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2. LE CADRE THÉORIQUE ET CONCEPTUEL

2.3. L’articulation entre la lecture et le lexique pour faciliter la compréhension

Dans le cadre de notre recherche, nous nous intéressons à l’articulation de la lecture d’un album de jeunesse à l’étude du lexique afin d’aider les élèves de FLE de la première année du secondaire à mieux comprendre le texte. Nous sommes d’avis qu’une telle articulation est favorable pour une bonne compréhension en lecture. D’une part, les élèves développent des compétences en lecture, d’autre part, ils développent leur compétence lexicale. En effet, plusieurs études recommandent une étude du lexique au sein de l’activité de lecture (Cuq et Gruca, 2005; Fayol, 2000; Giasson, 1990, 2011; Serafini, 2008). Cependant, le mot « articulation » dans notre texte est sujet à discussion. D’une façon très simple, nous comprenons que l’articulation est une manière d’unir deux ou plusieurs éléments dans un même contexte (d’enseignement). Mais plusieurs écrits (Bilodeau, 2009; Bon, 2004; Chartrand et Boivin, 2005; Sabbah, 2006) qui abordent l’idée d’établir des liens entre les différents contenus d’enseignement utilisent tantôt le terme d’articulation, tantôt le terme de décloisonnement dans leurs explications et parfois même le terme d’intégration. Il nous a semblé judicieux de définir ces différents termes et de produire notre propre définition du concept d’articulation dans le cadre de cette recherche.

Dans le Dictionnaire actuel de l’éducation, l’intégration est définie comme l’« action d’associer différents objets d’études, d’un même domaine ou de divers domaines, dans une même planification d’enseignement-apprentissage » (Legendre, 2005, p. 784). Dans le même ouvrage, le décloisonnement est décrit comme une « opération qui consiste à éliminer les barrières traditionnelles qui fragmentent et divisent artificiellement et

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arbitrairement les contenus scolaires » (Legendre, 2005, p. 349). Cependant, il est précisé dans l’ouvrage que l’élimination des barrières dans le décloisonnement ne signifie pas une interaction entre les contenus scolaires (Legendre, 2005). Le décloisonnement est en fait un « principe pédagogique qui recommande d’étudier les différentes composantes d’un savoir autour d’un objectif commun » (Bon, 2004, p. 39). Les définitions de deux termes ne reflètent pas complètement notre objectif de recherche, car elles n’abordent pas l’idée d’établir des liens et de favoriser des interactions entre les différents contenus d’enseignement.

En ce qui concerne le concept d’articulation, Chartrand (2005) précise qu’« il s’agit d’établir des relations, des liens, des jonctions entre les activités grammaticales et les pratiques discursives, sans toutefois intégrer tout le travail grammatical aux pratiques discursives » (p. 23). Elle évoque la création des liens entre les activités qui développent les habiletés discursives des élèves, telles que la lecture, l’écriture, l’oral, et des activités de grammaire, et qui permettent de développer les compétences langagières des élèves (Chartrand et Boivin, 2005). Cette définition de la notion fait écho à la définition de Legendre (2005) : « modèle d’organisation et d’enchainement des éléments du discours oral ou écrit » (p. 130). Chartrand et Boivin (2005) expliquent davantage la notion d’articulation dans la définition ci-dessous :

Cette orientation institutionnelle visant à intégrer les activités de grammaire aux activités de lecture et d’écriture dans les classes de français fait partie du mouvement de recomposition de la discipline français qui tend vers une moins grande compartimentation de ses objets d’enseignement traditionnel que sont la lecture, l’écriture, la récitation, l’élocution, la grammaire, le vocabulaire, la littérature, etc. (Chartrand et Boivin, 2005, p. 1).

Elles font ressortir que l’articulation vise l’intégration des activités grammaticales aux activités de lecture et d’écriture dans les classes de français. L’usage du terme « intégrer » dans les définitions de Chartrand (2005), et de Chartrand et Boivin (2005) peut prêter à confusion, car il s’agit aussi d’un terme utilisé dans le domaine de l’enseignement pour définir le fait de « conjuguer deux ou plusieurs contenus interdépendants d’apprentissage,

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appartenant à la même discipline ou à des disciplines différentes, en vue de résoudre un problème » (Legendre, 2005, p. 787). Cependant, l’usage du mot « intégrer » nous mène à une meilleure compréhension du terme de l’articulation par rapport à notre objectif de recherche. En effet, Chartrand et Boivin (2005) expliquent que plusieurs programmes d’études en français dans différents pays ou régions francophones (France, Belgique, Suisse, Québec) « prescrivent un enseignement grammatical intimement lié, voire intégré aux activités qui visent le développement des habiletés discursives des élèves (lire, écrire, parler, écouter) » (Chartrand et Boivin, 2005, p. 1). Pour elles, les termes décloisonnement,

intégration et articulation sont des mots importants à utiliser pour décrire cette façon

d’enseigner (Chartrand et Boivin, 2005). Or, dans un article paru en 2009, Bilodeau en collaboration avec Chartrand utilise le terme décloisonnement comme étant le synonyme de l’articulation. Pour Bilodeau, le décloisonnement est une « orientation didactique » permettant « que le travail en grammaire (au sens large du terme), en lecture, en écriture et en communication orale soit articulé dans un même projet, une même activité ou une même séquence d’enseignement afin que les élèves perçoivent les relations entre ces apprentissages et le développement de leurs capacités langagières » (Bilodeau, 2009, p. 79).

Dans le cadre de notre recherche, nous utilisons le terme articulation, mais nous ne méprisons pas les termes décloisonnement et intégration. Nous pensons que les trois termes sont liés et aident à mieux définir ce « modèle d’organisation » (Legendre, 2005) des activités grammaticales et discursives. Alors que l’intégration fait référence à l’inclusion des différents types d’activités dans les classes de français et que le décloisonnement vise à supprimer les barrières qui existent entre les activités grammaticales et les activités de lecture et d’écriture, l’articulation fournit une étape de plus en tissant des liens entre ces différentes activités. Pour notre recherche de maitrise, nous adoptons la définition de l’articulation de Chartrand (2005) :

Il s’agit d’établir des relations, des liens, des jonctions entre les activités grammaticales et les pratiques discursives, sans toutefois intégrer tout le travail grammatical aux pratiques discursives. L’enseignement-apprentissage de la grammaire n’est pas instrumentalisé. Autrement dit, il n’a pas seul objectif de fournir des aides momentanés à la résolution des problèmes de lecture ou

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d’écriture. Il est conçu comme une condition essentielle de développement des capacités discursives (Chartrand, 2005, p. 23).

En nous référant à notre objet de recherche, nous définissons donc l’articulation comme une orientation didactique qui vise non seulement l’inclusion des activités grammaticales et des activités discursives au sein d’une même séquence d’enseignement, mais aussi l’interaction entre les activités de grammaire, par exemple le lexique, et les activités de lecture dans le but de développer les compétences langagières des élèves.

Ainsi, une articulation entre la lecture d’un album de jeunesse et l’étude du lexique comprend un enseignement des stratégies de lecture qui implique la compréhension du texte dans son intégralité : le texte et le lexique. Il ne s’agit pas d’enseigner le lexique en dehors de la lecture du texte : l’enseignement du lexique est articulé à l’enseignement de la compréhension en lecture. En écrivant sur les lecteurs allophones, Giasson (2011) souligne l’importance d’encourager la lecture chez ces élèves et de favoriser des livres illustrés ou des albums en ce qui concerne l’enseignement du vocabulaire. Piotrowska-Skrzypek (2010) propose de travailler différents domaines de la langue française, tel que le vocabulaire, lors de l’exploitation d’un album de jeunesse. Afin d’enrichir la compréhension des élèves, il est pertinent de travailler sur les éléments du texte, notamment le lexique.

De ce fait, une articulation entre la lecture et le lexique implique la mise en œuvre des stratégies de lecture et des stratégies d’apprentissage du lexique pendant l’exploitation du texte littéraire. Camenish et Petit (2014) soulignent que « les nouvelles perspectives de la didactique du lexique se situent dans la combinaison des deux approches, avec un apprentissage explicite et structuré de notions lexicales combiné avec des acquisitions de vocabulaire au fil des projets de lecture et d’écriture et des apprentissages disciplinaires » (p. 2). Pour les auteurs, l’enseignement du lexique dans le contexte de la lecture des textes littéraires contribue à une meilleure compréhension (Camenish et Petit, 2014).

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Cette recension des écrits autour des concepts et des idées clés de notre recherche avait pour objectif de nous permettre de faire état des avancées quant à l’enseignement de la compréhension en lecture. Nous avons pu démontrer que la démarche de l’enseignement explicite favorise une bonne compréhension en lecture chez les élèves et permet un apprentissage durable des contenus. De plus, l’enseignement de stratégies de lecture permet l’apprentissage et l’acquisition du lexique au fur et à mesure que les élèves développent des compétences en lecture.

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