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The Witcher III constitue le dernier de volet de la trilogie The Witcher des studios de développement polonais CD Projekt Red. La première partie est sortie une première fois en 2007 sur PC. Encensée pour son gameplay, ses graphismes, son univers et son histoire, certains détails ont néanmoins dérangé les joueurs tels que les personnages non joueurs (PNJ) trop répétitifs ou le doublage parfois mal réalisé en français. Le jeu est paru une deuxième fois en 2008, corrigé par CD Projekt Red et avec des voix françaises revues. La deuxième partie du RPG est sortie en 2011 sur PC, puis en 2012 sur consoles. Elle a une fois de plus été accueillie très favorablement par les critiques. Enfin, le troisième et dernier volet est sorti en mai 2015, simultanément sur plusieurs supports : PC, Xbox One et PS 4.

L’intrigue du jeu se déroule après celle du cycle de romans Sorceleur. Cependant, les personnages principaux restent les mêmes. Ainsi, le joueur incarne Geralt de Riv, sorceleur, qui évolue dans les lieux décrits par Andrzej Sapkowski dans ses romans. Les implications culturelles de ce jeu inspiré du livre qui constitue le noyau de notre corpus sont donc multiples. Outre les références que l’on peut trouver dans l’ouvrage original, le jeu s’adresse

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en premier lieu à des joueurs qui connaissent l’œuvre de Sapkowski. Les moyens d’expression de l’univers dépeint sont plus nombreux que dans un ouvrage purement textuel, et les considérations culturelles et contextuelles passent par de nombreux canaux : graphismes des décors et des personnages, environnement sonore et musical, trame narrative, éléments d’intertextualité, etc.

Les deux premiers opus représentent chacun une cinquantaine d’heures de jeu, ce qui est considérable au vu des tendances actuelles qui sont à la réduction de la place des aventures en solo pour donner la part belle au multijoueur. Contrairement aux deux premières parties qui se déroulent en monde semi-ouvert, soit des chapitres dotés chacun d’une partie de carte séparée, il est difficile de quantifier la durée de vie de The Witcher III, car toute l’aventure se déroule en monde ouvert sur une carte faisant une surface totale de plus de 130 km². Outre l’aventure principale, le joueur a accès à un très grand nombre de quêtes secondaires, et la durée du jeu peut excéder les 150 heures. Le jeu s’est églement doté de deux extensions majeures intitulées Hearts of Stone et Blood and Wine. Dans notre analyse, nous n’avons donc pas prétendu à l’exhaustivité dans l’approche des éléments culturels et contextuels présents dans cet ensemble. Les culturèmes du jeu vidéo on été illustrés par comparaison avec ceux de l’ouvrage fantasy de référence, en proposant des exemples qui appartiennent aux différentes catégories culturelles distinguées.

6. Quel corpus pour l’analyse du culturème dans la traduction

des littératures de grande diffusion ?

Notre recherche s’intéresse à une grande catégorie de textes que les chercheurs tels qu’Anne Besson désignent sous le terme de « littérature de grande diffusion ». Comme leur nom l’indique, il s’agit de formes littéraires qui rencontrent beaucoup de succès auprès du grand public. Si notre étude concerne cette catégorie de textes, c’est justement au vu du nombre de personnes qu’elle touche. Le traducteur n’a pas seulement pour rôle de transmettre une histoire : celle-ci s’inscrit dans un contexte qui peut se révéler spécifique d’un point de vue culturel, historique, géographique, etc. Ainsi, comme l’écrit Israel :

En effet, les mots ne disent pas tout et ne nous livrent au mieux que les significations consignées dans les dictionnaires et, le plus souvent, c’est la prise

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en considération du contexte et des circonstances de l’énonciation qui permet de déterminer leur pertinence et de leur assiger une valeur spécifique143.

Lorsque les textes traduits s’adressent au plus grand nombre, la transmission de ce savoir complémentaire devient une problématique essentielle, car les littératures de grande diffusion peuvent devenir un moyen de découvrir l’Autre sans même y prêter garde. Cependant, la fluidité de passage de cette information n’est pas toujours aisée.

La recherche sur la fantasy a donné naissance à un questionnement sur la traduction vidéoludique. Sorceleur a en effet connu une adaptation en jeu vidéo avec la série The Witcher, ce qui a permis d’intégrer un nouvel axe à notre réflexion : si les littératures de l’imaginaire contiennent des culturèmes, est-ce aussi le cas pour le jeu vidéo orienté fantasy ? Si oui, comment s’expriment-ils ? Ce questionnement secondaire sera exploré tout au long des chapitres. En effet, l’industrie vidéoludique est en pleine expansion et atteint un public toujours plus important, sur une tranche d’âge toujours plus vaste. Certains chercheurs ont déjà consacré leur carrière académique à la culture vidéoludique, mais retrouve-t-on dans le jeu vidéo des culturèmes proches de ceux présents dans la littérature ?

Afin de vérifier la présence des culturèmes de la fantasy dans les autres types de littératures de grande diffusion, un corpus secondaire sera constitué du roman policier avec La Peste à Breslau, issu du cycle de romans sur l’inspecteur Eberhard Mock. Bien que la fantasy constitue le noyau de notre questionnement, il peut en effet être intéressant d’étudier l’applicabilité typologique des conclusions tirées sur un corpus plus varié.

Enfin, au vu de la popularité de certains romans historiques qui peuvent donc être considérés comme de la littérature de grande diffusion, une œuvre majeure de la littérature polonaise sera intégrée dans nos exemples par le biais du roman historique, représenté par Les Chevaliers teutoniques de Henryk Sienkiewicz. Bien qu’il ne s’agisse pas de littérature de grande diffusion à proprement parler, le public vaste auquel l’ouvrage s’adresse en Pologne justifie son étude du point de vue de la culture et de la traduction. Les particularités de l’ouvrage sont ses fortes connotations patriotiques et son anti-germanisme prononcé, qui se retrouvent dans

143 ISRAEL, Fortunato, « La créativité en traduction ou le texte réinventé », dans RADERS, Margit et MARTIN-GAITERO, Rafael (éds) IV Encuentros Complutenses en Torno a la Traducción, Madrid : Editorial Complutense, 1994, p. 105-118.

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les divers types de marqueurs que nous présenterons. Ces spécificités ont-elles fait leur chemin jusqu’au lecteur français dans la traduction la plus moderne de l’ouvrage ?

Enfin, les marqueurs culturels et contextuels que nous identifions pour la fantasy sont-ils communs aux autres textes de notre corpus ? Quelles sont les spécificités de l’expression de la culture dans les différents ouvrages que nous analysons ?

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ET S’IL EXISTAIT DES CULTURÈMES DE