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Le domaine technique est parmi les plus délaissés par les chercheurs. Cependant, Edmond Cary prouve la nécessité de posséder un certain bagage lors de la traduction de ces textes :

Ce que nous devons remarquer par-dessus tout est que la simple somme de connaissances acquises dans un domaine technique ne suffit pas à mettre ce traducteur […] en mesure de pénétrer tous les textes […]. Si l’on part enfermé dans la cuirasse de son savoir acquis, on est assuré de ne pas apercevoir l’étincelle de vie que l’on est censé révéler […].

On attend du traducteur une compréhension autant qu’un bagage […] Le français parle volontiers de fers de diverses sortes là où il s’agit d’aciers et où, en anglais, il est obligatoire de dire steel. Sentir qu’il ne faut pas traduire, dans ce cas, par iron ne procède pas seulement d’une solide connaissance de la langue, pas seulement d’une connaissance sérieuse du sujet, mais aussi d’une manière de sensibilité à tout un contexte réel […]. Sans doute, dans les traductions techniques, l’art prend une autre figure et trouve-t-il d’autres points d’application que pour la traduction des poètes. Il n’en reste pas moins perceptible et fort réel […].

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Assurément, posséder les deux langues, en percevoir les nuances et les finesses reste une condition sine qua non de toute traduction, qu’elle soit technique ou littéraire.29

Le « bagage » évoqué par Cary correspond à la première définition de la culture indiquée par les dictionnaires, celle des connaissances personnelles dans un domaine particulier. Cependant, il est impossible d’avancer une théorie générale sur la traduction de la culture dans les textes techniques sans en analyser un corpus représentatif. L’énoncé d’Edmond Cary permet toutefois de postuler que la culture est bel est bien présente dans ce type de traduction. Son approche en appelle à la culture personnelle du traducteur dans un domaine donné.

Se pose ici la problématique de la formation des traducteurs qui seront par la suite confrontés à ce type de textes hautement spécialisés. En effet, le marché est en constante évolution et de nouveaux produits apparaissent sans cesse. La plupart sont accompagnés de notices techniques ou de manuels d’utilisateurs à la terminologie plus ou moins pointue. La qualité des traductions de ces documents manque bien souvent à l’appel, à tel point que des forums entièrement consacrés à ces mauvaises traductions ont vu le jour sur Internet30. Regina Solová fait mention de normes supposées pallier cette absence de qualité dans le cadre de la traduction technique :

Depuis 2006 en Pologne, la norme PN-EN 15038:2006 « Usługi tłumaczeniowe – Wymagania dotyczące świadczenia usług » est appliquée dans le domaine de la traduction. Cette norme a été élaborée par la Commission européenne de normalisation en tant que norme EN15038:2006, « Translation services. Service requirements ». Son objectif est de définir les exigences envers les prestataires de services dans la traduction [...].

Selon la norme, des traductions de haute qualité peuvent être garanties par un processus en six étapes composé de la traduction, la vérification, la révision, la relecture-expertise, la correction d’épreuves et le contrôle final [...].

La norme s’adresse principalement aux agences de traduction, seule une partie des recommandations se rapporte donc directement au travail du traducteur.31

29CARY, Edmond, « Comment faut-il traduire les textes techniques ? » dans Comment faut-il traduire ?, Presses universitaires de Lille, 1985, p.57-63, [p. 61-62].

30 Nous pouvons citer comme exemple le groupe Facebook intitulé « Traductions de merde » dont les membres partagent quotidiennement des exemples de mauvaises traductions, découvertes la plupart du temps via des produits du quotidien, sur format papier comme sur format numérique.

31 SOLOVÁ, Regina, Norma i praktyka w przekładzie tekstów skonwencjonalizowanych [Norme et pratique dans la traduction des textes standardisés], Wrocław : Oficyna Wydawnicza Atuta – Wrocławskie Wydawnictwo Oświatowe, 2013, p. 67 : « Od 2006 roku w Polsce w dziedzinie przekładu stosuje się normę PN-EN 15038:2006 „Usługi tłumaczeniowe – Wymagania dotyczące świadczenia usług”. Norma ta została opracowana przez

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Dans la version française du document évoqué par Regina Solová, il est indiqué que « La Norme européenne EN 15038:2006 a le statut de norme française ». Les attentes sont donc les mêmes pour la traduction technique dans tous les pays européens. L’application systématique de cette norme peut cependant être remise en doute, d’autant plus que certaines entreprises préfèrent confier leurs traductions techniques à des agences hors-Europe qui abaissent les coûts de la traduction en bradant les tarifs payés aux traducteurs et aux relecteurs.

Dans son article « Le français de la connaissance, cette grande langue cible », Marc Van Campenhoudt remarque que la plupart des textes produits dans les domaines techniques sont issus de traductions ou d’écrits allophones. Ce sont souvent les produits non pas d’auteurs individuels, mais d’équipes entières. Ceci permet d’enrichir rapidement la langue en y important facilement des concepts nouveaux par le biais de la traduction. Mais pour l’enseignant et chercheur belge, il faut inclure plus activement les domaines non littéraires à la traductologie pour former des traducteurs plus efficaces et plus conscients de leur travail et de l’incidence qu’il peut avoir. Cependant, la question de la formation du traducteur et de son bagage cognitif et culturel n’est pas la seule grande problématique qui affecte la traduction technique. En effet, certaines agences recrutent des traducteurs non formés et/ou qui, conformément à la théorie du Skopos, fourniront une qualité de traduction égale à la qualité de la rémunération. Ainsi se pose le problème de la qualité par rapport au prix de la traduction. Bien que cette interrogation soit pleinement justifiée dans le cadre d’une considération globale sur la traduction, il ne nous sera pas possible de la traiter lors de notre recherche sur les approches traductionnelles possibles face au culturème dans un texte de divertissement. La question du bagage cognitif et culturel, cependant, garde toute son importance lorsque l’on approche la problématique qui nous intéresse, à savoir les références culturelles et contextuelles dans la traduction lors du passage du polonais vers le français.

Europejski Komitet Normalizacyjny jako EN15038:2006 jako Translation services. Service requirements. Jej celem jest określenie wymagań wobec dostawców usług tłumaczeniowych [...].

Zgodnie z Normą wysoką jakość przekładów może zagwarantować sześcioetapowy proces, składający się z: tłumaczenia, sprawdzenia, weryfikacji, redakcji, korekty i kontroli końcowej [...].

Ponieważ Norma adresowana jest przede wszystkim do biur tłumaczeń, tylko część zaleceń odniosi się bezpośrednio do pracy tłumacza» [AS].

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