . 111

11.3. Cas sym´etrique. . . 114

11.4. L’´equation de la chaleur. . . 116

(8)
(9)

PARTIE I

(10)
(11)

CHAPITRE 1

RAPPELS DE TOPOLOGIE

Comme l’indique le titre, l’objectif de ce chapitre n’est pas de pr´esenter de fa¸con compl`ete les bases de topologie, on se r´ef`ere pour cela au cours de Patrick Bernard et aux notes de cours de Fr´ed´eric Paulin o`u les r´esultats sont ´enonc´es dans un cadre tr`es g´en´eral. Voir aussi [3], [11], [12].

Nous rappelons uniquement quelques cons´equences du th´eor`eme de Baire sur la continuit´e des applications lin´eaires.

1.1. Espaces de Baire

D´efinition 1.1.1. — Soit X un espace topologique.

– X est dit de Baire si et seulement si toute intersection d´enombrable d’ouverts denses dans X est dense dans X (ou de fa¸con ´equivalente, toute r´eunion d´enombrable de ferm´es d’int´erieurs vides est d’int´erieur vide).

– Une partie A ⊂ X est maigre si et seulement si A est incluse dans une r´eunion d´enombrable de ferm´es d’int´erieurs vides.

– Une propri´et´e est vraie Baire presque partout si et seulement si elle est vraie sur le compl´ementaire d’une partie maigre, i.e. sur un ensemble gras (ou r´esiduel).

Th´eor`eme 1.1 (de Baire). — Les espaces topologiques localement compacts (i.e. les espaces s´epar´es et tels que tout point admet un syst`eme fondamental de voisinages compacts), et les espaces m´etriques complets sont des espaces de Baire.

D´emonstration. — Soit (On) une suite d’ouverts denses et O = ∩n∈NOn. Il s’agit de montrer que

pour tout ouvert W ⊂ X, l’intersection W ∩ O est non vide.

Comme O0∩ W 6= ∅, il existe un ouvert non vide W0tel que ¯W0⊂ O0∩ W avec

– ¯W0 compact si X est un espace topologique localement compact;

– ¯W0 de rayon inf´erieur `a 1 si X est un espace m´etrique complet.

Par r´ecurrence, on peut ainsi construire une suite d’ouverts non vides (Wn) tels que ¯Wn+1⊂ On+1∩Wn

(12)

4 CHAPITRE 1. RAPPELS DE TOPOLOGIE

– ¯Wn+1compact si X est un espace topologique localement compact;

– ¯Wn+1de rayon inf´erieur `a 1/(n + 1) si X est un espace m´etrique complet.

On a alors queT

n∈NW¯n6= ∅, en utilisant la compacit´e dans le premier cas, et la compl´etude dans le

second cas.

Ce r´esultat permet de montrer par exemple que l’ensemble des points de continuit´e de la limite simple f d’une suite de fonctions continues (fn) de C0([0, 1]) est un ensemble gras de [0, 1].

On utilise pour cela la propri´et´e suivante : s’il existe une suite (Fn) de parties de l’espace de Baire X

telle que X ⊂S n∈NFn, alors [ n∈N ˚ Fn⊃ X \ [ n∈N ∂Fn !

est dense dans X.

Pour tout ε > 0, on pose

Fnε= {x ∈ [0, 1] / ∀m ≥ n, |fn(x) − fm(x)| ≤ ε}.

Par d´efinition, Fnεest ferm´e et ∪n∈NFnε= [0, 1].

La suite Op= [ n ˚ Fn1/p

est alors une suite d’ouverts denses de [0, 1], et le th´eor`eme de Baire montre que G =T

pOp, est un

ensemble gras.

Il suffit alors de v´erifier que les ´el´ements de G sont des points de continuit´e de f .

Remarque 1.1.2. — Attention `a ne pas confondre les notions de “ presque partout” au sens de Baire et au sens des mesures.

Ainsi, si µ est une mesure bor´elienne qui ne charge pas les points sur un espace m´etrique s´eparable X, il existe toujours une partie grasse de X qui est µ-n´egligeable.

Il suffit pour construire une telle partie de prendre une suite dense (xi), de poser pour tout k ∈ N∗

Vk =[Oki o`u O k

i est un ouvert contenant xi tel que µ(Oik) ≤

2−i

k , puis de consid´erer G =T∞

k=1V k.

1.2. Op´erateurs lin´eaires et th´eor`eme de Banach-Steinhaus

Th´eor`eme 1.2 (de Banach-Steinhaus). — Soient E un espace de Banach et F un espace vectoriel norm´e. On consid`ere une famille (Tα) d’applications lin´eaires continues de E dans F telles que

∀x ∈ E, sup

α

kTαxkF < +∞ .

Alors il existe C > 0 telle que

(13)

1.2. OP ´ERATEURS LIN ´EAIRES ET TH ´EOR `EME DE BANACH-STEINHAUS 5

D´emonstration. — On pose, pour tout n ∈ N,

On= {x ∈ E / ∃α, kTαxkF > n},

de sorte que On est ouvert etT ∞

n=1On= ∅.

D’apr`es le th´eor`eme de Baire, il existe alors n0 tel que On0 n’est pas dense dans E, i.e. dont le

compl´ementaire contient une boule B(x0, r). Pour tout x ∈ B(x0, r),

kTα(x − x0)kF ≤ 2n0.

En utilisant la lin´earit´e de Tα, on en d´eduit que pour tout y ∈ E

kTαykF ≤

2n0

r kykE, ce qui conclut la preuve.

Corollaire 1.2.1. — Soient E un espace de Banach et F un espace vectoriel norm´e. On consid`ere une famille (Tα) d’applications lin´eaires continues de E dans F convergeant simplement vers T .

Alors T est lin´eaire continu de E dans F . De plus, si xn → x dans E, alors Tn(xn) → T (x) dans F .

Le th´eor`eme de Banach-Steinhaus peut en fait s’´etendre `a des espaces plus g´en´eraux, que nous utilis-erons dans la suite pour munir l’espace des distributions d’une topologie.

D´efinition 1.2.2. — Soit E un espace vectoriel. On appelle semi-norme sur E toute application p : E → R+ sous-additive et positivement homog`ene, i.e. telle que

∀x, y ∈ E, p(x + y) ≤ p(x) + p(y), ∀λ ∈ R, ∀x ∈ E, p(λx) = |λ|p(x) . On dit qu’une famille P de semi-normes s´epare les points si

p(x) = 0 pour tout p ∈ P ⇒ x = 0 .

Les ouverts de la topologie associ´ee `a P sont les parties U de E telles que, pour tout x ∈ U , il existe un ensemble fini J et r > 0

BJ(x, r) ≡ {y ∈ E / ∀j ∈ J, pj(x − y) < r} ⊂ U .

D´efinition 1.2.3. — Un espace vectoriel E est un pr´e-Fr´echet si et seulement si il existe une famille d´enombrable de semi-normes (pj)j∈N∗ telles que, pour tout x ∈ E

(

si pj(x) = 0 pour tout j, alors x = 0 ,

pour tout j, pj(x) ≤ pj+1(x) .

La topologie d’un pr´e-Fr´echet est m´etrisable avec la distance (invariante par translation) d(x, y) =

+∞

X

j=1

2−jmin(1, pj(x − y)) .

(14)

6 CHAPITRE 1. RAPPELS DE TOPOLOGIE

L’ensemble des fonctions C∞(K) sur un compact K est un espace de Fr´echet, muni des semi-normes pj(f ) = sup

|α|≤j

sup

x∈K

|Dαf (x)| .

Une “bonne” topologie sur Cc∞(Ω) (o`u Ω est un ouvert) est beaucoup plus subtile `a d´efinir. On y reviendra bri`evement dans le chapitre sur les distributions.

La continuit´e d’une application entre deux pr´e-Fr´echet peut s’exprimer `a l’aide des semi-normes Lemme 1.2.5. — Soient (E, (pj)j∈N∗) et (F, (qj)j∈N∗) deux pr´e-Fr´echet, et T une application

lin´eaire de E dans F . Alors T est continue si et seulement si

(1.2.1) ∀j ∈ N∗, ∃C ≥ 0, k ∈ N∗, qj(T x) ≤ Cpk(x) .

D´emonstration. — Si T est continue, pour j fix´e, il existe un voisinage U de 0 tel que ∀x ∈ U, qj(T x) ≤ 1 .

Il existe alors k ∈ N∗ et ε > 0 tels que

BkE(0, ε) ⊂ U .

Par homog´en´eit´e, on en d´eduit la condition (1.2.1) (on peut consid´erer s´epar´ement les cas o`u pk(x) = 0

et pk(x) > 0).

R´eciproquement, supposons que (1.2.1) soit satisfaite. Soit x ∈ E. Pour tout voisinage U de T x dans F , il existe une boule BF

j (T x, ε) incluse dans U , Il d´ecoule alors de (1.2.1) que pour tout y dans

Bk(x, ε/C)

T y ∈ BjF(T x, ε) ⊂ U , ce qui montre que T est continue.

On a alors la g´en´eralisation suivante du th´eor`eme de Banach-Steinhaus.

Th´eor`eme 1.3. — Soient E un espace de Fr´echet et F un pr´e-Fr´echet. On consid`ere une suite (Tn)

d’applications lin´eaires continues de E dans F convergeant simplement vers T .

Alors T est lin´eaire continu de E dans F . De plus, si xn → x dans E, alors Tn(xn) → T (x) dans F .

1.3. Th´eor`emes de l’application ouverte et du graphe ferm´e

Th´eor`eme 1.4. — Soient E et F deux espaces de Banach, et T un op´erateur lin´eaire continu de E dans F .

– Si T est surjectif, alors T envoie les ouverts de E sur les ouverts de F . – Si T est bijectif, T−1 est un op´erateur lin´eaire continu de F dans E.

D´emonstration. — On cherche δ > 0 tel que BF(0, δ) ⊂ T (BE(0, 1)).

On commence par d´efinir

Fn= T (BE(0, n)) de sorte que +∞

[

n=1

(15)

1.3. TH ´EOR `EMES DE L’APPLICATION OUVERTE ET DU GRAPHE FERM ´E 7

D’apr`es le th´eor`eme de Baire, il existe donc n0tel que Fn0 est d’int´erieur non vide

B(x0, r0) ⊂ Fn0.

Par lin´earit´e, on a aussi

B(−x0, r0) ⊂ Fn0. Si kykF < r0, y =1 2(y0+ y) + 1 2(−y0+ y) ∈ T (BE(0, n0)) . Autrement dit, BF(0, r0 n0 ) ⊂ T (BE(0, 1)) . Soit maintenant y ∈ BF(0,10nr0

0). D’apr`es ce qui pr´ec`ede, il existe x0∈ BE(0,

1 10) tel que kT x0− ykF ≤ r0 10n0 ×1 2. Par r´ecurrence, on construit une suite xn telle que

kxnkE≤ 1 10 1 2n, k(T x0+ · · · + T xn) − ykF ≤ r0 10n0 × 1 2n+1. La s´erieP

nxn est donc normalement convergente et, par continuit´e de T , sa somme x v´erifie T x = y.

On en d´eduit que BF  0, r0 10n0  ⊂ T (BE(0, n0)) ,

ce qui montre que l’image de tout ouvert de E est ouverte.

Th´eor`eme 1.5. — Soient E et F deux espaces de Banach, et T un op´erateur continu de E dans F . Alors T est continu si et seulement si son graphe G = {(x, T x) / x ∈ E} est ferm´e dans E × F . D´emonstration. — On introduit sur E la norme du graphe

kxkG= kxkE+ kT xkF.

• Si T est continu, son graphe est toujours ferm´e : si (x, y) ∈ ¯G, il existe une suite (xn) de E telle que

(xn, T xn) → (x, y), et par continuit´e y = T x.

• Supposons maintenant que G ⊂ E × F soit ferm´e. En particulier, G est un espace de Banach. On consid`ere alors l’application

Π : (x, T x) ∈ G 7→ x ∈ E ,

qui est clairement continue et bijective. D’apr`es le th´eor`eme de l’application ouverte, Π est un hom´eomorphisme, ce qui implique que T est continu.

Ces r´esultats peuvent aussi se g´en´eraliser au cas des espaces de Fr´echet.

Th´eor`eme 1.6. — Soient E et F deux espaces de Fr´echet, et T un op´erateur continu de E dans F . – Si T (E) n’est pas maigre dans F , alors T est une application surjective et ouverte.

(16)
(17)

CHAPITRE 2

TH´

EOR`

EME DE HAHN-BANACH

Le th´eor`eme de Hahn-Banach donne l’existence de prolongements de formes lin´eaires satisfaisant `a certaines conditions de norme.

– C’est un outil fondamental de l’analyse fonctionnelle car il permet d’introduire des topologies faibles (d´efinies par dualit´e) pour lesquelles on a de bonnes propri´et´es de compacit´e, ce qui fera l’objet du prochain chapitre.

– Par son interpr´etation g´eom´etrique en termes d’hyperplans ´evitant un convexe fix´e, il joue gale-ment un rˆole primordial dans l’´etude de la g´eom´etrie des convexes, et plus g´en´eralement en analyse convexe [7].

La preuve repose d’une part sur un argument simple permettant de prolonger une forme lin´eaire d´efinie sur un sous-espace de codimension 1, et d’autre part sur le lemme de Zorn (´equivalent `a l’axiome du choix) qui permet d’obtenir une r´ecurrence transfinie.

2.1. Forme analytique

Th´eor`eme 2.1. — Soient E un espace vectoriel r´eel, et p : E → R une application sous-additive, positivement homog`ene, i.e. telle que

∀x, y ∈ E, p(x + y) ≤ p(x) + p(y), ∀x ∈ E, ∀t ≥ 0, p(tx) = tp(x) . Si F est un sous-espace de E, et f est une forme lin´eaire sur F telle que

∀x ∈ F, f (x) ≤ p(x) , il existe un prolongement lin´eaire ˜f de f `a E tel que

∀x ∈ E, f (x) ≤ p(x) ,˜

D´emonstration. — On consid`ere l’ensemble P des prolongements de f constitu´e des paires (G, g) o`u G est un sous-espace de E contenant F et g une forme lin´eaire sur G tels que

G|F = f et ∀x ∈ G, g(x) ≤ p(x).

(18)

10 CHAPITRE 2. TH ´EOR `EME DE HAHN-BANACH

– P 6= ∅ car (F, f ) ∈ P;

– P est ordonn´e par la relation d’ordre partiel

(G1, g1) ≺ (G2, g2) si G1⊂ G2 et g2|G1 = g1;

– P est inductif (toute partie totalement ordonn´ee admet un majorant). D’apr`es le lemme de Zorn, il existe alors un ´el´ement maximal ( ¯G, ¯g) ∈ P.

Si ¯G 6= E, il existe x0 ∈ E \ ¯G. On cherche alors ˜g(x0) de sorte `a ce que l’application ˜g d´efinie sur

˜

G = ¯G + Rx0 par

˜

g(x + tx0) = ¯g(x) + t˜g(x0),

satisfasse la majoration attendue : pour tout x ∈ ¯G et tout t ∈ R ¯

g(x) + t˜g(x0) ≤ p(x + tx0) .

Cela implique en particulier que sup

x∈E

¯

g(x) − p(x − x0) ≤ ˜g(x0) ≤ inf

x∈E p(x + x0) − ¯g(x) .

Comme ˜g(x) + ˜g(x0) ≤ p(x + x0) ≤ p(x + x0) + p(x0− x0), cette condition est satisfaite, et on v´erifie

qu’elle suffit `a obtenir la majoration requise pour ˜g. En particulier ( ˜G, ˜g) ∈ P, ce qui contredit la maximalit´e de ( ¯G, ¯g).

Sous des hypoth`eses suppl´ementaires sur l’espace E, on peut d´emontrer un r´esultat analogue sans utiliser le lemme de Zorn. C’est le cas par exemple si E est de dimension finie, si E est un espace de Hilbert (il suffit alors d’utiliser le th´eor`eme de projection sur les ferm´es), si E est un espace vectoriel norm´e s´eparable...

2.2. Forme g´eom´etrique

On rappelle qu’un espace vectoriel topologique est un espace vectoriel muni d’une topologie rendant continues l’addition et la multiplication par un scalaire.

D´efinition 2.2.1. — Un espace vectoriel topologique est dit localement convexe si et seulement si tout voisinage de l’origine contient un voisinage convexe.

En associant `a chaque voisinage convexe de l’origine une semi-norme (jauge de Minkowski), on a alors la caract´erisation suivante :

Propri´et´e 2.2.2. — Soit E un espace vectoriel topologique. E est localement convexe si et seulement si sa topologie peut ˆetre d´efinie par une famille de semi-normes (pα) telles que



∀α, pα(x) = 0



⇒ x = 0 .

Sans perte de g´en´eralit´e, on peut supposer de plus que cette famille est filtrante, c’est-`a-dire que ∀α1, . . . αn, ∃β, pβ ≥ pα1+ · · · + pαn.

Une partie A de E est alors ouverte si et seulement si

(19)

2.2. FORME G ´EOM ´ETRIQUE 11

Les espaces vectoriels norm´es et les espaces pr´e-Fr´echet sont des espaces vectoriels topologiques locale-ment convexes.

Par contre, l’espace des fonctions continues sur [0, 1] muni de la distance d(f, g) =

Z 1

0

p|f − g| est un espace vectoriel topologique non localement convexe.

Th´eor`eme 2.2. — Soit E un espace vectoriel topologique localement convexe (de semi-normes (pα)).

Si A et B sont deux parties convexes non vides disjointes, alors

– si A est ouverte, il existe une forme lin´eaire f : F → R continue non nulle telle que sup

A

f ≤ inf

B f ;

– si A est compacte et B est ferm´ee, il existe une forme lin´eaire f : F → R continue non nulle telle que

sup

A

f < inf

B f.

D´emonstration. — On va commencer par d´etailler les arguments dans le cas o`u l’un des ensembles est r´eduit `a un point, puis on montrera comment on peut en d´eduire les autres cas.

• Cas o`u B = {x0} et A ouvert contenant 0.

On introduit la jauge de Minkowski de A

p(x) = inf{t > 0, x t ∈ A} ,

et on va montrer qu’elle permet de caract´eriser l’ensemble A de fa¸con fonctionnelle A = {x ∈ E / p(x) < 1} ,

et qu’elle satisfait les hypoth`eses du th´eor`eme de Hahn-Banach analytique. On commence par remarquer que, par d´efinition, p est positivement homog`ene :

∀x ∈ E, ∀λ ≥ 0, p(λx) = λp(x) .

La sous-additivit´e est une cons´equence de la convexit´e de A. Soient x, y ∈ E et ε > 0 fix´e. Par d´efinition, ˜ x = x p(x) + ε et ˜y = y p(y) + ε appartiennent `a A. On a alors x + y p(x) + p(y) + 2ε = p(x) + ε p(x) + p(y) + 2εx +˜ p(y) + ε p(x) + p(y) + 2εy ∈ A˜ de sorte que p(x + y) ≤ p(x) + p(y) + 2ε.

Comme A est ouvert et contient l’origine, il existe α et r > 0 tels que Bα(0, r) ⊂ A. On a alors les

propri´et´es suivantes : – Si pα(x) > 0, on a ˜ x = rx pα(x) ∈ A donc p(x) ≤ pα(x) r .

(20)

12 CHAPITRE 2. TH ´EOR `EME DE HAHN-BANACH

– Si pα(x) = 0, pour tout t > 0, pα(xt) = 0, donc xt ∈ A et p(x) = 0.

On en d´eduit que

∀x ∈ E, p(x) ≤ Cpα(x) .

Comme A est convexe et contient l’origine, on v´erifie facilement que

{x ∈ E / p(x) < 1} ⊂ A, et {x ∈ E / p(x) > 1} ∩ A = ∅ . Puisque p est continue et A est ouvert, on a alors

A = {x ∈ E / p(x) < 1} .

On consid`ere alors la forme lin´eaire d´efinie sur Rx0 par f (tx0) = t. En particulier,

f (tx0) ≤ p(tx0) = tp(x0).

En utilisant la forme analytique du th´eor`eme de Hahn-Banach, on prolonge f `a E avec ∀x ∈ E, f (x) ≤ p(x) .

Comme p ≤ Cpα, f est continue. De plus,

∀x ∈ A, f (x) ≤ p(x) < 1 de sorte que supAf ≤ f (x0).

• Cas o`u A est ouvert.

On se donne a0∈ A et b0∈ B, et on pose

C = A − B − a0+ b0= {x − y − a0+ b0/ x ∈ A, y ∈ B} =

[

y∈B

(A − a0+ b0− y) .

On v´erifie alors que C est ouvert, convexe et contient l’origine. De plus, comme A ∩ B = ∅, b0− a0∈ C./

En appliquant le r´esultat pr´ec´edent, on obtient alors l’existence d’une forme lin´eaire f continue non nulle telle que

∀x ∈ A, ∀y ∈ B, f (x − y − a0+ b0) ≤ f (b0− a0) ,

ce qui montre que supAf ≤ infBf .

• Cas o`u A est compact et B est ferm´e.

La preuve est ici un peu plus complexe et repose sur les deux propri´et´es suivantes qui sont v´erifi´ees dans les espaces vectoriels topologiques localement convexes :

(i) Soient A un compact, et B ferm´e non vide disjoint de A. Il existe un voisinage convexe V de 0 tel que (A + V ) ∩ B = ∅.

(ii) Si f est une forme lin´eaire continue non nulle, f est ouverte.

D’apr`es la propri´et´e (i), il existe un voisinage convexe V de 0 tel que (A + V ) ∩ B = ∅. L’ensemble A + V est ouvert (comme r´eunion d’ouverts) et convexe (comme somme de deux convexes). D’apr`es ce qui pr´ec`ede, il existe donc une forme lin´eaire f continue non nulle telle que supAf ≤ infBf .

La propri´et´e (ii) implique alors que f est ouverte, donc f (A + V ) est un intervalle ouvert ]λ1, λ2[.

(21)

2.3. UN EXEMPLE D’APPLICATION : LE TH ´EOR `EME DE KREIN MILMAN 13

Il reste `a montrer les deux propri´et´es utilis´ees dans la preuve.

- Soient A un compact, et B ferm´e non vide disjoint de A. Pour tout x ∈ A, il existe αxet δx> 0 tels

que Bαx(x, δx) ∩ B = ∅. Par d´efinition

A ⊂ [

x∈A

Bαx(x,

δx

2 ). Comme A est compact, on peut extraire un sous-recouvrement fini

A ⊂ N [ i=1 Bαi(xi, δi 2). On d´efinit alors l’ouvert convexe contenant 0

V = N \ i=1 Bαi(0, δi 2) . L’in´egalit´e triangulaire montre que

A + V ⊂

N

[

i=1

Bαi(xi, δi)

de sorte que (A + V ) ∩ B = ∅, ce qui prouve la propri´et´e (i).

- Soient f une forme lin´eaire continue non nulle, et U un ouvert (convexe) contenant 0. Il existe x1 tel

que f (x1) = 1. Pour t > 0 suffisamment petit, [−tx1, tx1] ⊂ U . On a alors

[−t, t] ⊂ f ([−tx1, tx1]) ⊂ f (U ) ,

i.e. f (U ) contient un voisinage ouvert de 0. Par lin´earit´e, on en d´eduit que f est ouverte.

2.3. Un exemple d’application : le th´eor`eme de Krein Milman

D´efinition 2.3.1. — Soit K une partie d’un espace vectoriel E. On dit que x0 est un point extr´emal

de K si



x0= θz + (1 − θ)y avec θ ∈]0, 1[ et z, y ∈ K



⇒ x0= y = z .

Th´eor`eme 2.3. — Soient E un espace vectoriel topologique localement convexe s´epar´e et K une partie compacte de E. Alors K est inclus dans l’enveloppe convexe ferm´ee de ses points extr´emaux et co¨ıncide avec elle si K est convexe.

D´emonstration. — La d´emonstration de ce r´esultat se fait en deux ´etapes bas´ees sur la version g´eom´etrique du th´eor`eme de Hahn-Banach : on commence par montrer que l’ensemble des points extr´emaux E est non vide, puis on prouve que tout point de K est n´ecessairement dans l’adh´erence de l’enveloppe convexe de E .

• On consid`ere l’ensemble P des parties extr´emales de l’enveloppe convexe ferm´ee co(K) de K, i.e. des parties A compactes v´erifiant

s’il existe x, y ∈ co(K), θ ∈]0, 1[ tels que θx + (1 − θ)y ∈ A, alors x, y ∈ A, que l’on munit de la relation d’ordre A ≺ B si B ⊂ A.

(22)

14 CHAPITRE 2. TH ´EOR `EME DE HAHN-BANACH

Si ˜P ⊂ P est totalement ordonn´e, B = ∩A∈ ˜PA est une partie extr´emale non vide (intersection de ferm´es emboˆıt´es dans un compact) majorant ˜P. Donc P est inductif. D’apr`es le lemme de Zorn, P a alors un ´el´ement maximal M .

Si M contient deux points distincts x0et x1, d’apr`es le th´eor`eme de Hahn-Banach, il existe une forme

lin´eaire continue sur E telle que f (x0) < f (x1). On d´efinit alors ˜M = {x ∈ M / f (x) = infMf }.

Comme M est compact et f est continue, ˜M 6= ∅. De plus, ˜M est compact (ferm´e dans un compact) et extr´emal

s’il existe x, y ∈ co(K), θ ∈]0, 1[ tels que θx + (1 − θ)y ∈ ˜M alors

( x, y ∈ M car M est extr´emal, θf (x) + (1 − θ)f (y) = inf

M f

donc x, y ∈ ˜M .

Ceci est absurde puisque M est extr´emal et que ˜M est strictement inclus dans M . M est donc r´eduit `

a un point.

• Soit E l’ensemble des points extr´emaux de co(K) (qui par d´efinition appartiennent `a K), et x0 un

point de co(K) qui n’appartient pas `a l’adh´erence de l’enveloppe convexe de E .

D’apr`es le th´eor`eme de Hahn-Banach, il existe une forme lin´eaire continue f sur E telle que f (x0) > sup{f (x) / x ∈ co(E )}.

Soit A l’ensemble des points de co(K) o`u f atteint son maximum. L’argument pr´ec´edent montre que A est extrr´emale. L’ensemble des parties extr´emales de co(K) incluses dans A admet un ´el´ement maximal r´eduit `a un point x1∈ E :

f (x1) ≥ f (x0) > sup{f (x) / x ∈ co(E )} ≥ sup E

f , ce qui aboutit `a une contradiction.

Remarque 2.3.2. — Dans le cas des espaces de Fr´echet, l’enveloppe convexe ferm´ee d’un compact est pr´ecompacte donc compacte, et pour tout x dans l’enveloppe convexe, il existe une mesure de probabilit´e µx sur l’ensemble E des points extr´emaux telle que x =

R

(23)

CHAPITRE 3

DUALIT´

E ET TOPOLOGIES FAIBLES

La notion de dualit´e est au coeur des m´ethodes d’analyse moderne, et jouera un rˆole fondamental dans ce cours, puisqu’elle est `a l’origine de la notion mˆeme de distributions.

La pr´esentation qui en est faite dans ce chapitre est assez abstraite, mais on verra par la suite beaucoup d’applications : d´erivation de fonctions non continues, d´efinition des solutions faibles d’´equations aux d´eriv´ees partielles, d´emonstration des propri´et´es de la transform´ee de Fourier,...

C’est probablement l’un des objectifs les plus importants de ce cours d’utiliser ce nouveau point de vue pour ´etudier les espaces de fonctions.

3.1. Dual topologique

Si E et F sont deux espaces vectoriels, et <> une forme bilin´eaire de F × E dans R telle que

(3.1.1)



∀f ∈ F, < f, x >= 0 ⇒ x = 0, 

∀x ∈ E, < f, x >= 0 ⇒ f = 0 .

on peut d´efinir une topologie d’espace vectoriel localement convexe sur E (respectivement sur F ) en consid´erant toutes les semi-normes

pB(x) = sup f ∈B

| < f, x > | o`u B est une partie finie de F (respectivement

qA(f ) = sup x∈A

| < f, x > | o`u A est une partie finie de E.)

Si E est un espace vectoriel topologique localement convexe s´epar´e, d´efini par ses ouverts τ (E), on peut consid´erer la forme bilin´eaire

(x, f ) ∈ E × E∗7→< f, x >= f (x) ∈ R .

D’apr`es le th´eor`eme de Hahn-Banach, le crochet de dualit´e v´erifie l’hypoth`ese (3.1.1). On peut ainsi d´efinir une nouvelle topologie sur E, not´ee σ(E, E∗), et une topologie sur E∗, not´ee σ(E∗, E).

(24)

16 CHAPITRE 3. DUALIT ´E ET TOPOLOGIES FAIBLES

Th´eor`eme 3.1. — Soit E est un espace vectoriel topologique localement convexe s´epar´e (d´efini par ses semi-normes (pα)).

Alors la topologie σ(E, E∗) est plus pauvre que τ (E) : elle a moins d’ouverts, plus de compacts, il existe moins de fonctions continues sur E `a valeurs r´eelles,...

D´emonstration. — Soit A un ouvert pour σ(E, E∗). Pour tout x0∈ A, il existe une partie finie B de

E∗et r > 0 tels que

pB(x − x0) < r ⇒ x ∈ A .

Comme B est finie, ses ´el´ements sont uniform´ement continus : il existe C > 0 et α tels que ∀x ∈ E, ∀f ∈ B, | < f, x − x0> | ≤ Chα(x − x0) .

On en d´eduit que Bα(x0, r/C) ⊂ A, et donc que A est ouvert pour la topologie initiale.

Dans le cas d’un espace de Banach (E, k · k), E et E∗ sont mutuellement en dualit´e. En effet, E∗ est un espace de Banach pour la norme duale

kf kE∗= sup

x6=0

|f (x)| kxkE

. D´efinition 3.1.1. — Soit (E, k · k) un espace de Banach.

– La topologie associ´ee `a la norme k · k est dite topologie forte sur E. – La topologie σ(E, E∗) est dite topologie faible sur E.

– La topologie σ(E∗, E) est dite topologie faible sur E∗.

Si E est lui-mˆeme le dual d’un espace de Banach, on a alors trois topologies sur E. Propri´et´e 3.1.2. — Soit (E, k · k) un espace de Banach.

– Si (xn) converge fortement vers x, xn converge faiblement vers x.

– Si (xn) converge faiblement vers x, xn est born´ee et

kxk ≤ lim inf

n→∞ kxnk .

D´emonstration. — La premi`ere propri´et´e est une simple cons´equence de la continuit´e de f ∈ E∗(voir aussi le th´eor`eme pr´ec´edent comparant les topologies forte et faible).

La seconde propri´et´e est un corollaire du th´eor`eme de Banach-Steinhaus. L’in´egalit´e est obtenue en utilisant la caract´erisation suivante de la norme

kxkE= max kf kE∗≤1

|f (x)| qui r´esulte du th´eor`eme de Hahn-Banach.

De fa¸con analogue, on a

Propri´et´e 3.1.3. — Soit (E, k · k) un espace de Banach, et E∗ son dual.

(25)

3.2. TOPOLOGIE FAIBLE 17

– Si (fn) converge faiblement* vers f dans E∗, fn est born´ee et

kf k ≤ lim inf

n→∞ kfnk .

3.2. Topologie faible

Lorsque E est de dimension infinie, la topologie faible est distincte de la topologie forte : il existe toujours des ferm´es pour la topologie forte qui ne sont pas ferm´es pour la topologie faible (par exemple la sph`ere unit´e).

Pour les sous-ensembles convexes toutefois on a le r´esultat suivant :

Th´eor`eme 3.2. — Soit E est un espace vectoriel topologique localement convexe s´epar´e. Si C ⊂ E est un convexe ferm´e pour τ (E), alors C est aussi ferm´e pour σ(E, E∗).

D´emonstration. — Soit x0∈ C. D’apr`/ es le th´eor`eme de Hahn-Banach, on peut s´eparer {x0} et C

∃f ∈ E∗, ∃α ∈ R, f (x0) < α ≤ inf C f .

En particulier,

{x ∈ E / |f (x) − f (x0)| < α − f (x0)} ∩ C = ∅ ,

ce qui signifie que C est ferm´e (compl´ementaire d’un ouvert) pour la topologie σ(E, E∗).

Corollaire 3.2.1 (Lemme de Mazur). — Soit E un espace de Banach. Si (xn) converge

faible-ment vers x dans E, alors il existe une suite (yn) avec chaque yn combinaison convexe des (xk)k≥n,

qui converge fortement vers x.

D´emonstration. — On consid`ere l’enveloppe convexe Cn des (xk)k≥n, de sorte que x appartient `a la

fermeture faible de Cn.

D’apr`es le th´eor`eme 3.2, la fermeture forte de Cn est ´egale `a la fermeture faible.

Proposition 3.2.2 ( sur l’´equivalence continuit´e forte/faible). — Soient E, F deux espaces de Banach, E∗, F∗ leurs duaux respectifs, et T : E → F une application lin´eaire.

Alors T est continue de (E, k · kE) dans (F, k · kF) si et seulement si T est continue de (E, σ(E, E∗))

dans (F, σ(F, F∗)).

D´emonstration. — • Supposons d’abord T continue de (E, k · kE) dans (F, k · kF). Pour tout f ∈ F∗,

f ◦ T ∈ E∗et donc est continue pour σ(E, E∗). On en d´eduit alors que T est continue de (E, σ(E, E∗)) dans (F, σ(F, F∗)).

En effet, σ(F, F∗) est la topologie la moins fine contenant la famille Λ = {f−1(ω) / f ∈ E∗ et ω ouvert de R}. Soit U un ouvert de σ(F, F∗), on a U = [ j∈J \ i∈Ij fi−1(ωi)

(26)

18 CHAPITRE 3. DUALIT ´E ET TOPOLOGIES FAIBLES

o`u chaque Ij est fini, fi∈ F∗et ωi est un ouvert de R. On a alors

T−1(U ) = [

j∈J

\

i∈Ij

(fi◦ T )−1(ωi)

qui est bien ouvert puisque chaque fi◦ T est continue.

• Supposons maintenant que T est continue de (E, σ(E, E∗)) dans (F, σ(F, F)). Alors le graphe de

T est ferm´e pour σ(E × F, E∗× F∗) et donc aussi fortement ferm´e dans E × F . Comme E et F sont

des espaces de Banach, on d´eduit du th´eor`eme du graphe ferm´e, que T est continue de (E, k · kE) dans

(F, k · kF).

3.3. Topologie faible*

Th´eor`eme 3.3 (de Banach-Alaoglu). — Soient E un espace de Banach et E∗ son dual.

Alors la boule unit´e B = {f ∈ E∗/ kf kE∗≤ 1} est compacte pour la topologie faible*.

De plus, si E est s´eparable, B est s´equentiellement compacte pour la topologie faible*.

D´emonstration. — En utilisant la correspondance entre f et (f (x))x∈E, on peut voir B comme une

partie de

K = Y

x∈E

[−kxk, kxk] .

D’apr`es le th´eor`eme de Tychonov (qui repose sur le lemme de Zorn), un produit quelconque d’espaces topologiques compacts est compact pour la topologie produit, donc K est compact. Comme B est le sous-ensemble de K constitu´e des fonctions lin´eaires

B = {f ∈ K / ∀x, y ∈ E, ∀λ ∈ R, f (λx + y) = λf (x) + f (y)} , B est ferm´e dans K, donc compact.

Dans le cas o`u E est s´eparable, il existe une suite (xj) dense dans E. Si on se donne une suite (fn) de

B, par extraction diagonale, on peut construire une suite nk telle que, pour tout j,

fnk(xj) → g(xj) quand k → ∞ avec |g(xj)| ≤ kxjk .

Par densit´e et lin´earit´e, on peut alors prolonger g en une fonction lin´eaire sur E telle que, ∀x ∈ E, |g(x)| ≤ kxk .

Par in´egalit´e triangulaire, on peut alors montrer que fnk converge simplement vers g (convergence

faible*).

Cette preuve utilise uniquement le fait que, si U est un voisinage de 0, K = {f ∈ E∗/ ∀x ∈ U, |f (x)| ≤ 1} est compact.

En particulier, le th´eor`eme de Banach-Alaoglu est encore vrai dans les espaces vectoriels topologiques localement convexes s´epar´es.

(27)

3.4. NOTION D’ESPACE R ´EFLEXIF 19

Remarque 3.3.1. — Si E est s´eparable, la topologie faible-* sur la boule est m´etrisable : si (xn) est

une suite dense dans BE(0, 1), on peut d´efinir par exemple

∀f, g ∈ BE∗(0, 1), d(f, g) = +∞ X 0 −n|(f − g)(x n|.

Si K est un espace m´etrique compact, E = C(K) muni de la norme uniforme est un espace de Banach s´eparable. Son dual E∗ est l’espace des mesures sign´ees sur K (th´eor`eme de repr´esentation de Riesz).

D’apr`es le th´eor`eme de Banach-Alaoglu, si (µn) est une suite de mesures de probabilit´es, il existe alors

une probabilit´e µ sur K telle que, `a extraction d’une sous-suite pr`es, µn* µ faiblement *.

3.4. Notion d’espace r´eflexif

Soit E un espace de Banach. On voit facilement que E s’identifie `a un sous-espace vectoriel de E∗∗ grˆace `a l’injection

j : x ∈ E 7→ j(x) ∈ E∗∗ o`u < j(x), f >=< f, x > pour tout f ∈ E∗,

qui est une isom´erie d’espace vectoriel norm´e.

D´efinition 3.4.1. — Soit E un espace de Banach. On dit que E est r´eflexif s’il est le dual de son dual, i.e. si l’application j d´efinie pr´ec´edemment est surjective.

Pour un espace r´eflexif, on a donc σ(E, E∗) = σ(E∗∗, E∗) et la boule unit´e est faiblement compacte. Il s’agit en fait d’une caract´erisation des espaces r´eflexifs :

Th´eor`eme 3.4 (de Kakutani). — Soit E un espace de Banach. Alors E est r´eflexif si et seulement si sa boule unit´e est compacte pour σ(E, E∗).

La preuve de ce r´esultat est un peu technique car elle n´ecessite de jongler avec les diff´erentes topologies. Elle repose sur les deux lemmes suivants.

Lemme 3.4.2 (de Helly). — Soit E un espace de Banach. On se donne f1, . . . , fn dans E0 et

α1, . . . , αn des r´eels. Alors les deux propri´et´es suivantes sont ´equivalentes :

(i) pour tout ε > 0, il existe xε∈ BE tel que

∀i = 1, . . . , n, |fi(xε) − αi| < ε ;

(ii) pour tout β1, . . . βn r´eels, on a

n X i=1 βiαi ≤ n X i=1 βifi .

Lemme 3.4.3 (de Goldstine). — Soit E un espace de Banach. On d´efinit j : x ∈ E 7→ j(x) ∈ E∗∗ o`u < j(x), f >=< f, x > pour tout f ∈ E∗, Alors j(BE) est dense dans BE∗∗ pour la topologie faible* σ(E∗∗, E∗).

(28)

20 CHAPITRE 3. DUALIT ´E ET TOPOLOGIES FAIBLES

D´emonstration du th´eor`eme de Kakutani. — Supposons d’abord que E est r´eflexif, de sorte que l’isom´etrie

j : x ∈ E 7→ j(x) ∈ E∗∗ o`u < j(x), f >=< f, x > pour tout f ∈ E∗,

est surjective : j(BE) = BE∗∗. D’apr`es le th´eor`eme de Banach-Alaoglu, BE∗∗ est compact pour la

topologie σ(E∗∗, E∗).

Comme j−1 est une isom´etrie, pour tout f ∈ E∗, f ◦ j−1 est continue pour σ(E∗∗, E∗). Cela im-plique que j−1 est continue de (E∗∗, σ(E∗∗, E∗)) vers (E, σ(E, E∗)). La boule BE est donc faiblement

compacte dans E.

R´eciproquement, si BE est faiblement compacte, comme j est une isom´etrie de E sur E∗∗, elle est

continue de (E, σ(E, E∗)) dans (E∗∗, σ(E∗∗, E∗∗∗)) d’apr`es le Corollaire 3.2.2. Comme σ(E∗∗, E∗) est moins fine que σ(E∗∗, E∗∗∗), j est aussi continue de (E, σ(E, E∗)) dans (E∗∗, σ(E∗∗, E∗)). Cela implique que j(BE) est compact pour σ(E∗∗, E∗).

Le lemme de Goldstine montre alors que BE∗∗= BE, et donc E∗∗= E.

Reste alors `a ´etablir les deux lemmes.

D´emonstration du lemme d’Helly. — Supposons d’abord que pour tout ε > 0, il existe xε ∈ BE tel

que

∀i = 1, . . . , n, |fi(xε) − αi| < ε .

Soient β1, . . . , βn des r´eels quelconques. On a

n X i=1 βiαi ≤ n X i=1 βifi(xε) + ε n X i=1 |βi| ≤ n X i=1 βifi + ε n X i=1 |βi|

d’o`u l’on d´eduit (ii) en faisant tendre ε → 0.

On ´etablit ensuite la r´eciproque par contraposition. On d´efinit F = (f1, . . . fn). Par d´efinition, F (BE)

est un convexe ferm´e de Rn. D’apr`es le th´eor`eme de Hahn-Banach, si α = (α

1, . . . αn) /∈ F (BE), il

existe une forme lin´eaire sur Rn qui s´epare strictement α et F (BE), autrement dit il existe β1, . . . , βn

et γ tels que : ∀x ∈ BE, n X i=1 βifi(x) < γ < n X i=1 βiαi,

ce qui implique en particulier que n X i=1 βifi < n X i=1 βiαi .

D´emonstration du lemme de Goldstine. — Soit η ∈ BE∗∗ et V un voisinage de η pour la topologie

σ(E∗∗, E∗). Il s’agit de montrer que V ∩ j(BE) 6= ∅.

Sans perte de g´en´eralit´e, on peut supposer qu’il existe ε > 0, f1, . . . , fn dans E∗ tels que

(29)

3.4. NOTION D’ESPACE R ´EFLEXIF 21 Si on pose αi= η(fi), on a ∀β1, . . . βn∈ Rn, n X i=1 βiαi = η n X i=1 βifi ! ≤ n X i=1 βifi . D’apr`es le lemme d’Helly, il existe alors xε∈ BE tel que

∀i = 1, . . . , n, |fi(xε) − αi| < ε ,

ce qui signifie exactement que j(xε) ∈ V , et donc que V ∩ j(BE) 6= ∅.

Une condition suffisante pour qu’un espace de Banach soit r´eflexif est qu’il soit uniform´ement convexe. D´efinition 3.4.4. — Un espace vectoriel norm´e E est dit uniform´ement convexe si on a la propri´et´e

∀ε > 0, ∃δ > 0, kxk ≤ 1, kyk ≤ 1 et k1

2(x + y)k ≥ 1 − δ 

⇒ kx − yk ≤ ε .

Th´eor`eme 3.5 (de Milman-Pettis). — Tout espace de Banach uniform´ement convexe est r´eflexif.

D´emonstration. — On doit montrer que j(E) = E∗∗, ou de fa¸con ´equivalente que j(BE) = BE∗∗.

Comme j(BE) est ferm´ee, il suffit par homog´en´eit´e de montrer que j(BE) est dense (pour la topologie

forte) dans la sph`ere

S = {η ∈ E∗∗/ kηkE∗∗ = 1} .

On se donne alors η ∈ S et ε > 0, et on va montrer qu’il existe x ∈ BE tel que kj(x) − ηk ≤ ε.

Comme E est unifom´ement convexe, il existe δ > 0 tel que

∀x, y ∈ BE, kx − yk > ε ⇒ kx + yk ≤ 2(1 − δ) .

On choisit alors f ∈ E∗telle que

kf kE∗= 1 et η(f ) ≥ 1 −

δ 2.

D’apr`es le lemme de Goldstine, j(BE) est dense dans BE∗∗ pour la topologie faible* σ(E∗∗, E∗) : il

existe donc x ∈ BE tel que

|η(f ) − f (x)| < δ 2. – si kj(x) − ηkE∗∗ ≤ ε, on a la propri´et´e voulue.

– si kj(x) − ηkE∗∗> ε, comme E∗∗\BE∗∗(j(x), ε) est ouvert pour la topologie σ(E∗∗, E∗), il r´esulte

du lemme de Goldstine qu’il existe y ∈ BE tel que

kj(y) − j(x)k = kx − yk > ε et |η(f ) − f (y)| < δ 2. On a alors 1 2kx + yk ≥ (1 − δ) puisque 1 − δ 2 ≤ η(f ) < 1 2f (x + y) + δ 2 ≤ 1 2kx + yk + δ 2 ce qui aboutit `a une contradiction.

(30)

22 CHAPITRE 3. DUALIT ´E ET TOPOLOGIES FAIBLES

Pour tout ouvert Ω ⊂ RN, on d´efinit Lp(Ω) comme l’espace des fonctions de puissance p-i`eme int´egrable, quotient´e par la relation d’´equivalence d’´egalit´e presque partout, et muni de la norme

kf kp= Z Ω |f |p(x)dx 1/p .

Ces espaces ont ´et´e introduits de fa¸con d´etaill´ee dans le cours Zhan Shi (voir aussi les notes de cours de Jean-Fran¸cois Legall). On en rappelle sans d´emonstration quelques propri´et´es fondamentales : Propri´et´e 3.4.5. — Soit Ω un ouvert de RN. Si p ∈ [1, ∞[,

– l’espace Lp(Ω) est complet; – l’espace Lp(Ω) est s´eparable;

– Cc∞(Ω) (et a fortiori Cc(Ω)) est dense dans Lp(Ω).

Un autre r´esultat important est que ces espaces sont r´eflexifs si p ∈]1, +∞[, et que les born´es sont donc faiblement compacts.

Propri´et´e 3.4.6. — Soit Ω un ouvert de RN. Si p ∈]1, ∞[, Lp(Ω) est uniform´ement convexe, donc r´eflexif. D´emonstration. — On pose h(x) = (1 + x1/p)p+ |1 − x1/p|p. On a alors h0(x) = (1 + x−1/p)p−1+ |1 − x−1/p|p−2(1 − x−1/p) h00(x) = p − 1 p x −1−1 p h |1 − x−1/p|p−2− (1 + x−1/p)p−2i

de sorte que h est convexe sur R+ si p ≤ 2 et concave si p ≥ 2.

Si p ≥ 2, l’in´egalit´e de Jensen donne h  R Ωv pdx R Ωu pdx  ≥R u ph v u p  dx R updx , soit encore ku + vkpp+ ku − vk p p≤ (kukp+ kvkp)p+ |kukp− kvkp|p. En particulier, si kukp= kvkp= 1 et ku − vkp> 2ε, 1 2(u + v) p ≤ (1 − εp)1/p.

Donc Lp(Ω) est uniform´ement convexe.

Si p ≤ 2, ku + vkp p+ ku − vk p p≥ (kukp+ kvkp)p+ |kukp− kvkp|p. En particulier, si k˜ukp= k˜vkp= 1, (k1 2(˜u + ˜v)kp+ k 1 2(˜u − ˜v)kp) p+ |k1 2(˜u + ˜v)kp− k 1 2(˜u − ˜v)kp| p ≤ 2 Donc Lp(Ω) est uniform´ement convexe.

(31)

PARTIE II

(32)
(33)

CHAPITRE 4

LA TH´

EORIE DE SCHWARTZ

L’espace des distributions est, en un sens convenable, le “plus petit espace” contenant les fonctions continues, et o`u la d´erivation est partout d´efinie. La th´eorie des distributions, ´elabor´ee par Schwartz `

a la fin des ann´ees quarante, est l’aboutissement d’un processus s’´etalant sur plus d’un demi-si`ecle et comprenant, entre autres, le calcul symbolique de l’ing´enieur Heaviside (1893), le formalisme introduit par le physicien Dirac (1926), les “parties finies” d’int´egrales divergentes de Hadamard (1932) et les d´eriv´ees g´en´eralis´ees de Sobolev (1936). On trouvera une pr´esentation compl`ete de cette th´eorie par exemple dans [13], [18].

L’id´ee de d´epart consiste `a changer de point de vue pour d´ecrire les fonctions : plutˆot que de consid´erer une fonction f de variable r´eelle comme la collection de ses valeurs f (x) o`u x parcourt R, on d´ecrit f par la collection de ses moyennes pond´er´eesR f ϕ(x)dx o`u ϕ parcourt Cc∞(R) . La formule d’int´egration

par parties Z R f0ϕ(x)dx = − Z R f ϕ0(x)dx

permet alors de d´efinir l’objet f0.

4.1. D´efinition et propri´et´es ´el´ementaires 4.1.1. L’espace des distributions. —

D´efinition 4.1.1. — Une distribution T sur un ouvert Ω ⊂ RN est une forme lin´eaire sur C∞ c (Ω)

ϕ ∈ Cc∞(Ω) 7→ hT, ϕi ∈ R ,

qui v´erifie la propri´et´e de continuit´e : pour tout K compact de Ω, il existe p ∈ N et C > 0 tels que (4.1.1) ∀ϕ ∈ C∞(Ω) `a support dans K, |hT, ϕi| ≤ C sup

|α|≤p

k∂αϕk ∞.

Si on peut choisir p ind´ependamment du compact K, on dit que la distribution T est d’ordre fini p.

L’espace D0(Ω) des distributions sur Ω est un espace vectoriel. C’est en fait le dual topologique de Cc∞(Ω).

(34)

26 CHAPITRE 4. LA TH ´EORIE DE SCHWARTZ

– Pour chaque compact K ⊂ Ω, l’ensemble des fonctions C∞(Ω) `a support dans K muni des semi-normes

pm(ϕ) = sup |α|≤m

k∂αϕk

est un espace de Fr´echet, donc un espace m´etrisable.

– On d´efinit alors la topologie de Cc∞(Ω) = ∪K⊂⊂ΩC∞(K) comme limite inductive des C∞(K),

i.e. comme la topologie la plus fine rendant continues les injections de C∞(K) dans Cc∞(Ω); – On v´erifie que la condition (4.1.1) exprime bien la continuit´e pour cette topologie.

Lemme 4.1.2. — Soient Ω un ouvert de RN, T ∈ D0(Ω) et (ϕ

n) une suite de Cc∞(Ω) convergeant

vers ϕ dans Cc∞(Ω). Alors

lim

n→∞hT, ϕni = hT, ϕi .

D´emonstration. — Si (ϕn) converge vers ϕ dans Cc∞(Ω), alors par d´efinition

– il existe un compact K ⊂ Ω tel que

∀n ∈ N, ∀x /∈ K, ϕn(x) = 0 ,

(en particulier ϕ est `a support dans K), – pour tout α ∈ NN, la suite (∂αϕ

n) converge vers ∂αϕ uniform´ement sur K.

Puisque T est une distribution, il existe C > 0 et p ∈ N (d´ependant uniquement de K) tels que |hT, ϕn− ϕi| ≤ C sup

|α|≤p

k∂α

n− ϕ)k∞,

ce qui donne la convergence attendue.

Le th´eor`eme d’annulation sur L1loc(Ω)  ∀v ∈ Cc∞(Ω), Z Ω uvdx = 0  ⇒ u = 0 presque partout

permet d’identifier L1loc(Ω) `a un sous-espace de D0(Ω). A chaque f ∈ L1loc(Ω), on associe en effet (de mani`ere injective) la distribution Tf d´efinie par

∀ϕ ∈ Cc∞(Ω), hTf, ϕi = Z Ω f ϕdx de sorte que ∀ϕ ∈ C∞(Ω) `a support dans K, |hT f, ϕi| ≤ kf kL1(K)kϕk.

D´efinition 4.1.3. — Soient Ω un ouvert de RN, et (Tn) une suite de D0(Ω). On dit que (Tn) converge

vers T dans D0(Ω) si

∀ϕ ∈ C∞

c (Ω), hTn, ϕi → hT, ϕi quand n → ∞.

La convergence au sens des distributions est une convergence tr`es faible : elle est impliqu´ee par exemple par la convergence dans L1

(35)

4.1. D ´EFINITION ET PROPRI ´ET ´ES ´EL ´EMENTAIRES 27

4.1.2. D´erivation au sens des distributions. —

D´efinition 4.1.4. — Soient Ω un ouvert de RN, T ∈ D0(Ω) et α ∈ NN. La d´eriv´ee ∂αT d’ordre α

de la distribution T est la distribution d´efinie par

∀ϕ ∈ Cc∞(Ω), h∂αT, ϕi = (−1)|α|hT, ∂αϕi .

Il est facile de v´erifier que la d´eriv´ee distribution co¨ıncide avec la d´eriv´ee classique, en utilisant la formule de Green.

En utilisant cette remarque tr`es simple et le lemme de fermeture suivant, on peut alors obtenir les r`egles de d´erivation des distributions.

Lemme 4.1.5. — Soient Ω un ouvert de RN, et (Tn) une suite de D0(Ω) convergeant vers T dans

D0(Ω). Alors, pour tout α ∈ NN,

∂αTn→ ∂αT au sens des distributions.

D´emonstration. — On a h∂αT

n, ϕi = (−1)|α|hTn, ∂αϕi → (−1)|α|hT, ∂αϕi = h∂αT, ϕi

et ceci pour tout fonction ϕ ∈ Cc∞(Ω).

Propri´et´e 4.1.6. — Soient Ω un ouvert de RN et T ∈ D0(Ω).

– Pour toute f ∈ C∞(Ω), f T ∈ D0(Ω) et ∀α ∈ NN, α(f T ) = X β≤α β α  ∂α−βf ∂βT

avec les notations usuelles pour les multi-indices et les coefficients binomiaux. – Pour tout diff´eomorphisme φ ∈ C∞(ω, Ω), T ◦ φ ∈ D0(ω) et

∂j(T ◦ φ) =

X

k

(∂jφk)(∂kT ◦ φ).

D´emonstration. — Les r`egles de calcul s’obtiennent `a partir du calcul diff´erentiel usuel par dualit´e. • On d´efinit la distribution produit f T par

∀ϕ ∈ Cc∞(Ω), hf T, ϕi = hT, f ϕi

de sorte que, pour tout compact K,

|hf T, ϕi| ≤ C sup |α|≤p k∂α(f ϕ)k ∞ ≤ ˜C sup |α|≤p k∂αϕk

pour toute fonction ϕ ∈ C∞ `a support dans K, o`u ˜C ne d´epend que de C et de f (par la formule de Leibniz).

On a alors

h∂j(f T ), ϕi = −hf T, ∂jϕi = −hT, f ∂jϕi

= −hT, ∂j(f ϕ) − ϕ∂jf i

(36)

28 CHAPITRE 4. LA TH ´EORIE DE SCHWARTZ

d’o`u ∂j(f T ) = (∂jf )T + f (∂jT ) dans D0(Ω). Par r´ecurrence sur |α|, on peut ´etablir la formule de

Leibniz annonc´ee.

• On d´efinit l’image inverse T ◦ φ de T par le changement de variable φ par ∀ϕ ∈ C∞

c (ω), hT ◦ φ, ϕi = hT, | det Dφ−1|ϕ ◦ φ−1i .

En utilisant les r`egles de d´erivation des fonctions compos´ees, la formule de Leibniz et le fait que | det Dφ−1| est dans C(Ω), on obtient alors que, pour tout compact K,

hT ◦ φ, ϕi ≤ C sup |α|≤p k∂α(| det Dφ−1|ϕ ◦ φ−1)k ∞ ≤ ˜C sup |α|≤p k(∂αϕ) ◦ φ−1k L∞(K) ≤ ˜C sup |α|≤p k(∂αϕ)k L∞−1(K))

pour toute fonction ϕ ∈ C∞`a support dans φ−1(K).

On a alors h∂j(T ◦ φ), ϕi = − D T, | det Dφ−1|(∂jϕ) ◦ φ−1 E . Par ailleurs hX k (∂kT ◦ φ)∂jφk, ϕi = X k D ∂kT, | det Dφ−1|(∂jφkϕ) ◦ φ−1 E = −X k D T, ∂k | det Dφ−1|(∂jφk◦ φ−1)(ϕ ◦ φ−1) E

Or, pour tout g ∈ Cc∞(Ω), Z ω ∂j(g ◦ φ)dy = X k Z ω ∂jφk(∂kg ◦ φ)dy =X k Z Ω (∂jφk◦ φ−1)∂kg| det Dφ−1|dx = 0 ,

d’o`u l’on d´eduit que

∂k  (∂jφk◦ φ−1)| det Dφ−1|  = 0 . On obtient finalement hX k (∂kT ◦ φ)∂jφk, ϕi = − X k D T, | det Dφ−1|(∂jφk◦ φ−1)∂k(ϕ ◦ φ−1) E = −hT, | det Dφ−1|(∂jϕ) ◦ φ−1i ,

ce qui conclut la preuve.

4.2. Quelques exemples

4.2.1. Mesures de Radon. — L’ensemble M+(Ω) des mesures positives localement finies sur Ω

s’identifie `a un sous-ensemble de D0(Ω) via l’application

µ ∈ M+(Ω) 7→ Tµ∈ D0(Ω) d´efinie par ∀ϕ ∈ Cc∞(Ω), hTµ, ϕi = Z Ω ϕdµ .

(37)

4.2. QUELQUES EXEMPLES 29

Cette application est en effet injective puisque Cc∞(Ω) est dense dans Cc(Ω).

Il est facile de v´erifier que les distributions ainsi obtenues sont d’ordre 0 : pour tout compact K ⊂ Ω, ∀ϕ ∈ C∞ `a support dans K, |hTµ, ϕi| ≤ µ(K)kϕk∞.

On a en fait la caract´erisation suivante :

Th´eor`eme 4.1. — Soit Ω un ouvert de RN. Si T est une distribution positive sur Ω, i.e.

∀ϕ ∈ C∞(Ω, R+), hT, ϕi ≥ 0 . alors T est une mesure de Radon positive.

D´emonstration. — On commence par v´erifier que T se prolonge en une forme lin´eaire positive sur Cc(Ω).

• Pour tout compact K ⊂ Ω, on peut construire (par r´egularisation de 11{x / d(x,K)≤δ}) une fonction

ψ ∈ Cc∞(Ω) telle que

ψ(Ω) ⊂ [0, 1], et ψ|K≡ 1 . Pour toute fonction ϕ ∈ C∞`a support dans K, on a alors

∀x ∈ Ω, −kϕk∞ψ(x) ≤ ϕ(x) ≤ kϕk∞ψ(x) .

Par positivit´e de T , on en d´eduit

|hT, ϕi| ≤ kϕk∞hT, ψi ,

ce qui signifie que T est continue pour la norme L∞(K).

• Pour toute fonction g ∈ Cc(Ω), g est la limite d’une suite (gn) de Cc∞(Ω) uniform´ement support´ee

dans un compact K (r´egularisation par convolution). On pose alors hT, gi = lim

n→∞hT, gni

qui est bien d´efinie car (hT, gni) est de Cauchy.

Le th´eor`eme de repr´esentation de Riesz permet alors de conclure que T s’identifie `a une mesure de Radon.

Attention : toute distribution ne s’´ecrit pas comme la diff´erence de deux distributions positives. Par exemple, δ0 - qui est d’ordre 1 - n’est pas la diff´erence de deux distributions positives.

4.2.2. Valeurs principales et parties finies. —

D´efinition 4.2.1. — Soit Tn la distribution sur R associ´ee `a la fonction int´egrable

fn(x) =

1

x11|x|≥n1 .

La valeur principale de 1/x est la distribution vp(1x) d’ordre 1 sur R, obtenue en passant `a la limite dans la suite (Tn). C’est la d´eriv´ee-distribution de log |x|.

(38)

30 CHAPITRE 4. LA TH ´EORIE DE SCHWARTZ

D´emonstration. — Pour toute fonction ϕ ∈ Cc∞(R) `a support dans [−a, a]

hTn, ϕi = Z 1 n≤|x|≤a ϕ(x) x dx = Z 1 n≤|x|≤a ϕ(x) − ϕ(0) x dx par parit´e.

Comme la fonction x 7→ (ϕ(x) − ϕ(0))/x se prolonge par continuit´e en 0, elle est int´egrable sur [−a, a], et on a lim n→∞hTn, ϕi = Z |x|≤a ϕ(x) − ϕ(0) x dx .

En utilisant `a nouveau la parit´e, on obtient que la limite est ind´ependante de a. Par exemple, hvp(1 x), ϕi = Z |x|≤1 ϕ(x) − ϕ(0) x dx + Z |x|>1 ϕ(x) x dx .

• Pour toute fonction ϕ ∈ C∞

c (R) `a support dans [−a, a], l’in´egalit´e des accroissements finis donne

hvp(1 x), ϕi ≤ 2akϕ0k∞.

On en d´eduit que vp(x1) est bien une distribution, d’ordre au plus 1. En particulier, on peut la prolonger en une forme lin´eaire continue sur C1

c(K) pour tout compact K ⊂ R.

Elle n’est pas d’ordre 0 comme on le voit facilement en choisissant ϕk = ρk ∗ 11[0,1], elle est donc

exactement d’ordre 1.

• Reste `a prouver l’identit´e vp(1x) = (log |x|)0. Pour toute fonction ϕ ∈ Cc∞(R),

h(log |x|)0, ϕi = −hlog |x|, ϕ0i = − Z

log |x|ϕ0(x)dx .

Comme x 7→ log |x| est dans L1

loc(R), on a Z log |x|ϕ0(x)dx = lim n→0 Z |x|≥1/n log |x|ϕ0(x)dx .

Par int´egration par parties, Z |x|≥1/n log |x|ϕ0(x)dx = − Z |x|≥1/n ϕ(x) x dx + log n  ϕ(1 n) − ϕ(− 1 n)  .

Le second terme du membre de droite tend vers 0 quand n → ∞ car ϕ est d´erivable en 0, donc Z log |x|ϕ0(x)dx = − lim n→0 Z |x|≥1/n ϕ(x) x dx = −hvp( 1 x), ϕi, ce qui est l’identit´e annonc´ee.

De fa¸con similaire, on d´efinit les parties finies P f (xα+) pour α ∈]−2, −1[ par d´erivation de x α+1

+ /(α+1).

D´efinition 4.2.2. — La partie finie de xα

+ est la distribution P f (xα+) d’ordre 1, d´efinie par

hP f (xα+), ϕi = − Z +∞ 0 xα+1 α + 1ϕ 0(x)dx = lim n→∞ Z x≥1 n xαϕ(x)dx .

(39)

4.3. LOCALISATION, CONVOLUTION, R ´EGULARISATION 31

4.2.3. D´eriv´ees des indicatrices et formule de saut. — Soit K un compact de classe C1de RN. En utilisant une partition de l’unit´e et des changements de carte locaux, on peut montrer la formule de Stokes

∂xi(11K) = −νidσ,

o`u ν est le vecteur unitaire normal `a ∂K orient´e vers l’ext´erieur et dσ est la mesure de Lebesqgue superficielle de ∂K. Cette formule n’est rien d’autre que la g´en´eralisation de la formule d’int´egration par parties

d

dx11[a,b]= δa− δb.

Proposition 4.2.3. — Soient Ω un ouvert de RN, K un compact de classe C1 de Ω et f ∈ C(Ω)

telle que ∂xif ∈ L

1

loc(Ω). Alors

∂xi(f 11K) = (∂xif )11K− νif dσ

o`u ν est le vecteur unitaire normal `a ∂K orient´e vers l’ext´erieur et dσ est la mesure de Lebesqgue superficielle de ∂K.

D´emonstration. — On commence par se ramener au cas d’une fonction `a support compact. Par r´egularisation de 11{x / d(x,K)≤δ} avec δ ≤ 1

2d(K, ∂Ω), on peut construire une fonction ψ ∈ C ∞ c (Ω)

v´erifiant

ψ(Ω) ⊂ [0, 1] et ψ ≡ 1 sur un voisinage de K. Si on pose g = ψf , g ∈ Cc(Ω) et ∂xig ∈ L

1(Ω). Comme f ≡ g sur un voisinage de K, il suffit de

prouver la formule des sauts pour g.

On se ram`ene alors au cas o`u la fonction est de classe C∞ par r´egularisation. On se donne une suite r´egularisante (ρn) d´efinie par

∀x ∈ RN, ρ

n(x) = nNρ(nx) o`u ρ ∈ C∞(RN, [0, 1]) `a support dans la boule unit´e,

et on pose gn= ρn∗ g. La formule de Stokes et la r`egle de d´erivation du produit montrent que

∂xi(gn11K) = gn(∂xi11K) + (∂xign)11K = −νigndσ + (∂xign)11K.

Par le lemme de fermeture,

∂xign→ ∂xig dans D

0(Ω), et ∂

xi(gn11K) → ∂xi(g11K) dans D

0(Ω).

Les r´esultats classiques sur la convolution montrent que

gn→ g uniform´ement sur Ω, et ∂xign→ ∂xig dans L

1(Ω) .

On obtient alors la formule des sauts pour g.

4.3. Localisation, convolution, r´egularisation

Comme pour les fonctions, le proc´ed´e de r´egularisation des distributions le plus standard est la convo-lution. Dans le cas o`u les distributions sont d´efinies sur un ouvert Ω, cette r´egularisation est partielle car elle ne va pas jusqu’au bord. On va donc d´efinir la notion de support d’une distribution, mais pour simplifier la pr´esentation, on exposera la suite des r´esultats dans le cas o`u Ω = RN.

(40)

32 CHAPITRE 4. LA TH ´EORIE DE SCHWARTZ

D´efinition 4.3.1. — Soit Ω un ouvert de RN et T une distribution sur Ω. Le support de T est le compl´ementaire du plus grand ouvert V tel que T|V ≡ 0.

Supp(T ) = Ω \ {x ∈ Ω / ∃ω voisinage de x, T|ω= 0}.

On note E0(Ω) l’ensemble des distributions `a support compact.

On a la caract´erisation suivante des distributions dont le support est r´eduit `a un point :

Propri´et´e 4.3.2. — Soit a ∈ RN. Les distributions sur RN dont le support est {a} sont les combi-naisons lin´eaires des d´eriv´ees de la masse de Dirac en a.

D´emonstration. — On commence par montrer que les distributions `a support compact sont toujours d’ordre fini. Soient T ∈ E0(Ω) et K un voisinage compact de Supp(T ). On peut construire (par r´egularisation d’une fonction caract´eristique par exemple) une fonction ψ ∈ Cc∞(Ω) `a support dans K

telle que

ψ(Ω) ⊂ [0, 1] et ψ|Supp(T )≡ 1.

On a alors T = T ψ. Donc, pour toute fonction ϕ ∈ Cc∞(Ω), comme ψϕ est `a support dans K,

|hT, ϕi| = |hT, ϕψi| ≤ CK sup |α|≤pK k∂α(ψϕ)k ∞ ≤ C sup |α|≤pK k∂αϕk∞

par la formule de Leibniz. T est donc d’ordre pK.

Soit maintenant T une distribution dont le support est r´eduit `a {a}, disons d’ordre p. On se donne une fonction ψ ∈ C∞

c (Ω) `a support dans B(a, δ) telle que

ψ(Ω) ⊂ [0, 1] et ψ ≡ 1 sur un voisinage de a, et on pose ψn(x) = ψ(a + n(x − a)).

La formule de Taylor donne, pour toute fonction ϕ ∈ Cc∞(Ω)

ϕ(x) = ψ(x)   X |α|≤p (x − a)α α! ∂ αϕ(a)  + ˜ϕ(x) avec

∀α tel que |α| ≤ p, ∂αϕ(a) = 0.˜ Par d´efinition du support de T ,

hT, ˜ϕ(1 − ψn)i = 0.

De plus, comme T est d’ordre p,

|hT, ˜ϕψni| ≤ C sup |α|≤p

k∂α( ˜ϕψn)k∞≤ ˜C/n

en utilisant la formule de Leibniz et la formule de Taylor ∀x ∈ B(a, δ/n), |∂βϕ(x)| ≤ C˜  1

n

p+1−|β| . On en d´eduit que hT, ˜ϕi = 0.

(41)

4.3. LOCALISATION, CONVOLUTION, R ´EGULARISATION 33

D´efinition 4.3.3. — Soient T ∈ D0(RN) et ϕ ∈ Cc∞(RN). La convolution de T par ϕ est d´efinie

sur RN par

T ∗ ϕ(x) = hT, τxϕi o`ˆ u ˆϕ(y) = ϕ(−y) .

Proposition 4.3.4. — Soient T ∈ D0(RN) et ϕ ∈ C

c (RN). Alors

Supp(T ∗ ϕ) ⊂ SuppT + Suppϕ . De plus, T ∗ ϕ ∈ C∞(RN) et on a

∂α(T ∗ ϕ) = T ∗ (∂αϕ) = (∂αT ) ∗ ϕ.

D´emonstration. — Soit x /∈ SuppT + Suppϕ, on a

SuppT ∩ Supp(τxϕ) = SuppT ∩ (x − Suppϕ) = ∅,ˆ

ce qui implique que T ∗ ϕ(x) = hT, τxϕi = 0.ˆ

Soient x ∈ RN et α ∈ NN avec |α| = 1. Pour tout ε > 0,

1 ε 

T ∗ ϕ(x + εα) − T ∗ ϕ(x)=1

εhT, (τx+εαϕ − τˆ xϕ)i .ˆ Or on peut montrer que 1ε(τx+εαϕ − τˆ xϕ) converge vers τˆ x(∂\αϕ) dans Cc∞(R

N) quand ε → 0 : – pour tout ε ∈]0, 1], Supp 1 ε(τx+εαϕ − τˆ xϕ)ˆ  ⊂ Supp( ˆϕ) + B(x, 1) , – pour tout β ∈ NN ∂β 1 ε(τx+εαϕ − τˆ xϕ) − τˆ x(∂\ αϕ)  → 0 uniform´ement quand ε → 0.

On a alors

1 ε 

T ∗ ϕ(x + εα) − T ∗ ϕ(x)→ hT, τx(∂\αϕ)i .

Par d´efinition de la d´erivation des distributions, h∂αT, τ

xϕi = −hT, ∂ˆ ατxϕiˆ

= −hT, τx∂αϕi = hT, τˆ x∂dαϕi , ce qui donne la derni`ere identit´e.

On conclut alors par r´ecurrence sur la longueur de α.

Th´eor`eme 4.2. — L’ensemble des fonctions lisses C∞(RN) est dense dans D0(RN).

D´emonstration. — Soit (ρn) une suite r´egularisante d´efinie par

∀x ∈ RN, ρ

n(x) = nNρ(nx) o`u ρ ∈ C∞(RN, [0, 1]) `a support dans la boule unit´e.

Pour toute fonction ϕ ∈ C∞

c (RN), ϕ ∗ ˆρn→ ϕ dans Cc∞(RN) puisque

– pour tout n ≥ 1,

(42)

34 CHAPITRE 4. LA TH ´EORIE DE SCHWARTZ

– pour tout β ∈ NN

∂β(ϕ ∗ ˆρn) = (∂βϕ) ∗ ˆρn→ ∂βϕ

uniform´ement quand n → ∞. On a alors hT ∗ ρn, ϕi = Z RN T ∗ ρn(x)ϕ(x)dx = Z RN hT, τxρˆniϕ(x)dx = hT, Z RN ϕ(x)τxρˆndxi = hT, ϕ ∗ ˆρni → hT, ϕi

en utilisant par exemple des sommes de Riemann pour justifier l’interversion du crochet de distribution et de l’int´egrale.

(T ∗ ρn)n∈N est donc une suite de C∞(RN) qui converge vers T au sens des distributions.

En fait, de fa¸con plus g´en´erale, on peut d´efinir la convolution de deux distributions, pourvu que l’une au moins soit `a support compact.

D´efinition 4.3.5. — Soient T ∈ D0(RN) et S ∈ E0(RN). La convolution de T par S est la

distribu-tion d´efinie par

∀ϕ ∈ C∞ c (R

N), hT ∗ S, ϕi = hT, ˆS ∗ ϕi

o`u ˆS est l’image inverse de S par le changement de variable x 7→ −x.

Avec cette d´efinition, on a les propri´et´es usuelles de la convolution : Propri´et´e 4.3.6. — Soient T ∈ D0(RN) et S, S

1, S2∈ E0(RN).

Supp(T ∗ S) ⊂ Supp(T ) + Supp(S), ordre(T ∗ S) ≤ ordre(T ) + ordre(S), ∀α ∈ NN, α(T ∗ S) = ∂αT ∗ S = T ∗ ∂αS,

S1∗ S2= S2∗ S1, (T ∗ S1) ∗ S2= T ∗ (S1∗ S2) .

D´emonstration. — Puisque

Supp( ˆS ∗ ϕ) ⊂ Supp( ˆS) + Supp(ϕ), ˆ

S ∗ ϕ est une fonction C∞`a support compact, et T ∗ S est bien d´efinie. De plus,

si Supp(ϕ) ∩ (Supp(T ) + Supp(S)) = ∅, alors Supp( ˆS ∗ ϕ) ∩ Supp(T ) = ∅, et hT ∗ S, ϕi = hT, ˆS ∗ ϕi = 0. On obtient ainsi la condition sur les supports convolutifs.

Si T est d’ordre fini p

|hT ∗ S, ϕi| = |hT, ˆS ∗ ϕi| ≤ C sup

|α|≤p sup x∈K+Supp( ˆS) |∂α( ˆS ∗ ϕ)(x)| ≤ C sup |α|≤p |β|≤p0 sup x∈K |∂α+βϕ(x)|

(43)

4.3. LOCALISATION, CONVOLUTION, R ´EGULARISATION 35

Pour la d´erivation, en utilisant la dualit´e, on a les identit´es

h∂α(T ∗ S), ϕi = (−1)|α|hT ∗ S, ∂αϕi = (−1)|α|hT, ˆS ∗ ∂αϕi

= (−1)|α|hT, ∂α( ˆS ∗ ϕ)i = h∂αT ∗ S, ϕi

= (−1)|α|hT, ∂αS ∗ ϕi = hT ∗ ∂ˆ αS, ϕi .

Les propri´et´es de r´eflexivit´e et d’associativit´e se prouvent par r´egularisation hS1∗ S2, ϕi = hS1, ˆS2∗ ϕi = lim

n→∞hS1∗ ρn, ˆS2∗ ϕi

car ˆS2∗ ϕ ∈ Cc∞(RN) et S1∗ ρn→ S1dans D0(RN).

Comme pr´ec´edemment, en utilisant des sommes de Riemann, on intervertit le crochet et l’int´egrale hS1∗ ρn, ˆS2∗ ϕi = Z S1∗ ρn(x)h ˆS2, τxϕidx = h ˆˆ S2, Z S1∗ ρn(x)τxϕdxiˆ = h ˆS2, S1∗ (ρn∗ ˆϕ)i = hS2, ˆS1∗ (ˆρn∗ ϕ)i = hS2∗ S1, ˆρn∗ ϕi → hS2∗ S1, ϕi

ce qui donne la r´eflexivit´e. De la mˆeme fa¸con, on a

T ∗ (S1∗ S2) = limn→∞ m→∞ T ∗ ((S1∗ ρn) ∗ (S2∗ ρm)) = lim n→∞ m→∞ (T ∗ (S1∗ ρn)) ∗ (S2∗ ρm) = (T ∗ S1) ∗ S2 car ∀ϕ1, ϕ2∈ Cc∞(R N), T ∗ (ϕ 1∗ ϕ2) = (T ∗ ϕ1) ∗ ϕ2.

Cela montre l’associativit´e.

Les deux r´esultats qui pr´ec`edent reposent essentiellement sur les g´en´eralisations suivantes des th´eor`emes de Fubini et de d´erivation sous le signe somme.

– Int´egration sous le crochet. Soient S ∈ E0(RN) et ϕ ∈ C∞(RN +q). Pour tout compact K ⊂ Rq, hS, Z K ϕ(·, y)dyi = Z K hS, ϕ(·, y)idy .

– D´erivation sous le crochet. Soient S ∈ E0(RN) et ϕ ∈ C(RN +q). La fonction φ : y 7→

hS, ϕ(·, yi est de classe C∞ et

(44)
(45)

CHAPITRE 5

SOLUTIONS SINGULI`

ERES D’´

EQUATIONS AUX D´

ERIV´

EES

PARTIELLES

On va pr´esenter maintenant une application tr`es simple de la notion de distribution `a la r´esolution d’´equations aux d´eriv´ees partielles pr´esentant des singularit´es en temps fini. La r´esolution se fera par approximation, puis par passage `a la limite : cela permettra donc de manipuler les diff´erentes notions de convergence introduites aux chapitres pr´ec´edents.

L’´equation aux d´eriv´ees partielles que nous allons consid´erer ici n’a pas d’application physique di-recte, mais c’est un prototype de syst`eme hyperbolique de lois de conservation, comme il en apparaˆıt naturellement par exemple en m´ecanique des fluides ou en ´elasticit´e [17], [4].

L’´equation de Hopf est une ´equation scalaire unidimensionnelle, ce qui signifie que l’inconnue u est r´eelle et d´epend du temps t ∈ R+ et d’une seule variable d’espace x ∈ R. Elle s’´ecrit

(5.0.1) ∂tu + ∂x  1 2u 2  = 0 ce qui est ´equivalent pour des solutions classiques r´eguli`eres `a

(5.0.2) ∂tu + u∂xu = 0.

Cette derni`ere ´equation est aussi appel´ee ´equation de Burgers non visqueuse.

5.1. M´ethode des caract´eristiques et explosion

En utilisant la forme (5.0.2) de l’´equation, on peut calculer explicitement la solution en fonction de la donn´ee initiale

u|t=0= u0,

au moins pour des temps petits. En effet, on dispose d’une m´ethode tr`es g´en´erale pour la r´esolution des ´equations de transport, dite m´ethode des caract´eristiques.

5.1.1. La m´ethode des caract´eristiques. —

Proposition 5.1.1. — Les solutions de l’´equation de transport

(46)

38 CHAPITRE 5. SOLUTIONS SINGULI `ERES D’ ´EQUATIONS AUX D ´ERIV ´EES PARTIELLES

peuvent s’´ecrire simplement `a partir des solutions de l’´equation diff´erentielle ordinaire

(5.1.2) dX

dt = a(t, X), X(0, x0) = x0 On a en effet

v(t, X(t, x0)) = v0(x0).

Si Xt: x 7→ X(t, x) est bijective, alors

v(t, x) = v0(Xt−1(x)).

Dans le cas d’un champ de convection constant a, le mouvement est uniforme v(t, x) = v0(x − at)

Figure 1. Les caract´eristiques sont des lignes droites.

Sous des hypoth`eses de r´egularit´e sur le champ a, le th´eor`eme de Cauchy-Lipschitz assure que les trajectoires de (5.1.2) sont localement bien d´efinies et uniques, de sorte que Xtest un diff´eomorphisme.

Th´eor`eme 5.1 (de Cauchy-Lipschitz). — Soit E un espace de Banach r´eel, U un ouvert de R×E, et a : U → E une application lipschitzienne. Alors

– Pour tout (t0, x0) ∈ U , il existe une unique solution maximale X(t0,x0): I(t0,x0)→ E de l’´equation

diff´erentielle

dX

dt = a(t, X(t)).

– L’application x 7→ X(t0,x)(s) est continue au voisinage de x0 pour tout s ∈ I(t0,x0).

– Si a est de classe Ck, toute solution de l’´equation diff´erentielle est de classe Ck+1.

Dans le cas de l’´equation de Hopf, le champ de vitesses u est transport´e par lui-mˆeme. On a donc dX

dt = u(t, X), X(0, x0) = x0, u(t, X(t, x)) = u0(x).

tant que X est un diff´eomorphisme, i.e. un changement de variables r´egulier. On rappelle que le fait que X soit un diff´eomorphisme d´epend de la r´egularit´e de u (par le th´eor`eme de Cauchy-Lipschitz).

(47)

5.1. M ´ETHODE DES CARACT ´ERISTIQUES ET EXPLOSION 39

Figure 2. Les caract´eristiques d´efinissent un diff´eomorphisme sur R

5.1.2. Apparition de singularit´e. —

En diff´erentiant l’´equation des caract´eristiques par rapport `a x, on obtient ∂ ∂t ∂X ∂x = ∂ ∂x(u(t, X)) = u 0 0(x)

En int´egrant par rapport au temps t, on en d´eduit que ∂X ∂x = 1 + u 0 0(x)t. Au temps t0= 1 supx∈R(−u00(x))+

la fonction ∂X∂x s’annule au moins en un point, de sorte que X n’est plus un diff´eomorphisme.

(x1,0)
 (x2,0)


(x0,t0)


t


characteristics


Figure 3. Croisement des caract´eristiques

En effet, au point (t0, x0) la solution u devient multivalu´ee et donc u(t0, x0) n’est pas d´efini. De plus,

il y a un saut lim x→x−0 u(t0, x) 6= lim x→x+0 u(t0, x).

Figure

Figure 1. Les caract´ eristiques sont des lignes droites.
Figure 2. Les caract´ eristiques d´ efinissent un diff´ eomorphisme sur R
Figure 4. Non unicit´ e des solutions au sens des distributions
Figure 5. Condition d’entropie
+2

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