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La littérature de jeunesse en classe de FLE aux Seychelles : l'élaboration d'une séquence didactique pour l'enseignement de la compréhension en lecture et du lexique

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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La littérature de jeunesse en classe de FLE aux

Seychelles

L’élaboration d’une séquence didactique pour l’enseignement de

la compréhension en lecture et du lexique

Mémoire

Anifa Willise Henry

Maitrise en didactique

Maitre ès arts (M.A.)

Québec, Canada

© Anifa Willise Henry, 2017

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La littérature de jeunesse en classe de FLE aux

Seychelles

L’élaboration d’une séquence didactique pour l’enseignement de

la compréhension en lecture et du lexique

Mémoire

Anifa Willise Henry

Sous la direction de :

Marie-Andrée LORD, directrice de recherche

Marion SAUVAIRE, codirectrice de recherche

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iii

Résumé

Bien que le français soit l’une des trois langues nationales des Seychelles, elle demeure la moins maitrisée1 et la moins pratiquée par la population. Dans les écoles secondaires, en particulier, les pratiques d’enseignement du français ne sont pas toujours cohérentes par rapport aux prescriptions ministérielles. En effet, nous avons constaté que malgré que la lecture des textes littéraires soit inscrite au programme de français, elle n’est pas enseignée dans les écoles. Pourtant, celle-ci pourrait contribuer à l’apprentissage du français des jeunes Seychellois. Dans ce mémoire de maitrise, nous explorons les rôles de la littérature de jeunesse dans les classes de français langue étrangère (FLE). Considérant le niveau des élèves en français et de l’absence de ce genre littéraire au programme dans les écoles secondaires, nous avons décidé de travailler à partir d’un album de jeunesse dans le but de développer la compréhension en lecture et la compétence lexicale chez les élèves de la première année du secondaire aux Seychelles. Loin d’être un simple livre avec des dessins, l’album est de plus en plus utilisé avec des enfants plus âgés (Giasson, 2014). C’est donc pour cette raison que nous pensons que ce genre littéraire pourrait susciter l’intérêt des élèves pour la lecture en français. Nous avons choisi l’approche de l’enseignement explicite pour élaborer une séquence d’enseignement, car il s’agit d’une méthode efficace qui met la compréhension des élèves au premier plan (Gauthier, Bissonnette et Richard, 2013). À travers la séquence, nous proposons aux enseignants différents types d’activités pour articuler l’enseignement de la compréhension en lecture à l’enseignement du lexique.

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iv

Abstract

Although French is one of the three national languages of the Seychelles, it remains the least mastered and the least practised by the population. In secondary schools, in particular, the teaching practices are not always consistent to the ministerial requirements. In fact, we have noticed that even though the reading of literary texts is included in the French program, it is not taught in schools. Yet, it could contribute to the learning of French by Seychellois students. In this master’s thesis, we explore the roles of children’s literature in the teaching of French as a foreign language. Considering the level of students’ competency in French and the absence of the literary corpus in the secondary schools’ program, we have decided to work from an album (picture book) with the aim of developing reading comprehension and lexical competence of first year secondary school students of the Seychelles. Far from being a simple book with pictures, the album is more and more used with older children (Giasson, 2014). It is thus for that reason that we think that this literary genre could arouse the reading interest of students. We have chosen the explicit teaching approach to develop a teaching sequence as it is an effective teaching method that prioritises students’ comprehension (Gauthier, Bissonnette & Richard, 2013). Through this teaching sequence, we present to teachers different types of activities to articulate the teaching of reading comprehension to the teaching of lexicon.

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v

Somer

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Menm si Franse i enn parmi sa trwa lalang nasyonal ki annan Sesel, i reste lalang ki ganny mwen metrize e mwen pratike par lapopilasyon. Dan bann lekol segonder, an partikilye, lansennyman ek laprantisaz Franse pa toultan reflekte sa ki ganny preskrir par Minister Ledikasyon Sesel. Nou’n remarke ki menm si lektir literer i form parti progranm Franse, i pa ganny ansennyen dan lekol. Pourtan, i kapab fasilit laprantisaz Franse par nou bann zenn seselwa. Dan sa memwar, nou eksplor bann rol ki literatir zenes i kapab zwe dan laklas Franse. Vi ki nou bann zelev, an arivan dan lekol segonder, zot pa touzour annan en tre o nivo an Franse e vi ki dan lekol primer, zot pa’n aprann literatir, nou’n prefere swazir en albonm ki’n ganny fer spesyalman pour bann zenn pour nou devlop sa de konpetans swivan dan nou bann zelev premye lannen segonder : konpreansyon dan lektir ek konpetans leksikal. Sa zanr literer i plis ki en liv avek zimaz e i pe ganny servi bokou plis avek bann zelev pli aze (Giasson, 2014) e nou’n panse ki i ava kapab motiv nou bann zelev pour lir an Franse. Nou’n swazir en metod apele « lansennyman eksplisit » ki favoriz konpreansyon bann zelev avan tou (Gauthier, Bissonnette ek Richard, 2013) pour nou konstrir en sekans didaktik. Atraver sa sekans, nou ofer nou bann ansenyan diferan kalite aktivite ki kapab devlop konpetans dan lektir ek konpetans leksikal dan nou bann zelev.

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vi

Table des matières

Résumé ... iii

Abstract ... iv

Somer ... v

Table des matières ... vi

Liste des tableaux ... viii

Remerciements ... ix

INTRODUCTION ... 1

1. LA PROBLÉMATIQUE ... 3

1.1. Le statut et les rôles du français aux Seychelles ... 3

1.2. Le contexte socio-institutionnel de l’enseignement du français aux Seychelles ... 6

1.2.1. Les prescriptions ministérielles pour l’enseignement du français ... 6

1.2.2. L’enseignement du français au secondaire ... 10

1.2.3. L’enseignement de la littérature ... 14

1.3. Le champ de la recherche ... 16

1.4. La pertinence de la recherche ... 19

1.4.1. L’efficacité de la littérature de jeunesse pour l’apprentissage de la lecture ... 19

1.4.2. Le lexique et la compréhension en lecture ... 22

1.4.3. L’enseignement explicite au service de la compréhension en lecture ... 22

1.5. L’objectif de la recherche ... 24

1.6. Les questions de recherche ... 24

2. LE CADRE THÉORIQUE ET CONCEPTUEL ... 26

2.1. La littérature à l’école ... 26

2.1.1. L’enseignement de la littérature de jeunesse ... 29

2.1.2. L’album de jeunesse en classe de FLE ... 33

2.2. L’enseignement explicite ... 37

2.2.1. L’enseignement explicite de la compréhension en lecture ... 42

2.2.2. L’enseignement de la compétence lexicale ... 47

2.3. L’articulation entre la lecture et le lexique pour faciliter la compréhension ... 54

3. LE CADRE MÉTHODOLOGIQUE ... 59

3.1. La recherche de développement ... 59

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vii

3.1.2. Les étapes du développement d’objet de la recherche de développement ... 60

3.2. La conception de la séquence didactique ... 71

3.2.1. La transposition didactique ... 71

3.2.2. La séquence didactique ... 72

3.2.3. Le choix du corpus de littérature ... 74

4. Séquence didactique autour de Machin truc chouette d’Hubert Ben Kemoun pour les élèves de la première année du secondaire des Seychelles ... 78

4.1. Les objectifs généraux de l’enseignement de l’album ... 78

4.2. Justification de la progression de la séquence ... 80

4.3. Justification du choix des activités pédagogiques autour de l’album ... 82

4.4. Présentation de la séquence ... 83

CONCLUSION DE LA SÉQUENCE ... 118

CONCLUSION ... 119

BIBLIOGRAPHIE ... 121

Annexes ... 128

Annexe 1 : Habiletés et objectifs pour le cycle 4 ... 128

Annexe 2 : Connaissances et objectifs pour le cycle 4 ... 129

Annexe 3 : Planification de la lecture ... 130

Annexe 4 : Exemple des stratégies pour trouver le sens des mots ... 131

Annexe 5 : Connaissances et objectifs pour le cycle 3 (prérequis) ... 132

Annexe 6 : Habiletés et objectifs pour le cycle 3 (prérequis) ... 133

Annexe 7 : Groupes de mots ou expressions choisis par l’enseignant (séance 4) ... 134

Annexe 8 : Phrases à trous (séance 4) ... 135

Annexe 9 : Fiche simplifiée (description des personnages, séance 6) ... 136

Annexe 10 : Savoirs à enseigner (personnage) ... 137

Annexe 11 : Fiche critériée (séance 8) ... 138

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Liste des tableaux

Tableau 1: Les objectifs de l’enseignement du français ... 7

Tableau 2 : Moyenne nationale en pourcentage (%) en français par niveau ... 12

Tableau 3 : La performance des élèves en GCE A Level French ... 15

Tableau 4 : Les étapes de l’enseignement explicite ... 40

Tableau 5 : Les stratégies à privilégier selon le niveau des élèves ... 44

Tableau 6 : Les stratégies de compréhension en lecture ... 46

Tableau 7 : Fiche de lecture (d’après Marion Sauvaire). ... 62

Tableau 8 : Les ouvrages scientifiques consultés ... 64

Tableau 9 : Les périodiques consultés ... 66

Tableau 10 : Les actes de colloque ... 67

Tableau 11 : Les diverses sources consultées ... 68

Tableau 12 : Séance 1 ... 83 Tableau 13 : Séance 2 ... 88 Tableau 14 : Séance 3 ... 93 Tableau 15 : Séance 4 ... 95 Tableau 16 : Séance 5 ... 99 Tableau 17 : Séance 6 ... 103 Tableau 18 : Séance 7 ... 108 Tableau 19 : Séance 8 ... 113

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Remerciements

La motivation, la détermination et le courage pour terminer ce mémoire de maitrise auraient été impossibles sans la présence de Dieu dans ma vie. C’est à lui que revient mon plus grand éloge.

Mes remerciements très distingués vont à ma directrice de recherche, Marie-Andrée Lord, et à ma codirectrice de recherche, Marion Sauvaire, qui ont su m’accompagner tout au long de mon parcours. Leurs conseils, leur charisme, leur disponibilité et leur expertise m’ont poussée à un niveau que j’ignorais pouvoir atteindre.

Je remercie aussi Louis LeVasseur, mon premier directeur de recherche, qui m’a guidée au tout début de mon parcours universitaire et qui a pris le temps de lire ma proposition de recherche pour me diriger vers les experts de mon domaine de recherche.

J’en profite pour remercier d’autres professeurs que j’ai rencontrés durant mes études et qui ont eu une influence sur moi en ce qui concerne mes choix méthodologiques, l’organisation de mon projet, la pertinence de ma recherche, la qualité de mon travail, entre autres : Monsieur Clermont Gauthier, Monsieur Érick Falardeau, Monsieur Denis Simard et Monsieur Denis Jeffrey.

Mes remerciements vont également à tout le monde au huitième étage de la FSÉ qui m’a aidée d’une façon ou d’une autre, avec des suggestions d’articles, de l’aide pour utiliser l’imprimante, ou juste une petite conversation pour enrichir ma motivation.

Un remerciement spécial va à France Bilodeau qui a été un vrai soutien dans mes recherches. Sa porte était toujours ouverte pour mes arrivées imprévues lorsque je n’arrivais pas à retrouver un livre sur les étagères à la bibliothèque et pour la recherche d’articles dans les bases de données. Merci, Madame Bilodeau, pour votre gentillesse et votre intérêt pour ma recherche.

Je suis aussi très reconnaissante envers le PCBF (Programme Canadien de Bourse de la Francophonie) qui a financé mes études et mon séjour au Canada. Cette maitrise a été possible grâce à la générosité du gouvernement canadien pour les pays en voie de

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x

développement et je lui suis infiniment reconnaissante. Je voudrais par la même occasion remercier Jeanne Gallagher, qui a été gestionnaire de PCBF. Elle se souciait de tous les boursiers et envoyait régulièrement des petits mots d’encouragement.

Une personne qui m’a fait découvrir cette bourse mérite ma gratitude : Monsieur Lamine Kanté, qui a été mon professeur de français aux Seychelles. Il est celui qui m’a poussée vers l’enseignement de cette langue. Il est devenu ensuite un collègue de travail et mon inspiration pour obtenir ma maitrise. Quand j’ai douté de mes capacités, vous avez vu en moi les compétences pour atteindre le sommet, merci.

Ce retour au passé me fait penser à tous mes amis et collègues aux Seychelles qui ont toujours cru en moi et qui m’ont aidée à atteindre mes objectifs. Je remercie mon amie, Ronia, pour son aide avec les traductions. Je remercie aussi des membres du personnel du ministère de l’Éducation des Seychelles qui m’ont aidée à obtenir des documents importants et des statistiques relatives à ma recherche : Merida Delcy, Marie-Reine Hoareau, Zita Bella Labiche, Keiren Madeleine, Hervé Young. Merci aussi aux nouveaux amis rencontrés ici à Québec pour leur accueil, leur conseil et leur amitié. Je pense à toi, Catherine, en particulier.

Finalement, je voudrais remercier ma famille : ma mère, ma tante, mon frère et ma filleule. Votre absence était difficile à accepter parfois. De même, je suis infiniment reconnaissante envers mon époux, Gary, qui n’a pas hésité à me suivre, lui qui déteste tant le froid et les longs voyages en avion. Merci, mon amour, pour ton soutien, tes conseils, et d’être là à mes côtés.

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INTRODUCTION

Notre intérêt pour la langue française et sa maitrise par les élèves seychellois explique notre choix de poursuivre des études de maitrise en didactique du français. Dans le but de voir évoluer les pratiques actuelles en enseignement du français aux Seychelles, nous avons développé un intérêt pour le champ de la didactique du français. Nos lectures nous ont permis de découvrir des méthodes pédagogiques efficaces et des outils didactiques qui peuvent améliorer le développement des compétences langagières chez les élèves qui apprennent le français langue étrangère (FLE) aux Seychelles.

Nous nous intéressons à la lecture du texte littéraire par les élèves de FLE, car des recherches ont démontré que la littérature en classe de FLE peut aider à former des lecteurs dans la langue qu’ils étudient (Anastassiadi, 2010; Benazout, 2010; Cuq et Gruca, 2005; Piotrowska-Skrzypek, 2010) et à développer des compétences en lecture, en écriture et à l’oral. L’approche communicative adoptée par le ministère de l’Éducation des Seychelles pour l’enseignement du français dans les écoles se concentre essentiellement sur le développement des compétences orales et l’usage pratique de la langue. Les compétences en lecture et en écriture sont moins développées chez les élèves.

Actuellement, la lecture des textes littéraires est insérée dans le programme officiel de français des Seychelles. Mais, pour des raisons multiples, cette activité ne fait pas partie de l’enseignement et de l’apprentissage du français dans les écoles secondaires. Or, le CECRL (Cadre européen commun de référence pour les langues) qui constitue la base de l’élaboration des programmes, des examens, etc., et de ce que les élèves de FLE doivent apprendre reconnait que « les études littéraires ont de nombreuses finalités éducatives, intellectuelles, morales et affectives, linguistiques et culturelles et pas seulement esthétiques » (Conseil de l’Europe, 2001, p. 47).

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2

Pour ce projet de maitrise, nous avons choisi de nous intéresser aux textes littéraires dans l’enseignement de FLE, plus particulièrement à la littérature de jeunesse, car elle présente des genres d’œuvres, notamment l’album, qui est adapté à un public débutant en lecture. Nous adoptons l’approche de l’enseignement explicite, car c’est une méthode d’enseignement dite efficace qui présente les contenus à enseigner du plus simple au plus complexe, ce qui permet la vérification de la compréhension tout au long de la leçon et la participation active de tous les élèves (Gauthier, Bissonnette et Richard, 2007). Au terme de cette recherche, nous utilisons cette méthode d’enseignement pour élaborer une séquence didactique portant sur un album de jeunesse et articulant l’enseignement de la compréhension en lecture à l’enseignement du lexique.

Le travail qui suit est constitué de quatre sections. Dans la première section, nous présentons la problématique de notre recherche. Le but est de contextualiser notre objet de recherche afin de montrer la pertinence de la langue française au sein de la société seychelloise et de souligner les problèmes liés à son enseignement dans les écoles de l’État. La deuxième section constitue une recension des écrits sur les concepts et les idées clés de notre recherche. Nous exposons l’état des recherches en didactique du français à propos de l’enseignement de la littérature de jeunesse, de l’approche de l’enseignement explicite et de l’enseignement de la compréhension en lecture et du lexique. Dans la troisième section, nous décrivons les approches méthodologiques préconisées pour mener notre recherche et nous justifions nos choix. Finalement, dans la quatrième section, nous présentons notre séquence didactique. Dans cette section, nous présentons l’œuvre littéraire choisie, un album de littérature de jeunesse intitulé Machin truc chouette et nous justifions les objectifs retenus pour son enseignement. Enfin, la séquence élaborée est présentée en détail une séance à la fois.

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1. LA PROBLÉMATIQUE

Dans ce premier chapitre, nous contextualisons notre objet de recherche. Pour ce faire, nous traitons d’abord du statut du français au sein de la société seychelloise et des rôles que joue cette langue dans les domaines politique, culturel et économique. Puisque l’apprentissage du français se réalise essentiellement à l’école, nous décrivons et analysons ensuite le programme de français du secondaire dans le but de dresser un bref portrait de l’enseignement de cette langue à l’école publique3. Cette brève description du contexte seychellois permettra de mieux comprendre les problèmes relatifs à l’enseignement du français et les enjeux de cet enseignement.

1.1. Le statut et les rôles du français aux Seychelles

Depuis leur indépendance en 1976, les Seychelles4 possèdent trois langues nationales : le créole, l’anglais et le français. Malgré leur statut égal dans la Constitution, les trois langues occupent des rôles différents sur le plan social, culturel, administratif, politique et éducatif. Le créole est la langue parlée par 97 % de la population et c’est la langue utilisée à l’Assemblée Nationale5. L’anglais est la langue officielle maitrisée par 60 % de la population et elle est utilisée dans le domaine administratif (Observatoire de la langue française de l’OIF, 2010). Le français est plutôt une langue qui reflète la culture historique du pays. Des données recueillies par Hoareau (2010) pour réaliser sa recherche doctorale portant sur « les écarts entre les statuts constitutionnels des langues seychelloises (créole, anglais et français) et leurs usages dans la pratique » (Hoareau, 2010, p. iv) décrivent davantage les rôles divers qu’occupent les trois langues. Le créole est perçu comme « le moyen de communication orale quotidien pour la quasi-totalité de la population » (p. 2). L’anglais, la « langue officielle dominante de l’administration, de la justice, de la communication écrite et de l’enseignement pour les cycles primaire, secondaire et postsecondaire, remplit de nombreuses fonctions sociales » (p. 2). Le français est vu

3 Précisons que notre recherche ne porte que sur l’enseignement offert dans les écoles de l’État, car elles sont tenues de suivre les mêmes prescriptions ministérielles selon le niveau et le cycle d’études. Les écoles privées, quant à elles, ont des programmes différents.

4 Les Seychelles constituent une ancienne colonie de la France (1770-1811) et du Royaume-Uni (1911-1976). 5 Le parlement des Seychelles.

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4

comme « première langue coloniale, utilisée comme matière obligatoire dans les cycles primaires et secondaires » et « il demeure toutefois, la langue la moins parlée » (p. 2).

Bien que le français partage le même statut que les deux autres langues, la pratique et la perception de cette langue par la population semblent indiquer qu’il y a effectivement un déséquilibre linguistique. Toujours en se référant aux données de Hoareau (2010), selon une majorité d’individus interrogés, lorsque l’on parle ou écrit en français, il ne faut pas faire d’erreurs. « Le français est la langue des grandes messes, de grandes dames, et ces dernières se moquent de vous en cas d’erreur… si vous parlez le français, vous vous mettez sur le même pied que les grands et il n’est pas permis de faire des fautes » (Hoareau, 2010, p. 294). Cette représentation de la langue française a eu des répercussions dans le monde scolaire, que ce soit pendant les périodes coloniales ou dans les classes de français après l’indépendance, et ce, jusqu’à aujourd’hui.

Selon les témoins6, la difficulté de la langue française, qui s’ajoute à la peur de l’utiliser, a été renforcée par les institutions comme l’église et surtout l’école. Plus d’un tiers des témoins font ressortir combien ces institutions ont contribué à propager ce sentiment de culpabilité. Les enseignants religieux qui assuraient des cours de français et les autres enseignants francophones considéraient l’erreur comme inadmissible en période d’apprentissage (Hoareau, 2010, p. 299).

Malgré sa représentation défavorable et sa pratique presque inexistante par la population, le français demeure une langue très importante sur le plan politique et économique du pays. Les Seychelles sont membres de différentes organisations francophones, notamment l’Organisation Internationale de la Francophonie (l’OIF), de la CONFEMEN (Conférence des ministres de l’Éducation ayant le français en partage) et CONFEJES (Conférence de la jeunesse et des sports). Les Seychelles entretiennent aussi des relations économiques avec d’autres iles du sud-ouest de l’Océan Indien en tant que membres de la COI (Commission de l’Océan Indien). « Ces pays partagent tous le français comme langue de communication, bien que le statut et la reconnaissance officielle de cette langue varient d’un pays à l’autre »

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5

(Hoareau, 2010, p. 7). Toutes ces affiliations politiques et économiques montrent que « les Seychelles doivent conserver le français afin de garder le contact avec des pays où cette langue exerce un pouvoir très fort, tant sur le plan de la coopération économique que sur le plan culturel » (Hoareau, 2010, p. 7).

En octobre 2010, un Pacte Linguistique a été signé entre le Président de la République des Seychelles, James Michel7, et le Secrétaire Général de la Francophonie, Abdou Diouf, avec la collaboration de l’OIF. Le gouvernement veut « parvenir à un “trilinguisme équilibré” entre les trois langues nationales (créole, anglais, français) et, pour l’atteindre, il convient de fournir un effort particulier en faveur de la langue française, dont l’usage est moins répandu que celui des deux autres » (OIF, 2010, paragr. 2). Le Pacte vise à attribuer au français une place méritée dans tous les domaines de l’enseignement et à encourager la population à utiliser cette langue au quotidien. Dans ce même but, l’Académie du Tourisme des Seychelles8 a décidé qu’à partir de 2016 plusieurs disciplines scolaires seront enseignées en français (Seychelles News Agency, 2014). Cette décision démontre clairement l’importance de la langue française, car l’industrie du tourisme est « le premier pilier de l’économie seychelloise » (Seychelles News Agency, 2014, paragr. 3) et la France est le deuxième pays d’où provient le plus grand nombre de visiteurs.

Dans la vie politique, économique et culturelle du pays, le français semble occuper une place très importante. Il est donc nécessaire pour plusieurs Seychellois d’avoir une assez bonne maitrise de cette langue, particulièrement, les employés et les employeurs dans les différents établissements touristiques du pays, les avocats, les ambassadeurs, les enseignants, entre autres. Puisque l’école est l’institution qui exerce le mieux le rôle de promouvoir la langue française, nous présentons, dans la section qui suit, des éléments contextuels de l’enseignement du français.

7 Le président actuel de la République des Seychelles est Danny Faure (depuis le 16 octobre 2016).

8 École qui assure la formation des élèves dans l’industrie du tourisme et accueille chaque année un grand nombre d’étudiants qui ont terminé leurs études au niveau du secondaire.

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1.2. Le contexte socio-institutionnel de l’enseignement du français aux Seychelles

Le français, comme discipline scolaire, a connu plusieurs évolutions dans le système éducatif des Seychelles. Il était la langue d’enseignement avant que l’anglais ne lui prenne sa place au début du 20e siècle. Dans les années 80, dans le but de revaloriser le français, l’enseignement de l’histoire et de la géographie se faisait en français grâce à un accord de coopération entre les Seychelles et la Guinée-Conakry. Mais ce projet n’a duré qu’une année en raison du manque d’enseignants nationaux pour assurer sa continuation et des grandes difficultés des élèves à suivre l’enseignement en français (Hoareau, 2010). Après l’échec de ce projet et la reconnaissance du créole comme langue nationale, le français a été enseigné à partir de la quatrième année du primaire après l’apprentissage du créole en premier lieu et celui de l’anglais en deuxième lieu. Cependant, en 1997, le ministère de l’Éducation s’est décidé à introduire le français et l’anglais dès la maternelle9 afin de « permettre une immersion dans ces deux langues, à travers des activités ludiques » (Chaudenson, 2007, p. 201). Nous constatons donc que le français a toujours fait partie des programmes scolaires des Seychelles, mais que son enseignement et son apprentissage demeurent problématiques.

1.2.1. Les prescriptions ministérielles pour l’enseignement du français

Depuis quelques années, le ministère de l’Éducation des Seychelles a mis en place plusieurs réformes dans le but d’améliorer les compétences des élèves dans les trois langues nationales. Il y a eu, entre autres, l’introduction du français et de l’anglais à partir de la maternelle, l’introduction d’un nouveau curriculum national du français, l’adoption du programme de DELF (Diplôme d’Études en Langue Française) scolaire dans les écoles secondaires et la signature du Pacte linguistique avec l’OIF (référence : section 1.1). De plus, tout récemment, en 2013, la Division for Curriculum Assessment and Teacher Support du ministère de l’Éducation a publié un nouveau National Curriculum Framework. Ce dernier est un ensemble d’objectifs pour les différents programmes scolaires dans les écoles primaires et secondaires. En ce qui concerne les langues (l’anglais, le français et le créole),

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7

on s’attend à ce que les élèves puissent les maitriser efficacement à l’oral et à l’écrit (Division for Curriculum Assessment and Teacher Support, 2013, p. 18). Le ministère cherche toujours à attribuer au français le statut égal qu’il partage avec les deux autres langues dans la Constitution.

L’enseignement du français dans les écoles de l’État se fait à partir du document officiel du ministère de l’éducation : Français Curriculum National.

Ce document présente la justification, les buts de l’enseignement du français, les objectifs généraux et terminaux pour chacun des cinq cycles10. Sont également décrites les stratégies d’enseignement/apprentissage ainsi que les modalités d’évaluation des élèves. Un tel document permettra aux enseignants de planifier leur travail, de préparer leurs leçons, de contrôler les apprentissages des apprenants et d’évaluer leur enseignement (Ministère de l’Éducation, 2001, p. 3).

Ce document préconise « une progression en spirale » (Ministère de l’Éducation, 2001, p. 38) c’est-à-dire une approche selon laquelle « une habileté, une connaissance sont présentées puis une autre, on revient sur les premières pour les reprendre et les compléter » (Ministère de l’Éducation, 2001, p. 38).

Le Tableau 1 ci-dessous explique brièvement les différents objectifs de l’enseignement du français pour chacun des cinq cycles scolaires.

Tableau 111: Les objectifs de l’enseignement du français Cycles Objectifs principaux (l’oral et l’écrit)

1 • Reconnaitre les intonations de la langue.

10 Cycle 1 : maternelle à la deuxième année du primaire; Cycle 2 : troisième année et quatrième année du primaire; Cycle 3 : cinquième année et sixième année du primaire; Cycle 4 : première année et deuxième année du secondaire; Cycle 5 : troisième année à la cinquième année du secondaire

11 Ce tableau est une synthèse du Curriculum National du Français (2001).

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• Apprendre et utiliser les formules de politesse.

• Connaitre le vocabulaire de base lié à son environnement immédiat et au contexte scolaire.

• Connaitre la construction des phrases de base et quelques articulateurs temporels.

• Découvrir l’importance des livres.

• Raconter une histoire en 3 petites phrases à l’aide des images.

• Donner des informations précises pour se présenter, exprimer ses sentiments, etc.

2 • Prononcer correctement les sons propres au français.

• Connaitre le nom des objets, les verbes d’action et les adjectifs. • Respecter la correspondance graphie-son (l’orthographe). • Identifier le présent, le passé et le futur.

• Connaitre les différents types des phrases et les rédiger aussi.

• Repérer le fonctionnement particulier du langage : arrangement phonétique, graphique et sémantique.

• Lire un texte court d’une dizaine de lignes et exprimer sa compréhension du texte.

• Découvrir l’utilité d’un dictionnaire.

• Écrire un court récit en 5 phrases en respectant les règles grammaticales.

3 • Mémoriser et réciter des textes d’auteurs d’une quinzaine de vers (poèmes) ou de cinq lignes.

• Lire un texte court d’une page (silencieusement ou à deux). • Répondre à des questions portant sur le texte lu.

• Utiliser le dictionnaire pour chercher la définition et vérifier l’orthographe d’un mot.

• Choisir un livre à la bibliothèque qui correspond à ses gouts ou à ses besoins. • Produire différents types de textes : une histoire en une page, un dialogue pour

une bande dessinée, une lettre amicale, un poème, etc.

• Résumer en français une histoire simple entendue ou lue en créole.

4 • Utiliser les règles de base pour maitriser le fonctionnement de la langue (vocabulaire, orthographe, grammaire, conjugaison).

• À partir d’un document sonore, repérer les informations sur les personnages, les lieux et les moments de l’action.

• Lire une œuvre complète (conte, nouvelle, BD).

• Montrer sa compréhension de la lecture de textes divers.

• Produire différents types de textes (un récit, une courte biographie, etc.) • Traduire en français un court texte écrit en créole ou en anglais.

5 • Approfondir sa connaissance du fonctionnement de la langue.

• Comparer la construction des phrases simples et complexes dans les trois langues.

• Lire une œuvre complète plus complexe (nouvelle, roman).

• Manifester sa compréhension plus complète et plus fine de la lecture en répondant aux questions portant sur le texte.

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• Utiliser un dictionnaire, un fichier ou un tableau de références.

• Produire différents types de textes en respectant leurs caractéristiques (narratif, prescriptif, informatif, poétique, argumentatif et descriptif)

• Traduire en créole ou en anglais des textes courts de divers types écrits en français.

• Traduire en français un texte court écrit en créole ou en anglais.

Ces objectifs généraux présentés ci-dessus répondent aux buts de l’enseignement du français aux Seychelles :

• Le développement de l’habileté à comprendre et à produire cette langue oralement et par écrit à différents niveaux de compétence;

• L’élargissement de la culture générale, le développement d’une compétence interculturelle et la promotion de la créativité; • La stimulation du plaisir de communiquer dans des situations

variées dans un contexte national, régional et international; • Le développement de la capacité à comprendre le français à

travers différents réseaux médiatiques;

• L’habitude d’une réflexion sur le langage et les langues, dans leurs caractéristiques, leur fonctionnement et leur diversité; • L’insertion scolaire, sociale, professionnelle et l’acquisition d’un

outil de formation pour la vie des jeunes citoyens seychellois (Ministère de l’Éducation, 2001, p. 5).

Par rapport aux buts présentés, nous constatons que le ministère de l’Éducation a un plan clair et précis pour l’enseignement du français aux Seychelles. Cependant, selon notre connaissance du milieu, ces buts-là ne reflètent pas toujours la réalité de l’enseignement et de l’apprentissage du français dans les écoles. Dans le cadre de notre recherche, nous nous concentrerons plus sur les cycles du secondaire au lieu de ceux du primaire. Au primaire, il s’agit d’enseigner la base du français aux élèves, et ce qui nous intéresse le plus est le développement des compétences langagières des élèves pour qu’ils puissent, soit entamer le français au postsecondaire avec succès, soit entrer dans le monde du travail avec une bonne maitrise de cette langue.

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10

1.2.2. L’enseignement du français au secondaire

Dans les écoles secondaires de l’État, les élèves de la première, de la deuxième et de la troisième année bénéficient de cinq séances de quarante minutes de cours de français chaque semaine. À partir de la quatrième jusqu’à la cinquième année du secondaire, une séance de cours de français est enlevée et le nombre de cours d’anglais augmente. Nous ne voulons pas faire une comparaison entre ces deux disciplines scolaires, mais il nous semble qu’en attribuant plus d’heures de cours à une discipline, le ministère de l’Éducation souligne que la discipline anglais mérite plus d’attention que la discipline français. De plus, toutes les autres disciplines à l’école, notamment, la géographie, l’histoire, les mathématiques et les sciences sont enseignées en anglais. Nous pouvons dire que la politique linguistique du ministère de l’Éducation semble montrer aux élèves et aux parents que le français n’est pas une discipline prioritaire. L’accent est mis sur la maitrise de l’anglais, car il s’agit de la langue d’enseignement de toutes les autres disciplines et, comme nous avons déjà mentionné, c’est également la langue dominante de l’administration, de la justice, de la communication, entre autres.

Depuis 2005, le ministère de l’Éducation en partenariat avec l’Alliance Française12 des Seychelles a introduit le DELF (Diplôme d’Études en Langue Française) scolaire pour « permettre un renouvellement des pratiques pédagogiques et une nouvelle approche quant à la mise en œuvre des programmes de français » (Seychelles Nation13, 2005, paragr. 5). Le DELF Scolaire a été créé en 2002 et « il est constitué de quatre certifications qui, chacune, attestent un niveau de compétences en français » (Seychelles Nation, 2005, paragr. 3). Ces compétences sont la compréhension écrite, la compréhension orale, la production écrite et la production orale. Les quatre certificats (niveaux) sont le DELF A1, DELF A2, DELF B1 et DELF B2. En 2005, seuls les certificats A2 et B1 étaient offerts aux élèves finissant le secondaire, maintenant les élèves peuvent choisir parmi les quatre niveaux correspondant à leurs habiletés orales et écrites en français. De plus, s’ils ont envie de poursuivre leurs études ou s’ils veulent développer leurs compétences en français, ils peuvent s’inscrire pour

12 L’association qui promeut la langue et la culture française et francophone. 13 Journal national des Seychelles.

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les examens du DALF (Diplôme Approfondi de Langue Française) qui sont offerts par l’Alliance Française.

Le DELF est basé sur le Cadre Européen Commun de Référence pour les Langues (CECRL) qui favorise une approche dite « actionnelle » pour l’enseignement et l’apprentissage des langues étrangères. Cette approche « considère avant tout l’usager et l’apprenant d’une langue comme des acteurs sociaux ayant à accomplir des tâches (qui ne sont pas seulement langagières) dans des circonstances et un environnement donnés, à l’intérieur d’un domaine d’action particulier » (Conseil de l’Europe, 2001, p. 15). Rosen (2006), cité par Guimarães-Santos (2012), fait ressortir que « la perspective privilégiée dans le CECRL – de type actionnel – soutient que l’apprentissage des langues est une préparation pour une utilisation active de la langue pour communiquer » (p. 1). Il nous semble qu’il s’agit d’une approche communicative et instrumentale qui met beaucoup plus d’accent sur la maitrise de l’oral que de l’écrit par les élèves comme le constate également Guimarães-Santos : « selon le CECR, le but de l’enseignement des langues étrangères est de former des acteurs sociaux avec une maitrise pratique de la langue, domaine qui permet à ses utilisateurs de participer d’une communication efficace dans différentes situations d’interaction dans la vie quotidienne » (2012, p. 1).

Comme les élèves (avec l’aide de leurs enseignants) peuvent choisir le niveau d’épreuve correspondant à leur niveau de compétence en français, il y a un plus haut taux de réussite chez les élèves (car ceux-ci choisissent souvent un niveau dans lequel il est plus facile d’obtenir un meilleur résultat).

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12

Tableau 2 : Moyenne nationale en pourcentage (%) en français par niveau

DELF A1 DELF A2 DELF B1 DELF B2

2009 69.15 75.28 60.44 57.64

2010 68.08 70.02 60.64 54.34

2011 65.19 70.01 64.49 55.9

2012 73.07 71.59 60.86 53.96

2013 69.73 68.9 58.78 51.96

Source : Centre chargé du curriculum, de l’évaluation et du soutien pédagogique, Ministère de l’Éducation des Seychelles.

Nous pouvons constater que les élèves réussissent mieux aux épreuves de deux premiers niveaux. De plus, ils sont plus nombreux à s’inscrire pour ces niveaux. Par exemple, en 2013, il y avait 133 élèves inscrits pour le DELF A1, 401 élèves inscrits pour le DELF A2, 343 élèves inscrits pour le DELF B1 et 63 élèves inscrits pour le DELF B214.

Selon le CECRL (Conseil de l’Europe, 2001), il y a six niveaux communs de référence : le niveau introductif (A1), le niveau intermédiaire (A2), le niveau seuil (B1), le niveau avancé (B2), le niveau autonome (C1) et le niveau maitrise (C2). Si la majorité des élèves seychellois se qualifient pour les épreuves du DELF A1 et DELF A2, cela veut dire qu’ils se situent majoritairement à des niveaux introductifs et intermédiaires. Le CECRL ne propose pas directement des méthodes à utiliser en classe, il demeure la responsabilité du ministère ou des enseignants de choisir les méthodes pédagogiques ou didactiques appropriées afin de développer les compétences des élèves en français.

Pour le niveau B1, le CECRL indique la compétence ci-dessous :

Peut comprendre les points essentiels quand un langage clair et standard est utilisé et s’il s’agit de choses familières dans le travail, à l’école, dans les loisirs, etc. Peut se débrouiller dans la plupart des situations rencontrées en

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voyage dans une région où la langue cible est parlée. Peut produire un discours simple et cohérent sur des sujets familiers et dans ses domaines d’intérêt. Peut raconter un événement, une expérience ou un rêve, décrire un espoir ou un but et exposer brièvement des raisons ou explications pour un projet ou une idée (Conseil de l’Europe, 2001, p. 25).

En ce qui concerne la compétence en lecture pour le niveau B1, l’auto-évaluation de l’apprenant selon le CECRL est la suivante :

Je peux comprendre des textes rédigés essentiellement dans une langue courante ou relative à mon travail. Je peux comprendre la description d’événements, l’expression de sentiments et de souhaits dans des lettres personnelles (Conseil de l’Europe, 2001, p. 26).

Cette compétence est différente de ce qui est attendu d’un apprenant du niveau A2 :

Je peux lire des textes courts très simples. Je peux trouver une information particulière prévisible dans des documents courants comme les publicités, les prospectus, les menus et les horaires et je peux comprendre des lettres personnelles courtes et simples (Conseil de l’Europe, 2001, p. 26).

Il nous semble que beaucoup d’élèves choisissent les niveaux A1 et A2, car l’importance pour eux est de réussir les examens. Ils ne veulent pas tous entamer des épreuves de DELF B1 ou B2, car ces épreuves exigent une compétence avancée en français. Cependant, nous postulons que si dès le début du secondaire, les enseignants employaient des méthodes didactiques beaucoup plus efficaces pour encourager les élèves et les aider à développer de meilleures compétences en français, un plus grand nombre d’élèves pourraient atteindre le niveau seuil (B1) ou le niveau avancé (B2). Il semble qu’on encourage les élèves à passer les examens au lieu de développer de vraies compétences en français.

Nous sommes d’avis que certains enseignants ne possèdent pas les méthodes ou les outils appropriés pour aider tous les élèves à atteindre les niveaux supérieurs du CECRL. Il nous semble que certains enseignants n’arrivent pas à établir le lien entre le programme officiel du français paru en 2001 et le programme du DELF adopté par le ministère en 2005. Par

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exemple, selon le programme officiel du français, dès le début de la première année du secondaire, les enseignants doivent insérer dans leur cours la lecture des textes littéraires. Mais, pour diverses raisons, telles que le manque de ressources et principalement le fait que la lecture des textes littéraires n’est pas évaluée dans les épreuves du DELF, les enseignants ne l’enseignent pas. Nous évoquons la lecture des textes littéraires, car c’est cet élément du programme de français qui nous intéresse dans le cadre de notre recherche et nous y reviendrons dans un prochain chapitre.

1.2.3. L’enseignement de la littérature15

La littérature fait partie du programme de français de l’école postsecondaire (School of Advanced Level Studies) aux Seychelles. Les élèves sont obligés de suivre des séances de littérature dans le cadre du cours de GCE (General Certificate of Education) A Level

French. Les futurs enseignants de français au secondaire, et parfois de l’anglais, doivent

impérativement s’inscrire à ce cours. Pendant deux ans, les élèves étudient un maximum de huit œuvres littéraires. Pour l’année 2016-2017, les œuvres au programme sont les classiques de la littérature française, notamment, Le Malade imaginaire de Molière, Les

Justes d’Albert Camus, Les Belles Images de Simone de Beauvoir, entre autres. Pour les

élèves qui arrivent directement des écoles secondaires de l’État, c’est la première fois qu’ils découvrent la littérature francophone et, la plupart du temps, ils peinent à s’adapter au contenu du cours.

Il y a de moins en moins d’élèves qui s’inscrivent au cours de français à cet établissement qui demeure le principal centre d’examens GCE A Level de l’université de Cambridge aux Seychelles16. À noter qu’en 2012 il y avait onze élèves inscrits au cours; en 2013, il y en avait quinze; en 2014, on comptait douze élèves; en 2015, huit élèves se sont inscrits et en 2016, il n’y a que sept élèves inscrits.

15 Nous définissons la littérature comme un ensemble d’œuvres littéraires. Il s’agit de l’étude de ces œuvres avec les élèves. Nous développerons davantage ce concept dans le cadre théorique.

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15

Le tableau 3 montre le déclin en ce qui concerne l’inscription des élèves au programme du français au postsecondaire.

Tableau 3 : La performance des élèves en GCE A Level French17

A B C D E d e18 Nombre d’élèves inscrits 2009 4 1 8 15 16 2 4 50 2010 0 2 3 8 14 6 2 36 2011 0 4 7 6 1 0 0 18 2012 2 2 3 4 0 0 0 11 2013 1 3 6 2 2 0 1 15

Il nous parait que cette réduction par rapport au nombre d’élèves inscrits est liée à l’épreuve de littérature attachée à ce cours. De plus, les résultats des élèves ne peuvent pas être considérés comme étant satisfaisants. Nous pensons qu’il y a une rupture entre les cours de français au secondaire et les cours de français au niveau postsecondaire. Il nous semble que les élèves ne sont pas suffisamment préparés pour entamer le premier niveau de cours de français enseigné à cette école. En effet, le GCE A Level de français requiert un assez haut niveau de français de la part des élèves. Cette matière comporte quatre composantes : l’expression orale, la compréhension des documents informatifs, la rédaction d’un essai sur les thèmes courants de la société et la lecture et l’analyse des textes littéraires (Cambridge International Examinations, 2016). Les élèves doivent développer des compétences adéquates en ce qui concerne, particulièrement, la compréhension en lecture et l’interprétation des textes littéraires.

Ainsi, dès le début du postsecondaire, les élèves qui ont décidé de poursuivre des études en français rencontrent des obstacles par rapport à la découverte d’une composante de la

17 Données non publiées de l’école postsecondaire (the School of Advanced Level Studies, Seychelles). 18 Niveau AS (Advanced Subsidiary level) – niveau intermédiaire. Les lettres sont en minuscules pour établir la différence avec le niveau AL (Advanced Level) – niveau avancé. Les élèves obtiennent une note de niveau intermédiaire lorsque le résultat obtenu ne reflète pas le niveau avancé (A Level).

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16

discipline français qu’ils auraient dû découvrir au secondaire, voire au primaire. C’est principalement pour ces raisons que nous voulons entamer une recherche sur l’enseignement de la littérature au premier cycle du secondaire : nous voulons étudier comment introduire cette composante de l’enseignement du français, et ce, en nous appuyant sur les pratiques documentées par des chercheurs en didactique du français.

1.3. Le champ de la recherche

Lorsque nous parlons de la didactique du français, nous distinguons les deux principaux domaines : la didactique du français langue maternelle19 et la didactique du français langue étrangère (ou seconde). Puisque le français est la troisième langue apprise par la majorité des élèves aux Seychelles, il est essentiellement considéré comme une langue étrangère. Selon Cuq et Gruca (2002), « la langue étrangère n’est généralement pas la langue de première socialisation, elle n’est pas la première dans l’ordre des appropriations linguistiques, la proportion entre apprentissage et acquisition s’inverse dans son mode d’appropriation par rapport à ce qui fonde la langue maternelle, et le critère d’appartenance est lui aussi minoré » (p. 94). À l’opposé, nous parlons de langue maternelle lorsqu’il s’agit de la première langue acquise par le locuteur. Cuq et Gruca (2002) définissent une langue maternelle comme « une langue qui, acquise lors de sa première socialisation et éventuellement renforcée par un apprentissage scolaire, définit prioritairement pour un individu son appartenance à un groupe humain et à laquelle il se réfère plus ou moins consciemment lors de tout apprentissage linguistique » (p. 93). Ainsi, pour la majorité des élèves seychellois, le créole est la langue maternelle. Pour certains, c’est l’anglais qui occupe cette place aussi. Mais, pour la plupart, le français demeure une langue étrangère. L’enseignement du français aux Seychelles relève donc du champ de la didactique du français langue étrangère.

19 Notons que plusieurs didacticiens critiquent l’expression langue maternelle et préfèrent celle de langue première (Simard, Dufays, Dolz et Garcia-Debanc (2010).

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17

Puisque le français est l’une des trois langues nationales, le gouvernement et le ministère de l’Éducation exigent officiellement que la population arrive à maitriser cette langue. Selon notre connaissance du milieu, l’enseignement du français, particulièrement dans les écoles secondaires, ne correspond pas totalement aux visées du ministère de l’Éducation (référence : section 1.2.1). Les pratiques dans les classes et l’application du programme semblent ne pas favoriser une appropriation de cette langue par les élèves. Les élèves apprennent le français avec le seul but de passer les examens. À la fin du cycle secondaire, ils ne pratiquent guère cette langue, et cela va à l’encontre de la prescription du ministère de l’Éducation qui vise une maitrise du français par tous les élèves. Pour ces raisons, entre autres, nous nous intéressons au champ de la didactique du français afin de contribuer à l’enseignement et à l’apprentissage du français aux Seychelles.

La didactique du français « inclut une réflexion sur les savoirs, leur transformation en matière scolaire et leur appropriation par les apprenants » (Rosier, 2002, p. 7). Selon Simard et coll. (2010, p. 12), « la didactique place au cœur de ses préoccupations les savoirs à acquérir (aussi bien théoriques que pratiques) ».

La didactique est essentiellement une discipline scientifique qui étudie les phénomènes d’enseignement-apprentissage en visant d’abord la production de connaissances dans son champ d’investigation. C’est par les connaissances issues de ses recherches qu’elle peut parvenir à éclairer et à améliorer les pratiques scolaires (Simard et coll., 2010, p. 9).

Le domaine de la didactique s’intéresse au français comme une discipline scolaire en focalisant sur l’enseignement de la langue, l’enseignement des compétences langagières et l’enseignement de la littérature.

Dans le système éducatif des Seychelles, l’accent est mis principalement sur l’enseignement de la langue et l’enseignement des compétences langagières, particulièrement l’oral et l’écrit. En ce qui concerne la lecture, il s’agit de la lecture des

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documents dits authentiques20 qui figurent dans les manuels scolaires ou dans des cahiers d’exercices utilisés dans les écoles. La lecture des textes littéraires, ou même d’extraits, ne fait pas partie des pratiques d’enseignement et d’apprentissage dans les classes de français aux Seychelles. Cela est dû au fait que la littérature n’est pas enseignée dans les classes de français langue étrangère. Pourtant, plusieurs didacticiens de FLE soulignent l’importance de la littérature dans l’enseignement et l’apprentissage de français langue étrangère. Cuq et Gruca (2005, p. 420-421) affirment que la littérature est capable de former « des lecteurs éclairés de textes produits dans la langue qu’ils sont en train de s’approprier ». Boza Araya (2008) fait ressortir qu’« il s’avère nécessaire de mettre en place des stratégies pédagogiques qui permettent [aux élèves] d’acquérir des connaissances, d’appliquer et de développer des savoir-faire langagiers » (p. 16). Selon elle, « la littérature peut constituer un outil pédagogique très utile, soit pour aborder la diversité culturelle en classe FLE ou dans des cours de civilisation francophone, soit pour améliorer les compétences communicatives » (Boza Araya, 2008, p. 16).

Ainsi, à travers la lecture de textes littéraires, les élèves sont mis en contact direct avec la langue qu’ils essaient de s’approprier et cette approche est susceptible de faciliter l’apprentissage de la langue. Dans le domaine du français langue première, Giasson (2005) abonde dans le même sens lorsqu’elle évoque les rôles essentiels des textes littéraires à l’école. Selon elle, la lecture des textes littéraires est « un moyen privilégié d’appropriation de savoirs » (p. 9) et elle favorise « le développement cognitif et métacognitif » (p. 8) des élèves. De plus, la lecture des textes littéraires aide à « l’acquisition du vocabulaire et des connaissances » (Giasson, 2005, p. 8).

Le champ de la didactique du français nous permet d’identifier les savoirs essentiels à enseigner aux élèves pour une meilleure appropriation de la langue. Des recherches en didactique peuvent décrire comment faciliter l’apprentissage de cette langue par les élèves et peuvent recommander des modes d’enseignement qui favorisent l’appropriation des savoirs. Nous nous intéressons à l’enseignement de la littérature, particulièrement la

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19

littérature de jeunesse. En nous référant aux recherches didactiques, nous espérons pouvoir montrer qu’il existe des moyens de développer les compétences en lecture et la compétence lexicale des élèves.

1.4. La pertinence de la recherche

Nous jugeons nécessaire d’introduire la lecture de textes littéraires dès la première année du secondaire dans le but 1) de développer une culture littéraire chez les élèves; 2) de développer la compréhension en lecture des élèves et 3) de développer la compétence lexicale des élèves. Il ne s’agit pas simplement d’enseigner la littérature pour qu’un plus grand nombre d’élèves s’inscrivent au cours de français au postsecondaire plus tard. Il s’agit particulièrement d’enseigner aux élèves des stratégies de lecture pour qu’ils arrivent à comprendre d’autres textes littéraires destinés à la jeunesse. En ayant une bonne compréhension du texte, ils arriveraient aussi à mieux comprendre la langue et à la maitriser.

1.4.1. L’efficacité de la littérature de jeunesse pour l’apprentissage de la lecture

Selon notre expérience et notre connaissance du milieu, la lecture de textes littéraires est quasiment inexistante dans les classes de français au secondaire aux Seychelles. Comme indiqué dans le tableau 1 (chapitre 1.2.1), la lecture d’une œuvre complète par les élèves figure parmi les objectifs des cycles 4 et 5 du programme officiel du français. En réalité, il s’agit d’une lecture dite « cursive21 » et individuelle. L’enseignant demande simplement aux élèves d’emprunter un livre de leur choix à la bibliothèque de l’école. Il n’y a pas d’activités d’apprentissage spécifiques sur le texte littéraire. Même si le programme officiel de français présente cet objectif concernant la lecture de textes littéraires, le programme du DELF que les élèves suivent au secondaire n’est pas axé sur l’enseignement de la littérature. Or, à travers l’enseignement de la littérature, beaucoup plus d’élèves seraient capables d’atteindre le niveau B1 ou B2 du CECRL. Selon le CECRL (Conseil de l’Europe,

21 « Désigne la lecture courante de tout un chacun, au gré de son rythme, selon ses désirs et sa disponibilité » (Bon, 2014, p. 76).

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20

2001), le niveau B2 est un niveau avancé en français et il correspond à l’« utilisateur indépendant » qui est capable de comprendre des textes complexes et qui peut s’exprimer avec aisance sur différents sujets.

Peut comprendre le contenu essentiel de sujets concrets ou abstraits dans un texte complexe, y compris une discussion technique dans sa spécialité. Peut communiquer avec un degré de spontanéité et d’aisance tel qu’une conversation avec un locuteur natif ne comportant de tension ni pour l’un ni pour l’autre. Peut s’exprimer de façon claire et détaillée sur une grande gamme de sujets, émettre un avis sur un sujet d’actualité et exposer les avantages et les inconvénients de différentes possibilités (Conseil de l’Europe, 2001, p. 25).

En atteignant ce niveau-là, les élèves seraient capables de mieux réussir dans les cours de littérature au postsecondaire ou tout simplement avoir une maitrise de la langue plus solide.

L’enseignement de la littérature à l’école est une façon d’aider les élèves à découvrir la langue, à éveiller leur imagination, à développer leur capacité d’interprétation et à acquérir de nouvelles connaissances (Giasson, 2000; Perrin, 2010; Tauveron, 1999). À travers la lecture et l’étude des textes littéraires, les élèves développent également une culture littéraire (Perrin, 2010; Tsimbidy, 2008). Selon Tsimbidy, « une culture littéraire est une culture active, évolutive, commune et partagée qui s’établit à partir de la fréquentation régulière des œuvres et d’un réseau de références communes élaboré tout le long de la scolarité par des discussions entre pairs » (2008, p. 15). Afin de bien développer cette culture littéraire chez les élèves, il est aussi important de bien choisir les œuvres qui susciteraient l’intérêt des élèves, surtout s’il s’agit des élèves de français langue étrangère. Selon Anastassiadi (2010), le CECRL ne porte pas beaucoup d’attention à l’usage de la littérature dans les classes de langues étrangères. L’auteure trouve que les textes littéraires sont beaucoup plus présents dans les classes de FLM que dans celles de FLE. Selon Anastassiadi, « tout comme le lecteur natif, le lecteur étranger lit pour construire un sens. Par conséquent, il est important de lui proposer une véritable lecture qui lui permettra de comprendre et de s’approprier ce qu’il lit à l’aide d’instruments donnés dans le texte » (2010, p. 238). Elle propose « d’exploiter des ouvrages destinés à de jeunes lecteurs avec un public débutant en FLE, indépendamment de son âge » (Anastassiadi, 2010, p. 242).

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Dans le cadre de notre recherche, nous favorisons l’enseignement de la littérature de jeunesse puisque nous nous adressons aux élèves de la première année du secondaire en français langue étrangère (FLE). La littérature de jeunesse peut aider les élèves à mieux comprendre les textes qu’ils lisent et à développer des compétences en lecture, particulièrement la compréhension de textes, et aussi à découvrir le lexique en langue étrangère. Guérette (1995) citée dans Giasson (2005) explique que « la littérature d’enfance et de jeunesse joue un rôle dans le développement intellectuel, affectif, social et culturel des jeunes » (p. 4). « Plus l’élève lit, plus il développe ses habiletés en lecture, plus la tâche devient facile et agréable et plus il a envie de lire » (Giasson, 2004, p. 9). C’est cette attitude envers la lecture que nous voulons faire développer aux élèves de première année du secondaire aux Seychelles. Tout comme la littérature générale, la littérature de jeunesse se soumet aux contraintes de style et aux règles esthétiques. Poslaniec (1992) affirme que « toutes les techniques littéraires identifiées par les chercheurs sont largement présentes dans les livres destinés aux enfants; [que] rien ne permet d’établir une coupure entre la littérature pour la jeunesse et la littérature générale » (p. 16). Nous voulons proposer des textes littéraires, en commençant par l’album de jeunesse, à travers lesquels les élèves pourront développer des savoirs et construire des connaissances nouvelles sur la langue.

Nous choisissons l’album, car nous nous adressons aux élèves de FLE de la première année du secondaire. Ils n’ont pas d’habitude de lire en français, et commencer par l’album est une façon de susciter leur intérêt et de les motiver à lire davantage. Selon Dolz, Noverraz et Schneuwly, « l’album est un objet qui est beaucoup plus familier aux jeunes enfants. C’est un bon support pour les apprentis lecteurs et il facilite l’interaction entre l’enseignant et les élèves, et les élèves entre eux » (2001, p. 24). Pour Giasson, « dans l’intimité de la classe, il peut s’agir d’un excellent moyen d’amadouer les élèves qui se sont éloignés de la lecture » (2014, p. 156). C’est le cas de ces élèves qui ne lisent presque jamais en français. En favorisant l’album de jeunesse, nous voulons faciliter la compréhension en lecture et l’appropriation du lexique.

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22

1.4.2. Le lexique et la compréhension en lecture

Nous nous intéressons au lexique parce que nous pensons qu’en développant leur compétence lexicale, les élèves seraient plus capables de maitriser et de s’approprier la langue. Par compétence lexicale, nous entendons la capacité d’utiliser les connaissances sur le lexique correctement22. Selon Cuq et Gruca (2002, p. 363), « l’entrée par le vocabulaire est un penchant naturel à tout apprenant de langue étrangère ». De plus, David fait ressortir que « la plupart des recherches menées dans différents pays montrent que l’étendue du lexique est en relation étroite avec les performances en lecture – et bien sûr au-delà avec la réussite scolaire en général » (2000, p. 37). Pour leur part, Blachowicz et Fisher (2000); Nagy et Scott (2000), cités dans Giasson (2003), disent que « bon nombre d’études ont montré que la connaissance du vocabulaire contenu dans un texte est reliée à la compréhension de ce texte » (p. 337). Cependant, Giasson (2003) indique qu’il ne s’agit pas d’enseigner le lexique en pensant que cela résoudra les difficultés de compréhension, car comprendre un texte est bien plus complexe que connaitre le sens de tous les mots. Elle souligne que « la relation entre la lecture et le vocabulaire n’est cependant pas univoque : d’une part, le vocabulaire influe sur la compréhension en lecture et, d’autre part, la lecture peut aider à enrichir le vocabulaire » (p. 338). De ce fait, nous soutenons qu’à travers la littérature de jeunesse, il serait possible pour les élèves de s’approprier le lexique grâce à un travail sur la compréhension du texte et vice versa.

1.4.3. L’enseignement explicite au service de la compréhension en lecture23

Selon le programme officiel de français (réf : 1.2.1, tableau 1), l’un des objectifs de l’enseignement du français au cycle 4 est la capacité de « manifester sa compréhension de la lecture de textes divers » (Ministère de l’Éducation, 2001, p. 30). Mais, comme nous l’avons déjà souligné, cette compétence en lecture n’est pas enseignée dans les classes de français. Pour Giasson (2003, p. 280) « la compréhension consiste, pour le lecteur, à construire le sens du texte à partir à la fois de l’information explicite et implicite donnée par

22 Le concept de compétence lexicale sera défini davantage dans le cadre théorique et conceptuel.

23 Nous développerons davantage le concept de lecture, de la compréhension en lecture et la démarche de l’enseignement explicite dans le cadre théorique et conceptuel.

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23

l’auteur et de ses propres connaissances ». Pour ce faire, le lecteur a besoin des stratégies de compréhension générales, notamment, la recherche des significations des mots inconnus, la capacité de faire des inférences, l’identification des personnages, entre autres. Le lecteur a donc besoin d’être formé afin de maitriser ces différentes stratégies qui pourraient faciliter sa compréhension des textes qu’il lit.

Pour faciliter la compréhension en lecture des élèves, nous préconisons la méthode de l’enseignement explicite. Cette méthode d’enseignement « fait référence à une démarche d’apprentissage dirigée par l’enseignant qui procède du simple vers le complexe » (Rosenshine et Stevens (1986) cités dans Gauthier, Bissonnette et Richard (2013, p. 26). Rosenshine « a montré que l’enseignement explicite et systématique est une méthode d’enseignement particulièrement appropriée pour l’apprentissage de la lecture, des mathématiques, de la grammaire, de la langue maternelle, des sciences, de l’histoire et, en partie, des langues étrangères » (cité dans Gauthier et coll., 2013, p. 31). Pour aider nos élèves de français langue étrangère à accéder au niveau B1 du CERCL et à le dépasser aussi, il faudrait un enseignement qui mette plus l’accent sur la compréhension.

Boyer (1993) affirme qu’un enseignement explicite est une méthode efficace lorsqu’il s’agit de développer la compréhension en lecture des élèves. Selon lui, « l’habileté à comprendre [doit] se refléter dans la capacité du lecteur à adapter sa lecture à une intention de lecture et au type de texte soumis, ce qui [implique] qu’il puisse reconstruire le sens du texte » (Boyer, 1993, p. 20). L’enseignement explicite de la compréhension en lecture « est un enseignement, dont la principale préoccupation, est de rendre le plus visibles possible la démarche et la structure sous-jacente à l’exercice d’une habileté » (Boyer, 1993, p. 27). Gauthier et coll. (2013) partagent cette idée en écrivant que l’enseignement explicite « renvoie aux comportements visibles de l’enseignant et des élèves, donc à ce qui n’est ni caché ni implicite. Dans cette perspective, l’enseignement explicite est basé sur l’idée que l’apprentissage est facilité si on évite les fausses interprétations, les “mal entendus”, le non-dit, le caché, l’implicite » (p. 42). En d’autres mots, le but principal de l’enseignement explicite est de faciliter l’acquisition des savoirs par les élèves. Puisque nous voulons aider les élèves à mieux comprendre les textes qu’ils lisent, il est aussi important de choisir la

Figure

Tableau 2 : Moyenne nationale en pourcentage (%) en français par niveau
Tableau 3 : La performance des élèves en GCE A Level French 17
Tableau 5 : Les stratégies à privilégier selon le niveau des élèves
Tableau 7 : Fiche de lecture (d’après Marion Sauvaire 29 ).
+3

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